Cass. 1re civ., 22 avril 1997, n° 95-12.152
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Squeli
Défendeur :
Goddeeris, Beudin, Piette, Ponlin et Le Fur (SCP)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Chartier
Avocat général :
M. Gaunet
Avocats :
Mes Roger, Balat
LA COUR : - Donne défaut contre M. Goddeeris, M. Beudin et M. Piette ; - Attendu que, le 10 décembre 1990, la société civile professionnelle de commissaires-priseurs Poulin et Le Fur (la SCP) a, sur la demande de MM. Beudin et Piette, professionnels de l'automobile, vendu aux enchères publiques un véhicule appartenant à M. Goddeeris, de marque Jaguar, type XK 150, cabriolet 3,4 L ; que ce véhicule a été reproduit au n° 38 du catalogue de la vente, lequel mentionnait :
" Ce cabriolet est en très bon état général aussi bien mécanique (n'ayant parcouru que 61 000 km) que carrosserie. Cette voiture a été vendue neuve en Belgique et n'a eu que deux propriétaires " ; que l'adjudication a été prononcée au profit de M. Pierre Squeli, dit Scali ; que l'acquéreur ayant ultérieurement constaté que le compteur était libellé en miles et non en kilomètres, a confié le véhicule pour examen à un expert qui a constaté qu'il était en bon état général extérieur, mais qu'il présentait à certains endroits une oxydation importante, qu'il n'avait été restauré que partiellement et qu'il avait été utilisé sur plus de 60 000 km ; que M. Squeli, dit Scali, a assigné MM. Goddeeris, Piette, Beudin et la SCP, demandant que MM. Goddeeris et cette société soient solidairement condamnés à lui payer la somme correspondant au prix d'achat, outre des dommages-intérêts ;
Sur le deuxième moyen : - Attendu que M. Squeli, dit Scali, reproche à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en résolution de la vente pour vice caché, alors, selon le moyen, que le vendeur est tenu à garantie en raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine et que la cour d'appel, qui considère que le véhicule est propre à son usage puisqu'il s'agissait d'un véhicule de collection, sans tenir compte du fait que la présentation du véhicule dans le catalogue démontrait que l'usage auquel il était destiné était de pouvoir déplacer le conducteur, a donc violé l'article 1641 du Code civil ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que M. Squeli, dit Scali, collectionneur averti, avait acquis un véhicule de collection et que le vice n'était pas suffisant à rendre le véhicule impropre à cet usage ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en ses deux branches : - Vu l'article 1116 du Code civil, ensemble l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que, pour rejeter la demande de M. Scali fondée sur l'existence d'un dol, l'arrêt retient que M. Scali demande la résolution de la vente, alors que le dol constitue un vice de consentement dont la sanction n'est pas la résolution, mais l'annulation de la vente ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de restituer à la sanction du dol son exacte qualification, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches : - Vu les articles 1382 et 1383 du Code civil ; - Attendu que pour refuser de condamner la SCP au paiement de dommages-intérêts, la cour d'appel retient, par motifs adoptés des premiers juges, que le commissaire-priseur n'a qu'une responsabilité subsidiaire, que M. Squeli, dit Scali, n'établit pas d'autre préjudice que celui résultant de la différence de prix et susceptible d'être imputable à une faute du commissaire-priseur, et que faire garantir le vendeur d'une réduction du prix aboutirait, pour lui, à un enrichissement sans cause ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le commissaire-priseur est tenu de ne donner que des informations exactes dans les catalogues mis à la disposition de la clientèle et que, dans ses rapports avec l'acheteur, sa responsabilité peut être engagée envers lui in solidum avec le vendeur, sauf à ce que, dans ses rapports avec ce dernier, seul celui-ci ait éventuellement à contribuer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 janvier 1995, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.