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Décisions

CA Rennes, 1re ch. B, 4 décembre 1998, n° 9703525

RENNES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Auto Pièces Occasion (SA)

Défendeur :

Lamy, Asli

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lefevre

Conseillers :

Mmes L'Henoret, Sabatier

Avoués :

Mes Castres Colleu & Perot, Bourges, Chaudet & Brebion

Avocats :

Mes Le Brusq, Lavisse-Bouamrirene, Doucet.

CA Rennes n° 9703525

4 décembre 1998

Exposé des faits et des demandes :

Monsieur Lamy a acheté le 4 novembre 1991, un véhicule d'occasion BMW pour le prix de 46 000 F à Monsieur Hocine Asli.

Le véhicule est réparé pour une fuite d'huile en décembre 1991 et le garagiste relève des défauts de la traverse support de suspension avant.

Monsieur Lamy fait expertiser le véhicule et l'expert affirme que le véhicule a été accidenté et que le défaut constaté sur la traverse le rend impropre à sa destination, dans un rapport du 2 mars 1992.

Ayant appris que le véhicule accidenté avait été vendu par ses anciens propriétaires aux établissements Auto Pièces Occasion qui l'avaient revendu en l'état à Monsieur Asli, Monsieur Lamy par actes du 7 octobre 1994 et du 9 février 1995 a fait assigner la société Auto Pièces Occasion et Monsieur Asli à l'effet d'obtenir le remboursement des réparations engagées, la nullité de la vente et la restitution du prix ainsi que des dommages-intérêts.

Par jugement du 19 mars 1997 le Tribunal de grande instance de Lorient a :

- prononcé la nullité de la vente du véhicule intervenue le 4 novembre 1991 entre Monsieur Hocine Asli et Monsieur Bruno Lamy,

- condamné Monsieur Hocine Asli à payer à Monsieur Bruno Lamy la somme de 46 000 F avec intérêts au taux légal à compter du 15 février 1995 ainsi que la somme de 8 000 F de dommages-intérêts avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

- condamné Monsieur Hocine Asli in solidum avec la société Auto Pièces Occasion à payer à Monsieur Bruno Lamy la somme de 9 432,73 F avec intérêts au taux légal à compter du 15 février 1995, - débouté les parties de toutes autres conclusions plus amples ou contraires,

- Fait masse des dépens qui comprendront ceux des différentes décisions judiciaires rendues dans cette affaire et n'auraient pas encore été liquidées et dit qu'ils seront supportés in solidum par Monsieur Hocine Asli et par la société Auto Pièces Occasion à proportion de leurs condamnations respectives.

La SA Auto Pièces Occasion a relevé appel.

Monsieur Lamy et Monsieur Asli ont fait des appels incidents.

Prétentions et moyens des parties :

La SA Auto Pièces Occasion, conclut à la réformation du jugement et demande à la cour de dire irrecevable la procédure engagée à son encontre par Monsieur Lamy, de constater en tout état de cause que le véhicule n'a pas été déclaré gravement accidenté et de condamner Monsieur Lamy à lui payer la somme de 10 000 F pour procédure abusive et celle de 15 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle rappelle que conformément à son objet social elle a acheté le véhicule accidenté et l'a revendu en l'état à Monsieur Asli, et que le véhicule n'a été déclaré ni gravement accidenté, ni économiquement irréparable en sorte qu'elle n'avait pas à faire opposition à tout transfert du certificat d'immatriculation.

Monsieur Lamy sollicite pour sa part une réformation du jugement sur le montant des dommages-intérêts alloués et réclame à ce titre la somme de 20 000 F.

Il prétend également à la condamnation solidaire de l'appelante et de Monsieur Asli à lui payer 9 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Il soutient que Monsieur Asli lui a certifié sur l'honneur que le véhicule n'avait pas été accidenté et que tous les organes de celui-ci étaient en bon état et que son consentement a été vicié par des manœuvres dolosives, ajoutant qu'en toute occurrence, Monsieur Asli a manqué à son obligation de délivrance conforme.

