CJCE, 22 avril 1997, n° C-310/95
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Road Air BV
Défendeur :
Inspecteur der Invoerrechten en Accijnzen
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rodríguez Iglesias
Présidents de chambre :
MM. Mancini, Moitinho de Almeida, Murray, Sevón
Avocat général :
M. Ruiz-Jarabo Colomer
Juges :
MM. Kakouris, Kapteyn, Gulmann, Edward, Puissochet, Hirsch, Jann, Ragnemalm, Wathelet, Schintgen
Avocats :
Mes Bos, Slotboom, Stuyck
LA COUR,
1 Par ordonnance du 21 septembre 1995, parvenue à la Cour le 29 septembre suivant, la Tariefcommissie a posé, en application de l'article 177 du traité CE, une question préjudicielle relative à l'interprétation des dispositions de la quatrième partie du traité CEE, devenu traité CE, concernant l'association des pays et territoires d'outre-mer (ci-après les "PTOM") à la Communauté, ainsi qu'à la validité et à l'interprétation des décisions 86-283-CEE du Conseil, du 30 juin 1986, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 175, p. 1, ci-après la "cinquième décision"), et 91-110-CEE du Conseil, du 27 février 1991, prorogeant la décision 86-283-CEE (JO L 58, p. 27).
2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'un recours formé par la société Road Air à l'encontre de la décision de l'Inspecteur der Invoerrechten en Accijnzen te Hoofddorp lui imposant le paiement d'un droit de douane de 54,40 HFL sur l'importation en provenance des Antilles néerlandaises de 7 kg de café en poudre originaire de Colombie.
3 L'article 227 du traité CEE définit le champ d'application territorial de celui-ci. Au paragraphe 3, il l'étend aux PTOM dont la liste figure à l'annexe IV et précise que ces pays et territoires "font l'objet du régime spécial d'association défini dans la quatrième partie (du) traité".
4 La quatrième partie du traité est intitulée "L'association des pays et territoires d'outre-mer".
5 Aux termes de l'article 131, premier alinéa, du traité CEE, "Les États membres conviennent d'associer à la Communauté les pays et territoires non européens entretenant avec la Belgique, le Danemark, la France, l'Italie, les Pays-Bas et le Royaume-Uni des relations particulières". Selon la même disposition, ces pays et territoires sont énumérés à l'annexe IV du traité.
6 A l'origine, les Antilles néerlandaises ne figuraient pas dans cette liste; elles y ont été insérées, conformément à l'article 227, paragraphe 3, du traité, par la convention 64-533-CEE, du 13 novembre 1962, portant révision du traité instituant la Communauté économique européenne en vue de rendre applicable aux Antilles néerlandaises le régime spécial d'association défini dans la quatrième partie de ce traité (JO 1964, 150, p. 2414), entrée en vigueur le 1er octobre 1964.
7 L'article 132 du traité dispose:
"L'association poursuit les objectifs ci-après.
1. Les États membres appliquent à leurs échanges commerciaux avec les pays et territoires le régime qu'ils s'accordent entre eux en vertu du présent traité.
..."
8 L'article 133 du traité ajoute:
"1. Les importations originaires des pays et territoires bénéficient à leur entrée dans les États membres de l'élimination totale des droits de douane qui intervient progressivement entre les États membres conformément aux dispositions du présent traité.
2. A l'entrée dans chaque pays et territoire, les droits de douane frappant les importations des États membres et des autres pays ou territoires sont progressivement supprimés conformément aux dispositions des articles 12, 13, 14, 15 et 17."
9 Selon l'article 134 du traité,
"Si le niveau des droits applicables aux marchandises en provenance d'un pays tiers à l'entrée dans un pays ou territoire est, compte tenu de l'application des dispositions de l'article 133, paragraphe 1, de nature à provoquer des détournements de trafic au détriment d'un des États membres, celui-ci peut demander à la Commission de proposer aux autres États membres les mesures nécessaires pour remédier à cette situation."
10 Enfin, l'article 136 du traité dispose:
"Pour une première période de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur du présent traité, une convention d'application annexée à ce traité fixe les modalités et la procédure de l'association entre les pays et territoires de la Communauté.
