CJCE, 3e ch., 14 avril 2005, n° C-128/03
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
AEM SpA, AEM Torino SpA
Défendeur :
Autorità per l'energia elettrica e per il gas e.a., ENEL Produzione SpA,
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Rosas
Avocat général :
Mme Stix-Hackl
Juges :
MM. Borg Barthet, von Bahr, Malenovský, Lõhmus
Avocats :
Mes Brouwer, Salonico, Fiorilli.
LA COUR (troisième chambre),
1 Les demandes de décision préjudicielle portent sur l'interprétation de l'article 87 CE et de la directive 96-92-CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité (JO 1997, L 27, p. 20), notamment de ses articles 7 et 8.
2 Ces demandes ont été présentées dans le cadre de recours introduits par les sociétés AEM SpA (ci-après "AEM") et AEM Torino SpA (ci-après "AEM Torino") par lesquels ces sociétés ont attaqué deux décisions de l'Autorità per l'energia elettrica e per il gas (agence pour l'énergie électrique et pour le gaz, ci-après l'"AEEG"), ainsi qu'un décret ministériel, soumettant certaines centrales hydrauliques et géothermiques à une majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation.
Le cadre juridique
La réglementation communautaire
3 Selon son article 1er, la directive 96-92 "établit des règles communes concernant la production, le transport et la distribution d'électricité. Elle définit les modalités d'organisation et de fonctionnement du secteur de l'électricité, l'accès au marché, les critères et les procédures applicables en ce qui concerne les appels d'offres et l'octroi des autorisations ainsi que l'exploitation des réseaux".
4 L'article 7, paragraphes 1 et 5, de la directive 96-92 prévoit:
"1. Les États membres désignent, ou demandent aux entreprises propriétaires de réseaux de transport de désigner, pour une durée à déterminer par les États membres en fonction de considérations d'efficacité et d'équilibre économique, un gestionnaire du réseau qui sera responsable de l'exploitation, de l'entretien et, le cas échéant, du développement du réseau de transport dans une zone donnée, ainsi que de ses interconnexions avec d'autres réseaux, pour garantir la sécurité d'approvisionnement.
[...]
5. Le gestionnaire du réseau s'abstient de toute discrimination entre les utilisateurs du réseau ou les catégories d'utilisateurs du réseau, notamment en faveur de ses filiales ou de ses actionnaires."
5 L'article 8, paragraphes 1 à 3, de la même directive dispose:
"1. Le gestionnaire du réseau de transport est responsable de l'appel des installations de production situées dans sa zone et de la détermination de l'utilisation des interconnexions avec les autres réseaux.
2. Sans préjudice de la fourniture d'électricité sur la base d'obligations contractuelles, y compris celles qui découlent du cahier des charges de l'appel d'offres, l'appel des installations de production et l'utilisation des interconnexions sont faits sur la base de critères qui peuvent être approuvés par l'État membre, et qui doivent être objectifs, publiés et appliqués de manière non discriminatoire, afin d'assurer un bon fonctionnement du marché intérieur de l'électricité. Ils tiennent compte de l'ordre de préséance économique de l'électricité provenant des installations de production disponibles ou de transferts par interconnexion, ainsi que des contraintes techniques pesant sur le réseau.
3. Un État membre peut imposer au gestionnaire du réseau, lorsqu'il appelle les installations de production, de donner la priorité à celles qui utilisent des sources d'énergie renouvelables ou des déchets ou qui produisent de la chaleur et de l'électricité combinées."
6 L'article 24, paragraphe 1, de ladite directive prévoit:
"1. Les États membres où des engagements ou des garanties d'exploitation, accordés avant l'entrée en vigueur de la présente directive, risquent de ne pas pouvoir être honorés en raison des dispositions de la présente directive pourront demander à bénéficier d'un régime transitoire; celui-ci pourra leur être accordé par la Commission, en tenant compte, entre autres, de la taille et du niveau d'interconnexion du réseau concerné, ainsi que de la structure de son industrie de l'électricité. La Commission informe les États membres de ces demandes avant de prendre une décision, dans le respect de la confidentialité. Cette décision est publiée au Journal officiel des Communautés européennes."
7 L'article 24, paragraphe 2, de la directive 96-92 précise que les demandes de régime transitoire doivent être notifiées à la Commission au plus tard un an après l'entrée en vigueur de cette directive.
La réglementation nationale
8 Le décret législatif n° 79, du 16 mars 1999, relatif à l'exécution de la directive 96-92-CE portant règles communes pour le marché intérieur de l'électricité (Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana n° 75, du 31 mars 1999, p. 8, ci-après le "décret législatif n° 79-99"), prévoit à son article 3, paragraphe 10, que, pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation, une redevance est due au gestionnaire du réseau. Celle-ci est fixée indépendamment de la localisation géographique des sites de production et des clients finaux et, en tout état de cause, sur la base de critères non discriminatoires. Cette redevance est fixée par l'AEEG qui procède également à l'adaptation de son tarif.
