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Décisions

CJCE, 6e ch., 24 octobre 2002, n° C-99/01

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Linhart, Biffl

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Puissochet

Avocat général :

M. Geelhoed

Juges :

MM. Schintgen, Skouris, Cunha Rodrigues, Mme Macken

CJCE n° C-99/01

24 octobre 2002

LA COUR (sixième chambre),

1 Par ordonnance du 29 janvier 2001, parvenue à la Cour le 28 février suivant, le Verwaltungsgerichtshof a posé, en application de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation des articles 30 et 36 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE et 30 CE) ainsi que des directives 76-768-CEE du Conseil, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques (JO L 262, p. 169), telle que modifiée par la directive 93-35-CEE du Conseil, du 14 juin 1993 (JO L 151, p. 32, ci-après la "directive 76-768"), et 84-450-CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse (JO L 250, p. 17).

2 Ces questions ont été posées dans le cadre de litiges relatifs aux poursuites engagées contre MM. Linhart et Biffl, auxquels il est reproché d'avoir mis sur le marché des produits cosmétiques incorrectement désignés.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3 L'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 dispose:

"Les États membres prennent toute disposition utile pour que, dans l'étiquetage, la présentation à la vente et la publication concernant les produits cosmétiques, le texte, les dénominations, marques, images ou autres signes figuratifs ou non ne soient pas utilisés pour attribuer à ces produits des caractéristiques qu'ils ne possèdent pas. [...]"

4 L'article 7 bis, paragraphe 1, de la directive 76-768 prévoit:

"Le fabricant, ou son mandataire, ou la personne pour le compte de laquelle un produit cosmétique est fabriqué, ou le responsable de la mise sur le marché communautaire d'un produit cosmétique importé, s'assure que les autorités compétentes des États membres concernés ont, à des fins de contrôle, aisément accès, à l'adresse spécifiée sur l'étiquette conformément à l'article 6 paragraphe 1 point a), aux informations suivantes:

[...]

f) les données existantes en matière d'effets indésirables pour la santé humaine provoqués par le produit cosmétique suite à son utilisation;

g) les preuves de l'effet revendiqué par le produit cosmétique, lorsque la nature de l'effet ou du produit le justifie."

5 L'article 4, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 84-450 énonce:

"Les États membres veillent à ce qu'il existe des moyens adéquats et efficaces pour contrôler la publicité trompeuse dans l'intérêt des consommateurs aussi bien que des concurrents et du public en général.

[...]"

6 Aux termes de l'article 7 de la directive 84-450:

"La présente directive ne fait pas obstacle au maintien ou à l'adoption par les États membres de dispositions visant à assurer une protection plus étendue des consommateurs, des personnes qui exercent une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ainsi que du public en général."

La réglementation nationale

7 Le Bundesgesetz über den Verkehr mit Lebensmittel, Verzehrprodukten, Zusatzstoffen, Kosmetischen Mitteln und Gebrauchsgegenständen (Lebensmittelgesetz 1975) (loi fédérale sur la mise dans le commerce de denrées alimentaires, de produits destinés à la consommation humaine, d'additifs, de produits cosmétiques et d'objets d'utilisation courante, ci-après le "LMG"), du 23 février 1975, dispose, à son article 8:

"Les denrées alimentaires, produits de consommation et additifs sont:

[...]

f) désignés de manière incorrecte lorsqu'ils sont commercialisés avec des indications susceptibles d'être trompeuses et relatives à des éléments essentiels en vertu des usages, notamment au regard des attentes des consommateurs, par exemple, la nature, la provenance, le domaine d'utilisation, la conservation, la date de fabrication, la qualité, la teneur en éléments déterminant la valeur, la quantité, la dimension, le nombre ou le poids, ou sous une forme ou une présentation susceptibles de l'être ou avec des indications illicites ayant trait à la santé."