Avant l'expiration de la convention prévue à l'alinéa ci-dessus, le Conseil statuant à l'unanimité établit, à partir des réalisations acquises et sur la base des principes inscrits dans le présent traité, les dispositions à prévoir pour une nouvelle période."
11 Sur la base de l'article 136, second alinéa, du traité, le Conseil a adopté, le 25 février 1964, la décision 64-349-CEE, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne (JO 1964, 93, p. 1472). Celle-ci visait à remplacer, à compter du 1er juin 1964, date de l'entrée en vigueur de l'accord interne relatif au financement et à la gestion des aides de la Communauté, signé à Yaoundé le 20 juillet 1963, la convention d'application relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté, annexée au traité et conclue pour une durée de cinq ans.
12 Par la suite, les décisions 70-549-CEE, 76-568-CEE et 80-1186-CEE, respectivement des 29 septembre 1970 (JO L 282, p. 83), 29 juin 1976 (JO L 176, p. 8) et 16 décembre 1980 (JO L 361, p. 1), relatives à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne, ont été adoptées par le Conseil.
13 Enfin, le 30 juin 1986, le Conseil a adopté la cinquième décision, qui, selon son article 183, était applicable jusqu'au 28 février 1990. Elle a toutefois été prorogée jusqu'au 30 juin 1991 par l'article 1er de la décision 91-110.
14 L'article 70, paragraphe 1, de la cinquième décision est ainsi rédigé:
"Les produits originaires des pays et territoires sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption de droits de douane et de taxes d'effet équivalent."
15 Les "produits originaires des pays et territoires" sont définis à l'article 1er, paragraphe 1, sous b), de l'annexe II de la cinquième décision dans les termes suivants:
"1) les produits entièrement obtenus dans un ou plusieurs pays ou territoires;
2) les produits obtenus dans un ou plusieurs pays ou territoires et dans la fabrication desquels sont entrés des produits autres que ceux entièrement obtenus dans les pays et territoires à condition que lesdits produits aient fait l'objet d'ouvraisons ou transformations suffisantes au sens de l'article 3."
16 Le 25 juillet 1991, le Conseil a adopté la décision 91-482-CEE relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 263, p. 1, ci-après la "sixième décision"), laquelle est entrée en vigueur le 20 septembre 1991. Selon son article 240, paragraphe 1, elle est applicable pour une période de dix ans à compter du 1er mars 1990.
17 L'article 101 de cette décision dispose:
"1. Les produits originaires des PTOM sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption de droits de douane et de taxes d'effet équivalent.
2. Les produits non originaires des PTOM se trouvant en libre pratique dans un PTOM et réexportés en l'état vers la Communauté sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption de droits de douane et de taxes d'effet équivalent à condition qu'ils:
- aient acquitté, dans le PTOM concerné, des droits de douane ou taxes d'effet équivalent d'un niveau égal ou supérieur aux droits de douane applicables dans la Communauté à l'importation de ces mêmes produits originaires de pays tiers bénéficiant de la clause de la nation la plus favorisée,
- n'aient pas fait l'objet d'exemption ou de restitution, totale ou partielle, de droits de douane ou de taxe d'effet équivalent,
- soient accompagnés d'un certificat d'exportation.
..."
18 Le 24 juin 1991, Road Air a déclaré aux autorités douanières néerlandaises l'importation de 7 kg d'extrait de café en poudre originaire de Colombie qui avait été mis en libre pratique aux Antilles néerlandaises.
19 Le 25 juin 1991, la marchandise a été classée sous la sous-position 2101 10 11 du tarif douanier commun, à laquelle s'appliquait un droit de douane s'élevant à 18 % de la valeur en douane. Le montant s'élevait donc à 54,40 HFL.
20 Road Air a contesté cette imposition au motif que, en vertu de l'article 132, paragraphe 1, du traité, les États membres ne pouvaient prélever des droits de douane sur des marchandises qui, tout en étant originaires d'un pays tiers, ont été régulièrement mises en libre pratique dans les PTOM.
21 L'Inspecteur der Invoerrechten en Accijnzen te Hoofddorp a rejeté cette réclamation, considérant pour sa part que les marchandises qui profitent de la suppression des droits de douane sont exclusivement celles qui remplissent les conditions d'origine.
22 Estimant que la solution du litige nécessitait l'interprétation de la quatrième partie du traité, la Tariefcommissie a sursis à statuer et a posé à la Cour la question préjudicielle suivante:
"La quatrième partie du traité CEE et, plus particulièrement, les articles 132, paragraphe 1, 133, paragraphe 1, et 134 doivent-ils être interprétés en ce sens que, le 25 juin 1991, aucun droit de douane ne pouvait être prélevé lors de l'importation dans la Communauté de marchandises qui se trouvaient en libre pratique dans un pays faisant partie des pays et territoires d'outre-mer, que ces marchandises soient originaires des pays ou territoires d'outre-mer ou de pays tiers et donc par dérogation aux décisions 86-283-CEE et 91-110-CEE du Conseil?"
23 Afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, il convient de s'interroger, en premier lieu, sur l'applicabilité à l'extrait de café originaire de Colombie du règlement (CEE) n° 3835-90 du Conseil, du 20 décembre 1990, modifiant les règlements (CEE) n° 3831-90, (CEE) n° 3832-90 et (CEE) n° 3833-90 en ce qui concerne le régime de préférences tarifaires généralisées appliqué à certains produits originaires de la Bolivie, de la Colombie, de l'Équateur et du Pérou (JO L 370, p. 126), d'examiner, en second lieu, l'article 133, paragraphe 1, du traité, en troisième lieu, l'article 136 du traité et, en dernier lieu, l'applicabilité des cinquième et sixième décisions du Conseil.
Sur l'applicabilité du règlement n° 3835-90
24 Dans ses observations écrites, le Gouvernement français fait valoir que le litige au principal relève du règlement n° 3835-90.
25 L'article 3 de ce règlement prévoit, en son paragraphe 1, que les droits du tarif douanier commun sont totalement suspendus, entre le 1er janvier et le 31 décembre 1991, pour les produits originaires des quatre États concernés qui sont énumérés à l'annexe de ce règlement.
26 Or, dans cette annexe figurent les préparations alimentaires diverses classées dans l'ex-chapitre 21 du code NC, à l'exclusion de sirops de sucre relevant des numéros de code 2106 90 30, 2106 90 51, 2106 90 55 et 2106 90 59.
27 Il en résulte que, en vertu de ce règlement, aucun droit de douane ne pouvait être prélevé sur l'importation, le 25 juin 1991, aux Pays-Bas de café en poudre originaire de Colombie.
28 Il incombe à la juridiction de renvoi d'examiner, dans le cadre des règles procédurales nationales, si le litige au principal peut être réglé par l'application du règlement n° 3835-90.
Sur l'interprétation de l'article 133, paragraphe 1, du traité
29 Road Air estime que l'article 133, paragraphe 1, du traité n'a pas seulement trait aux produits originaires des PTOM, mais qu'il concerne également les produits des pays tiers qui y sont mis en libre pratique.
30 Road Air se fonde, tout d'abord, sur l'article 132, paragraphe 1, du traité, lequel imposerait aux États membres l'obligation d'appliquer à leurs échanges commerciaux avec les PTOM le régime qu'ils s'accordent entre eux en vertu du traité. Elle se réfère ensuite à la version allemande de l'article 133, paragraphe 1, du traité qui utilise les termes "Waren aus den Ländern und Hoheitsgebieten..." (marchandises en provenance des PTOM) et, enfin, invoque l'économie de l'article 134 qui, selon elle, serait vidé de son sens si seuls les produits originaires des PTOM pouvaient bénéficier du traitement préférentiel dans les États membres.
31 A cet égard, il convient de relever que les versions néerlandaise, anglaise, danoise, irlandaise, hellénique, espagnole, finnoise et suédoise emploient des termes se référant explicitement aux "produits" ou aux "marchandises": "goederen van oorsprong uit...", "goods originating in...", "varer med oprindelse i...", "earraí de thionscnamh na...", "ôùí êáôáãïìÝíùí åìðïñåõìÜôùí áðü...", "mercancías originarias de...", "peräisin... tavaroiden...", "varor med ursprung i...". Il s'ensuit que, selon ces versions, l'article 133, paragraphe 1, ne peut s'appliquer qu'aux produits ayant leur origine dans un PTOM.