9 L'article 3, paragraphe 11, du décret législatif n° 79-99 dispose que les frais généraux afférents au réseau d'électricité incluent différents coûts: ceux des activités de recherche, ceux de démantèlement des centrales nucléaires ayant cessé leur production, ceux liés à l'arrêt du cycle du combustible nucléaire ainsi que ceux afférents aux activités connexes et conséquentes. Ces frais généraux sont précisés par un ou plusieurs décrets du Ministro dell'industria, del commercio e dell'artigianato (ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat), en accord avec le Ministro del tesoro, del biliancio e della programmazione economica (ministre du Trésor, du Budget et de la Programmation économique), sur proposition de l'AEEG.
10 L'article 2, paragraphe 1, du décret du Ministro dell'industria, del commercio e dell'artigianato, du 26 janvier 2000, portant détermination des frais généraux du système électrique, adopté de concert avec le Ministro del tesoro, del bilancio e della programmazione economica, sur proposition de l'AEEG (Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana n° 27, du 3 février 2000, p. 12, ci-après le "décret du 26 janvier 2000"), précise que constituent des frais généraux afférents au système électrique:
"a) l'indemnisation des entreprises productrices-distributrices, en application des critères définis dans le présent décret, pour la partie non récupérable, à la suite de la mise en œuvre de la directive [96-92], des coûts engendrés par l'activité de production d'électricité;
b) la compensation de la meilleure valorisation, résultant de la transposition de la directive [96-92], de l'électricité produite par les installations hydrauliques et géothermiques qui, en date du 19 février 1997, étaient la propriété ou à la disposition des entreprises productrices-distributrices;
c) les coûts liés au démantèlement des centrales nucléaires abandonnées et à l'arrêt du cycle du combustible nucléaire et aux activités connexes en résultant;
d) les coûts des activités de recherche et de développement en vue de l'innovation technologique d'intérêt général pour le réseau électrique;
e) l'application de conditions tarifaires favorables pour la fourniture d'électricité prévues par les dispositions rappelées à l'article 2, paragraphe 2, point 4, de la délibération de l'[AEEG] n° 70-97 et le décret du Ministro dell'industria, del commercio e dell'artigianato du 19 décembre 1995."
11 En ce qui concerne la compensation de la meilleure valorisation dont il est fait état à l'article 2, paragraphe 1, sous b), du décret du 26 janvier 2000, l'article 3, paragraphe 3, du même décret, apparaissant sous la rubrique "Charges résultant de l'exécution de la directive [96-92]", prévoit:
"est récupérée, afin de compenser ne serait-ce que partiellement les frais généraux afférents au réseau électrique, pour une période de sept ans à partir du 1er janvier 2000 et selon les modalités précisées à l'article 5, uniquement une somme correspondant à la meilleure valorisation de l'électricité produite par les installations hydrauliques et géothermiques non admises au régime des contributions[, en faveur des nouvelles installations utilisant des sources d'énergies renouvelables,] prévu par les décisions n° 15, du 12 juillet 1989, n° 34, du 14 novembre 1990, et n° 6, du 29 avril 1992 du Comitato interministerale dei prezzi [Comité interministériel des prix], telles que modifiées. Les dispositions du présent paragraphe ne s'appliquent pas aux installations d'une puissance nominale non supérieure à 3 MW ni aux installations hydrauliques de pompage."
12 Selon l'article 5, paragraphe 9, du décret du 26 janvier 2000:
"La somme correspondant à la meilleure valorisation à récupérer durant la période précisée à l'article 3, paragraphe 3, est égale, pour l'année 2000, au coût unitaire variable reconnu de l'électricité produite par les centrales thermiques qui utilisent des combustibles fossiles commerciaux, au sens de l'article 6, paragraphe 5, de la décision de l'[AEEG] n° 70-97 et, pour les années successives, pour chaque centrale et pour chaque période de deux mois, à une partie de la différence entre la valeur moyenne pondérée des prix de gros de l'électricité sur le marché national durant les différentes périodes de deux mois, en utilisant comme coefficient la quantité d'électricité produite par la centrale durant les différentes périodes de deux mois, et les coûts fixes moyens unitaires de la centrale, tels que précisés chaque année, à compter du 31 décembre de l'année précédente, par l'[AEEG]. Cette partie est de 75 % pour les années 2001 et 2002, de 50 % pour les années 2003 et 2004, et de 25 % pour les années 2005 et 2006. Au-delà de cette date, cette partie est égale à zéro."
