CA Douai, 2e ch. sect. 1, 16 janvier 2003, n° 00-03637
DOUAI
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Landen
Défendeur :
Sublistatic International (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Geerssen
Conseillers :
MM. Testut, Rossi
Avoués :
SCP Masurel-Thery-Laurent, Mes Congos-Vandendaele
Avocats :
Mes Dupont, Brunet.
Vu le jugement contradictoire du 3 mai 2000 du Tribunal de grande instance de Béthune statuant commercialement, signifié à Parquet le 24 mai ayant débouté Mme Landen de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de la rupture par la société Sublistatic International de son contrat d'agent commercial sur le Sud de l'Allemagne, la Suisse et une partie de l'Autriche et de sa demande en paiement d'une indemnité de réemploi, déclaré mal fondée la société Sublistatic International de sa demande reconventionnelle en paiement de la somme de 1 733 F et condamné Mme Landen à payer à cette société la somme de 6 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu l'appel interjeté le 23 juin 2000 par Mme Barbara Landen, ingénieur textile agent commercial ;
Vu les conclusions déposées le 19 octobre 2001 pour celle-ci ;
Vu les conclusions déposées le 5 avril 2001 pour la SA Sublistatic International (société Sublistatic);
Vu l'ordonnance de clôture du 3 octobre 2002.
Attendu que Mme Landen a interjeté appel aux motifs que la loi du 25 juin 1991 (article 12) prévoit l'indemnisation de l'agent commercial (deux ans de commissions) du seul fait de la résiliation du contrat et non de la perte de revenus de la clientèle apportée par l'agent, sauf faute grave de l'agent ; que l'insuffisance de résultats de l'agent révélée par la baisse de chiffres d'affaires ou l'absence de conclusion de nouveaux contrats n'est pas une faute grave ; que les 182 clients figurant en annexe au contrat résultent de son activité salariée de 1986 à 1995 au bureau de Düsseldorf de la société Sublistatic, bureau fermé en 1995 ; qu'en 1996 et 1997, certains de ces clients n'ont pas commandé car ils étaient en faillite ou ne commandaient déjà plus en 1995 ; que ceux qui n'ont pas commandé en 1997 ne sont pas pour autant perdus ; qu'en réalité, elle a gagné sur cette période 37 nouveaux clients au cours de ces deux années civiles ; que d'ailleurs, ses commissions ont augmenté en 1997 ce qui n'est pas compatible avec la perte de 23 clients comme soutenu par la société Sublistatic ; que l'autre agent de la société Sublistatic en Allemagne a vu lui aussi son chiffre d'affaires diminuer de 1994 à 1997, cette dégradation du marché se poursuivant après la résiliation de son contrat ; elle sollicite l'infirmation, la condamnation de la société Sublistatic à lui payer la somme de 880 000 F sur le fondement de l'article 12 de la loi du 25 juin 1991, de 35 040 F au titre de réemploi, de 3 163,62 DM et 32 385,50 DM au titre de l'article 7 de la loi, avec intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 1997 (fin du contrat), celle de 50 000 F au titre de ses frais irrépétibles.
Attendu que la société Sublistatic sollicite la confirmation, Mme Landen n'ayant apporté que 12 nouveaux clients et perdu un nombre plus important ; qu'elle doit être déboutée de sa demande de réemploi fondée sur l'article 720 du Code général des impôts, de ses demandes au titre de l'article 7 et condamnée à lui payer la somme de 1 733,05 F correspondant à un trop-perçu de commissions ainsi que 15 000 F au titre de ses frais irrépétibles.
