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Décisions

CA Paris, 25e ch. A, 11 septembre 1997, n° 95-17675

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

DMC (SA)

Défendeur :

Tissus Scot (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard-Payen

Conseillers :

M. Faucher, Mme Deurbergue

Avoués :

SCP Cossec, SCP Faure-Arnaudy

Avocats :

Mes Devin, Malka.

T. com. Paris, 3e ch., du 3 mai 1995

3 mai 1995

LA COUR statue sur l'appel interjeté par la société DMC du jugement du Tribunal de commerce de Paris (3e chambre), prononcé le 3 mai 1995, qui l'a déboutée de sa demande de paiement de la somme de 68 718,13 F et qui, avant dire droit au fond sur sa demande de règlement de la somme de 40 380,46 F ainsi que sur les prétentions de la société Tissus Scot a sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert Wolf désigné pour rechercher les responsabilités quant à l'origine des défauts constatés sur le tissu de la qualité 2379.

Référence faite au jugement attaqué et aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, il suffit de rappeler les éléments suivants.

La société DMC a effectué deux livraisons de tissus à la société Tissus Scot qui s'est plaint de défauts. Des pourparlers ont été engagés, mais finalement, la société DMC a assigné sa cocontractante devant le Tribunal de commerce de Paris en paiement des sommes retenues par celle-ci sur le montant des deux factures correspondant aux livraisons.

Le Tribunal a estimé, pour la première livraison que la société DMC devait aux termes de l'accord conclu avec la société Tissus Scot, et sur lequel elle ne pouvait revenir, prendre en charge les frais de surteinture rendus nécessaires pour la commercialisation du produit.

Pour la seconde livraison, il a ordonné une expertise.

Appelante de cette décision, la société DMC fait valoir à titre principal que l'intimée fonde son refus de lui payer ses factures sur l'existence de vices cachés et que son action est forclose puisqu'elle n'a pas agi à bref délai.

Subsidiairement, elle soutient n'avoir jamais accepté de prendre en charge les frais de surteinture de la seconde livraison et avoir été informée tardivement que les tissus livrés en juillet 1992 présentaient des trous.

Elle impute les défauts de la première livraison à la société SVTA qui a réalisé la surteinture.

Elle prie en conséquence la cour de réformer le jugement déféré, de déclarer la société Tissus Scot irrecevable en son action, de la condamner à lui payer la somme de 109 195,41 F avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 février 1993, subsidiairement pour la seconde livraison de surseoir à statuer dans l'attente du jugement se prononçant à son sujet.

Elle demande enfin à la cour d'ordonner la capitalisation des intérêts et de condamner l'intimée à lui payer une indemnité de 15 000 F on vertu de l'article 700 du NCPC.

Intimée, la société Tissus Scot réplique à titre principal:

- que l'argumentation du bref délai est inopérante puisque le litige ne porte que sur la prise on charge des frais de teinture et que l'appelante a reconnu sa responsabilité au sujet des défauts constatés sur la première livraison,

- que pour la seconde livraison, son délai pour agir n'a pu courir qu'après l'échec des pourparlers et après la communication du rapport de contre-expertise demandée par l'appelante,

- qu'ensuite les relations commerciales qu'elles entretenaient, excluaient une procédure judiciaire en raison de l'importance de leurs échanges et de leur habitude de régler amiablement leurs litiges.

A titre subsidiaire, la société Tissus Scot soutient que la société DMC ne peut revenir sur son accord de prise en charge des frais de surteinture.

Elle prie donc la cour de confirmer le jugement déféré, de surseoir à statuer sur la seconde livraison dans l'attente du jugement se prononçant sur cette question.

Elle conclut enfin à la condamnation de la société DMC à lui payer une indemnité de 10 000 F en vertu de l'article 700 du NCPC.

Sur ce, la cour :

Considérant que la règle selon laquelle le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices cachés de la chose vendue vaut même si l'acheteur est lui-même un professionnel ;

Considérant qu'en l'espèce, le vendeur a reconnu la réalité des vices dont les tissus vendus étaient affectés puisqu'il affirme avoir consenti à son cocontractant dix avoirs représentant des bonifications égales à la valeur des tissus défectueux ; que cette reconnaissance de garantie lui interdit d'opposer à l'intimée une irrecevabilité tirée de ce qu'elle n'aurait pas agi dans le bref délai prescrit par l'article 1648 du Code civil ;

Considérant qu'il est établi par les correspondances échangées par les parties les 5 et 7 novembre 1991, que pour pouvoir commercialiser les tissus défectueux, les parties ont décidé de leur appliquer une surteinture ; que les défauts préexistant à cette opération, le teinturier qui a réalisé ce travail n'est pas responsable de leur apparition, contrairement à ce que soutient de manière illogique l'appelante ;

Considérant qu'il résulte des termes de l'article 1645 du Code civil que le vendeur qui connaissait les vices de la chose doit réparer les conséquences du dommage causé par ce vice ; que les frais de teinture exposés pour permettre la vente du produit sont une conséquence du dommage causé par les défauts des tissus ; qu'il s'en suit que la société DMC, qui avait initialement accepté de les prendre en charge, avant de changer d'avis deux jours plus tard, doit être déboutée de sa demande de paiement correspondant à leur coût ; que le jugement sera confirmé ;

Considérant que pour la seconde livraison les deux parties ont conclu au sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert et implicitement du jugement statuant sur ce point ; qu'il apparaît toutefois que le Tribunal de commerce de Paris a rendu sa décision le 25 avril 1997 ; que, la cour n'étant pas saisie dans le cadre de la présente instance d'un appel de cette décision, il ne peut être statué sur la partie du litige relative à la seconde livraison et qu'un sursis à statuer ne se justifie pas ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts formulée par l'appelante qui est déboutée de sa demande principale ;

Considérant qu'il n'est pas inéquitable que chaque partie conserve la charge de ses frais irrépétibles ;

Par ces motifs, Confirme le jugement déféré, Déboute les parties de leurs demandes, Condamne la société DMC aux dépens de première instance et d'appel, admet la SCP Faure et Arnaudy, avoué, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.