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Décisions

CJCE, 20 février 1975, n° 12-74

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Commission des Communautés européennes

Défendeur :

République fédérale d'Allemagne

CJCE n° 12-74

20 février 1975

LA COUR,

1. Attendu que, par recours du 21 février 1974, la Commission, en application de l'article 169 du traité instituant la Communauté économique européenne, vise à faire reconnaître qu'en réservant les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" à la production nationale et la dénomination "Praedikatssekt" à des vins produits en Allemagne à partir d'une proportion minimale déterminée de raisins allemands, la République fédérale d'Allemagne aurait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des dispositions du traité, notamment quant à la libre circulation des marchandises ;

2. Attendu qu'aux termes du paragraphe 26 de la loi vinicole allemande du 14 juillet 1971 (Bundesgesetzblatt 1971, I, p. 893) et des paragraphes 3 et 8 du règlement d'application sur les vins mousseux et les eaux-de-vie de vin du 15 juillet 1971 (Bundesgesetzblatt 1971, I, p. 939) ci-après dénommés "législation vinicole", la dénomination "Sekt" ne peut designer qu'un vin mousseux allemand répondant à certaines conditions de qualité et ne peut s'appliquer à des vins étrangers que si l'allemand est langue officielle dans l'ensemble du pays de production ;

Qu'en vertu de ces mêmes dispositions, la dénomination "Praedikatssekt" ne peut designer qu'un "Sekt" contenant au moins 60 % de raisins allemands ;

Qu'en outre, selon le paragraphe 44 de la loi précitée, la dénomination " Weinbrand " ne peut être utilisée que pour une production nationale ayant droit à la dénomination "eau-de-vie de vin de qualité" et, pour une production étrangère, que si l'allemand est langue officielle dans l'ensemble du pays de production ;

Qu'enfin, les vins mousseux et les eaux-de-vie de vin non-nationaux autres que ceux produits dans les pays où l'allemand est langue officielle sont, en principe, astreints aux dénominations "Schaumwein" ou "Qualitaetsschaumwein", "Branntwein Aus Wein" ou "Qualitaetsbranntwein Aus Wein" ;

3. Attendu que la Commission soutient que les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" sont des dénominations génériques que le législateur allemand aurait essayé de transformer en indications de provenance indirectes par le truchement d'un acte législatif ;

Que la dénomination "Praedikatssekt" ne serait pas comprise par les milieux intéressés et le consommateur allemand comme désignant un vin contenant une proportion minimale déterminée de raisins allemands, mais comme une qualité particulière de "Sekt" ;

Qu'en réservant les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" aux produits nationaux et la dénomination "Praedikatssekt" au "Sekt" qui contient une proportion minimale déterminée de raisins allemands, alors que les produits étrangers seraient astreints à utiliser sur le marché allemand des dénominations moins appréciées ou inconnues du consommateur, la législation vinicole favoriserait la production nationale au détriment des produits étrangers et comporterait ainsi des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives, contraires aux impératifs de l'article 30 du traité et, en ce qui concerne le "Sekt" et le "Praedikatssekt", à l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement n° 816-70 du Conseil du 18 avril 1970 (JO 1970, n° L 99) :

Que, par ailleurs, les mesures litigieuses, n'étant pas indispensables pour protéger les producteurs contre la concurrence déloyale et les consommateurs contre la fraude portant sur la provenance des produits, ne se justifieraient pas en vertu de l'article 36 du traité ;

4. Attendu que la République fédérale fait valoir, à titre principal, que le législateur n'aurait pas innové, par rapport à la situation de fait existant avant l'entrée en vigueur de la législation vinicole, mais se serait borné à consacrer, sur le plan normatif, l'opinion des milieux économiques intéressés et du consommateur allemands, pour lesquels les dénominations litigieuses désigneraient des produits nationaux ;

Que, de ce fait, les dispositions de la législation vinicole concernant le "Sekt" et le "Weinbrand" relèveraient du régime des indications de provenance indirectes et ne sauraient dès lors, aux termes de l'article 2, paragraphe 3s), de la directive 70-50-CEE de la Commission du 22 décembre 1969 (JO 1969, n° L 13, p. 29), être qualifiées de mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives ;

Qu'en outre, la dénomination "Praedikatssekt" désignerait un "Sekt" dont la quantité minimale déterminée de raisins allemands utilisés pour sa fabrication accentuerait le bouquet typiquement allemand ;

