Cass. crim., 25 janvier 2005, n° 04-80.305
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Avocats :
SCP Waquet, Farge, Hazan
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : - X Jean, contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Orléans, Chambre correctionnelle, en date du 16 décembre 2003, qui, pour ventes en liquidations non autorisées et publicité portant sur des liquidations non autorisées, l'a condamné à 25 000 euro d'amende, a ordonné une mesure de publication et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, des articles L. 212-1 et R. 213-6 et R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire, des articles 510, 511 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel était composée de "Mme Carlier, conseiller faisant fonction de président" ;
"alors que toute accusation en matière pénale devant être examinée par un tribunal établi par la loi, la composition d'une formation de jugement doit être conforme aux dispositions législatives et réglementaires prévues à cet effet ; que tout arrêt devant faire la preuve par lui-même de la composition légale et réglementaire de la juridiction de laquelle il émane, la seule mention relative à un magistrat "conseiller faisant fonction de président", qui ne précise pas, au regard des dispositions des articles L. 212-1, R. 213-6 et R. 213-7 du Code de l'organisation judiciaire à quel titre et selon quelle procédure le magistrat susnommé a été désigné dans les fonctions de président, ne permet pas d'établir que la juridiction est légalement établie ; que, dès lors, l'arrêt attaqué encourt la nullité" ;
Attendu que les mentions de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel était composée conformément aux prescriptions des articles 510 du Code de procédure pénale et L. 212-2 du Code de l'organisation judiciaire ;
Que, dès lors, le moyen, inopérant en ce qu'il invoque la violation de dispositions réglementaires du Code de l'organisation judiciaire, doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4 du Code pénal, L. 310-1, L. 310-5 du Code de commerce, L. 121-15 du Code de la consommation, 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe non bis in idem ;
"en ce que la cour d'appel a condamné Jean X des chefs de vente en liquidation non autorisée et publicité d'une opération de vente en liquidation non autorisée à une amende de 25 000 euro et a ordonné la publication par extraits de l'arrêt ;
"aux motifs qu'une vente en liquidation se définit par l'écoulement accéléré de la totalité ou d'une partie des marchandises accompagné ou précédé d'une publicité, justifié par une décision de cessation, de suspension saisonnière ou de changement d'activité ou de modification substantielle des conditions d'exploitation ; qu'en l'espèce la bijouterie Y proposait une remise de 40 % à la caisse sur "tous les bijoux diamants marqués d'un point rouge" ; qu'il s'agit donc de l'écoulement accéléré d'une partie de son stock ; que cette opération était accompagnée d'une publicité portant la mention "dans les limites des stocks disponibles" ; qu'à l'époque où cette opération a été lancée, le magasin faisait l'objet d'important travaux qui avaient d'ailleurs permis à son propriétaire d'obtenir l'autorisation de procéder à une vente en liquidation pour la période du 30 août au 30 octobre 1999 ; que l'infraction de vente en liquidation était caractérisée, celle de publicité sur une opération commerciale soumise à autorisation est également établie à l'encontre de Jean X par les affiches placardées sur les vitrines de la bijouterie et les encarts publiés dans la presse ;
"alors, d'une part, que ne sont considérée comme liquidation, selon l'article L. 310-1 du Code de commerce, que les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant à l'écoulement accéléré de la totalité ou d'une partie des marchandises à la suite d'une décision de cessation, de suspension saisonnière ou de changement d'activité ou de modification substantielle des conditions d'exploitation ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt, les ventes litigieuses étaient accompagnées de publicités "bijouterie Claude Y, pour fêter l'an 2000 et pendant les travaux jusqu'au 31 décembre 1999 - 40 % de remise à la caisse", "pendant les travaux la vente continue", "pendant les travaux la vente continue, Bijouterie Y - 40 % sur tous les bijoux diamant", que la vente litigieuse était donc annoncée comme une opération de promotion destinée à informer le public de la poursuite de l'activité pendant des travaux et non comme une opération de liquidation faisant suite à une décision de cessation, de suspension saisonnière ou de changement d'activité ou de modifications substantielles des conditions d'exploitation ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les articles L. 310-1 et L. 310-5 du Code de commerce ;
"alors, d'autre part, que le délit de vente en liquidation non autorisée suppose la vente d'articles appartenant à un stock susceptible d'épuisement et non renouvelable ; qu'en conséquence, en se bornant à constater l'existence d'une publicité mentionnant "dans les limites des stocks disponibles" sans rechercher, ainsi que l'y invitait Jean X (conclusions, p. 6, 2 et suiv.), si le stock des articles vendu en promotion était, dans les faits et non tel qu'il était présenté dans la publicité, limité ou renouvelable, la cour d'appel n'a pas légalement motivé sa décision, en ce qui concerne le prétendu délit de vente en liquidation autorisée ;
"alors, enfin, qu'en condamnant Jean X pour avoir réalisé une liquidation - vente accompagnée ou précédée de publicité - non autorisée et pour avoir procédé à une publicité portant sur une opération de vente en liquidation non autorisée, la cour d'appel a condamné le prévenu deux fois pour les mêmes faits et a violé l'article 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l'Homme et le principe non bis in idem" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Attendu que, par ailleurs, le demandeur est sans intérêt à reprocher à la cour d'appel de l'avoir déclaré coupable des mêmes faits sous plusieurs qualifications pénales - comportant au demeurant des éléments constitutifs différents et n'étant pas incompatibles entre elles - dès lors que, conformément à l'article 132-3 du Code pénal, une seule peine a été prononcée ;
Qu'ainsi, le moyen, ne peut être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, L. 411-11 du Code de travail, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel a condamné Jean X... à verser à la chambre professionnelle de l'horlogerie bijouterie joaillerie orfèvrerie - Région Centre la somme de 15 000 euro à titre de dommages et intérêts ;
"aux motifs que la chambre professionnelle de l'horlogerie bijouterie joaillerie orfèvrerie - Région Centre entend obtenir réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession qu'elle représente, comme le prévoit l'article 411-1 du Code du travail ; que sa constitution de partie civile est donc recevable ; que, par ses agissements, Jean X a porté atteinte à l'image des artisans et bijoutiers par tromperie au préjudice de la clientèle et par détournement de cette clientèle au seul profit de la bijouterie Y ;
"alors que les syndicats professionnels n'exercent l'action civile devant les juridictions répressives que relativement aux faits portant un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; que ne porte pas atteinte aux intérêts collectifs de profession d'artisan bijoutier le détournement de clientèle commis par un membre de ladite profession au préjudice, personnel, d'autres membres de la même profession ; qu'en conséquence, en condamnant Jean X à réparer le préjudice lié au détournement de clientèle prétendument réalisé par la vente en liquidation sans autorisation, la cour d'appel a violé les articles précités" ;
Attendu que, pour accueillir la constitution de partie civile de la chambre professionnelle de l'horlogerie bijouterie joaillerie orfèvrerie Région Centre, l'arrêt relève que les faits commis par Jean X ont altéré l'image des bijoutiers et ont porté atteinte à la concurrence ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi.