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Décisions

Cass. 3e civ., 31 mars 2005, n° 03-20.096

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Les Cottages de Guermantes (SCA), Boissières de Guermantes (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Paloque

Avocat général :

M. Cédras

Avocats :

Me de Nervo, SCP Defrenois et Levis, SCP Gatineau

Paris, 19e ch. A, du 24 sept. 2003

24 septembre 2003

LA COUR : - Met hors de cause la SCP Gueroult-X-Martin- Maulen-Bontoux et M. X ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 septembre 2003), que, suivant acte reçu par M. X, notaire, un bail à construction a été passé entre la Société civile d'attribution les Cottages de Guermantes (la SCA) et la Société civile immobilière Boissières de Guermantes (la SCI), pour une durée de vingt-cinq ans, en vue de l'édification par le preneur, sur diverses parcelles de terre, de dix-huit maisons individuelles à usage d'habitation ; qu'il était prévu qu'au terme du bail, les constructions deviendraient la propriété du bailleur, sans indemnité au profit du preneur ; que la SCI a demandé l'annulation du bail ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de rejeter cette demande, alors, selon le moyen : 1°) que l'attribution de l'usage des biens sociaux aux associés étant de l'essence de la société d'attribution, celle-ci ne dispose elle-même d'aucun droit de jouissance et ne peut valablement conclure de bail à construction portant sur l'immeuble à construire ; qu'en affirmant que le bail à construction était un moyen de remplir l'objet social de la société d'attribution, la cour d'appel a violé l'article L. 212-1 du Code de la construction et de l'habitation ; 2°) que l'erreur sur la rentabilité ou viabilité économique d'un contrat constitue une erreur sur la substance qui entraîne la nullité du contrat dès lors qu'aucun aléa n'a été accepté par les parties et que l'erreur est excusable ; qu'en se bornant à affirmer que l'appréciation erronée de la rentabilité économique de l'opération n'est pas constitutive d'un vice du consentement, sans rechercher si les parties avaient accepté un aléa ou si l'erreur commise était inexcusable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1110 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé, d'une part, que la construction d'immeubles étant dans l'objet d'une société d'attribution, le recours à un bail à construction n'était pas contraire à cet objet et était même un moyen de le remplir, et, d'autre part, retenu, à bon droit, que l'appréciation erronée de la rentabilité économique de l'opération n'était pas constitutive d'une erreur sur la substance de nature à vicier le consentement de la SCI à qui il appartenait d'apprécier la valeur économique et les obligations qu'elle souscrivait, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais, sur le deuxième moyen : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour condamner la SCI au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la présente action a été engagée après l'échec d'une première procédure tendant aux mêmes fins, dont la SCI a été déboutée ; qu'en statuant ainsi, alors que, dans cette précédente procédure, la demande de la SCI tendant à l'annulation du contrat de bail à construction avait été déclarée irrecevable comme nouvelle et que les deux actions ne tendaient donc pas aux mêmes fins, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

Et, sur le troisième moyen : - Vu l'article 1382 du Code civil ; - Attendu que pour condamner la SCI au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, l'arrêt retient que l'appel qui ne fait que reprendre des moyens que les premiers juges ont clairement et de façon motivée rejetés, apparaît guidé par la mauvaise foi ; qu'en statuant par de tels motifs, qui ne suffisent pas à établir le caractère abusif de la procédure intentée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en ce que, d'une part, il confirme le jugement entrepris en ce qu'il condamne la SCI Boissières de Guermantes à payer à la SCA Cottages de Guermantes la somme de 2 000 euro pour procédure abusive, et, d'autre part, en ce qu'il condamne la SCI Boissières de Guermantes à payer à la SCA Cottages de Guermantes la somme de 2 000 euro pour procédure abusive, l'arrêt rendu le 24 septembre 2003, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Orléans.