CJCE, 5e ch., 3 juin 1999, n° C-33/97
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Colim NV
Défendeur :
Bigg's Continent Noord NV
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
M. Puissochet
Avocat général :
M. Cosmas
Juges :
MM. Moitinho de Almeida, Gulmann, Edward, Sevón
Avocats :
Mes De Bauw, Wytinck, Morris
LA COUR (cinquième chambre),
1 Par jugement du 10 janvier 1997, parvenu à la Cour le 24 janvier suivant, le Rechtbank van Koophandel te Hasselt a posé, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de la directive 83-189-CEE du Conseil, du 28 mars 1983, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques (JO L 109, p. 8), telle que modifiée par la directive 88-182-CEE du Conseil, du 22 mars 1988 (JO L 81, p. 75, ci-après la "directive 83-189"), et des principes applicables à l'étiquetage des produits.
2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Colim NV (ci-après "Colim") à Bigg's Continent Noord NV (ci-après "Bigg's") au sujet de l'étiquetage de divers produits mis en vente dans leurs commerces respectifs.
La réglementation communautaire
3 La directive 83-189 prévoit une procédure d'information en vertu de laquelle les États membres sont obligés de notifier à la Commission tout projet de règle technique entrant dans le champ d'application de ladite directive.
4 L'article 1er de la directive 83-189 dispose:
"Au sens de la présente directive, on entend par:
1) spécification technique, la spécification qui figure dans un document définissant les caractéristiques requises d'un produit, telles que les niveaux de qualité ou de propriété d'emploi, la sécurité, les dimensions, y compris les prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la terminologie, les symboles, les essais et méthodes d'essai, l'emballage, le marquage et l'étiquetage ainsi que les méthodes et procédés de production pour les produits agricoles au titre de l'article 38 paragraphe 1 du traité, pour les produits destinés à l'alimentation humaine et animale ainsi que pour les médicaments tels que définis à l'article 1er de la directive 65-65-CEE, modifiée en dernier lieu par la directive 87-21-CEE;
...
5) règle technique, les spécifications techniques, y compris les dispositions administratives qui s'y appliquent, dont l'observation est obligatoire, de jure ou de facto, pour la commercialisation ou l'utilisation dans un État membre ou dans une partie importante de cet État, à l'exception de celles fixées par les autorités locales;
6) projet de règle technique, le texte d'une spécification technique, y compris des dispositions administratives, élaboré avec l'intention de l'établir ou de la faire finalement établir comme une règle technique, et se trouvant à un stade de préparation qui permet encore de lui apporter des amendements substantiels;
7) produit, tout produit de fabrication industrielle et tout produit agricole."
5 L'article 8, paragraphe 1, de la directive 83-189 impose aux États membres l'obligation de communiquer à la Commission tout projet de règle technique sauf s'il s'agit d'une simple transposition intégrale d'une norme internationale ou européenne et d'indiquer brièvement les raisons pour lesquelles l'établissement d'une telle règle technique est nécessaire.
6 Conformément à l'article 9, paragraphe 1, de la directive 83-189, les États membres reportent l'adoption d'un projet de règle technique de six mois à compter de la date de la communication visée à l'article 8, paragraphe 1, si la Commission ou un autre État membre émet, dans les trois mois qui suivent cette date, un avis circonstancié selon lequel la mesure envisagée doit être modifiée afin d'éliminer ou de limiter les entraves à la libre circulation des biens qui pourraient éventuellement en découler.
La réglementation nationale
7 L'article 13 de la wet van 14 juli 1991 betreffende de handelspraktijken en de voorlichting en bescherming van de consument (loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur, Belgisch Staatsblad du 29 août 1991, ci-après la "WHPC") dispose:
"Les mentions qui font l'objet de l'étiquetage et qui sont rendues obligatoires par la présente loi, par ses arrêtés d'exécution et par les arrêtés d'exécution visés à l'article 122, deuxième alinéa, les modes d'emploi et les bulletins de garantie sont au moins libellés dans la langue ou les langues de la région où les produits sont mis sur le marché.
Lorsqu'il est obligatoire, l'étiquetage doit être utilisé sous la forme et avec le contenu fixés par la réglementation.
Les mentions de l'étiquetage doivent être apparentes et lisibles et nettement distinctes de la publicité.
En aucun cas, l'étiquetage ne peut être présenté de manière telle qu'il puisse être confondu avec un certificat de qualité."