13 Les articles 2, paragraphes 1 et 2, de la décision n° 231-00 de l'AEEG, du 20 décembre 2000, et 2, paragraphes 1, 2 et 8, de la décision n° 232-00 de l'AEEG, du 20 décembre 2000, relatives à la définition de la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport et pour son utilisation par l'électricité produite par des installations hydrauliques et géothermiques pour les années 2000 à 2006 (supplément ordinaire à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana n° 4, du 5 janvier 2001, p. 13, ci-après la "décision nº 231-00" et la "décision n° 232-00"), soumettent l'électricité dont il est question à l'article 3, paragraphe 3, du décret du 26 janvier 2000 et qui est produite et introduite dans le réseau par les installations qui, le 19 février 1997, étaient la propriété ou à la disposition des entreprises productrices-distributrices à une majoration de la redevance pour l'utilisation du réseau couvrant les services dynamiques, en compensation de la meilleure valorisation au sens de l'article 2, paragraphe 1, sous b), du décret du 26 janvier 2000.
14 Le produit de la majoration de la redevance visée aux articles 2 des décisions nos 231-00 et 232-00 (ci-après la "majoration de la redevance") est, selon les articles 3, paragraphe 1, desdites décisions, versé à la "Cassa conguaglio per il settore elettrico" (caisse de péréquation pour le secteur de l'électricité, ci-après la "caisse de péréquation") par le gestionnaire du réseau. Les articles 3, paragraphe 2, desdites décisions prévoient que ces versements alimentent le "Conto per la gestione della compensazione della maggiore valorizzazione dell'energia elettrica nella transizione" (compte pour la compensation de la meilleure valorisation de l'électricité pendant la période de transition). Selon les articles 3, paragraphe 3, de ces mêmes décisions, l'éventuel excédent sur ce dernier compte est transféré sur le "Conto per nuovi impianti da fonti rinnovabili e assimilate" (compte pour des nouvelles installations utilisant des sources d'énergie renouvelables et assimilées).
Les litiges au principal
15 Il ressort des décisions de renvoi que AEM et AEM Torino ont introduit, devant le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia, des recours à l'encontre des décisions nos 231-00 et 232-00 et de leurs actes préalables, de base et connexes, en ce compris le décret du 26 janvier 2000.
16 Ces recours ayant été rejetés, AEM et AEM Torino ont formé des pourvois devant le Consiglio di Stato pour demander l'annulation des décisions de rejet.
17 Dans les décisions de renvoi, le Consiglio di Stato indique notamment que AEM et AEM Torino font valoir que la majoration de la redevance relève intégralement du régime des subventions de fonctionnement d'entreprises déterminées ou de productions financées par le biais de prélèvements sur les fournitures d'entreprises du secteur, ce qui s'analyse en des aides d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE, accordées en l'espèce sans qu'ait été mise en œuvre la procédure aménagée dans le traité CE. AEM et AEM Torino soutiennent également que, un prix différencié pour l'accès au réseau de transport, qui se traduit par une plus grande charge pour certaines entreprises, constituerait une violation d'un des principes fondamentaux de la directive 96-92, en ce qui concerne l'accès de tous et sans discrimination audit réseau.
Les questions préjudicielles
18 Selon le Consiglio di Stato, il ressort d'une analyse d'ensemble des dispositions litigieuses que la majoration de la redevance est fondée sur la nécessité de remédier aux avantages indus et aux déséquilibres concurrentiels qui sont apparus durant la première période, fixée entre 2000 et 2006, de la libéralisation du marché de l'électricité à la suite de la transposition de la directive 96-92.
19 À cet égard, il relève que, en fait, antérieurement à la libéralisation, les entreprises productrices-distributrices d'électricité provenant d'installations hydrauliques et géothermiques appliquaient un tarif dont l'un des éléments, l'élément B, était relatif au coût du combustible. Toutefois, la part de cet élément du tarif était versé par les entreprises à la caisse de péréquation qui, à son tour, la reversait aux installations thermiques qui étaient les seules à supporter un coût de combustible.
20 Le changement intervenu générerait un double avantage en faveur desdites entreprises. D'une part, à la suite de l'élimination de l'élément B du tarif pour les clients du marché captif et qui était dans le passé destiné à la caisse de péréquation, lesdites entreprises seraient en mesure d'encaisser un prix fixé de manière égale sur le territoire national pour le marché captif, encore soumis à un régime tarifaire, sur la base de paramètres qui tiendraient encore compte d'un coût du combustible alors qu'elles ne supporteraient pas ce coût. D'autre part, cet avantage serait destiné à trouver application également sur le marché libre pour les clients éligibles, en ce sens que les prix de vente en gros sur le marché captif constitueraient une référence pour les conventions bilatérales sur le marché libre. Ces deux avantages seraient uniquement le résultat de la modification du contexte juridique à la suite de la libéralisation du secteur et non pas d'une modification des paramètres d'efficacité et de concurrence.