5. Attendu que le Marché commun est fondé sur la liberté de circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté ;

Que pour assurer cette liberté, le traité interdit, notamment par ses articles 12 et 31, l'introduction entre les Etats membres de mesures nouvelles ayant pour effet d'entraver directement ou indirectement les échanges à l'intérieur de la Communauté et qui ne soient pas justifiées en vertu de l'article 36 ;

Que, plus spécialement pour le "Sekt" et le "Praedikatssekt", depuis l'entrée en vigueur du règlement n° 816-70, une règlementation relative aux conditions du marché de ces produits doit se situer dans un cadre communautaire ;

Que la législation vinicole adoptée en 1971, après l'entrée en vigueur dudit règlement, peut affecter les conditions de l'offre des produits qu'elle vise sur le marché allemand ;

Que c'est au vu des interdictions tant du traité que du règlement n° 816-70, qu'il y a lieu d'examiner si, en adoptant les dispositions en cause, la République fédérale d'Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité ;

Qu'à ces fins il échet d'examiner tout d'abord la situation faite aux dénominations "Sekt" et "Weinbrand" ;

6. Attendu que la directive 70-50-CEE, fondée sur les dispositions de l'article 33, paragraphe 7, du traité et ayant pour objet, aux termes de son article 1, l'élimination des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation existant à la date d'entrée en vigueur du traité, énumère, dans son article 2, paragraphe 3, les mesures à considérer comme interdites au sens des paragraphes précédents et mentionne, sous s), celles qui "réservent aux seuls produits nationaux des dénominations ne constituant pas des appellations d'origine ou des indications de provenance" ;

7. Attendu que les appellations d'origine et les indications de provenance visées par ladite directive, quels que soient les éléments qui peuvent les distinguer, désignent au moins, dans tous les cas, un produit provenant d'une zone géographique déterminée ;

Que, dans la mesure où ces dénominations sont juridiquement protégées, elles doivent satisfaire aux objectifs de cette protection, notamment à la nécessité d'assurer non seulement la sauvegarde des intérêts des producteurs intéressés contre la concurrence déloyale, mais aussi celle des consommateurs contre les indications susceptibles de les induire en erreur ;

Que ces dénominations ne remplissent leur fonction spécifique que si le produit qu'elles désignent possède effectivement des qualités et des caractères dûs à la localisation géographique de sa provenance ;

Qu'en ce qui concerne plus spécialement les indications de provenance, la localisation géographique de l'origine d'un produit doit imprimer à celui-ci une qualité et des caractères spécifiques de nature à l'individualiser ;

8. Attendu que la législation vinicole allemande prévoit que les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" désignent des produits originaires de la République fédérale d'Allemagne ou provenant d'autres pays sur l'ensemble du territoire desquels l'allemand est langue officielle ;

Qu'une zone de provenance définie en fonction de l'étendue du territoire national ou d'un critère linguistique ne saurait suffire à constituer un milieu géographique, au sens précité, apte à justifier une indication de provenance, d'autant plus que les produits en question peuvent être fabriqués à partir de raisins de provenance indéterminée ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la zone de provenance visée par la législation vinicole ne présente pas des facteurs naturels homogènes qui la délimitent par rapport aux zones limitrophes, les propriétés naturelles des produits de base utilisés dans la fabrication des produits litigieux ne correspondant pas nécessairement au trace de la frontière nationale ;

Que, cependant, le Gouvernement allemand soutient que les produits couverts par les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" seraient nettement individualisés grâce à la méthode spécifique de fabrication employée en Allemagne, qui leur confèrerait un bouquet typique, par ailleurs accentué, dans le "Praedikatssekt", par la teneur minimale de raisins allemands exigée ;

9. Attendu que, dans le cas des produits vinicoles, les facteurs naturels de la zone d'origine, tels que le raisin à partir duquel ces produits sont obtenus, jouent un rôle important dans la détermination de leur qualité et de leurs caractères ;

Que si la méthode de fabrication utilisée pour de tels produits peut contribuer à les caractériser, elle n'est pas, à elle seule, décisive, indépendamment de la qualité du raisin utilisé, pour en déterminer la provenance ;

Qu'au surplus, la méthode de fabrication d'un produit vinicole constitue un critère de rattachement d'autant moins apte à caractériser à lui seul sa provenance que, dans la mesure où elle n'est pas liée à l'utilisation d'un raisin déterminé, elle est susceptible d'être appliquée dans d'autres milieux géographiques ;