8 L'article 9, paragraphes 1 et 3, du LMG prévoit:

"1. Lors de la mise dans le commerce de produits alimentaires, de produits destinés à la consommation humaine ou d'additifs, il est interdit:

a) de faire référence à la prévention, au soulagement ou à la guérison de maladies ou de symptômes de maladie, ou à des effets physiologiques ou pharmacologiques, notamment des effets qui conservent la jeunesse, ralentissent les symptômes du vieillissement, font maigrir ou conservent la santé, ou de donner l'impression d'un tel effet;

b) de faire référence à des récits de malades, à des recommandations de médecins ou à des expertises médicales;

c) d'utiliser des représentations liées à la santé, figuratives ou stylisées, d'organes du corps humain, des images des membres des professions de soins de santé ou d'établissements thermaux ou d'autres images renvoyant à des activités de soins liées à la santé.

[...]

3. Le ministre fédéral de la Santé et de l'Environnement autorise par arrêté, sur demande, des indications ayant trait à la santé pour certaines denrées alimentaires ou produits de consommation lorsque cela est compatible avec la protection des consommateurs contre la fraude. L'arrêté doit être abrogé lorsque les conditions de l'autorisation ne sont plus remplies."

9 Aux termes de l'article 26, paragraphe 1, du LMG, il est interdit de mettre sur le marché des produits cosmétiques qui:

"a) nuisent à la santé dans des conditions normales ou prévisibles d'utilisation;

b) contiennent des substances pharmacologiquement actives ou des colorants non autorisés, ne correspondant pas aux conditions d'autorisation ou présentes dans des quantités interdites;

c) sont avariés;

d) sont incorrectement désignés;

e) ne répondent pas aux règles édictées en vertu de l'article 27."

10 Selon l'article 26, paragraphe 2, du LMG:

"L'article 8, sous a), b) et f), s'applique par analogie [pour le commerce des produits cosmétiques], l'article 9 s'applique sous la réserve que des indications non trompeuses relatives à des effets physiologiques ou pharmacologiques ainsi que des représentations figuratives pour expliquer le domaine d'utilisation du produit sont autorisées. Si de tels effets sont affirmés, il faut communiquer à l'administration, à la demande de celle-ci, les composants actifs [du produit]."

Les litiges au principal et les questions préjudicielles

11 Deux litiges au principal sont à l'origine de la présente demande préjudicielle.

12 Par décision de l'Unabhängiger Verwaltungssenat Wien (Autriche) du 22 février 1999, M. Linhart, gérant de la Colgate Palmolive GmbH, a été reconnu coupable d'une infraction administrative au regard de l'application combinée des articles 74, paragraphe 1, 9, paragraphe 1, sous a), et 8, sous f), du LMG, en raison du fait que ladite société a mis sur le marché le produit cosmétique "Palmolive flüssige Seife Prima Antibakteriell" portant la mention "testé dermatologiquement" sur son conditionnement.

13 L'Unabhängiger Verwaltungssenat im Land Niederösterreich (Autriche) a, par décision du 9 mai 2000, condamné M. Biffl, en sa qualité de gérant de la Haarkos Parfumeriewaren und Kosmetika GmbH, pour violation des articles 74, paragraphe 1, 9, paragraphe 1, sous b), et 8, sous f), du LMG, au motif que ladite société avait distribué le produit "Keralogie Creme-Peeling Anti Schuppen regulierendes Haarbad" dont le conditionnement portait l'indication "testé dermatologiquement".

14 Dans les recours qu'ils ont introduits contre ces décisions devant le Verwaltungsgerichtshof, MM. Linhart et Biffl ont soutenu que la législation autrichienne en vigueur, sur laquelle lesdites décisions sont fondées, serait contraire au droit communautaire, notamment aux dispositions de la directive 76-768, et à la jurisprudence de la Cour, telle qu'elle résulte en particulier de l'arrêt du 28 janvier 1999, Unilever (C-77-97, Rec. p. I-431).

15 Le Verwaltungsgerichtshof relève que la question de la conformité de la réglementation autrichienne, telle qu'elle devrait être appliquée dans la procédure au principal, au traité CE et aux directives 76-768 et 84-450 n'est pas totalement clarifiée par la jurisprudence de la Cour. En l'espèce, la juridiction de renvoi considère que la directive 2000-13-CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 mars 2000, relative au rapprochement des législations des États membres concernant l'étiquetage et la présentation des denrées alimentaires ainsi que la publicité faite à leur égard (JO L 109, p. 29), selon laquelle l'étiquetage ne doit pas attribuer à une denrée alimentaire des propriétés de prévention, de traitement et de guérison d'une maladie humaine, ni évoquer ces propriétés, est susceptible de s'appliquer également aux produits cosmétiques.

