CJCE, 13 mars 1979, n° 91-78
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Hansen GmbH & Co.
Défendeur :
Hauptzollamt de Flensburg
LA COUR,
1. Attendu que, par ordonnance du 22 mars 1978, reçue à la Cour le 12 avril suivant, le Finanzgericht de Hambourg a posé, en vertu de l'article 177 du traité CEE, un ensemble de questions portant sur l'interprétation de l'article 37 du traité, concernant les monopoles nationaux présentant un caractère commercial, en relation avec les articles 92 et 93, relatifs au régime des aides, ainsi que de l'article 2, paragraphe 1, de la décision du Conseil 70-549, du 29 septembre 1970, relative à l'association des pays et territoires d'Outre-mer a la Communauté (JO L 282, p. 83), en vue d'apprecier la compatibilité, avec le droit communautaire, du traitement fiscal d'alcool importé dans la République fédérale d'Allemagne, a la suite de l'entrée en vigueur de la loi du 2 mai 1976 portant modification de la loi concernant le monopole de l'alcool (Gesetz zur anderung des gesetzes über das Branntweinmonopol, Bundesgesetzblatt I N 50, du 7 mai 1976, p. 1145) ;
2. Attendu que le requérant au principal est un producteur et distributeur d'alcool qui a commercialisé, dans la République fédérale d'Allemagne, à l'époque considérée, des alcools importés de provenances diverses, soit en l'état, soit sous forme de coupages, d'origine communautaire et extracommunautaire ;
Qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi du 2 mai 1976, ces alcools ont été soumis à l'impôt sur l'alcool de 1 650 DM par hectolitre d'esprit-de-vin, applicable uniformément, bien que sous des qualifications diverses, à l'alcool indigène comme à l'alcool importé ;
3. Que, selon le requérant, cette égalité de traitement ne serait cependant qu'apparente, alors qu'il résulterait explicitement des travaux préparatoires de la loi du 2 mai 1976 que l'augmentation du taux d'imposition - de 1 500 DM/hl à 1 650 DM/hl - n'aurait eu d'autre but que de permettre à l'administration du monopole de l'alcool de combler les pertes résultant pour elle de la différence notable qui s'est créée entre, d'une part, le prix d'achat qu'elle est légalement tenue de verser aux producteurs d'alcool relevant du monopole et, d'autre part, le prix de vente du même alcool aux consommateurs, tel qu'il s'est formé sur le marché après les arrêts de la Cour du 17 février 1976 dans les affaires 45-75, Rewe, et 91-75, Miritz (Recueil, p. 181 et 217) ;
Qu'en dépit du relèvement uniforme du taux d'imposition par la loi du 2 mai 1976, le système reviendrait donc, dans son effet pratique, à faire supporter par l'alcool importé la charge de subventions massives accordées à l'alcool de production nationale et qu'ainsi seraient remplies les conditions dans lesquelles la Cour aurait reconnu qu'une taxe interne, même en apparence non discriminatoire, peut être qualifiée de taxe d'effet équivalant à un droit de douane prohibé par le traité, ainsi qu'il ressortirait des arrêts de la Cour du 25 mai 1977, dans les affaires 77-76, Cucchi, et 105-76, Interzuccheri (Recueil, p. 987 et 1029) ;
Que, selon le requérant, cette pratique ne serait rien d'autre que la continuation des privilèges du monopole de l'alcool par d'autres moyens et que, des lors, serait justifiée l'application de l'article 37 du traité et, plus particulièrement, de son paragraphe 2, aux termes duquel les Etats membres s'abstiennent de toute mesure nouvelle contraire aux principes énoncés au paragraphe 1 ou qui restreint la portée des articles relatifs à l'élimination des droits de douane entre les Etats membres ;
4. Que l'administration fiscale allemande, défenderesse au principal, fait valoir, pour sa part, que le monopole de l'alcool aurait été aménagé de manière telle qu'il ne remplirait désormais plus que la fonction d'une organisation nationale de marché et qu'il ne contrôlerait ni n'orienterait plus l'importation d'alcool ;
Que le lien indirect existant entre la perception de la taxe à l'importation et le financement d'une activité économique nationale ne suffirait pas pour donner à cette taxe le caractère d'une imposition ou d'une aide illicite ;
5. Attendu qu'en vue de trancher les contestations soulevées, le Finanzgericht a formulé les questions suivantes :
1) L'article 37 du traité CEE constitue-t-il, par rapport aux articles 92 et 93 du traité, une 'lex specialis' en ce sens que les mesures étatiques qui touchent la circulation des marchandises entre Etats membres et, le cas échéant, entre Etats membres et pays tiers doivent aussi être appréciées au regard de l'article 37 du traité CEE lorsque ces mesures étatiques comportent entre autres une aide ?
2) En cas de réponse affirmative à la première question :
a) l'article 37, paragraphe 2, du traité CEE, en liaison avec son paragraphe 1, alinéa 1, qui interdit toute discrimination entre les ressortissants des Etats membres dans les conditions d'approvisionnement et de débouchés, doit-il être interprété en ce sens qu'il vise aussi les mesures étatiques qui établissent, pour les produits importés et pour les produits indigènes, une majoration uniforme de l'impôt de consommation, dont le rendement inscrit au budget général est indirectement destiné à compenser les pertes d'un monopole d'Etat à caractère commercial qui résultent au paiement à certains producteurs d'un prix excessif par rapport aux conditions de marché existant à l'intérieur de la Communauté et de la diminution simultanée des prix de vente des produits en question achetés à des prix excessifs ?
b) l'article 37, paragraphe 2, du traité CEE, qui interdit de prendre des mesures qui restreignent la portée des articles relatifs à l'élimination des droits de douane, doit-il être interprété en ce sens qu'il vise aussi les mesures du genre de celles décrites dans la première partie de la deuxième question ?
c) l'article 37 du traité CEE confère-t-il aussi des droits directs, que les tribunaux nationaux doivent sauvegarder, à celui qui est touché par une majoration de l'impôt de consommation frappant de manière identique les produits importés et les produits indigènes, lorsque cette majoration fiscale, prise isolément, est certes compatible avec le traité CEE, mais en liaison avec d'autres mesures, devient incompatible avec ce traité ?
d) le champ d'application de l'article 37 du traité CEE s'étend-il aussi aux mesures qui touchent l'importation de marchandises en provenance de pays tiers et, le cas échéant, à quelles conditions ?
3) Pour le cas où la perception de l'impôt de consommation constitue une taxe d'effet équivalant à un droit de douane et où le champ d'application de l'article 37 du traité CEE ne s'étend pas aux importations en provenance de pays tiers : l'article 2, paragraphe 1, de la décision du Conseil du 29 septembre 1970 relative à l'association des pays et territoires d'Outre-mer à la Communauté économique européenne (JO L 282, p. 83) engendre-t-il des droits directs que les tribunaux nationaux doivent sauvegarder ?
Sur la première question :
6. Attendu que, par la première question, il est demandé, en substance, si une mesure étatique, liée au fonctionnement d'un monopole national à caractère commercial, lorsqu'elle touche à la libre circulation des marchandises, est éventuellement soustraite à l'interdiction de discrimination de l'article 37 du traité du fait qu'une telle mesure comporte, entre autres, une aide au sens des articles 92 et 93 ;
7. Attendu que l'applicabilité de l'article 37, dans le cadre du litige porté devant le Finanzgericht, a été mise en doute tant par le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne que par la Commission ;
Que, selon le Gouvernement allemand, la loi du 2 mai 1976 aurait pour objet d'aménager le monopole allemand des alcools conformément à l'article 37 du traité ;
Qu'elle aurait, en effet, éliminé le monopole d'importation existant jusque-là et supprime la compensation des prix, de sorte qu'à l'heure actuelle, le monopole exercerait exclusivement la fonction d'un service d'organisation du marché en ce qu'il rachète l'ensemble de la production nationale à un prix couvrant les coûts de production et, qu'après transformation, il la revend à des prix fixés en fonction du marché ;
Que, pour sa part, la Commission fait valoir qu'avec la transformation des monopoles nationaux, conformément à l'article 37, à la fin de la période de transition, cette disposition du traité aurait épuisé ses effets et qu'ainsi seraient applicables en la matière, d'une part, les dispositions du traité relatives à la libre circulation des marchandises et, d'autre part, l'article 95, relatif à l'application non discriminatoire des impositions intérieures ;
8. Attendu que l'article 37 n'exige pas la suppression totale des monopoles nationaux de caractère commercial, mais seulement leur aménagement, de telle façon que soit assurée, dans les conditions d'approvisionnement et de débouchés, l'exclusion de toute discrimination entre les ressortissants des Etats membres ;
Qu'il est précisé au surplus, par le paragraphe 2 du même article, que les pratiques d'un monopole national ne sauraient servir à une reconstitution d'une protection douanière ou de restrictions quantitatives dans les échanges intracommunautaires ;
Que l'article 37 reste applicable dans toute la mesure où, même après l'aménagement prescrit par le traité, l'exercice, par un monopole public, de ses droits d'exclusivité entraînerait l'une des discriminations ou restrictions interdites par cette disposition ;
Que, dans un cas comme celui de l'espèce, où il s'agit d'une activité liée spécifiquement à l'exercice, par un monopole national, de son droit d'exclusivité en matière d'achat, de transformation et de vente de l'alcool, l'application des dispositions de l'article 37 ne saurait dès lors être exclue ;
Qu'il apparaît donc que c'est de manière pertinente que la juridiction nationale a demandé d'être éclairée sur le rapport de cet article avec les dispositions du traité relatives aux aides publiques, étant entendu que l'action du monopole est étroitement associée au soutien de certaines catégories de producteurs grâce à des prix d'achat légalement garantis ;
9. Attendu qu'un rapprochement entre, d'une part, l'article 37 et, d'autre part, les articles 92 et 93 montre que ces dispositions poursuivent un objectif identique, consistant à éviter que les deux ordres d'interventions d'un Etat membre - par l'action d'un monopole public ou par l'octroi d'aides - aient pour effet de fausser les conditions de concurrence sur le Marché commun ou de créer des discriminations à charge de la production ou du commerce d'autres Etats membres ;
Que, cependant, ces dispositions tablent sur des conditions d'application distinctes, spécifiques aux deux ordres de mesures étatiques qu'elles ont, respectivement, pour objet de régler, et différent au surplus par leurs conséquences juridiques, en ce sens surtout que la mise en œuvre des articles 92 et 93 fait une large place à l'intervention de la Commission, alors que l'article 37 est destiné à trouver une application directe ;
Qu'une mesure réalisée par l'intermédiaire d'un monopole public, susceptible d'être en même temps considérée comme aide au sens de l'article 92, est, dès lors, assujettie cumulativement aux dispositions de l'article 37 et à celles relatives aux aides d'Etat ;
Qu'il s'ensuit que les pratiques d'un monopole public ne sont pas exemptées de l'application de l'article 37 du fait qu'elles peuvent être qualifiées en même temps d'aide au sens du traité ;
Qu'il en résulte que, dans tous les cas où le régime de commercialisation d'une marchandise, telle que l'alcool, comporte l'intervention d'un monopole public, agissant en vertu de son droit d'exclusivité, les dispositions spécifiques de l'article 37 sont applicables, même si les rapports du monopole avec les producteurs sont éventuellement caractérisés par l'octroi d'une aide ;
10. Qu'il y a donc lieu de répondre à la première question que l'article 37 du traité constitue, par rapport aux articles 92 et 93 du même traité, une disposition spécifique en ce sens que les mesures étatiques, inhérentes à l'exercice, par un monopole national à caractère commercial, de son droit d'exclusivité, doivent, même lorsqu'elles sont liées à l'octroi d'une aide en faveur des producteurs relevant du monopole, être appréciées au regard des exigences de l'article 37 ;
11. Qu'au vu de cette réponse, il n'est pas nécessaire d'examiner la question de savoir dans quelle mesure les dispositions des articles 92 et 93 sont applicables à la production et au commerce d'un produit agricole, tel que l'alcool, ne faisant pas encore l'objet d'une organisation commune de marché ;
Sur la deuxième question :
12. Attendu que, par les première et deuxième branches de la deuxième question, il est demandé si les paragraphes 1 et 2 de l'article 37 prohibent une augmentation d'un droit de consommation lorsque cette augmentation, en soi non discriminatoire, est aménagée de telle manière que la recette supplémentaire ainsi réalisée est destinée à combler les pertes occasionnées à un monopole national du fait qu'il est astreint à verser aux producteurs un prix d'achat garanti, plus élevé que le prix de revente sur le marché ;
13. Attendu que ces questions visent en réalité à savoir si la combinaison d'un régime d'aide avec les opérations d'un monopole public, consistant à garantir aux producteurs un prix d'achat plus élevé que le prix de revente pratiqué sur le marché, peut constituer une violation des prohibitions de l'article 37 ;
Qu'il convient de faire remarquer à ce sujet que, dans un cas comme celui de l'espèce, il n'existe pas de rapport causal entre le montant de l'aide, accordée sous forme d'un prix d'achat garanti au producteur, et le prix de vente, en raison du fait qu'en vertu de l'interposition du monopole, le producteur, bénéficiaire de l'aide, n'a aucun accès au marché, le prix de vente au consommateur étant déterminé de manière autonome par le monopole, pour des motifs inhérents à sa politique de vente, indépendamment de la destination et du montant de l'aide ;