Qu'on ne saurait exclure la possibilité que la méthode de fabrication appliquée dans une zone déterminée soit pratiquée, pour autant qu'elle n'est pas protégée par des droits d'exclusivité, par des fabricants installés en tout ou en partie dans d'autres zones géographiques ;

Qu'en outre, la comparaison entre les dispositions du paragraphe 3 (1) et celles du paragraphe 8 (1) troisième phrase du règlement "vins mousseux et eaux-de-vie de vin" laisse apparaître que, compte tenu de l'annexe 2 de ce règlement, les conditions auxquelles doivent répondre les vins mousseux de qualité étrangers et le "Sekt" sont pour l'essentiel identiques ;

Que, de même, les dispositions du paragraphe 40 (1) et du paragraphe 44 (1) de la loi vinicole ne font pas non plus apparaître, entre le "Weinbrand" et l'eau-de-vie de vin de qualité étrangère, une différence appréciable dans les exigences de qualité applicables à l'un et à l'autre produit ;

Qu'en outre, la condition prévue au paragraphe 40 (1), n° 4, pour le "Weinbrand" est d'autant moins essentielle en l'espèce que, d'une part, la législation vinicole n'exclut pas la possibilité que le distillat indigène soit obtenu à partir de vins étrangers et que, d'autre part, l'obligation de faire reposer ce distillat dans une entreprise située sur le territoire allemand n'implique pas nécessairement que tous les producteurs implantés sur ce même territoire appliquent effectivement la méthode de fabrication spécifique dont il est question ;

10. Qu'au vu de ces considérations, les arguments que la partie défenderesse tiré de la méthode de fabrication utilisée pour la production du "Sekt" et du "Weinbrand" ne permettent pas d'établir que ces produits auraient, en raison de cette méthode, une qualité et des caractères qui leur seraient propres et qui en feraient des produits typiquement allemands ;

Qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que le droit en vigueur en République fédérale d'Allemagne jusqu'a 1971 permettait, en ce qui concerne le "Sekt", et même imposait, en ce qui concerne le "Weinbrand", l'utilisation en langue allemande des dénominations litigieuses pour les produits importés ;

Qu'il ressort implicitement des dispositions du paragraphe 75 (6) de la loi vinicole prévoyant un régime transitoire d'application, ainsi que des réactions dont cette loi a fait l'objet, sur le plan judiciaire, en République fédérale d'Allemagne, de la part d'importateurs ou de producteurs tant de vins mousseux que d'eaux-de-vie de vin étrangers que, lors de l'entrée en vigueur de ladite loi, lesdites dénominations étaient effectivement appliquées à une partie au moins des produits importés ;

Qu'en soutenant, dans sa réponse à une question posée par la Cour au cours de la procédure orale, que le recours à ces dénominations pour designer les produits importés aurait été "très peu fréquent", la partie défenderesse se réfère à l'année 1966, c'est-à-dire à une époque à laquelle l'offre de ces produits était, sur le marché allemand, encore très limitée, en raison des mesures nationales restrictives de l'importation en vigueur à l'époque et destinées, peu après, à être supprimées en vertu du traité ;

Qu'en effet, les données chiffrées relatives aux importations intervenues dans les années postérieures à 1966 montrent que ces importations ont considérablement augmenté en République fédérale d'Allemagne, notamment au cours des années 1969 et 1970 ;

Qu'au surplus, les précisions fournies par la partie défenderesse sur les ventes du vin mousseux allemand et sur les importations de vins mousseux étrangers laissent apparaître qu'au cours des années 1969 à 1971, les importations et, par conséquent, les quantités offertes sur le marché allemand ont augmenté à un rythme beaucoup plus élevé que celui des ventes de la production nationale, ce rythme étant en revanche décroissant, par rapport à celui des ventes, dans les années qui suivent l'entrée en vigueur de la législation vinicole ;

Qu'il faut donc admettre que le recours aux dénominations en cause pour designer des produits importés, s'il était encore très peu fréquent notamment en 1966, pouvait intéresser, lors de l'entrée en vigueur de la législation vinicole, des quantités de plus en plus importantes de ces produits ;

