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Décisions

Cass. com., 7 janvier 1997, n° 93-17.326

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Le Bras

Défendeur :

Coum, Conseils immobiliers Atlantique (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Vigneron

Avocat général :

M. Mourier

Avocats :

Me Vuitton, SCP Boré, Xavier, SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin

Rennes, 2e ch., du 2 juin 1993

2 juin 1993

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 2 juin 1993), que, par acte passé en 1990, M. Le Bras a vendu à Mme Coum un fonds de commerce de bar-tabac, dépôt de presse et de gaz, situé à Concarneau; que la réalisation, l'année suivante, d'un nouveau réseau routier ayant réduit sensiblement l'importance de la voie sur laquelle le fonds était placé, Mme Coum a considéré que M. Le Bras avait commis une réticence dolosive et a réclamé la nullité de la vente puis, subsidiairement, la réfaction du prix; que la cour d'appel a accueilli la demande en ce dernier chef et a condamné M. Le Bras à payer une somme de 140 000 francs à titre de réfaction du prix, ainsi que 35 000 francs à titre de dommages-intérêts correspondant aux frais exposés pour la vente;

Sur le premier moyen du pourvoi principal : - Attendu que M. Le Bras reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, que la demande de réfaction du prix sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, demandée pour la première fois en appel très subsidiairement, était irrecevable comme nouvelle; qu'en y faisant néanmoins droit, l'arrêt attaqué a violé l'article 564 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que le moyen tiré de la nouveauté de la demande n'a pas été présenté devant la cour d'appel; qu'il est nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable devant la cour de cassation;

Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches : - Attendu que M. Le Bras reproche à l'arrêt d'avoir retenu à son encontre une réticence dolosive alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt, qui s'est borné à retenir qu'il avait intentionnellement caché à Mme Coum la cession effectuée en 1987, soit trois ans auparavant, a statué par simple affirmation sa décision de motifs en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; alors, d'autre part, que la décision est privée de base légale au regard de l'article 1116 du Code civil en ne recherchant pas si, en l'absence d'une relation évidente entre la vente de terrain en 1987 et la vente du fonds de commerce en 1990, il n'était pas de bonne foi en ne signalant pas le premier de ces événements à l'occasion de la survenance du second; et alors, enfin, qu'ayant constaté que Mme Coum était informée de l'existence du projet de déviation dont il ignorait l'imminence et dont l'ancienneté laissait à penser qu'il ne serait pas réalisé dans un avenir proche, la cour d'appel n'a pas caractérisé les manœuvres en l'absence desquelles Mme Coum aurait peut-être consenti, mais à d'autres conditions; qu'elle a ainsi méconnu les conséquences légales de ses propres constatations;

Mais attendu que, statuant sur la responsabilité, l'arrêt relève que, si Mme Coum connaissait le projet de modification du réseau routier, déjà ancien, elle ignorait l'imminence de sa réalisation, tandis que M. Bras était au courant de pareille imminence, pour avoir vendu, trois ans plus tôt, des parcelles nécessaires aux travaux; qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a pu retenir, par un arrêt motivé, d'un côté, que la réticence de M. Le Bras revêtait un caractère dolosif et, de l'autre, que cette faute n'avait pas "permis une discussion loyale du prix qui tînt compte de la possibilité d'une réalisation immédiate" du projet; que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches;

Sur le troisième moyen : - Attendu que M. Le Bras reproche enfin à l'arrêt de l'avoir condamné à payer 35 000 francs à titre de dommages-intérêts complémentaires, alors, selon le pourvoi, qu'en prononçant une condamnation pour des frais d'une vente qui a eu réellement lieu sans préciser en quoi ces frais constituaient un préjudice réparable par dommages-intérêts, l'arrêt a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile et laissé incertain le fondement de sa décision, partant, violé les articles 1382 et 1593 du Code civil;

Mais attendu que, par une décision motivée, la cour d'appel a, appréciant souverainement le mode et le montant de la réparation du préjudice causé à Mme Coum par M. Le Bras, pu ordonner que la somme allouée représenterait d'un coté une réduction du prix convenu et, de l'autre, la réparation des frais de la vente; qu'elle a ainsi justifié sa décision du chef critiqué; que le moyen n'est pas fondé;

Sur le pourvoi incident formé par Mme Coum : - Attendu que ce pourvoi est formé à titre subsidiaire pour le cas où le pourvoi principal serait accueilli; - Que, ce pourvoi ayant été rejeté, il n'y a pas lieu d'examiner le pourvoi incident;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi principal.