Qu'ainsi, à la différence des articles 92 et 93 du traité, dont l'application permet d'apprécier comme tel l'effet économique d'une aide accordée par l'Etat, l'article 37 a pour but de soumettre la politique de vente d'un monopole public aux exigences de la libre circulation des marchandises et de l'égalité de chances qui doit être assurée aux produits importés d'autres Etats membres ;
Qu'une atteinte serait portée à cette égalité de chances si le prix de vente pratiqué par le monopole, pour l'alcool de production nationale, apparaissait comme étant inférieur non seulement au prix d'achat garanti au producteur, mais aussi au prix, avant taxation, de l'alcool de qualité comparable, importé d'un autre Etat membre ;
14. Qu'il y a donc lieu de répondre aux deux premières branches de la deuxième question que serait incompatible avec l'article 37, paragraphe 1, du traité CEE, toute pratique d'un monopole national consistant à commercialiser un produit, tel que l'alcool, à l'aide de fonds publics, à un prix de revente anormalement bas par comparaison avec le prix, avant taxation, de l'alcool de qualité comparable, importé d'un autre Etat membre ;
Qu'il appartient au juge national d'apprécier les éléments de fait en fonction de ces critères ;
15. Attendu que, conformément à ce qui précède, la troisième branche de la deuxième question doit être comprise comme visant à savoir si l'article 37 a pour effet de conférer directement des droits à tous ceux qui seraient préjudiciés par la politique de prix pratiquée sur le marché par un monopole public, dans les conditions décrites par la juridiction nationale ;
16. Attendu que l'article 37 est fondé sur le principe de l'interdiction de toute discrimination entre les ressortissants des Etats membres dans les conditions d'approvisionnement et d'écoulement de marchandises formant, dans un Etat membre, l'objet d'un monopole national ;
Que, dans une situation telle que celle soumise à l'appréciation du Finanzgericht, il est possible pour le juge d'établir les comparaisons de prix entre, d'une part, le prix de vente de l'alcool commercialisé par le monopole et, d'autre part, le prix d'importation d'un opérateur économique introduisant sur le territoire national une marchandise comparable ;
Qu'un effet éventuel de discrimination en faveur de la production nationale et en défaveur des produits importés étant susceptible d'être établi avec toute la précision voulue, il est indubitable que, dans une telle hypothèse, l'article 37 confère aux particuliers des droits qui doivent être sauvegardés par les juridictions nationales ;
17. Qu'il y a donc lieu de répondre à la troisième branche de la deuxième question que l'article 37 du traité confère des droits que les tribunaux nationaux doivent sauvegarder à celui qui subit les conséquences financières d'une discrimination résultant d'un abaissement anormal du prix de revente pratiqué par un monopole public au moyen de fonds de l'Etat ;
18. Attendu que, par la quatrième branche de la deuxième question, il est demandé si l'article 37 du traité est applicable également à des mesures qui touchent l'importation de marchandises en provenance de pays tiers ;
19. Attendu que l'article 37 fait partie du deuxième chapitre du titre I du traité, relatif à 'l'élimination des restrictions quantitatives entre les Etats membres';
Qu'il résulte tant du texte de cette disposition que de son emplacement dans le système du traité que l'article 37 est destiné à promouvoir la libre circulation intracommunautaire et le maintien de conditions de concurrence normales entres les économies des Etats membres dans le cas où, dans l'un ou l'autre de ces Etats, un produit déterminé est soumis à un monopole national à caractère commercial ;
Qu'on ne saurait, dès lors, appliquer les dispositions de cet article aux produits importés de pays tiers, le régime d'importation de ces produits relevant non des dispositions relatives au marché intérieur, mais de celles qui concernent la politique commerciale ;
20. Qu'il y a donc lieu de répondre à la quatrième branche de la deuxième question que le champ d'application de l'article 37 du traité ne s'étend pas aux mesures qui touchent l'importation de marchandises en provenance de pays tiers ;
Sur la troisième question :