11. Qu'il y a donc lieu de conclure que les dénominations "Sekt" et "Weinbrand", ne s'appliquant pas à des produits dont la qualité serait due essentiellement à leur localisation dans une zone de provenance déterminée, et pouvant ou devant designer des produits importés aussi bien que la production nationale, n'étaient pas, lors de l'entrée en vigueur de la législation vinicole, aptes à identifier les produits en cause comme des produits allemands, en raison de leur qualité et de leurs caractères spécifiques ;

12. Attendu que la partie défenderesse produit des sondages d'opinion pour prouver qu'à la date susdite, les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" évoquaient chez le consommateur allemand la notion de produit national ;

Que, cependant, la protection accordée par l'indication de provenance n'étant légitime que si le produit qui en fait l'objet possède réellement des caractères susceptibles de l'individualiser du point de vue de sa provenance géographique, on ne saurait, à défaut d'une telle condition, justifier cette protection en s'appuyant sur l'opinion du consommateur, telle qu'elle peut résulter de sondages effectués sur la base de critères statistiques ;

Qu'au surplus, en raison des difficultés inhérentes à ces formes d'enquête, celles-ci ne sont pas, de par leur nature, susceptibles d'aboutir à des résultats permettant une appréciation objective des faits controversés ;

Que, par ailleurs, les sondages présentés par la partie défenderesse, effectués en 1966 et en 1973, se situent à des époques qui ne sont pas déterminantes en l'espèce, des mesures restrictives des importations des produits en cause étant encore en vigueur, en 1966, en République fédérale, et la législation vinicole étant, à la date des derniers sondages, appliquée depuis deux ans déjà ;

Qu'il ressort des considérations qui précèdent que les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" ne constituent pas des indications de provenance ;

13. Attendu qu'en ce qui concerne la dénomination "Praedikatssekt", créée par la législation vinicole, on ne saurait admettre que l'emploi de raisins allemands à concurrence de 60 % confère au produit en cause un bouquet spécial ;

Qu'en effet, la législation vinicole ne déterminant pas les raisins dont l'utilisation est obligatoire pour le "Praedikatssekt" en fonction de leur caractère spécifique, mais en raison uniquement de leur origine nationale, le pourcentage minimum requis n'implique pas nécessairement que le produit en question ait réellement une qualité spéciale par rapport au "Sekt", justifiant la protection qui lui est accordée ;

14. Attendu que les dispositions du traité établissant la libre circulation des marchandises, notamment celles de l'article 30, interdisent, entre Etats membres, les restrictions quantitatives à l'importation et toutes mesures d'effet équivalent ;

Qu'aux termes de l'article 2, paragraphe 3 s), de la directive 70-50-CEE de la Commission, sont à considérer comme des mesures interdites au sens des articles 30 et suivants du traité, celles qui réservent aux seuls produits nationaux des dénominations ne constituant pas des appellations d'origine ou des indications de provenance ;

Qu'en réservant ces dénominations à la production nationale et en astreignant les produits des autres Etats membres à des dénominations inconnues ou moins appréciées par le consommateur, la législation vinicole est de nature à favoriser l'écoulement sur le marché allemand de la production nationale au détriment des produits des autres Etats membres ;

Que ladite législation vinicole comporte donc des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives à l'importation, au sens des dispositions précitées, et, en ce qui concerne les importations de vins mousseux en provenance des pays tiers, contraires à l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement n° 816-70 du Conseil ;

Qu'aux fins de cette interdiction, il n'est pas nécessaire d'établir que de telles mesures restreignent effectivement les importations des produits concernés, mais, conformément à l'article 2, paragraphe 1, de la directive précitée, qu'elles peuvent seulement faire obstacle "à des importations qui pourraient avoir lieu en leur absence" ;

Que, par ailleurs, il résulte des données chiffrées contenues dans le mémoire en duplique qu'en ce qui concerne notamment les importations de vins mousseux, le taux annuel d'augmentation de ces importations présente, après l'entrée en vigueur de la législation vinicole, un fléchissement par rapport à celui des années 1969 à 1971 ;

15. Attendu que la circonstance que les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" ne constituent pas des indications de provenance exclut que les mesures litigieuses que comporte la législation vinicole puissent se justifier en vertu de l'article 36 du traité, pour des raisons de protection de la propriété industrielle et commerciale ;

Que la partie défenderesse fait toutefois valoir qu'en se referant aux règles nationales de la propriété industrielle et commerciale, l'article 36 précité n'entendrait pas renvoyer à un régime déterminé de protection juridique de cette propriété, mais laisserait aux Etats membres le pouvoir d'aménager et de faire évoluer ce régime ;

