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Décisions

CA Paris, 21e ch. A, 5 mars 2003, n° 01-36880

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Api-Seplast (SA)

Défendeur :

Gautier

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Trebucq

Conseillers :

Mme Phytilis, M. Esperben

Avocats :

Mes Palermi, Zanotto.

Cons. prud'h. Bobigny, sect. encadr., du…

26 juillet 2001

Statuant sur l'appel régulièrement formé par la société Api-Seplast d'un jugement du Conseil de prud'hommes de Bobigny - section encadrement - en date du 26 juillet 2001, dans un litige l'opposant à Martine Gautier, et qui, sur la demande de cette dernière en paiement :

- de la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence,

- d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de ses débours (article 700 du nouveau Code de procédure civile),

a:

- condamné la société Api-Seplast à lui verser les sommes suivantes:

* 51 928 F soit 7 916,37 euro, à titre de contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence,

* 80 000 F soit 12 195,92 euro, à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive,

* 3 000 F soit 457,35 euro, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

- l'a déboutée du surplus de sa demande;

La société Api-Seplast, par conclusions visées par la greffière à l'audience, estimant que le licenciement de Martine Gautier repose sur une cause réelle et sérieuse, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en la déboutant de l'ensemble de ses demandes et en la condamnant à lui rembourser la somme de 7 218,59 euro qu'elle lui a versée au titre de l'exécution provisoire;

Martine Gautier, par conclusions visées par la greffière à l'audience, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris, sauf à porter le montant des dommages et intérêts pour rupture abusive à la somme de 23 782,05 euro, et à condamner également la société Api-Seplast à lui payer une somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Qu'elle sollicite également la condamnation de la société Api-Seplast à lui verser les intérêts légaux à compter de l'introduction de la demande;

Pour l'exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions qu'elles ont soutenues à l'audience;

Sur quoi, LA COUR :

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et des débats que Martine Gautier a été engagée verbalement le 2 mai 1973 en qualité de VRP exclusif par la société Api-Seplast qui vend des équipements de sécurité; que le contrat écrit n'a été signé que le 14 novembre 1977 ; qu'il prévoit que sa rémunération est composée d'un fixe mensuel et de commissions sur le chiffre d'affaires, calculées au taux de 2 %;

Que le 15 juillet 1998, Martine Gautier a été victime d'un accident du travail qui a entraîné des arrêts de travail successifs qui l'ont empêchée de reprendre son activité professionnelle; que le 20 avril 1999, son médecin traitant a estimé qu'elle était guérie depuis le 14 avril 1999 de son accident du travail mais qu'elle était encore malade ; qu'à ce titre, elle a ainsi bénéficié, sans discontinuer, de nouveaux arrêts de travail;

Que le 24 septembre 1999, elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement, fixé au 6 octobre, et le 8 octobre 1999, elle a été licenciée en ces termes:

"Depuis le 16 juillet 1998, vous avez cessé votre activité professionnelle pour raison médicale et nous avons reçu, sans interruption, des arrêts de travail pour maladie depuis le 4 mai 1999.

Dans ces conditions, votre clientèle n'est plus visitée par un professionnel de la vente de produits Api-Seplast depuis le 16 juillet 1998, puisque nous n'avons pas d'autre VRP en dehors de vous dans notre société.

Nous avons tenté de suppléer à votre absence en faisant prospecter votre secteur par un stagiaire à mi-temps, pendant plusieurs mois. Cependant, ce mode de prospection s'est révélé peu satisfaisant. En terme de qualité, une présence constance sur le terrain s'avère nécessaire.

L'entreprise ne peut plus continuer à fonctionner sans commercial à temps plein sur le terrain. En effet, pour se développer, elle doit sans cesse prospecter de nouveaux clients et assurer un relationnel constant auprès de sa clientèle actuelle, c'est pourquoi nous nous trouvons dans l'obligation de pourvoir à votre remplacement de manière définitive."

Considérant que l'article 11 du contrat de travail stipule :

"... Si la maladie entraîne une incapacité supérieure à six mois, la société Api-Seplast pourra constater la résiliation du contrat de Mademoiselle Martine Gautier pour cas de force majeure si Mademoiselle Martine Gautier ne pouvait reprendre sa prospection à la date qui lui aura préalablement été fixée par lettre recommandée. Il en sera de même lorsqu'au cours d'une période consécutive de 12 mois, Mademoiselle Martine Gautier aura été indisponible pour une durée supérieure à six mois en plusieurs fois";

Qu'il apparaît ainsi que la société Api-Seplast ne pouvait prendre l'initiative d'un licenciement qu'à l'expiration d'une période de six mois d'arrêt de travail, laquelle, en l'espèce, prenait effet le 14 avril 1999 et s'achevait le 14 octobre 1999;

Considérant que pour écarter l'application de cette disposition contractuelle, la société Api-Seplast soutient que cette clause est nulle car contraire à l'article L. 122-45 du Code du travail qui interdit le licenciement d'un salarié en raison de son état de santé ; qu'un tel moyen est inopérant car, s'agissant d'une clause de garantie d'emploi, édictée dans l'intérêt du salarié, seul celui-ci peut invoquer la nullité d'une telle disposition; qu'il suit de là que le licenciement litigieux, intervenu avant l'expiration de la période de garantie d'emploi, est dénué de cause réelle et sérieuse comme l'ont constaté les premiers juges qui, en allouant à Martine Gautier, à titre de dommages et intérêts, une somme de 12 195,92 euro ont fait, en regard des éléments du dossier, une exacte appréciation de son préjudice;

Considérant que l'article 20 du contrat de travail instaure une clause de non-concurrence d'une durée d'un an;

Considérant qu'aux termes de l'article 17 de la convention collective des VRP, l'employeur qui n'a pas valablement libéré le représentant de son obligation de non-concurrence doit lui verser une contrepartie pécuniaire mensuelle qui, en l'espèce, équivaut au tiers de la rémunération moyenne mensuelle des douze derniers mois;

Considérant que la notion de rémunération à laquelle fait référence cet article commande, puisque Martine Gautier s'est trouvée, de manière ininterrompue, en arrêt de travail depuis le 16 juillet 1998 et n'a donc perçu pendant cette période que des indemnités journalières, de retenir pour base de calcul la période des douze mois effectivement travaillés précédant cette date,soit celle du 16 juillet 1997 au 16 juillet 1998 ; que le jugement déféré qui a interprété en ce sens les dispositions de l'article 17 de la convention collective des VRP sera donc confirmé; qu'il suffit seulement de préciser que de la somme de 7 916,37 euro qui a été allouée de ce chef à Martine Gautier devront être déduites les sommes qui lui ont déjà été versées par la société Api-Seplast du mois de janvier 2000 au mois de janvier 2001, et que les intérêts légaux sur les sommes allouées courront à compter du prononcé du jugement déféré;

Considérant, enfin, que comme en première instance, les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile bénéficieront à Martine Gautier;

Par ces motifs : Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement déféré, Condamne la société Api-Seplast à payer à Martine Gautier une somme de 1 800 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Rejette toute prétention plus ample ou contraire, Condamne la société Api-Seplast aux dépens.