8 L'article 30 de la WHPC dispose:
"Au plus tard au moment de la conclusion de la vente, le vendeur doit apporter de bonne foi au consommateur les informations correctes et utiles relatives aux caractéristiques du produit ou du service et aux conditions de vente, compte tenu du besoin d'information exprimé par le consommateur et compte tenu de l'usage déclaré par le consommateur ou raisonnablement prévisible."
Le litige au principal
9 Il ressort du dossier que chacune des parties au principal exploite une grande surface dans la province néerlandophone du Limbourg, Colim à Houthalen-Helchteren et Bigg's, depuis 1996, à Kuringen-Hasselt. L'établissement principal du groupe dont Bigg's fait partie est situé à Waterloo, c'est-à-dire dans une autre région linguistique de la Belgique.
10 A la demande de la société Colruyt NV, dont Colim est une filiale, un huissier de justice a constaté, le 4 juillet 1996, que de nombreux produits offerts à la vente dans le magasin de Bigg's à Kuringen-Hasselt ne portaient, sur l'emballage ou sur l'étiquette, aucune mention en langue néerlandaise - langue de la région - qu'il s'agisse du mode d'emploi, de la composition ou de la dénomination de vente.
11 Lors d'un second passage, le 12 juillet suivant, le même huissier de justice a relevé que les mentions figurant sur les étiquettes d'une trentaine de produits n'étaient pas traduites dans la langue de la région, à l'exception du produit Zeugg Skipper Orange 1 L, sur lequel était apposé un autocollant portant une traduction néerlandaise de la nature du produit et de sa composition, ainsi qu'un renvoi en néerlandais aux colonnes d'information où des renseignements supplémentaires en néerlandais pouvaient être obtenus.
12 Selon la description de l'huissier, "les colonnes info fonctionnent de la manière suivante: le code barre figurant sur chaque produit devait être présenté devant un scanner, ce qui provoquait l'apparition sur un écran des informations concernant le produit en question", ces informations étant limitées au prix et à une traduction sommaire de la dénomination de vente du produit. L'huissier a précisé que les infos colonnes ne fournissaient aucun numéro de téléphone que le client aurait pu appeler pour obtenir des renseignements supplémentaires sur le produit.
13 Sur la base de ces constatations, Colim a, le 27 septembre 1996, introduit un recours en référé à l'encontre de Bigg's devant la juridiction de renvoi afin qu'il soit fait interdiction, sous astreinte, à la défenderesse au principal de vendre 48 produits dont la commercialisation dans les conditions décrites par l'huissier violait, notamment, les articles 13 et 30 de la WHPC.
14 Le 18 octobre 1996, un huissier de justice mandaté par Bigg's a constaté que Colim vendait également dans son magasin divers produits sans étiquetage en néerlandais.
15 Bigg's a alors formé une demande reconventionnelle devant la juridiction de renvoi, comportant des conclusions semblables à celles formulées par Colim.
16 Devant la juridiction de renvoi, Bigg's a fait valoir que les dispositions invoquées par Colim, notamment les articles 13 et 30 de la WHPC, étaient inapplicables parce qu'elles n'avaient pas été notifiées à la Commission, comme le prévoit la directive 83-189.
17 Il ressort, par ailleurs, de la réponse faite le 2 août 1996 par la Commission au conseil de Bigg's que la WHPC n'avait fait l'objet d'aucune notification, fût-elle partielle, au sens de la directive 83-189.
Les questions préjudicielles
18 La juridiction de renvoi relève que, dans la mesure où Colim se fonde sur la violation des articles 13 et 30 de la WHPC, une décision de la Cour sur la question de savoir si cette législation aurait dû être notifiée à la Commission conformément à la directive 83-189 lui est nécessaire pour rendre son jugement dans l'affaire au principal. Dans ces conditions, elle a décidé de surseoir à statuer pour ce qui concerne la violation des articles 13 et 30 de la WHPC et a soumis à la Cour les questions préjudicielles suivantes:
"1) Une disposition légale d'un État membre aux termes de laquelle
- les mentions qui font l'objet de l'étiquetage et qui sont rendues obligatoires par la loi nationale,
- le mode d'emploi et
- les certificats de garantie
doivent être libellés au moins dans la langue ou les langues de la région où les produits sont mis sur le marché et en application de laquelle les emballages des produits importés doivent être modifiés est-elle une règle technique au sens de la directive 83-189-CEE ?