32 D'autres versions linguistiques (les versions française, italienne et portugaise) utilisent des termes plus vagues: "importations originaires des...", "importazioni originarie dei...", "importações originárias dos...". Ces versions sont à l'évidence susceptibles d'une interprétation compatible avec l'interprétation précédente. Enfin, la version allemande "Waren aus..." évoque les "marchandises", tout comme les versions linguistiques visées au paragraphe précédent, sans pour autant utiliser un terme exprimant directement l'idée d'origine. Quand bien même elle comporterait une ambiguïté à cet égard, elle doit être interprétée dans un sens conforme aux autres versions linguistiques.
33 C'est, par ailleurs, sur la base de cette interprétation que, dans les six décisions adoptées par le Conseil en vertu de l'article 136 du traité, seuls les produits originaires des PTOM ont été exemptés des droits de douane et des taxes d'effet équivalent. De même, la convention 64-533, qui a rendu applicable aux Antilles néerlandaises le régime spécial d'association des PTOM, a annexé le protocole 64-534-CEE relatif aux importations dans la Communauté économique européenne de produits pétroliers raffinés aux Antilles néerlandaises (JO 1964, 150, p. 2416), selon lequel le régime spécial prévu pour ces produits diffère toujours du régime applicable aux mêmes produits originaires des pays tiers.
34 Il convient enfin de souligner que l'interprétation préconisée par Road Air obligerait à reconnaître aux PTOM un régime analogue à celui que les États membres s'accordent entre eux de façon progressive, en vertu du traité, non seulement quant aux importations de produits originaires des PTOM, mais également quant aux produits qui y sont importés, de sorte que les PTOM feraient partie de la zone douanière commune, ce qui va bien au-delà de ce qui a été prévu par le traité.
35 Il s'ensuit que l'article 133, paragraphe 1, ne vise pas les importations de marchandises qui ne sont pas originaires des PTOM mais qui s'y trouvent en libre pratique et que, en outre, la quatrième partie du traité n'a pas prévu de régime spécifique pour de tels produits.
36 Contrairement à ce qu'affirme Road Air, cette interprétation n'a pas pour effet de priver l'article 134 du traité de toute signification. Il suffit, à cet égard, de constater que, après l'entrée en vigueur du traité et jusqu'à la réalisation de la zone douanière commune, certains produits originaires de pays tiers pouvaient être soumis à des droits de douane réduits ou exemptés des droits dans un PTOM, puis dans l'État membre avec lequel ce PTOM entretenait des relations particulières. Cette situation pouvait donner lieu à des détournements de trafic au détriment d'un des États membres qui aurait pu alors saisir la Commission au titre de l'article 134.
Sur l'interprétation de l'article 136 du traité
37 L'article 136 du traité prévoit, dans son premier alinéa, "une première période de cinq ans" pour laquelle une convention d'application annexée au traité fixe les modalités et la procédure de l'association des PTOM et, dans son second alinéa, "une nouvelle période" pour laquelle le Conseil établit de nouvelles dispositions à partir des réalisations acquises et sur la base des principes inscrits dans le traité.
38 Road Air estime que l'article 136, second alinéa, n'habilitait le Conseil à adopter qu'une seule décision relative à l'association avec les PTOM après la convention d'application annexée au traité, précitée. La pratique du Conseil consistant à adopter, au-delà du terme de la décision prise à l'expiration de cette convention d'application, plusieurs décisions successives serait donc contraire au traité.
39 Il y a lieu de relever que, si l'article 136, second alinéa, ne précise pas la durée de la nouvelle période pour laquelle le Conseil peut adopter des dispositions nécessaires à la réalisation des objectifs de l'association, il le dote d'un large pouvoir discrétionnaire à cet égard.
40 L'association des PTOM doit être réalisée selon un processus dynamique et progressif qui peut nécessiter l'adoption de plusieurs dispositions aux fins de réaliser l'ensemble des objectifs énoncés à l'article 132 du traité, tenant compte des réalisations acquises grâce aux décisions antérieures du Conseil.
41 Compte tenu de ces objectifs, il y a lieu d'interpréter l'article 136, second alinéa, comme prévoyant non pas une seule "nouvelle période" pour laquelle le Conseil est habilité à prendre des dispositions nécessaires pour réaliser les objectifs de l'association, mais l'instauration d'un régime selon lequel le Conseil peut adopter différentes décisions successives contenant chacune des dispositions "pour une nouvelle période".