Qu'en l'espèce, le régime en vigueur en République fédérale d'Allemagne dans le domaine des indications de provenance, tout en relevant encore du droit de la concurrence, évoluerait précisément vers celui de la propriété industrielle et commerciale ;

16. Attendu cependant qu'une évolution aussi illimitée risquerait de restreindre progressivement la portée du traité ;

Que, si le traité ne fait pas obstacle au pouvoir de chaque Etat membre de légiférer en matière d'indications de provenance, il leur interdit néanmoins, à l'article 36, deuxième phrase, l'introduction de nouvelles mesures ayant un caractère arbitraire et injustifié et, de ce fait, comportant des effets équivalant à des restrictions quantitatives ;

Que tel serait précisément le cas lorsque le législateur national accorde la protection prévue pour les indications de provenance à des dénominations n'ayant, au moment où cette protection est accordée, que la nature de dénominations génériques ;

17. Attendu que la République fédérale d'Allemagne soutient en outre que les mesures litigieuses trouvent leur justification dans des raisons d'ordre public, au sens de l'article 36 du traité, notamment en raison de la nécessité de protéger les producteurs contre la concurrence déloyale et les consommateurs contre la fraude portant sur la provenance des produits ;

Que, cependant, indépendamment de toute définition de la notion d'ordre public retenue par l'article 36 du traité, cette disposition ne saurait déroger aux articles 30 à 34 que pour autant que ces dérogations s'avéreraient nécessaires pour assurer la protection du producteur et du consommateur contre les fraudes commerciales ;

Que des produits vinicoles de même genre peuvent se diversifier les uns par rapport aux autres en raison de leur qualité et de certains de leurs caractères ;

Que, d'ailleurs, avant l'entrée en vigueur de la législation vinicole, figuraient sur le conditionnement d'une partie au moins des produits litigieux, à coté de la dénomination générique, la désignation d'origine de ces produits ;

Que la partie défenderesse n'a pas établi les raisons pour lesquelles elle a modifié cette pratique ;

18. Qu'il convient donc de conclure qu'en réservant, dans la loi vinicole et dans le règlement d'application " vins mousseux et eaux-de-vie de vin " de juillet 1971, les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" à la production nationale et la dénomination "Praedikatssekt" à des vins produits en Allemagne à partir d'une proportion minimale déterminée de raisins allemands, la République fédérale d'Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 30 du traité et, en ce qui concerne le vin mousseux, en vertu de l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement n° 816-70 du Conseil du 28 avril 1970 ;

19. Attendu qu'aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens ;

Qu'en l'espèce la République fédérale d'Allemagne a succombé en ses moyens ;

Qu'elle fait toutefois valoir que la Commission, ayant, dans son mémoire en réplique et contrairement aux termes de son recours, restreint au vin mousseux le grief tiré de la violation de l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement no 816-70, se serait partiellement désistée de son recours et devrait de ce fait être condamnée aux dépens afférents à ce désistement, conformement à l'article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure ;

20. Attendu qu'il ressort de l'article 1, paragraphe 2, du règlement n° 816-70 que ce règlement, concernant entre autres le vin mousseux, ne vise pas l'eau-de-vie de vin ;

Que, dès lors, en limitant au vin mousseux le grief tiré de la violation de l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement n° 816-70, la Commission n'a pas modifié les conclusions du recours, mais y a apporté une précision découlant du champ d'application dudit règlement ;

Que, par conséquent, il n'y a pas lieu d'appliquer en l'espèce l'article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure ;

Par ces motifs,

LA COUR,

Déclare et arrête :

1) En réservant, dans la loi vinicole du 14 juillet 1971 (Bundesgesetzblatt 1971, I, p. 893) et dans le règlement d'application "vins mousseux et eaux-de-vie de vin" du 15 juillet 1971 (Bundesgesetzblatt 1971, I, p. 939) les dénominations "Sekt" et "Weinbrand" à la production nationale et la dénomination "Praedikatssekt" à des vins produits en Allemagne à partir d'une proportion minimale déterminée de raisins allemands, la République fédérale d'Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 30 du traité et, en ce qui concerne le vin mousseux, en vertu de l'article 12, paragraphe 2 b), du règlement n° 816-70 du Conseil du 28 avril 1970 (JO 1970, n° L 99, p. 1) ;

2) La République fédérale d'Allemagne est condamnée aux dépens de l'instance.