Faits
Mme Landen a été salariée de la société Sublistatic du 1er janvier 1987 au 31 décembre 1995 sous l'autorité de M. Trueson, chef de vente au bureau de Düsseldorf, fermé fin 1995 ; le 2 novembre 1995, elle est devenue agent commercial à compter du 1er janvier 1996, ainsi que M. Trueson, contrat conclu pour une durée d'un an, reconductible tacitement sauf résiliation trois mois avant le 31 décembre, commission de 5 % ;
Le 30 novembre 1998, Mme Landen a assigné la société Sublistatic sur le fondement de la loi du 25 juin 1991 applicable au contrat devant le Tribunal de grande instance de Béthune statuant commercialement en paiement de diverses indemnités ;
Sur l'indemnité compensant la perte de revenus : articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce
Attendu qu'une telle indemnité est due sauf faute grave de l'agent ; qu'il incombe au mandant d'apporter une telle preuve ; que la société Sublistatic invoque la perte de ventes en m2 de tissus dans une conjoncture certes difficile mais perte plus élevée pour Mme Landen que pour son autre agent commercial en Allemagne, M. Trueson, et la perte de (18 + 23) = 41 clients sur les 182 confiés tandis que seuls 12 nouveaux clients lui étaient apportés (1 en 1996- 11 en 1997) ;
Attendu que Mme Landen justifie de ce que ses commissions en 1997 (et 1998) ont considérablement augmenté(cf. la pièce 31 des commissions payées par la société Sublistatic), ce qui n'est pas compatible avec la perte de clientèle; de ce que sur la liste des 182 clients confiés, 14 étaient en procédure collective tandis que d'autres n'avaient jamais rien commandé de sorte qu'ils étaient à prospecter, ce qu'elle a fait ; de ce que la société Garotex récupérée par son successeur en 1998, qui n'avait rien commandé en 1996 et 1997 était alors en procédure collective ; de ce qu'en réalité, son activité a apporté 37 nouveaux clients dûment répertoriés, chiffres d'affaires 1996 et 1997 par client et année civile ;
Que ces différents éléments ne sont pas contestés par la société Sublistatic ; que l'insuffisance d'activité de Mme Landen n'est donc pas démontrée ;
Attendu que le mandant ne qualifie pas les faits qu'il invoque de faute grave;
Attendu que la durée d'activité de Mme Landen du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997 a été de deux ans; que l'usage s'est établi d'accorder deux ans de commissions brutes;que Mme Landen justifiant de ce que celles-ci se sont élevées à 254 054,32 DM soit 134 155,13 euro (880 000 F) ; que sa demande sera accueillie pour ce montant ;
Sur l'indemnité de réemploi
Attendu que Mme Landen réclame les droits fiscaux (article 720 du Code général des impôts) sur les cessions de fonds de commerce ou de clientèle, 4,8 % sur la fraction du prix supérieur à 150 000 F sur le montant de son indemnité de clientèle (880 000 F) soit 35 040 F ; que sa demande en réparation de son préjudice complémentaire éventuel ne sera pas accueillie ;
Sur la demande d'indemnité de retour sur échantillonnage (article 7 loi du 25 juin 1991 L. 134-7 du Code de commerce)
Attendu que Mme Landen a versé le détail de toute son activité en 1996, 1997 et de ses commissions, de ce qu'elle a reçu et de ce qui lui reste dû ; ce qui n'est pas le cas de la société Sublistatic qui a versé un document synthétique ; que ses relevés détaillés de commission ne sont pas critiqués par la société Sublistatic qu'en conséquence, la créance de Mme Landen au titre de commissions impayées s'élève à (2 447,11 DM + 716,51 DM =) 3 163,62 DM ou 1 617,53 euro ;
Attendu que la société Sublistatic ne s'explique pas sur la créance de 515,79 DM qu'elle invoque sur Mme Landen (trop-versé) ; que le jugement qui a débouté pour la même raison la société Sublistatic sera confirmé sur ce point;
Attendu que la société Sublistatic n'a pas fourni le relevé exact des commissions dues à Mme Landen au titre des contrats 1997 dénoncés en 1998 ; que celle-ci lui réclame trois mois de commissions 1997 soit (129 542,02 DM X 3/12=) 32 385,52 DM ; que cette demande sera accueillie soit 16 558,44 euro ; que le relevé de commissions restant dû sur factures non réglées au 15 juillet 1998 versé par la société Sublistatic ne peut être retenu, les commissions n'étant pas réglées d'avance à Mme Landen ne peuvent lui être redemandées en cas de non-paiement des factures ;
Attendu que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 1998, date de l'assignation délivrée par Mme Landen puisque certaines ne pouvaient être établies que courant 1998 ;
Sur la demande en article 700 du nouveau Code de procédure civile
Attendu que Mme Landen sollicite 50 000 F ; qu'il est équitable de lui accorder 3 000 euro ;
Par ces motifs, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Déclare recevables l'appel principal et l'appel incident; Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté la société Sublistatic de sa demande en paiement de la somme de 515,79 DM; Déboute la société Sublistatic de son appel incident; Statuant à nouveau, Condamne la société Sublistatic à payer à Mme Landen 134 155,13 euro sur le fondement de l'article L. 134-12 du Code de commerce, 1 617,53 euro au titre des commissions restant dues et 16 558,44 euro au titre de l'article L. 134-7 du Code de commerce avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 1998, date de l'assignation, ainsi que la somme de 3 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Rejette la demande de Mme Landen au titre du réemploi (article 720 du Code général des impôts) ; Condamne la société Sublistatic aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.