21 Le Consiglio di Stato précise que, dans une note informative sur la réglementation tarifaire, du 4 août 1999 (ci-après la "note informative"), l'AEEG a relevé que cette meilleure valorisation de la production hydraulique et géothermique, si elle était laissée au bénéfice des entreprises productrices-distributrices, créerait des revenus pour ces entreprises et générerait une charge pour le réseau d'électricité, en tant que conséquence directe du processus de libéralisation, en imposant au consommateur des niveaux tarifaires plus élevés non établis sur des coûts plus élevés.
22 La note informative précise encore que, "[d]ans le cas de l'électricité produite par des installations hydrauliques et géothermiques, cette conséquence doit être évitée en soumettant cette électricité à une majoration de la redevance pour l'accès au réseau de transport et pour son utilisation, au sens de l'article 3, paragraphe 10, du décret législatif n° 79-99, jusqu'à la fin des concessions actuelles de dérivation des voies d'eau pour usage hydroélectrique et d'utilisation des ressources géothermiques à des fins thermoélectriques. Le produit de ces majorations pourra être utilisé pour compenser les coûts échoués qui se manifesteront et ne seront autrement reconnus, ou employé pour le financement des frais généraux afférents au réseau électrique notamment ceux relatifs à la promotion de l'électricité produite par les installations qui utilisent des sources d'énergie renouvelables".
23 L'annexe 2 de la note informative précise d'abord que le règlement tarifaire fondé sur le régime antérieur à la transposition de la directive 96-92 prévoyait l'octroi de contributions, versées par la caisse de péréquation, à la production d'électricité qui étaient différenciées par types d'installations et de producteurs.
24 Il est constaté dans ladite annexe qu'une telle différenciation dans le système de contribution à la production d'électricité n'est pas compatible avec un cadre de production libéralisé. Dans un tel cadre, il serait inévitable que se forme, pour chaque période, un prix unique de marché de l'électricité de gros que tous les producteurs fixeront et demanderont, indépendamment du type d'installation utilisée.
25 Enfin, il est précisé dans cette annexe que le revenu qui en résulte pour l'électricité produite par les installations hydrauliques et géothermiques serait fonction de la disponibilité de ressources rares, à savoir l'eau et les ressources géothermiques à usage de production d'électricité, qui, dans le système actuel, ne seraient pas valorisées de manière appropriée.
26 Le Consiglio di Stato rappelle que, en ce qui concerne l'électricité distribuée sur le marché libre, la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport et pour son utilisation a été introduite à partir de 2000, par la décision n° 231-00, alors que pour l'électricité distribuée sur le marché captif elle n'a été introduite qu'à partir de 2001, par la décision n° 232-00. Ceci s'expliquerait par le fait que, pour ce dernier marché, l'élément B du tarif ainsi que les contributions aux coûts du combustible qui lui sont liées n'ont été supprimés qu'à partir de l'année 2001.
27 Le Consiglio di Stato précise encore que la récupération de la meilleure valorisation est fixée de manière dégressive jusqu'à la fin de l'année 2006, de manière à permettre au marché d'atteindre un équilibre effectivement concurrentiel.
28 Il indique en outre avoir pris acte du fait que la majoration de la redevance n'est pas fondée sur l'article 24 de la directive 96-92.
29 Sur la base de ces considérations, le Consiglio di Stato estime nécessaire de vérifier, en premier lieu, si un régime tel que celui en cause au principal implique une aide d'État au sens des dispositions des articles 87 CE et suivants.
30 À cet égard, il relève que le produit de la majoration de la redevance n'est pas affecté en faveur d'entreprises déterminées ou de catégories d'entreprises opérant sur le marché selon une logique de subventions croisées, mais viserait à faire face aux frais généraux du réseau d'électricité au bénéfice de l'utilisateur. Il s'agirait donc d'une mesure générale de politique économique qui n'aurait pas pour finalité d'avantager certaines entreprises déterminées ou certaines productions, mais entendrait au contraire poursuivre un intérêt de caractère général. En fait, selon le Consiglio di Stato, contrairement à ce qu'il ressort de certaines indications dans les travaux préparatoires, les dispositions en cause n'envisagent pas une redistribution des revenus en faveur d'une catégorie déterminée d'entreprises en vue de couvrir les coûts échoués. En outre, les décisions nos 231-00 et 232-00 prévoiraient seulement en tant que simple éventualité que les excédents éventuels du compte pour la compensation de la meilleure valorisation de l'électricité pendant la période de transition soient transférés sur le compte pour des nouvelles installations utilisant des sources d'énergie renouvelables et assimilées. En définitive, ce ne seraient pas les dispositions concernées du décret du 26 janvier 2000, prévoyant une confluence des sommes en question sur un compte destiné à contribuer à la couverture des frais généraux du système, qui sont à qualifier d'aides d'État, mais éventuellement la détermination séparée et ultérieure de la destination desdites sommes, désormais disponibles au Trésor public, en faveur d'entreprises ou de productions déterminées au sens de l'article 87, paragraphe 1, CE.