2) a) Lorsqu'il existe une réglementation communautaire spécifique concernant les mentions qui doivent figurer sur un produit déterminé, un État membre peut-il exiger pour les produits importés que d'autres mentions figurent dans la langue de la région où ils sont vendus ou dans une langue aisément compréhensible pour le consommateur ?
b) En cas de réponse affirmative à la question qui précède, une telle exigence peut-elle porter sur toutes les mentions qui doivent figurer sur l'emballage ou bien ne peut-elle concerner que certaines mentions déterminées et lesquelles ?
c) Lorsque aucune réglementation communautaire spécifique n'existe pour certains produits, un État membre peut-il exiger que toutes les mentions ou certaines d'entre elles (et alors lesquelles) figurant sur l'emballage du produit importé soient libellées dans la langue de la région où les produits sont vendus ou dans une langue aisément comprise pour le consommateur?"
Sur la première question
19 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l'obligation de libeller les mentions faisant obligatoirement l'objet de l'étiquetage, le certificat de garantie et le mode d'emploi de produits au moins dans la ou les langues de la région dans laquelle ces produits sont mis sur le marché constitue une "règle technique" au sens de la directive 83-189 qui, à ce titre, aurait dû être notifiée à la Commission.
20 Les règles techniques ne devant être notifiées à la Commission que dans la mesure où l'obligation de notification prévue à l'article 8 de la directive 83-189 les vise, il convient d'abord de préciser l'étendue de cette obligation.
21 Le Gouvernement du Royaume-Uni soutient que ladite obligation ne s'applique qu'aux mesures nationales qui édictent des règles techniques nouvelles ou ajoutent aux règles techniques existantes. En effet, la directive 83-189 viserait à donner à la Commission et aux États membres la possibilité d'examiner les conséquences de nouvelles mesures envisagées sur le marché intérieur avant leur adoption par l'État membre concerné.
22 A cet égard, il convient de rappeler que l'objectif de la directive 83-189 est de protéger, par un contrôle préventif, la libre circulation des marchandises, qui est l'un des fondements de la Communauté (arrêt du 20 mars 1997, Bic Benelux, C-13-96, Rec. p. I-1753, point 19). Ce contrôle vise à éliminer ou limiter les entraves à la libre circulation des marchandises qui pourraient découler des règles techniques que les États membres se proposent d'arrêter. Or, ne saurait être considérée comme "projet" de règle technique au sens de l'article 1er, point 6, de la directive 83-189 ni, par conséquent, être soumise à l'obligation de notification une mesure nationale qui reproduit ou remplace, sans y ajouter des spécifications nouvelles ou supplémentaires, des règles techniques existantes et, si ces règles ont été arrêtées après l'entrée en vigueur de la directive 83-189, dûment notifiées à la Commission.
23 Il appartient au juge national d'apprécier si tel est le cas en l'espèce.
24 S'agissant de la notion de règle technique au sens de la directive 83-189, il convient de rappeler d'emblée que cette notion et, partant, le champ d'application de cette directive ont été étendus, d'abord par la directive 88-182, puis par la directive 94-10-CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 mars 1994, portant deuxième modification substantielle de la directive 83-189 (JO L 100, p. 30).
25 Il y a lieu, toutefois, de constater que, dans l'affaire au principal, la version de la directive 83-189 applicable est celle qui était en vigueur à l'époque à laquelle la notification aurait dû être faite si les dispositions de l'article 13 de la WHPC avaient constitué des règles techniques.
26 Ainsi, la WHPC ayant été adoptée le 14 juillet 1991, les exigences édictées à son article 13 doivent être examinées au regard de la directive 83-189, dans sa version modifiée par la directive 88-182.
27 Il y a lieu d'admettre qu'une réglementation d'un État membre subordonnant la commercialisation de produits, dans cet État, à l'emploi d'une ou plusieurs langues déterminées pour les mentions faisant obligatoirement l'objet de l'étiquetage, le mode d'emploi, voire le certificat de garantie, pourrait être considérée comme relevant des "prescriptions applicables au produit en ce qui concerne la terminologie, les symboles ... l'emballage, le marquage et l'étiquetage" au sens de l'article 1er, point 1, de la directive 83-189 et, par conséquent, constituer une règle technique au sens de cette directive.