16 Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

"1) Les articles 28 CE et 30 CE, la directive 76-768-CEE du Conseil, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques, telle que modifiée par les directives 88-667-CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, et 93-35-CEE du Conseil, du 14 juin 1993 [...], en particulier son article 6, paragraphe 3, et la directive 84-450-CEE du Conseil, du 10 septembre 1984, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité trompeuse [...], en particulier ses articles 4 et 7, s'opposent-ils à la réglementation d'un État membre interdisant lors de la mise sur le marché de produits cosmétiques la référence à des expertises médicales en particulier l'utilisation de la mention testé cliniquement ou testé dermatologiquement lorsque, faute d'indications sur l'objet et le résultat de l'expertise, cette référence est susceptible de susciter chez le consommateur des idées fausses quant à la composition et au mode d'action du produit ?

2) Les articles 28 CE et 30 CE, la directive 76-768, en particulier son article 6, paragraphe 3, et la directive 84-450, en particulier ses articles 4 et 7, s'opposent-ils à la réglementation d'un État membre qui n'autorise l'utilisation d'indications au sens de la question sous 1) que sous réserve d'une autorisation préalable délivrée par le ministre compétent ?"

Observations liminaires

17 À titre liminaire, il convient de rappeler que la directive 76-768 a procédé à une harmonisation exhaustive des règles nationales d'emballage et d'étiquetage des produits cosmétiques (voir, notamment, arrêts Unilever, précité, point 24, et du 13 janvier 2000, Estée Lauder, C-220-98, Rec. p. I-117, point 23).

18 Or, ainsi que la Cour l'a déjà jugé, lorsqu'une question est réglementée de manière harmonisée au niveau communautaire, toute mesure nationale y relative doit être appréciée au regard des dispositions de cette mesure d'harmonisation et non pas de celles des articles 30 et 36 du traité (arrêts du 23 novembre 1989, Parfümerie-Fabrik 4711, C-150-88, Rec. p. 3891, point 28; du 12 octobre 1993, Vanacker et Lesage, C-37-92, Rec. p. I-4947, point 9, et du 13 décembre 2001, DaimlerChrysler, C-324-99, Rec. p. I-9897, point 32).

19 Il y a lieu également de rappeler que l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 impose aux États membres de prendre toute disposition utile pour que, dans l'étiquetage, la présentation à la vente et la publication concernant les produits cosmétiques, le texte, les dénominations, marques, images ou autres signes figuratifs ou non ne soient pas utilisés pour attribuer à ces produits des caractéristiques qu'ils ne possèdent pas.

20 Il s'agit en l'espèce d'une disposition concrète, dont l'objectif est l'interdiction des indications trompeuses portant exclusivement sur les caractéristiques des produits cosmétiques, qui doit donc être interprétée comme une règle spéciale par rapport aux règles générales en matière de protection contre la tromperie prévues par la directive 84-450.

21 Il s'ensuit que, pour répondre aux questions préjudicielles, la Cour doit se limiter à l'interprétation de l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768.

Sur la première question

22 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 s'oppose à la réglementation d'un État membre qui, lors de la mise sur le marché de produits cosmétiques, interdit la référence à des expertises médicales en particulier l'utilisation de la mention "testé cliniquement" ou "testé dermatologiquement" lorsque, faute d'indications relatives à l'objet et au résultat de ces expertises, cette référence est susceptible de susciter chez le consommateur des idées fausses quant à la composition et au mode d'action du produit.

23 Il convient de rappeler que l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 impose aux États membres de prendre toute disposition utile pour que, dans l'étiquetage, la présentation à la vente et la publication concernant les produits cosmétiques, le texte, les dénominations, marques, images ou autres signes figuratifs ou non ne soient pas utilisés pour attribuer à ces produits des caractéristiques qu'ils ne possèdent pas.

