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Décisions

CA Grenoble, 2e ch. civ., 9 mars 1999, n° 97-01189

GRENOBLE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Auxiliaire (Sté)

Défendeur :

Lamont (Epoux), Disdier, Compagnie Gan

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Douysset

Conseillers :

Mmes Obrego, Rachou

Avoués :

Mes Selarl Dauphin & Neyret, Perret & Pougnand, Grimaud

Avocats :

Mes Salomez, Balestas, Tartanson, Tomasi

TGI Gap, du 15 janv. 1997

15 janvier 1997

M. et Mme Lamont ont acheté un appartement le 28 janvier 1990 sis à Gap à Mme Veuve Disdier.

Se plaignant de désordres affectant le carrelage, ils ont saisi le tribunal de Gap qui par jugement en date du 15 janvier 1997 a:

- déclaré Mme Veuve Disdier responsable des désordres;

- condamné solidairement Mme Veuve Disdier et le Gan à payer à M. et Mme Lamont les sommes de:

* 73 475 F pour les désordres;

* 3 600 F pour le préjudice de jouissance;

* 5 000 F à titre de dommages et intérêts pour résidence abusive.

- dit que l'Auxiliaire relèvera Mme Disdier et le Gan des condamnations prononcées contre eux ; ladite décision étant assortie de l'exécution provisoire ;

- alloué 5 000,00 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à M. et Mme Lamont.

La société Auxiliaire a interjeté appel de cette décision et conclut à l'irrecevabilité de l'action engagée contre elle car prescrite, subsidiairement à l'irrecevabilité du fait de l'absence au procès de son assuré ; en tout état de cause elle conclut à sa mise hors de cause et à la condamnation des époux Lamont à lui payer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire soit 82 345 F avec intérêts à compter du 7 mai 1997, outre la condamnation du Gan à lui payer 10 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'appui de sa déclaration d'appel, elle expose que l'action est irrecevable comme prescrite ayant été engagée postérieurement à la fin du délai de garantie décennale, lequel délai n'a pu être interrompu ni par l'envoi d'une lettre recommandée en 1990, ni par la position de garantie adoptée par le Gan qui lui est inopposable.

Subsidiairement, l'action irrecevable en l'absence de mise en cause de son assuré, l'artisan ayant posé le carrelage lors de la construction de l'immeuble.

En tout état de cause, les époux Lamont sont irrecevables à agir puisqu'ils ont vendu leur immeuble antérieurement à la clôture de la procédure de 1ère instance.

Elle est donc bien fondée à solliciter remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire.

La compagnie d'assurances Gan conclut à l'irrecevabilité des demandes des époux Lamont, au débouté de Mme Disdier et très subsidiairement à la garantie de la compagnie Auxiliaire.

A l'appui de ses écritures, elle expose que si la prescription est acquise envers l'Auxiliaire, elle l'est nécessairement envers elle ; en tout état de cause, les époux Lamont n'étant plus propriétaires, ils n'ont pas d'intérêt à agir, le seul fait qu'ils allèguent avoir consenti un rabais à leur acquéreur n'établit pas cet intérêt dans la mesure où l'acte de cession de la propriété n'en faisait nullement état et le fondement de l'action des époux Lamont est l'article 1792 du Code Civil.

Pour le surplus le Gan conclut à sa mise hors de cause.

Mme Veuve Disdier conclut à l'irrecevabilité des époux Lamont et subsidiairement à la réformation du jugement en ce qu'il n'a pas répondu à ses entières conclusions et en ce qu'il a retenu sa responsabilité, outre 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Très subsidiairement, en cas de condamnation, elle sollicite la garantie du Gan et de l'Auxiliaire.

A l'appui de ses écritures, elle expose que les époux Lamont sont irrecevables à agir, n'étant plus propriétaires du bien immobilier.

Pour le surplus, elle réfute les écritures adverses,

M. et Mme Lamont concluent à la confirmation de la décision déférée, étant observé que l'appel interjeté par la compagnie l'Auxiliaire n'est pas dirigé contre eux ; ils sollicitent également la condamnation de Mme Veuve Disdier et du Gan à leur payer 5 000 F HT sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

A l'appui de leurs écritures, ils exposent avoir eu intérêt à agir car ils ont vendu leur bien 70 000 F de moins que le prix prévu de fait des désordres affectant le carrelage. Ils versent aux débats les attestations de l'acquéreur et du notaire, rédacteur de l'acte établissant la réalité de cette moins value. Pour le surplus, ils concluent à la confirmation de la décision déférée et réfutent les argumentations adverses non fondées.

Sur ce ;

Attendu que Mme Veuve Disdier soulève le défaut d'intérêt à agir de M. et Mme Lamont, ces derniers ayant vendu leur appartement;

Attendu que le Gan et l'Auxiliaire s'associent à cette fin de non recevoir ;

Attendu que M. et Mme Lamont exposent avoir intérêt à agir; qu'en effet ils ont vendu leur bien avec une moins-value du fait des désordres affectant le carrelage;

Attendu qu'ils versent aux débats une attestation de leur acquéreur et du notaire rédacteur de l'acte établissant la réalité de leurs allégations ;

Mais attendu que M. et Mme Lamont ont fondé leur action tant sur l'article 1792 du Code civil que sur l'article 1641 du Code civil nécessitant la qualité de propriétaire des demandeurs pour recevoir application ; que leur demande consistant au paiement de la somme nécessaire à la réfection du carrelage, outre préjudice de jouissance en découlant, ils sont irrecevables n'étant plus propriétaires;

Que le fait d'avoir vendu leur appartement moins cher ne peut leur conférer cet intérêt à agir sur les fondements retenus par eux;

Qu'il s'ensuit qu'ils seront déclarés irrecevables à agir;

Attendu qu'il convient de les condamner en outre à rembourser à l'Auxiliaire la somme de 82 345 F versée au titre de l'exécution provisoire avec intérêt à compter de la notification de la présente décision

Attendu qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charges des parties qui en ont fait la demande les frais irrépétibles engagés;

Par ces motifs, LA COUR, Publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, Infirmant la décision déférée Déclare irrecevable la demande de M. et Mme Lamont faute d'intérêt à agir; Les condamne à rembourser à l'Auxiliaire la somme de 83 345 F (quatre-vingt trois mille trois cent quarante cinq F) avec intérêt à compter de la notification de la présente décision; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit d'aucune des parties en ayant fait la demande ; Condamne M. et Mme Lamont aux dépens et autorise les avoués qui en ont fait la demande à les recouvrer conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.