31 En deuxième lieu, le Consiglio di Stato estime nécessaire de vérifier la compatibilité d'un tel régime avec les principes et les dispositions de la directive 96-92, notamment celles de l'article 7 de cette directive, et son vingt-cinquième considérant, en ce qui concerne la garantie de l'accès de tous et sans discrimination au réseau, et celles de l'article 8 de la même directive, en ce qui concerne la fixation des critères pour l'appel des installations de production.
32 C'est dans ces conditions que le Consiglio di Stato a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les deux questions préjudicielles suivantes rédigées en termes identiques dans les affaires C-128-03 et C-129-03:
"1) Une mesure administrative qui, selon les termes et pour les motifs précisés, prévoit pour certaines entreprises déterminées qui utilisent le réseau de transport d'électricité une majoration de la redevance pour l'accès au réseau et pour son utilisation, destinée à financer les frais généraux du réseau électrique, constitue-t-elle une aide d'État au sens des articles 87 [CE] et suivants du traité?
2) Les principes consacrés par la directive 96-92, en matière de libéralisation du marché intérieur de l'électricité, et notamment les dispositions des articles 7 et 8 concernant l'exploitation du réseau de transport de l'électricité s'opposent-ils à ce qu'un État membre puisse adopter, à titre transitoire, une mesure prévoyant, pour certaines entreprises déterminées, une majoration de la redevance destinée à compenser la meilleure valorisation des énergies hydraulique et géothermique résultant, selon les termes et les motifs précisés, de la modification du contexte législatif et à financer les frais généraux du système électrique?"
33 Par ordonnance du 6 mai 2003, le président de la Cour a ordonné la jonction des affaires C-128-03 et C-129-03.
Sur le fond
Sur la première question
34 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si une mesure, telle que celle en cause au principal, par laquelle un État membre n'impose qu'à certains utilisateurs du réseau national de transport d'électricité une majoration de la redevance due pour l'accès à ce réseau et son utilisation constitue une aide d'État au sens de l'article 87 CE.
Observations soumises à la Cour
35 AEM et AEM Torino rappellent que le décret du 26 janvier 2000 et les décisions nos 231-00 et 232-00 ainsi que la décision n° 228-01 de l'AEEG, du 18 octobre 2001, approuvant un texte consolidé des dispositions de l'AEEG pour la prestation des services de transport, de mesure et de vente de l'électricité (supplément ordinaire à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana n° 277, du 22 décembre 2001, p. 5), imposent à certains producteurs-distributeurs d'hydroélectricité et d'électricité d'origine géothermique de payer une redevance majorée pour l'accès au réseau national de transport, dans le but de compenser les frais généraux du système électrique et les coûts de production des centrales admises au régime des contributions en faveur des nouvelles installations utilisant des sources d'énergie renouvelables. AEM et AEM Torino soutiennent que ces dispositions font partie intégrante des régimes d'aides d'État prévus par le décret du 26 janvier 2000 pour financer les frais généraux du système électrique italien (coûts échoués) et par l'article 22, paragraphe 3, de la loi n° 9-91, du 9 janvier 1991, relative aux règles pour l'exécution du nouveau plan national sur l'énergie: aspects institutionnels, centrales hydroélectriques et lignes électriques, hydrocarbures et géothermie, autoproduction ainsi que dispositions fiscales (supplément ordinaire à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana n° 13, du 16 janvier 1991, p. 3), pour allouer les incitations à la production d'électricité obtenue à partir de sources renouvelables et assimilées.
36 Le Gouvernement italien fait valoir qu'une mesure administrative qui, dans le contexte d'une baisse des coûts de production, impose à certaines entreprises productrices-distributrices d'électricité hydraulique et géothermique qui utilisent le réseau national de transport une majoration temporaire et dégressive de la redevance d'accès et d'utilisation visant à financer les frais généraux du système électrique ne peut être qualifiée d'aide d'État.