24 Le caractère exhaustif de cette réglementation, qui a déjà été relevé au point 17 du présent arrêt, a pour conséquence que les États membres ne sont plus autorisés à adopter des mesures nationales plus sévères ayant pour finalité la répression de la publicité trompeuse en ce qui concerne les caractéristiques des produits cosmétiques.

25 En effet, il est de jurisprudence constante que, s'il est vrai que l'article 36 du traité permet aux États membres de maintenir des restrictions à la libre circulation des marchandises, il n'en reste pas moins que l'application de cette disposition doit être exclue lorsque des directives communautaires prévoient l'harmonisation des mesures nécessaires à la réalisation de l'objectif spécifique que poursuivrait le recours audit article 36 (voir, notamment, arrêts du 19 mars 1998, Compassion in World Farming, C-1-96, Rec. p. I-1251, point 47, et du 25 mars 1999, Commission/Italie, C-112-97, Rec. p. I-1821, point 54). Cette exclusion s'impose également lorsqu'est invoquée la nécessité de protéger les consommateurs (arrêt du 12 novembre 1998, Commission/Allemagne, C-102-96, Rec. p. I-6871, point 21).

26 Les mesures que les États membres sont appelés à prendre pour la mise en œuvre de l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 doivent cependant respecter le principe de proportionnalité (voir, notamment, arrêts précités Unilever, point 27, et Estée Lauder, point 26).

27 Or, selon l'article 26, paragraphe 2, du LMG, les mentions relatives à des expertises médicales sont interdites à moins que des indications non trompeuses relatives à des effets physiologiques ou pharmacologiques du produit concerné ne soient autorisées.

28 En l'occurrence, ainsi qu'il ressort de l'ordonnance de renvoi, l'interdiction de la mention "testé dermatologiquement" sur les conditionnements des produits en cause au principal est intervenue au seul motif que ceux-ci ont été mis sur le marché sans aucune indication relative à l'objet et au résultat de l'expertise médicale qui est implicitement sous-entendue par ladite mention.

29 En effet, d'après la réglementation autrichienne et la jurisprudence nationale, l'absence de références explicites quant à l'objet et au résultat de l'expertise médicale à laquelle les produits cosmétiques ont été soumis peut suggérer chez le consommateur l'idée fausse selon laquelle ces derniers comporteraient des effets curatifs.

30 Dans ce contexte, il convient de vérifier si la simple mention "testé dermatologiquement", inscrite sur le conditionnement d'un produit cosmétique, est susceptible d'attribuer à celui-ci des caractéristiques qu'il ne possède pas, permettant ainsi aux autorités nationales d'interdire sa commercialisation en application de l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768.

31 À cet égard, la Cour a jugé que le critère de l'attente présumée d'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, s'applique également dans le domaine de la commercialisation de produits cosmétiques lorsqu'une erreur sur les caractéristiques du produit ne saurait porter atteinte à la santé publique (arrêt Estée Lauder, précité, points 27 et 28).

32 L'application d'un tel critère au litige au principal permet de considérer que la mention "testé dermatologiquement", figurant sur le conditionnement de certains produits cosmétiques, en l'occurrence des savons et des produits capillaires, ne peut suggérer chez un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, d'autre idée que celle selon laquelle un tel produit a subi un test ayant pour objet l'étude de ses effets pour la peau et que, par conséquent, sa mise sur le marché implique que les résultats de ce test ont été positifs et que sa bonne tolérance par l'épiderme ou, à tout le moins, son caractère inoffensif pour la peau ont été constatés.

33 Par ailleurs, l'authenticité de ces résultats reste soumise au contrôle des autorités nationales.

34 En effet, l'article 7 bis, paragraphe 1, sous f) et g), de la directive 76-768 impose au responsable de la mise sur le marché d'un produit cosmétique l'obligation de s'assurer que les autorités compétentes des États membres ont aisément accès aux informations concernant les données existantes en matière d'effets indésirables pour la santé humaine provoqués par le produit en cause à la suite de son utilisation et les preuves de l'effet revendiqué par celui-ci.

35 Dans ces conditions, la mention "testé dermatologiquement" ne saurait induire en erreur un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, en attribuant aux produits en cause des caractéristiques qu'ils ne possèdent pas et, en tout état de cause, une éventuelle erreur relative auxdites caractéristiques ne serait pas susceptible d'avoir une incidence sur la santé publique.