Il reproche à la société Auto Pièces Occasion d'avoir omis de mentionner sur la carte grise que la vente intervenait pour destruction épave ou pièces et d'avoir manqué à ses obligations de professionnel.

Pour Monsieur Asli le jugement doit être infirmé et à titre subsidiaire la société Auto Pièces Occasion lui doit sa garantie.

Il fait valoir que l'action de Monsieur Lamy ne peut avoir pour fondement juridique que la garantie des vices cachés et que l'action qu'il a engagée est tardive donc irrecevable.

Il fait grief à l'appelante de l'avoir trompé sur l'état réel du véhicule puisqu'il n'a pas eu connaissance de la gravité de l'accident subi par ce dernier et ajoute que c'est donc en toute bonne foi qu'il l'a revendu après l'avoir réparé.

Il considère enfin injustifiéé la demande de dommages-intérêts de Monsieur Lamy.

Motifs :

Considérant qu'il résulte de l'expertise à laquelle Monsieur Lamy a soumis son véhicule et des autres pièces qu'il produit, que celui-ci a été accidenté, et qu'il est probable que la déformation qui en affecte la traverse de suspension avant et dont l'expert dit qu'elle rend le véhicule impropre à sa destination, procède de cet accident ;

Que néanmoins, s'il n'apparaît pas que le vendeur, Monsieur Asli, ait informé Monsieur Lamy de cet accident, il n'est pas non plus établi que l'absence d'accident subi par le véhicule ait été une condition déterminante de son engagement à contracter en sorte que l'action de ce dernier ne peut prospérer ni sur le dol, ni sur le défaut de conformité ;

Que ce qui est acquis en revanche c'est que le véhicule vendu présente de graves défauts, antérieurs à la vente puisque selon l'expert vraisemblablement consécutifs à l'accident, non décelables par un non-professionnel, et qui le rendent impropre à sa destination, en sorte qu'ils ne peuvent ressortir que de la garantie des vices cachés, à supposer même que les organes affectés aient été déclarés en bon état par le vendeur, étant ici observé que de surcroît il n'est pas démenti par les pièces du dossier que cette déclaration a pu être faite par ignorance ;

Que toutefois force est de constater que Monsieur Lamy n'est pas recevable à arguer de cette garantie, faute d'avoir respecté le bref délai imparti par l'article 1648 du Code civil dès lors que la découverte des vices remonte au 28 février 1992 (date des constatations de l'expert qu'il avait requis) et qu'il n'a engagé son action contre Monsieur Asli que par acte du 9 janvier 1995 soit près de trois ans plus tard ;

Considérant qu'à supposer que puisse être déduit du coût estimé des réparations nécessitées par l'état apparent du véhicule après l'accident, que celui-ci avait été suffisamment grave pour que les organes internes aient subi des dommages, force est de constater que le véhicule n'a fait l'objet d'aucune des procédures réglementées par les articles R. 294 et suivants du Code de la route, ou la Loi du 31 décembre 1993, relative aux véhicules économiquement irréparables et que la société Auto Pièces Occasion qui l'a acquis puis revendu en l'état sans omettre de signaler l'accident subi, n'apparaît pas être un spécialiste de la réparation mécanique puisque son activité ne relève que de la vente de véhicules pièces et accessoires automobiles ;

Que cela étant, lui est à tort reproché une part de responsabilité dans la remise en circulation du véhicule en cause.

Considérant que le jugement est en conséquence infirmé,

Qu'en raison de l'issue du litige, Monsieur Lamy est condamné aux entiers dépens,

Que l'équité n'appelle pas une application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Décision :

Par ces motifs : LA COUR; Infirme le jugement, Déclare Monsieur Lamy irrecevable en son action contre Monsieur Asli, Le déboute de ses demandes contre la société Auto Pièces Occasion, Condamne Monsieur Lamy aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile, Rejette les autres demandes.