21. Attendu que, par cette question, le Finanzgericht désire être éclairé sur la portée de l'article 2 de la décision du Conseil 70-549, du 29 septembre 1970, relative à l'association des pays et territoires d'Outre-mer à la Communauté économique européenne, aux termes duquel les produits originaires des pays et territoires en question sont admis à l'importation dans la Communauté 'en exemption des droits de douane et taxes d'effet équivalent';
22. Attendu que la décision 70-549 - à supposer qu'elle ait été applicable aux importations en cause - a pour objet, notamment, d'étendre aux pays et territoires associés à la Communauté et aux produits de ces pays les règles relatives à la libre circulation des marchandises à l'intérieur de la Communauté ;
Qu'à cet effet, il est disposé à l'article 2, paragraphe 1, de la décision, que les produits originaires des pays et territoires associés sont admis à l'importation dans la Communauté en exemption des droits de douane et taxes d'effet équivalent ;
Qu'il convient encore d'attirer l'attention sur l'article 5, paragraphe 1, de la même décision, selon lequel 'les Etats membres s'abstiennent de toute mesure ou pratique de nature fiscale interne établissant directement ou indirectement une discrimination entre leurs produits et les produits similaires originaires des pays et territoires;
Qu'il est permis d'établir un rapprochement de ces dispositions avec, d'une part, l'article 37, paragraphe 2, du traité CEE, et, d'autre part, l'article 95 relatif à l'application non discriminatoire, aux produits nationaux comme aux produits importés, des régimes d'impositions intérieures ;
Qu'il apparaît, dès lors, que l'alcool originaire des pays et territoires envisagés par la décision 70-549 doit bénéficier, à l'importation, du même traitement que celui qui a été dégagé ci-dessus en ce qui concerne les produits d'origine communautaire ;
23. Qu'il y a donc lieu de répondre à la troisième question que la décision du Conseil 70-549, du 29 septembre 1970, relative à l'association des pays et territoires d'Outre-mer à la Communauté - sous réserve, pour la juridiction nationale, d'en vérifier l'applicabilité aux faits de l'affaire - vise à placer les marchandises originaires des pays et territoires concernés sur un pied d'égalité avec les produits communautaires en ce qui concerne des pratiques éventuellement discriminatoires de la part d'un monopole national à caractère commercial ;
Quant aux dépens :
24. Attendu que les frais exposés par le Gouvernement de la République française, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne et la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement ;
Que la procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant le Finanzgericht de Hambourg, il appartient à celui-ci de statuer sur les dépens ;
Par ces motifs,
LA COUR,
Statuant sur les questions à elle soumises par le Finanzgericht de Hambourg par ordonnance du 22 mars 1978, dit pour droit :
1) L'article 37 du traité CEE constitue, par rapport aux articles 92 et 93 du même traité, une disposition spécifique en ce sens que les mesures étatiques, inhérentes à l'exercice, par un monopole national à caractère commercial, de son droit d'exclusivité doivent, même lorsqu'elles sont liées à l'octroi d'une aide en faveur des producteurs relevant du monopole, être appréciées au regard des exigences de l'article 37.
2) Est incompatible avec l'article 37, paragraphe 1, du traité CEE toute pratique d'un monopole national consistant à commercialiser un produit, tel que l'alcool, à l'aide de fonds publics, à un prix de revente anormalement bas par comparaison avec le prix, avant taxation, de l'alcool de qualité comparable importé d'un autre Etat membre.
3) L'article 37 du traité CEE confère des droits que les tribunaux nationaux doivent sauvegarder à celui qui subit les conséquences financières d'une discrimination résultant d'un abaissement anormal du prix de revente pratique par un monopole public au moyen de fonds de l'Etat.
4) Le champ d'application de l'article 37 du traité CEE ne s'étend pas aux mesures qui touchent l'importation de marchandises en provenance de pays tiers.
5) La décision du Conseil 70-549, du 29 septembre 1970, relative à l'association des pays et territoires d'Outre-mer à la Communauté économique européenne - sous réserve, pour la juridiction nationale, d'en vérifier l'applicabilité aux faits de l'affaire - vise à placer les marchandises originaires des pays et territoires concernés sur un pied d'égalité avec les produits communautaires en ce qui concerne des pratiques éventuellement discriminatoires de la part d'un monopole national à caractère commercial.