36 Il en découle que l'interdiction de ladite mention, dans les cas où aucune indication relative à l'objet et au résultat de l'expertise médicale ne figure sur les conditionnements des produits cosmétiques, est une mesure nationale de répression de la tromperie plus stricte que celle prévue à l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768.

37 S'agissant de la mention "testé cliniquement", qui est également mentionnée dans l'ordonnance de renvoi, il convient de constater qu'il ressort du dossier qu'une telle mention est sans aucun rapport avec l'objet du litige au principal. En effet, celui-ci porte uniquement sur l'indication "testé dermatologiquement" figurant sur le conditionnement des produits en cause.

38 Il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de répondre à la question concernant l'utilisation de la mention "testé cliniquement".

39 Compte tenu des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 s'oppose à la réglementation d'un État membre qui, lors de la mise sur le marché de produits cosmétiques, interdit la référence à des expertises médicales en particulier l'utilisation de la mention "testé dermatologiquement" lorsque cette référence ne comporte pas d'indications relatives à l'objet et au résultat de ces expertises.

Sur la seconde question

40 Par sa seconde question, la juridiction nationale demande en substance si l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 s'oppose à la réglementation d'un État membre qui n'autorise l'utilisation d'indications telles que mentionnées dans la première question que sous réserve d'une autorisation préalable délivrée par le ministre compétent.

41 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l'application combinée des articles 9, paragraphe 3, et 26, paragraphe 2, du LMG, le ministre compétent autorise par arrêté, sur demande, des indications ayant trait à la santé pour certains produits cosmétiques lorsque cela est compatible avec la protection des consommateurs contre la fraude.

42 Il s'ensuit que la mise sur le marché des produits cosmétiques portant la mention "testé dermatologiquement", même si celle-ci, ainsi que la Cour l'a constaté au point 35 du présent arrêt, n'est pas de nature à induire en erreur le consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, exige une autorisation préalable des autorités nationales.

43 Or, la mention "testé dermatologiquement" n'étant pas de nature à induire en erreur ledit consommateur, puisqu'elle n'attribue pas aux produits cosmétiques en cause des caractéristiques qu'ils ne possèdent pas, la commercialisation de ces produits ne tombe pas sous le coup des interdictions de l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768.

44 Il en résulte que la mise sur le marché des produits cosmétiques qui répondent aux prescriptions de la directive 76-768 est soumise à la règle fondamentale de la libre circulation des marchandises, les États membres n'étant pas, par conséquent, autorisés à prendre des mesures qui ont pour effet de restreindre leur commercialisation.

45 En conséquence, ainsi que la Cour l'a déjà jugé, la nécessité d'obtenir l'autorisation prévue à l'article 9, paragraphe 3, du LMG constitue une entrave à la libre circulation des produits en cause, privée de toute justification (arrêt Unilever, précité, point 34).

46 Il y a donc lieu de répondre à la seconde question que l'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768 s'oppose à la réglementation d'un État membre qui n'autorise l'utilisation d'indications au sens de la première question que sous réserve d'une autorisation préalable délivrée par le ministre compétent.

Sur les dépens

47 Les frais exposés par le Gouvernement autrichien et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre),

Statuant sur les questions à elle soumises par le Verwaltungsgerichtshof, par ordonnance du 29 janvier 2001, dit pour droit:

1) L'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768-CEE du Conseil, du 27 juillet 1976, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques, telle que modifiée par la directive 93-35-CEE du Conseil, du 14 juin 1993, s'oppose à la réglementation d'un État membre qui, lors de la mise sur le marché de produits cosmétiques, interdit la référence à des expertises médicales en particulier l'utilisation de la mention "testé dermatologiquement" lorsque cette référence ne comporte pas d'indications relatives à l'objet et au résultat de ces expertises.

2) L'article 6, paragraphe 3, de la directive 76-768, telle que modifiée par la directive 93-35, s'oppose à la réglementation d'un État membre qui n'autorise l'utilisation d'indications telles que mentionnées dans la première question que sous réserve d'une autorisation préalable délivrée par le ministre compétent.