37 La Commission des Communautés européennes, pour sa part, soutient qu'une mesure telle que celle qui fait l'objet de la procédure au principal et qui, selon des termes et pour des motifs précis, prévoit pour certaines entreprises déterminées qui utilisent les lignes du réseau d'électricité une majoration de la redevance due pour l'accès au réseau et pour son utilisation, destinée à financer les frais généraux du système électrique, ne constitue pas une aide d'État au sens des articles 87 CE et suivants.
Appréciation de la Cour
38 Il convient de rappeler que l'article 87, paragraphe 1, CE définit les aides d'État qui sont réglementées par le traité comme les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres. La notion d'aide d'État au sens de cette disposition est plus générale que celle de subvention parce qu'elle comprend non seulement des prestations positives telles que les subventions elles-mêmes, mais également des interventions qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d'une entreprise (voir, notamment, arrêts du 23 février 1961, De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 30-59, Rec. p. 1, 39; du 29 juin 1999, DM Transport, C-256-97, Rec. p. I-3913, point 19, et du 14 septembre 2004, Espagne/Commission, C-276-02, non encore publié au Recueil, point 24).
39 Toutefois, la notion d'aide ne vise pas des mesures introduisant une différenciation entre entreprises en matière de charges lorsque cette différenciation résulte de la nature et de l'économie du système de charges en cause (voir, notamment, arrêts du 26 septembre 2002, Espagne/Commission, C-351-98, Rec. p. I-8031, point 42, et du 29 avril 2004, Pays-Bas/Commission, C-159-01, non encore publié au Recueil, point 42).
40 Dans l'affaire au principal, il ressort des décisions de renvoi que la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation exigée des seules entreprises productrices-distributrices d'électricité provenant d'installations hydrauliques ou géothermiques a pour objet de compenser l'avantage généré, pour ces entreprises, par la libéralisation du marché de l'électricité à la suite de la transposition de la directive 96-92. En effet, le régime de transition de la première période de ladite libéralisation permet auxdites entreprises de demander, d'une part, sur le marché captif, un prix fixé sur la base de paramètres qui tiennent compte d'un coût du combustible qu'elles ne supportent pas et qui n'est plus compensé par un élément du tarif versé par elles à la caisse de péréquation et, d'autre part, sur le marché libre, un prix pour lequel le prix de vente en gros dans le marché captif constitue une référence, alors que, ainsi qu'il résulte notamment de l'annexe 2 de la note informative, dans le cadre des concessions de dérivation des voies d'eau pour usage hydroélectrique et d'utilisation des ressources géothermiques à des fins thermoélectriques, ces ressources ne sont pas encore valorisées de manière appropriée.
41 Ainsi que l'a observé la juridiction de renvoi, cet avantage ne résulte pas d'une modification des paramètres d'efficacité et de concurrence, mais de la modification du contexte juridique à la suite de la libéralisation du secteur de l'électricité.
42 En outre, il ressort de la note informative que l'électricité produite par ces entreprises ne sera soumise à la majoration de la redevance que jusqu'à la fin des concessions actuelles de dérivation des voies d'eau pour usage hydroélectrique et d'utilisation des ressources géothermiques à des fins thermoélectriques. Il ressort également de la décision de renvoi que la majoration de la redevance est fixée de manière dégressive jusqu'à la fin de l'année 2006.
43 Il convient d'en déduire qu'une mesure telle que celle en cause au principal, qui impose à titre transitoire une majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation aux seules entreprises productrices-distributrices d'électricité venant des installations hydrauliques et géothermiques afin de compenser l'avantage généré pour celles-ci, pendant la période de transition, par la libéralisation du marché de l'électricité à la suite de la transposition de la directive 96-92, constitue une différenciation entre entreprises en matière de charges résultant de la nature et de l'économie du système de charges en cause. Partant, cette différenciation ne constitue pas en soi une aide d'État au sens de l'article 87 CE.
44 Toutefois, AEM et AEM Torino ont fait valoir que la majoration de la redevance fait partie intégrante des régimes d'aides d'État prévus par le décret du 26 janvier 2000 pour financer les frais généraux du système électrique italien (coûts échoués) et par l'article 22, paragraphe 3, de la loi n° 9-91 pour inciter la production d'électricité obtenue à partir de sources renouvelables et assimilées.
45 À cet égard, il convient de rappeler qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour que le mode de financement d'une aide peut rendre l'ensemble du régime d'aide qu'il entend financer incompatible avec le Marché commun. Dès lors, l'examen d'une aide ne saurait être séparé des effets de son mode de financement. Tout au contraire, l'examen d'une mesure d'aide par la Commission doit nécessairement aussi prendre en considération le mode de financement de l'aide dans le cas où ce dernier fait partie intégrante de la mesure (voir arrêt du 21 octobre 2003, Van Calster e.a., C-261-01 et C-262-01, Rec. p. I-12249, point 49).