42 Les diverses décisions adoptées par le Conseil en application de cette disposition étant par conséquent valides, il convient ensuite de déterminer quelle était la décision applicable à l'époque des faits au principal, lesquels ont eu lieu le 25 juin 1991, et quel était le régime prévu pour les marchandises originaires des pays tiers se trouvant en libre pratique dans les PTOM.
Sur l'applicabilité des cinquième et sixième décisions
43 La période de 16 mois comprise entre le 1er mars 1990 et le 30 juin 1991 a été, à compter du 20 septembre 1991, couverte tant par la cinquième décision que par la sixième, chacune prévoyant un régime différent en ce qui concerne les marchandises originaires des pays tiers qui se trouvent en libre pratique dans un PTOM.
44 En effet, la cinquième décision, qui avait été prorogée jusqu'au 30 juin 1991 par l'article 1er de la décision 91-110, ne prévoyait d'exemption des droits de douane et des taxes à l'importation dans la Communauté que pour les produits originaires des PTOM (article 70), définis à l'annexe II de cette décision comme les produits qui y ont été entièrement obtenus ou qui y sont suffisamment transformés, à l'exclusion des produits originaires de pays tiers.
45 Quant à la sixième décision, entrée en vigueur le 20 septembre 1991, elle est applicable, en vertu de son article 240, pour une période de dix ans à compter du 1er mars 1990. Or, elle contient un régime plus favorable que celui prévu par la cinquième décision pour les produits originaires des pays tiers se trouvant en libre pratique dans un PTOM. En effet, son article 101, paragraphe 2, prévoit une exemption des droits de douane pour un certain nombre de ces produits à condition, notamment, que des droits de douane ou taxes d'effet équivalent d'un niveau égal ou supérieur aux droits de douane applicables dans la Communauté à l'importation des mêmes produits aient été acquittés dans les PTOM en question et n'aient pas fait l'objet d'une exemption ou d'une restitution totale ou partielle.
46 Il en résulte que les importations en cause, effectuées le 25 juin 1991, ont été soumises, à partir du 20 septembre 1991, à la sixième décision, laquelle était rétroactivement applicable aux opérations effectuées depuis le 1er mars 1990.
47 Comme l'Avocat général l'a observé aux points 24 à 43 de ses conclusions, une telle application rétroactive peut être admise dans la mesure où elle est susceptible d'entraîner, pour l'intéressé, une situation juridique plus favorable et dans la mesure où sa confiance légitime est dûment respectée.
48 Il y a lieu de considérer à cet égard que les États membres doivent imputer sur les droits de douane à acquitter dans la Communauté les droits de douane ou les taxes d'effet équivalent déjà acquittés dans les PTOM.
49 Il convient donc de répondre à la question de la juridiction de renvoi que les dispositions de la quatrième partie du traité et, plus particulièrement, les articles 132, paragraphe 1, 133, paragraphe 1, et 134 doivent être interprétés en ce sens que, le 25 juin 1991, des droits de douane pouvaient être prélevés lors de l'importation dans la Communauté de marchandises originaires de pays tiers qui se trouvaient en libre pratique dans un PTOM, dans la mesure où, conformément à l'article 101 de la sixième décision, les droits acquittés dans le PTOM en question étaient inférieurs aux droits applicables dans la Communauté.
Sur les dépens
50 Les frais exposés par les Gouvernements néerlandais et français, ainsi que par le Conseil de l'Union européenne et la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs,
LA COUR
Statuant sur la question à elle soumise par la Tariefcommissie, par ordonnance du 21 septembre 1995, dit pour droit:
Les dispositions de la quatrième partie du traité CE et, plus particulièrement, les articles 132, paragraphe 1, 133, paragraphe 1, et 134 doivent être interprétés en ce sens que, le 25 juin 1991, des droits de douane pouvaient être prélevés lors de l'importation dans la Communauté de marchandises originaires de pays tiers qui se trouvaient en libre pratique dans un pays faisant partie des pays et territoires d'outre-mer, dans la mesure où, conformément à l'article 101 de la décision 91-482-CEE du Conseil, du 25 juillet 1991, relative à l'association des pays et territoires d'outre-mer à la CEE, les droits acquittés dans le pays et territoire d'outre-mer en question étaient inférieurs aux droits applicables dans la Communauté.