28 Toutefois, il y a lieu de distinguer l'obligation de transmettre certaines informations sur un produit au consommateur, exécutée en apposant des mentions sur ledit produit ou en lui adjoignant des documents tels que le mode d'emploi et le certificat de garantie, de l'obligation de libeller ces informations dans une langue déterminée. A la différence de la première obligation qui concerne directement le produit, la seconde ne vise qu'à déterminer la langue dans laquelle la première doit être exécutée.
29 En effet, les informations que les opérateurs économiques ont l'obligation de communiquer à l'acheteur, voire au consommateur final, sauf lorsqu'elles peuvent être transmises efficacement par l'utilisation de pictogrammes ou de signes autres que des mots, sont dépourvues d'utilité pratique si elles ne sont pas libellées dans une langue compréhensible pour les personnes auxquelles elles sont destinées. L'obligation d'énoncer ces informations dans une langue déterminée ne constitue donc pas en soi une "règle technique" au sens de la directive 83-189, mais une règle accessoire qui est nécessaire à la réalisation de la transmission effective des informations.
30 Il convient donc de répondre à la première question que l'obligation de libeller les mentions faisant obligatoirement l'objet de l'étiquetage, le mode d'emploi et le certificat de garantie de produits au moins dans la ou les langues de la région dans laquelle ces produits sont mis sur le marché ne constitue pas une "règle technique" au sens de la directive 83-189.
Sur la seconde question
31 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si et dans quelle mesure les États membres peuvent exiger que les mentions figurant sur les produits importés soient libellées dans la langue de la région dans laquelle ces produits sont vendus ou dans une autre langue aisément compréhensible pour les consommateurs de cette région.
32 Le juge national envisage, dans sa question, deux situations distinctes selon qu'existe ou non une réglementation communautaire spécifique précisant, pour un produit déterminé, les mentions qui doivent figurer sur ce produit. Dans la première situation, la question est de savoir si et dans quelle mesure les États membres peuvent arrêter des exigences linguistiques pour les mentions figurant sur le produit qui ne sont pas prévues par la réglementation communautaire. Dans la seconde, dans laquelle il n'existe pas de réglementation communautaire spécifique, la question est de savoir si et dans quelle mesure les États membres sont en droit d'exiger que tout ou partie des mentions figurant sur le produit soit libellé dans la langue de la région dans laquelle il est vendu ou dans une autre langue aisément compréhensible pour les consommateurs de cette région.
33 A titre liminaire, il convient de relever qu'il y a, pour certaines catégories de produits, des directives communautaires prévoyant l'emploi de la ou des langues nationales afin d'assurer une meilleure protection du consommateur ou de la santé publique.
34 Lorsque ces directives réalisent une harmonisation complète des exigences linguistiques applicables à un produit déterminé, les États membres ne peuvent imposer des exigences linguistiques supplémentaires.
35 En revanche, lorsque l'harmonisation communautaire n'est que partielle ou fait entièrement défaut, les États membres restent, en principe, compétents pour imposer des exigences linguistiques supplémentaires.
36 Toutefois, des exigences linguistiques comme celles édictées par la réglementation nationale en cause au principal, même si elles ne sont pas des règles techniques au sens de la directive 83-189, constituent une entrave au commerce intracommunautaire dans la mesure où les produits provenant d'autres États membres doivent être revêtus d'étiquetages différents entraînant des frais supplémentaires de conditionnement (voir, en ce sens, arrêt du 9 août 1994, Meyhui, C-51-93, Rec. p. I-3879, point 13).
37 Par ailleurs, la nécessité de modifier l'emballage ou l'étiquette des produits importés exclut qu'il s'agisse de modalités de vente au sens de l'arrêt du 24 novembre 1993, Keck et Mithouard (C-267-91 et C-268-91, Rec. p. I-6097, point 16).
38 L'article 30 du traité CE (devenu, après modification, article 28 CE) prohibe les obstacles à la libre circulation des marchandises résultant de règles relatives aux conditions auxquelles doivent répondre ces marchandises (telles que celles qui concernent leur dénomination, leur forme, leurs dimensions, leur poids, leur composition, leur présentation, leur étiquetage ou leur conditionnement), même si ces règles sont indistinctement applicables à tous les produits nationaux et importés, dès lors que cette application ne peut être justifiée par un but d'intérêt général de nature à primer les exigences de la libre circulation des marchandises (voir, notamment, arrêt Meyhui, précité, point 10).