46 Cependant, pour que l'on puisse considérer une taxe parafiscale comme faisant partie intégrante d'une mesure d'aide, il doit nécessairement exister un lien d'affectation contraignant entre la taxe parafiscale et l'aide, en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe parafiscale est nécessairement affecté au financement de l'aide. Ce n'est que si un tel lien existe que le produit de la taxe parafiscale influence directement l'importance de l'aide et, par voie de conséquence, l'appréciation de sa compatibilité avec le Marché commun (voir, en ce sens, arrêts du 13 janvier 2005, Streekgewest, C-174-02, non encore publié au Recueil, point 26, et Pape, C-175-02, non encore publié au Recueil, point 15).
47 Il s'ensuit que, si, dans une situation telle que celle au principal, il existe un lien d'affectation contraignant entre la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation et un régime d'aide national, en ce sens que le produit de la majoration est nécessairement affecté au financement de cette aide, ladite majoration fait partie intégrante de ce régime et doit donc être examinée ensemble avec ce dernier.
48 À cet égard, il y a lieu de constater que le dossier ne contient pas d'informations suffisamment précises pour que la Cour puisse se prononcer sur cette question.
49 Dans ce contexte, il convient en outre de remarquer que la Commission a relevé que, le 25 juillet 2000, les autorités italiennes lui ont notifié le décret du 26 janvier 2000 en tant que mesures d'aide au sens de l'article 88, paragraphe 3, CE et que ledit décret fait référence à la compensation de la meilleure valorisation et donc indirectement à la majoration de la redevance. Lors de l'audience, la Commission a indiqué que la procédure d'examen de ce décret est toujours pendante.
50 Dès lors, il y a lieu de répondre à la première question préjudicielle qu'une mesure telle que celle en cause au principal, qui impose à titre transitoire une majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation aux seules entreprises productrices-distributrices d'électricité provenant d'installations hydrauliques et géothermiques afin de compenser l'avantage généré pour celles-ci, pendant la période de transition, par la libéralisation du marché de l'électricité à la suite de la transposition de la directive 96-92, constitue une différenciation entre entreprises en matière de charges résultant de la nature et de l'économie du système de charges en cause. Partant, cette différenciation ne constitue pas en soi une aide d'État au sens de l'article 87 CE.
51 Toutefois, l'examen d'une aide ne saurait être séparé des effets de son mode de financement. Si, dans une situation telle que celle au principal, il existe un lien d'affectation contraignant entre la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation et un régime d'aide national, en ce sens que le produit de la majoration est nécessairement affecté au financement de cette aide, ladite majoration fait partie intégrante de ce régime et doit donc être examinée ensemble avec ce dernier.
Sur la seconde question
52 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande en substance si les articles 7, paragraphe 5, et 8, paragraphe 2, de la directive 96-92, en ce qu'ils interdisent toute discrimination entre utilisateurs du réseau national de transport d'électricité, s'opposent à ce qu'un État membre adopte une mesure à titre transitoire, telle que celle en cause au principal, qui n'impose qu'à certaines entreprises productrices-distributrices d'électricité une majoration de la redevance due pour l'accès audit réseau et pour son utilisation.
Observations soumises à la Cour
53 AEM et AEM Torino font valoir qu'une majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport et pour son utilisation, qui est imposée, serait-ce à titre transitoire, à certaines entreprises seulement, notamment eu égard au fait que cette période de majoration coïncide avec la phase d'introduction de la concurrence sur le marché italien de l'électricité après son ouverture, est contraire au principe fondamental d'accès au réseau selon des critères objectifs, transparents et non discriminatoires, prévu par la directive 96-92.
54 Le Gouvernement italien est d'avis que le fait qu'un État membre impose à certaines entreprises productrices-distributrices d'électricité une majoration transitoire et dégressive de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation afin de prévenir un bénéfice résultant de la meilleure valorisation de l'hydroélectricité et de l'électricité d'origine géothermique imputable au nouveau contexte législatif consécutif à la libéralisation du marché intérieur de l'électricité n'est pas incompatible avec les principes consacrés par la directive 96-92.
55 La Commission considère que les principes consacrés par la directive 96-92 en matière de libéralisation du marché intérieur de l'électricité, et notamment les dispositions des articles 7 et 8 concernant l'exploitation du réseau national de transport, ne s'opposent pas à ce qu'un État membre puisse adopter, à titre transitoire, une mesure prévoyant, pour certaines entreprises déterminées, une majoration de la redevance destinée à compenser la meilleure valorisation de l'électricité hydraulique et géothermique résultant de la modification du contexte législatif et à financer les frais généraux du système électrique.
