CJCE, 6e ch., 7 février 2002, n° C-279/00
COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Commission des Communautés européennes
Défendeur :
République italienne
LA COUR,
1. Par requête déposée au greffe de la Cour le 13 juillet 2000, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 226 CE, un recours visant à faire constater que, en imposant que les entreprises de fourniture de travail temporaire établies dans d'autres États membres aient leur siège social ou une succursale sur le territoire national et déposent une caution de 700 millions de ITL auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE et 56 CE.
La réglementation nationale
2. La legge n° 196, Norme in materia di promozione dell'occupazione (loi n° 196 portant dispositions en matière d'aide à l'emploi), du 24 juin 1997 (GURI n° 154, du 4 juillet 1997, supplément ordinaire n° 136-L, p. 3, ci-après la "loi n° 196-97"), réserve, à son article 2, paragraphe 1, l'exercice de l'activité de fourniture de travail temporaire à des sociétés inscrites au tableau prévu à cet effet auprès du service compétent du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. Pour être inscrites audit tableau, ces sociétés doivent obtenir une autorisation dudit ministère qui est délivrée, dans un premier temps, à titre provisoire puis, après deux ans d'exercice de l'activité, pour une durée indéterminée. La délivrance de cette autorisation est à son tour subordonnée à la réunion de certaines conditions fixées à l'article 2, paragraphe 2, de la loi n° 196-97.
3. Cette dernière disposition prévoit:
"Les conditions exigées pour l'exercice de l'activité visée au paragraphe 1 sont les suivantes:
a) constitution de la société sous la forme de société de capitaux ou de société coopérative, italienne ou d'un autre État membre de l'Union européenne; inclusion dans le nom de la société des mots `société de fourniture de travail temporaire'; indication de cette activité en tant qu'objet exclusif de la société; capital versé non inférieur à 1 milliard de lires; siège social ou succursale sur le territoire national;
[...]
c) à titre de garantie pour les créances des travailleurs engagés avec le contrat visé à l'article 3 [contrat pour prestations de travail temporaire] et des créances correspondantes des organismes de prévoyance pour cotisations de sécurité sociale, versement, pour les deux premières années, d'un cautionnement de 700 millions de lires auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national; à compter de la troisième année solaire, mise à disposition, au lieu et place du cautionnement, d'une garantie bancaire ou d'assurance équivalant à au moins 5 % du chiffre d'affaires hors TVA réalisé au cours de l'exercice financier précédent et, dans tous les cas, non inférieure à 700 millions de lires;
[...]"
4. En vertu de l'article 10, paragraphe 1, de la loi n° 196-97, les personnes qui fournissent des prestations de travail temporaire sans disposer de l'autorisation prévue à l'article 2 de ladite loi sont passibles de sanctions administratives ou pénales.
La procédure précontentieuse
5. Estimant que l'article 2, paragraphe 2, sous a) et c), de la loi n° 196-97 était incompatible avec les articles 59 du traité CE (devenu, après modification, article 49 CE) et 73 B du traité CE (devenu article 56 CE), la Commission a, par lettre du 29 juillet 1998, mis le Gouvernement italien en demeure de présenter ses observations dans un délai de deux mois.
6. Par lettre du 6 novembre 1998, le Gouvernement italien a répondu que lesdites dispositions de la loi n° 196-97 étaient justifiées par des raisons d'ordre public au sens des articles 56 du traité CE (devenu, après modification, article 46 CE) et 66 du traité CE (devenu article 55 CE), en tant qu'elles visent à assurer une protection effective des droits des travailleurs en matière de rémunération et de cotisations de sécurité sociale à l'encontre de leur propre employeur, à savoir l'entreprise fournissant des prestations de travail temporaire.
7. Jugeant insuffisante la réponse du Gouvernement italien, la Commission a, le 28 avril 1999, adressé un avis motivé à la République italienne, en l'invitant à adopter, dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit avis, les mesures nécessaires pour se conformer à ses obligations résultant des articles 59 et 73 B du traité.
8. Le Gouvernement italien n'ayant pas répondu à cet avis motivé, la Commission a introduit le présent recours.
Observation liminaire
9. Dans son mémoire en duplique, le Gouvernement italien indique que l'article 117, paragraphe 1, de la loi n° 388, du 23 décembre 2000 (GURI n° 302, du 29 décembre 2000, supplément ordinaire n° 219-L, p. 1), a modifié l'article 2, paragraphe 2, sous a) et c), de la loi n° 196-97 pour ajouter à chacune de ces deux dernières dispositions, après les mots "ayant son siège ou une succursale sur le territoire national", les termes "ou d'un autre État membre de l'Union européenne". Dans ces conditions, il invite la Commission à renoncer à son recours en ce qui concerne le premier de ses deux griefs (relatif à l'exigence de la présence du siège social ou d'une succursale sur le territoire national) ainsi que la deuxième partie du second grief (relative à l'obligation de constituer une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national).
10. La Commission n'ayant pas donné suite à cette invitation, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l'existence d'un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l'État membre telle qu'elle se présentait au terme du délai fixé dans l'avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 12 décembre 2000, Commission-Portugal, C-435-99, Rec. p. I-11179, point 16, et du 11 octobre 2001, Commission-Autriche, C-111-00, non encore publié au Recueil, point 13).
11. Dès lors, il y a lieu d'examiner l'intégralité des griefs invoqués par la Commission dans son recours.
Sur l'exigence de la présence du siège social ou d'une succursale sur le territoire national
12. La Commission fait valoir que l'article 2, paragraphe 2, sous a), de la loi n° 196-97, qui oblige les entreprises de fourniture de travail temporaire à avoir leur siège social ou une succursale sur le territoire national, est contraire à l'article 49 CE au motif que cette condition constitue en fait la négation même de la libre prestation des services garantie par cette disposition et qu'elle a pour conséquence d'enlever tout effet utile à celle-ci (voir, en ce sens, notamment arrêt du 4 décembre 1986, Commission-Allemagne, 205-84, Rec. p. 3755, point 52).
13. En se fondant sur les arrêts de la Cour du 25 juillet 1991, Collectieve Antennevoorziening Gouda (C-288-89, Rec. p. I-4007, point 11), et du 14 novembre 1995, Svensson et Gustavsson (C-484-93, Rec. p. I-3955, point 15), la Commission soutient que de telles restrictions discriminatoires à l'égard des opérateurs établis dans d'autres États membres ne peuvent être admises que si elles sont justifiées au titre de l'une des dérogations expressément prévues à l'article 46 CE, combiné avec l'article 55 CE. En ce qui concerne, en particulier, les "raisons d'ordre public", qui figurent parmi les raisons d'intérêt général énumérées à l'article 46 CE et qui ont été invoquées par le Gouvernement italien dans sa réponse à la lettre de mise en demeure, elle fait valoir que la notion d'ordre public doit être interprétée de manière restrictive (voir arrêts du 18 juin 1991, ERT, C-260-89, Rec. p. I-2925, point 24, et du 9 mars 2000, Commission-Belgique, C-355-98, Rec. p. I-1221, point 28) et que, en tout état de cause, le recours à une telle notion suppose, en dehors du trouble social que constitue toute infraction à la loi, l'existence d'une menace réelle et suffisamment grave, affectant un intérêt fondamental de la société (voir, notamment, arrêts du 7 mai 1998, Clean Car Autoservice, C-350-96, Rec. p. I-2521, point 40, et Commission-Belgique, précité, point 28). La Commission ajoute que, en l'espèce, les arguments invoqués par le Gouvernement italien pour justifier lesdites restrictions à la libre prestation des services sont dénués de fondement.
14. Après avoir rappelé que, dans l'arrêt du 17 décembre 1981, Webb (279-80, Rec. p. 3305, point 18), la Cour a reconnu que la mise à disposition de main-d'œuvre constitue un domaine particulièrement sensible du point de vue professionnel et social, le Gouvernement italien fait valoir que le marché du travail temporaire est encore aujourd'hui caractérisé par d'importants phénomènes de fraude et de violation des droits des travailleurs.
15. Ledit Gouvernement soutient que, dans un tel contexte, exiger que le siège social ou une succursale d'une entreprise de fourniture de travail temporaire soient installés sur le territoire national constitue un moyen visant à garantir la protection des droits des travailleurs en matière de rémunération et de paiement des cotisations de sécurité sociale, dans la mesure où, en l'absence d'une telle exigence, les travailleurs, pour faire valoir leurs droits en la matière, seraient contraints d'engager à l'encontre de leur employeur, devant un tribunal étranger, des procédures judiciaires complexes et dépourvues de perspectives de succès.
16 Le Gouvernement italien précise que les obstacles que ladite exigence vise à surmonter sont essentiellement de nature économique et résultent de ce que, pour faire valoir des droits d'un montant généralement modeste, le travailleur serait confronté à des frais d'un montant égal ou même supérieur s'il était obligé de saisir les juridictions d'un autre État membre.
17. Afin de statuer sur le bien-fondé du premier grief de la Commission, il convient de constater que l'exigence selon laquelle les entreprises de fourniture de travail temporaire souhaitant mettre de la main-d'œuvre à la disposition d'utilisateurs établis en Italie doivent avoir leur siège social ou une succursale sur le territoire national va directement à l'encontre de la libre prestation des services dans la mesure où elle rend impossible la prestation, dans ledit État membre, de services par des entreprises établies dans d'autres États membres (voir, en ce sens, arrêts Commission-Belgique, précité, point 27, et du 29 mai 2001, Commission-Italie, C-263-99, Rec. p. I-4195, point 20).
18. Pour qu'une telle exigence, qui, ainsi que la Cour l'a itérativement jugé, est en fait la négation même de la liberté fondamentale de prestation des services, soit acceptée, il faut établir qu'elle constitue une condition indispensable pour atteindre l'objectif recherché (voir arrêts du 9 juillet 1997, Parodi, C-222-95, Rec. p. I-3899, point 31, et du 25 octobre 2001, Commission-Allemagne, C-493-99, non encore publié au Recueil, point 19).
19. À cet égard, il résulte de la jurisprudence de la Cour que la protection des travailleurs figure parmi les raisons impérieuses d'intérêt général susceptibles de justifier une restriction à la libre prestation des services (voir, notamment, arrêts précités Webb, point 19; Collectieve Antennevoorziening Gouda, point 14, et du 23 novembre 1999, Arblade e.a., C-369-96 et C-376-96, Rec. p. I-8453, point 36).
20. Force est toutefois de constater que l'exigence de la présence du siège social ou d'une succursale sur le territoire national, telle qu'elle découle de l'article 2, paragraphe 2, sous a), de la loi n° 196-97, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif de protection des travailleurs invoqué par le Gouvernement italien.
21. En effet, ladite exigence s'applique indifféremment à toute entreprise de fourniture de travail temporaire établie dans un État membre autre que la République italienne sans distinguer selon le lieu de résidence des travailleurs qu'une telle entreprise emploie.
22. Or, il n'est pas exclu que les travailleurs mis à la disposition d'un utilisateur de main-d'œuvre temporaire établi en Italie par une entreprise de fourniture de travail temporaire dont l'établissement se trouve dans un autre État membre résident dans ce dernier État, de sorte que le besoin de protection des travailleurs, invoqué en l'espèce par le Gouvernement italien pour justifier l'exigence en cause, n'existe pas en ce qui les concerne.
23. Il en va de même dans les cas où le travailleur accomplit habituellement son travail en Italie dans le cadre d'un contrat individuel de travail.
24. En effet, en vertu de l'article 5, point 1, de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (version consolidée JO 1998, C 27, p. 1), le travailleur peut attraire son employeur devant les juridictions de l'État contractant dans lequel il accomplit habituellement son travail même si son employeur est domicilié sur le territoire d'un autre État contractant.
25. En outre, le Gouvernement italien n'a allégué aucun argument convaincant de nature à établir que le procès qu'un travailleur résidant en Italie, mais se trouvant au service d'une entreprise de fourniture de travail temporaire établie dans un autre État membre, qui est mis à la disposition d'un utilisateur de main-d'œuvre temporaire établi en Italie, intente à son employeur devant un tribunal du second État soit nécessairement, dans tous les cas, plus complexe et doté de perspectives de succès moindres qu'un procès similaire qu'il aurait pu intenter devant un tribunal italien.
26. Il s'ensuit que le premier grief de la Commission doit être accueilli.
Sur l'obligation de constituer une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national
27. La Commission fait valoir que l'obligation de constituer une caution en Italie, telle que prévue à l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97, est également contraire à l'article 49 CE, dans la mesure où elle constituerait manifestement une entrave à l'exercice, en Italie, de l'activité de fourniture de travail temporaire par des entreprises établies dans d'autres États membres, lesquelles devraient déjà satisfaire aux conditions fixées par la législation de l'État dans lequel elles sont établies.
28. Par analogie avec l'arrêt Svensson et Gustavsson, précité, la Commission fait valoir en outre que l'obligation de constituer une telle caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national est contraire à la fois à l'article 56 CE et à l'article 49 CE et ne saurait être justifiée que par les raisons d'intérêt général mentionnées expressément à l'article 46 CE, combiné avec l'article 55 CE.
29. Le Gouvernement italien soutient que l'obligation de constituer une caution a pour objectif de garantir les créances salariales et le paiement des cotisations sociales correspondantes des travailleurs employés par des entreprises de fourniture de travail temporaire. Il fait valoir que la caution prévue par la législation italienne ne peut pas être considérée comme étant analogue ou comparable aux garanties exigées par les législations d'autres États membres, dans la mesure où celles-ci seraient destinées à garantir des créances nées dans un autre État membre ou poursuivraient des finalités autres que la caution prévue à l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97.
30. En ce qui concerne l'obligation de constituer ladite caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, le Gouvernement italien renvoie aux justifications fournies dans le contexte du premier grief soulevé par la Commission, en faisant valoir que la constitution d'une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale dans un autre État membre entraînerait des coûts plus élevés pour le travailleur.
Sur l'obligation de constituer une caution
31. Il est de jurisprudence constante que l'article 49 CE exige non seulement l'élimination de toute discrimination à l'encontre du prestataire de services établi dans un autre État membre en raison de sa nationalité, mais également la suppression de toute restriction, même si elle s'applique indistinctement aux prestataires nationaux et à ceux des autres États membres, lorsqu'elle est de nature à prohiber, à gêner ou à rendre moins attrayantes les activités du prestataire établi dans un autre État membre, dans lequel il fournit légalement des services analogues (voir, notamment, arrêts précités Parodi, point 18, et Arblade e.a., point 33).
32. Or, il n'est pas contesté que l'obligation de constituer une caution, à laquelle est subordonnée l'obtention de l'autorisation requise pour exercer, en Italie, l'activité de fourniture de travail temporaire, est de nature à gêner les activités d'un prestataire établi dans un autre État membre et constitue dès lors une restriction à la libre prestation des services au sens de l'article 49 CE.
33. S'agissant des arguments invoqués par le Gouvernement italien pour justifier cette restriction, il convient de rappeler qu'il est également de jurisprudence constante que la libre prestation des services, en tant que principe fondamental du traité, ne peut être limitée que par des réglementations justifiées par des raisons impérieuses d'intérêt général et s'appliquant à toute personne ou entreprise exerçant une activité sur le territoire de l'État membre d'accueil, dans la mesure où cet intérêt n'est pas sauvegardé par les règles auxquelles le prestataire est soumis dans l'État membre où il est établi (voir, notamment, arrêts précités Parodi, point 21; Arblade e.a., point 34, et Commission-Italie, point 23).
34. Or, en exigeant que toutes les entreprises constituent la caution prévue à l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97 en vue d'obtenir l'autorisation requise pour exercer, en Italie, l'activité de fourniture de travail temporaire, ladite loi exclut qu'il soit tenu compte d'obligations comparables, en raison de leur finalité, à celles auxquelles le prestataire est déjà soumis dans l'État membre où il est établi (voir, en ce sens, outre les arrêts précités Commission-Belgique, point 38, et Commission-Italie, point 24, arrêt du 9 mars 2000, Commission-Italie, C-358-98, Rec. p. I-1255, point 13).
35. Dès lors, le second grief de la Commission, en tant qu'il conteste l'obligation de constituer une caution, est fondé.
Sur l'obligation de constituer une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national
36. À cet égard, il convient de constater, d'une part, qu'il n'est pas contesté que, ainsi qu'il ressort du point IX de la nomenclature des mouvements de capitaux figurant à l'annexe I de la directive 88-361-CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l'article 67 du traité (JO L 178, p. 5), les cautionnements accordés par des non-résidents à des résidents ou par des résidents à des non-résidents constituent des mouvements de capitaux au sens de l'article 1er de ladite directive et, dès lors, relèvent de l'article 56, paragraphe 1, CE (voir, en ce sens, arrêt du 16 mars 1999, Trummer et Mayer, C-222-97, p. I-1661, points 21 à 24).
37. D'autre part, l'obligation de constituer une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, telle qu'elle résulte de l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97, est une restriction aux mouvements de capitaux au sens de l'article 56, paragraphe 1, CE, dans la mesure où elle empêche une entreprise souhaitant exercer l'activité de fourniture de travail temporaire en Italie de présenter, en vue de l'obtention de l'autorisation requise à cette fin, une caution constituée auprès d'un établissement de crédit établi dans un autre État membre.
38. En outre, une disposition nationale telle que l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97, en ce qu'elle réserve aux seuls établissements de crédit ayant leur siège ou une succursale en Italie la constitution des cautions requises pour l'obtention de ladite autorisation, constitue également une discrimination à l'encontre des établissements de crédit établis dans d'autres États membres, interdite par l'article 49, premier alinéa, CE (voir, en ce sens, arrêt Svensson et Gustavsson, précité, point 12).
39. S'agissant des arguments invoqués par le Gouvernement italien pour justifier l'article 2, paragraphe 2, sous c), de la loi n° 196-97, il suffit de constater que la constitution de la caution, imposée par cette disposition, incombe à l'entreprise de fourniture de travail temporaire et n'engendre donc pas de coûts à la charge des travailleurs employés par cette dernière.
40. Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que le second grief de la Commission, en tant qu'il conteste l'obligation de constituer une caution auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, est également fondé, de sorte qu'il y a lieu de l'accueillir dans sa totalité.
41. Il découle de l'ensemble des considérations qui précèdent que, en imposant que les entreprises de fourniture de travail temporaire établies dans d'autres États membres aient leur siège social ou une succursale sur le territoire national et déposent une caution de 700 millions de ITL auprès d'un établissement de crédit ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE et 56 CE.
Sur les dépens
42. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République italienne et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs,
LA COUR (sixième chambre),
Déclare et arrête:
1) En imposant que les entreprises de fourniture de travail temporaire établies dans d'autre États membres aient leur siège social ou une succursale sur le territoire national et déposent une caution de 700 millions de ITL auprès d'un établissement ayant son siège ou une succursale sur le territoire national, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 CE et 56 CE.
2) La République italienne est condamnée aux dépens.