39 A cet égard, ainsi qu'il a été constaté au point 29 du présent arrêt, des informations adressées à l'acheteur ou au consommateur final, qui ne peuvent être transmises autrement que par des mots, sont dépourvues d'utilité pratique si elles ne sont pas libellées dans une langue qui leur est compréhensible.
40 Cependant, une mesure nationale prévoyant de telles exigences linguistiques doit, en tout état de cause, être proportionnée au but poursuivi (voir arrêt Meyhui, précité, point 10).
41 Il s'ensuit, d'une part, qu'une mesure imposant l'utilisation d'une langue aisément compréhensible pour les consommateurs ne doit pas être de nature à exclure l'emploi éventuel d'autres moyens assurant l'information des consommateurs, tels que l'usage de dessins, symboles ou pictogrammes. Il appartient au juge national d'apprécier, dans chaque cas d'espèce, si les éléments figurant sur l'étiquetage sont susceptibles d'informer pleinement les consommateurs (voir, en ce sens, arrêt du 12 octobre 1995, Piageme e.a., C-85-94, Rec. p. I-2955, point 28).
42 Il en résulte, d'autre part, qu'une telle mesure doit se limiter aux mentions rendues obligatoires par l'État membre concerné. L'accessibilité, dans la langue du consommateur, aux informations que cet État ne juge pas nécessaire de rendre obligatoire doit être laissée à l'appréciation de l'opérateur économique responsable de la commercialisation du produit, lequel pourra, s'il le souhaite, en assurer la traduction.
43 De plus, des exigences linguistiques comme celles édictées par la réglementation nationale en cause au principal, ne pouvant être justifiées par le but d'intérêt général que constitue la protection du consommateur que dans la mesure où elles sont indistinctement applicables, ne doivent pas non plus être appliquées uniquement aux produits importés, afin que les produits venant d'autres régions linguistiques de l'État membre concerné ne soient pas privilégiés par rapport aux produits en provenance d'autres États membres.
44 Il convient donc de répondre à la seconde question que, en l'absence d'harmonisation complète des exigences linguistiques applicables aux mentions figurant sur des produits importés, les États membres peuvent adopter des mesures nationales exigeant que ces mentions soient libellées dans la langue de la région dans laquelle les produits sont vendus ou dans une autre langue aisément compréhensible pour les consommateurs de cette région, à la condition que lesdites mesures nationales soient indistinctement applicables à tous les produits nationaux et importés et soient proportionnées au but de protection des consommateurs qu'elles poursuivent. Ces mesures nationales doivent, notamment, être limitées aux mentions auxquelles l'État membre attribue un caractère obligatoire et pour lesquelles l'emploi d'autres moyens que leur traduction ne permettrait pas d'assurer une information des consommateurs appropriée.
Sur les dépens
45 Les frais exposés par les Gouvernements français, néerlandais et du Royaume-Uni, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs,
LA COUR (cinquième chambre),
Statuant sur les questions à elle soumises par le Rechtbank van Koophandel te Hasselt, par jugement du 10 janvier 1997, dit pour droit:
1) L'obligation de libeller les mentions faisant obligatoirement l'objet de l'étiquetage, le mode d'emploi et le certificat de garantie de produits au moins dans la ou les langues de la région dans laquelle ces produits sont mis sur le marché ne constitue pas une "règle technique" au sens de la directive 83-189-CEE du Conseil, du 28 mars 1983, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques, telle que modifiée par la directive 88-182-CEE du Conseil, du 22 mars 1988.
2) En l'absence d'harmonisation complète des exigences linguistiques applicables aux mentions figurant sur des produits importés, les États membres peuvent adopter des mesures nationales exigeant que ces mentions soient libellées dans la langue de la région dans laquelle les produits sont vendus ou dans une autre langue aisément compréhensible pour les consommateurs de cette région, à la condition que lesdites mesures nationales soient indistinctement applicables à tous les produits nationaux et importés et soient proportionnées au but de protection des consommateurs qu'elles poursuivent. Ces mesures nationales doivent, notamment, être limitées aux mentions auxquelles l'État membre attribue un caractère obligatoire et pour lesquelles l'emploi d'autres moyens que leur traduction ne permettrait pas d'assurer une information des consommateurs appropriée.