Appréciation de la Cour
56 Il convient tout d'abord de constater que l'article 7, paragraphe 5, de la directive 96-92 vise le gestionnaire du réseau national de transport d'électricité et l'article 8, paragraphe 2, de cette même directive vise l'ordre d'appel des installations de production d'électricité. Or, d'une part, les mesures en cause dans l'affaire au principal sont un décret ministériel et des décisions adoptées par une autorité publique et non pas par le gestionnaire du réseau. D'autre part, les dispositions nationales visées par les recours formés par AEM et AEM Torino concernent les conditions d'accès au réseau et non pas l'ordre d'appel des installations de production d'électricité.
57 Toutefois, il résulte de l'article 16 de la directive 96-92 que, si, pour l'organisation de l'accès au réseau, les États membres peuvent choisir entre la formule de l'accès négocié au réseau ou celle de l'acheteur unique, les deux formules doivent être mises en ouvre conformément à des critères objectifs, transparents et non discriminatoires.
58 En tout état de cause, ces dispositions, tout comme le principe général de non-discrimination dont elles sont des expressions particulières, interdisent, d'une part, de traiter de manière différente des situations similaires et, d'autre part, de traiter de la même manière des situations différentes (voir, en ce qui concerne le principe de non-discrimination, notamment, arrêt du 12 décembre 2002, Rodríguez Caballero, C-442-00, Rec. p. I-11915, point 32).
59 Or, la mesure nationale en cause au principal prévoit, à titre transitoire, ainsi que la Cour l'a constaté aux points 42 et 43 du présent arrêt, la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation pour les seules entreprises productrices-distributrices d'électricité provenant d'installations hydrauliques et géothermiques afin de compenser l'avantage généré pour ces entreprises, pendant la période de transition, par la modification du contexte juridique à la suite de la libéralisation du marché de l'électricité résultant de la transposition de la directive 96-92. Si une telle mesure traite de manière différente des situations non similaires, il appartient néanmoins à la juridiction de renvoi de s'assurer que la majoration de la redevance ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour compenser ledit avantage.
60 Dès lors, il convient de répondre à la seconde question préjudicielle que la règle de l'accès sans discrimination au réseau national de transport d'électricité entérinée par la directive 96-92 ne s'oppose pas à ce qu'un État membre adopte une mesure à titre transitoire, telle que celle en cause au principal, qui n'impose qu'à certaines entreprises productrices-distributrices d'électricité une majoration de la redevance due pour l'accès audit réseau et pour son utilisation afin de compenser l'avantage généré pour ces entreprises, pendant la période de transition, par la modification du contexte juridique à la suite de la libéralisation du marché de l'électricité résultant de la transposition de ladite directive. Il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de s'assurer que la majoration de la redevance ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour compenser ledit avantage.
Sur les dépens
61 La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.
Par ces motifs,
LA COUR (troisième chambre),
dit pour droit:
1) Une mesure telle que celle en cause au principal, qui impose à titre transitoire une majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation aux seules entreprises productrices-distributrices d'électricité provenant d'installations hydrauliques et géothermiques afin de compenser l'avantage généré pour celles-ci, pendant la période de transition, par la libéralisation du marché de l'électricité à la suite de la transposition de la directive 96-92-CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité, constitue une différenciation entre entreprises en matière de charges résultant de la nature et de l'économie du système de charges en cause. Partant, cette différenciation ne constitue pas en soi une aide d'État au sens de l'article 87 CE.
Toutefois, l'examen d'une aide ne saurait être séparé des effets de son mode de financement. Si, dans une situation telle que celle au principal, il existe un lien d'affectation contraignant entre la majoration de la redevance pour l'accès au réseau national de transport d'électricité et pour son utilisation et un régime d'aide national, en ce sens que le produit de la majoration est nécessairement affecté au financement de cette aide, ladite majoration fait partie intégrante de ce régime et doit donc être examinée ensemble avec ce dernier.
2) La règle de l'accès sans discrimination au réseau national de transport d'électricité entérinée par la directive 96-92 ne s'oppose pas à ce qu'un État membre adopte une mesure à titre transitoire, telle que celle en cause au principal, qui n'impose qu'à certaines entreprises productrices-distributrices d'électricité une majoration de la redevance due pour l'accès audit réseau et pour son utilisation afin de compenser l'avantage généré pour ces entreprises, pendant la période de transition, par la modification du contexte juridique à la suite de la libéralisation du marché de l'électricité résultant de la transposition de ladite directive. Il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de s'assurer que la majoration de la redevance ne dépasse pas ce qui est nécessaire pour compenser ledit avantage.