CA Colmar, ch. corr., 24 juin 2003, n° 02-00297
COLMAR
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Défendeur :
Kleinclaus, Pfeiffer
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jurd
Conseillers :
Mme Fratte, M. Laurain
Avocats :
Mes Richert, Huck.
Vu le jugement rendu le 06 décembre 2001 par le Tribunal correctionnel de Saverne qui, sur l'action publique a déclaré:
K Gauthier :
- non coupable de complicité de démarchage pour obtenir une commande de fournitures ou une prestation liée à un décès, le 12 juillet 2000, à Drulingen, infraction prévue par les articles L. 2223- 35 al. 2, L. 2223-33 du Code général des collectivités territoriales, Art. 121-6 et 121-7 du nouveau Code pénal et réprimée par l'article L. 2223-35 al. 2, al. 5 du Code général des collectivités territoriales, Art. 121-6 et 121-7 du nouveau Code pénal,
qui, en conséquence, l'a renvoyé des fins de la poursuite sans peine,
- coupable de complicité de démarchage pour obtenir une commande de fournitures ou une prestation liée à un décès, courant novembre 1999, à Drulingen, infraction prévue par les articles L. 2223-35 al. 2, L. 2223-33 du Code général des collectivités territoriales, Art. 121-6 et 121-7 du nouveau Code pénal et réprimée par l'article L. 2223-35 al. 2, al. 5 du Code général des collectivités territoriales, Art. 121-6 et 121-7 du nouveau Code pénal,
qui, en répression, l'a condamné à une amende de 30 000 F,
T Eric Rodolphe:
- non coupable de démarchage pour obtenir une commande de fournitures ou une prestation liée à un décès, le 12 juillet 2000, à Drulingen, infraction prévue par les articles L. 2223-35 al. 2, L. 2223-33 du Code général des collectivités territoriales et réprimée par l'article L. 2223-35 al. 2, al. 5 du Code général des collectivités territoriales,
qui, en conséquence, l'a renvoyé des fins de la poursuite sans peine,
- coupable de démarchage pour obtenir une commande de fournitures ou une prestation liée à un décès, courant novembre 1999, à Drulingen, infraction prévue par les articles L. 2223-35 al. 2, L. 2223-33 du Code général des collectivités territoriales et réprimée par l'article L. 2223-35 al. 2, al. 5 du Code général des collectivités territoriales,
qui, en répression, l'a condamné à une amende de 3 000 F, et qui, sur l'action civile:
- a condamné solidairement M. Eric T et M. Gauthier K à payer aux époux Pfeiffer Pierre la somme de un euro à titre de dommages-intérêts,
- a condamné solidairement M. Eric T et M. Gauthier K à payer aux époux Pfeiffer Pierre la somme de 4 000 F (609,8 euro) au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,
- a déclaré la présence de l'avocat de la partie civile effective et utile aux débats,
- a condamné le prévenu aux dépens de l'action civile ;
Vu les appels, interjetés contre ce jugement par: Monsieur T Eric, le 10 décembre 2001, Monsieur K Gauthier, le 10 décembre 2001, M. le Procureur de la République, le 10 décembre 2001, Madame Kleinclaus Violette, le 12 décembre 2001, Monsieur Pfeiffer Pierre, le 12 décembre 2001, Madame Kleinclaus Violette, le 17 décembre 2001, Monsieur Pfeiffer Pierre, le 17 décembre 2001 ;
LA COUR, après avoir à son audience publique du 16 mai 2003 sur le rapport de Madame Fratte, conseiller, accompli dans l'ordre légal les formalités prescrites par l'article 513 du Code de procédure pénale, les prévenus interrogés, le Ministère Public entendu, les prévenus ayant eu la parole en dernier, après avoir avisé les parties qu'un arrêt serait rendu ce jour 24 juin 2003, et après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué comme suit :
Sur l'action publique:
Sur les faits et leur qualification pénale:
Il résulte des éléments du dossier et des débats que M. Eric T, employé de la société Helmstetter (fabricant de tombes et monuments funéraires), s'est présenté fin novembre 1999 au domicile de M. et Mme. Pfeiffer pour leur proposer les services de la société, ayant appris par la presse le décès de leur fils;
Par la voie de l'interphone, Mme. Pfeiffer lui a clairement fait savoir qu'elle souhaitait qu'on la laisse tranquille;
Il est constant que le 12.7.2000, soit 8 mois plus tard, M. Eric T s'est à nouveau présenté au domicile des époux Pfeiffer aux fins de démarchage, ce qui suscita la plainte déposée le même jour par M. Pfeiffer Pierre auprès de la brigade de gendarmerie de Drulingen;
L'infraction reprochée est celle actuellement prévue et réprimée par l'article L. 2223-33 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), initialement article 13 de la loi n° 93-23 du 8 janvier 1993, et interdit les offres de service, à l'exception des formules de financement d'obsèques, à l'occasion ou en prévision d'obsèques, en vue d'obtenir ou de faire obtenir la commande de fournitures ou de prestations liées à un décès, ainsi que le démarchage, notamment à domicile;
Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, ce texte ne distingue pas, selon la nature de ces prestations, à savoir si elles relèvent ou non du service extérieur des pompes funèbres, et le fait que la "marbrerie funéraire" soit à l'instar d'autres prestations, exclue de la liste des "objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations exhumations, et crémations", ne signifie nullement que la prohibition légale ne la concerne pas, la réglementation des pompes funèbres ne concernant pas seulement leur service extérieur dont les contours sont définis par l'article L. 2223- 19 précité;
La raison d'être de la prohibition légale tend d'une part à respecter les sentiments des proches d'une personne dont le décès est imminent ou récent et, d'autre part, à interdire à quiconque de profiter de leur désarroi pour leur faire acheter un produit ou un service à des conditions qu'ils n'auraient pas acceptées en temps normal;
Or, en l'espèce, eu égard aux circonstances particulièrement tragiques du décès de leur fils, le deuil des époux Pfeiffer devait être respecté et le démarchage de M. T tel qu'il a été effectué en novembre 1999 (avec coup de sonnette, échange verbal et dépôt de publicité malgré demande contraire) tombe sous le coup du démarchage prohibé mais il en est de même des faits du 12.7.2000, date à laquelle M. T Eric a réitéré avec insistance l'offre de l'entreprise ;
En conséquence, si la confirmation du jugement entrepris s'impose pour les faits de démarchage irrégulier de novembre 1999, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en tant qu'il a relaxé T Eric pour les faits du 12.7.2000 et, statuant à nouveau, de le déclarer coupable de tous les faits visés à la prévention;
M. K Gauthier, reconnaissant que M. Eric T, VRP de la société Helmstetter dont il est pénalement responsable, a agi dans le cadre de son travail tant courant novembre 1999 qu'au mois de juillet 2000 et qu'il déclarait qu'il était informé du démarchage par ses salariés de familles dans la peine (après examen des journaux locaux) il y a lieu de confirmer sa culpabilité pour complicité de démarchage pour les faits de novembre 1999, mais de l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau, de le déclarer aussi complice des faits de démarchage du 12.7.2000;
Sur la peine:
Vu la personnalité des deux prévenus, lesquels n'ont jamais été condamnés, la nature du délit dont ils sont les auteurs et ses circonstances, la peine de 3 000 F, soit 450 euro prononcée à l'encontre de T Eric et celle de 30 000 F, soit 4 500 euro prononcée à l'encontre de M. K Gauthier méritent confirmation, étant adaptées au cas d'espèce et constituant des sanctions mesurées mais dissuasives ;
Sur l'action civile:
Vu l'ensemble du dossier, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions civiles, les premiers juges ayant justement fixé le préjudice moral subi par les époux Pfeiffer à la somme de un euro;
Il convient aussi de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'article 475-1 du Code de procédure pénale, et de condamner en outre solidairement Eric T et Gauthier K à payer aux époux Pfeiffer une somme de 500 euro en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Par ces motifs : Statuant publiquement, par arrêt contradictoire; Reçoit les appels comme réguliers en la forme; Au fond: Sur l'action publique: Confirme le jugement entrepris en tant qu'il a déclaré Eric T et K Gauthier coupables respectivement de démarchage irrégulier en novembre 1999, ainsi que de complicité dudit démarchage; L'infirme en tant qu'il les a relaxés pour les faits du 12.7.2000 et condamne d'une part T Eric et d'autre part Gauthier K respectivement pour des faits de démarchage irrégulier et de complicité dudit démarchage; Confirme le jugement entrepris sur les peines en précisant cependant qu'il s'agit de 450 euro pour T Eric et 4 500 euro pour K Gauthier; Sur l'action civile: Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions civiles, y compris l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Condamne en outre solidairement T Eric et K Gauthier à payer aux époux Pfeiffer une somme de 500 euro au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour la procédure d'appel ; Condamne chacun des prévenus aux frais de justice visés par l'article R. 93 du Code de procédure pénale ; Le tout par application des articles visés dans le corps de l'arrêt.