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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch., 12 octobre 1998, n° 97004937

BORDEAUX

arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Volvo Aquitaine (SA)

Défendeur :

Paul

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Frizon de Lamotte

Conseillers :

Melle Courbin, M. Ors

Avoués :

SCP Arsène-Henry & Lançon, SCP Touton-Pineau

Avocats :

Mes Oliver, Deffieux, Ferrant.

T. com. Bordeaux, du 28 août 1997

28 août 1997

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant bon de commande du 30 novembre 1995 M. Paul a acheté à la société Volvo Aquitaine SA (la société Volvo) un véhicule Scania, mis en circulation le 3 janvier 1979, ayant parcouru 1 186 977 Kms, au prix de 30 150 F TTC réglé suivant facture du même jour.

Par contrat écrit daté du même jour, le 30 novembre 1995, M. Paul a confié ce véhicule en dépôt à la société Volvo pour être proposé à la vente à un prix qui ne pourra être inférieur à 29 000 F HT.

Ce véhicule avait été acquis, suivant fiche de vente du 10 octobre 1995 versée par la société Volvo, par Volvo 25 000 F HT de la société TET qui l'avait elle- même acquis de la société Transports Internationaux Gouygou, le 8 juillet 1995 laquelle n'avait pas opéré mutation de la carte grise ; la carte grise au nom de la société des Transports Internationaux Philippe Gouygou porte la mention vendu le 8 juillet 1995 "Dates visites techniques 17 octobre 1996" ;

Le procès verbal de la visite technique le 25 octobre 1995 précise :

"propriétaire M. Philippe Gouygou"

"Refusé sans interdiction de circuler (sursis) date limite de validité du visa 17 novembre 1995".

Le 15 décembre 1995 M. Paul a fait établir la mutation de la carte grise de son véhicule ; celle-ci porte la mention :

"visite Mines avant le 17 octobre 1996"

Le 1er avril 1996 M. Paul a écrit à la société Volvo :

"Le 30 novembre 1995 vous m'avez vendu un tracteur Scania 141 immatriculé 2781 JE 33 en me confirmant son bon état général, je vous ai fait confiance.

Ce tracteur était destiné à garder mon inscription au registre des transporteurs dans l'attente de la réfection et du passage aux mines d'un de mes véhicules.

Il était convenu entre nous que vous gardiez ce tracteur avec une garantie impérative de revente en janvier 1996.

J'aurais dû être plus méfiant, l'examiner, l'essayer sans faire confiance à votre vendeur qui m'avait fait des promesses qu'il savait ne pas tenir.

En effet, par la suite après plusieurs conversations téléphoniques avec votre vendeur, celui-ci m'a envoyé sur les roses et m'a imposé de prendre livraison du véhicule.

Je me suis rendu sur place le 29 mars 1996 pour en prendre livraison mais cela fût impossible puisque :

- il y avait une roue de crevée.

- les batteries étaient à plat en ouvrant les portes qui étaient fermées lors de l'achat, j'ai pu constater avec stupeur que certains endroits de la cabine étaient complètement endommagés par la corrosion, le jour paraissant au travers.

- que vous n'aviez pas le carnet d'entretien, ou que vous n'aviez pas intérêt à me le faire voir, car sans doute des annotations importantes doivent être mentionnées par le service des mines."

Par acte du 29 novembre 1996 M. Paul a fait assigner la société Volvo devant le Tribunal de commerce de Bordeaux en restitution du prix de la vente et dommages et intérêts.

Par jugement du 10 juillet 1997 le tribunal de commerce a statué ainsi :

"Condamne la SA Volvo Aquitaine à payer à M. Bernard Paul les sommes de :

- 30 150 F (trente mille cent cinquante francs) à titre principal,

- 2 603 F (deux mille six cents trois francs) au titre des formalités d'immatriculation,

- 10 000 F (dix mille francs) au titre des dommages et intérêts,

- 3 500 F (trois mille cinq cents francs) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement, sans constitution de garantie, à l'exception de la condamnation prononcée sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Condamne la SA Volvo Aquitaine aux dépens de l'instance."

La société Volvo a interjeté appel de cette décision ; elle a formé devant la cour les demandes suivantes :

"Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société Volvo Aquitaine SA à l'encontre du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Bordeaux le 10 juillet 1997.

Y faisant droit et réformant ledit jugement :

- dire et juger qu'à la date de la cession, le 30 novembre 1995, le véhicule vendu à M. Paul n'était pas interdit à la circulation.

- dire et juger que le véhicule en question n'était atteint d'aucun vice rédhibitoire.

- débouter en conséquence M. Paul de l'ensemble de ses demandes.

Faisant droit à l'appel incident de la société Volvo Aquitaine SA, condamner M. Paul à lui payer la somme de 15 000 F à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.

Condamner M. Paul à payer à la société Volvo Aquitaine SA, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du NCPC la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles par elle exposés devant le tribunal de commerce.

Condamner M. Paul à payer à la société Volvo Aquitaine SA, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du NCPC, la somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles par elle exposés dans le cadre de la présente instance.

Condamner M. Paul aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction, pour ces derniers, au profit de la SCP Juia, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC."

De son côté M. Paul a formé les demandes suivantes :

"Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux du 10 juillet 1997.

En conséquence,

Vu la cession du 30 novembre 1995.

Vu le procès verbal de visite de technique établi par la Drire, le 17 octobre 1995 et n'ayant accordé qu'un visa de validité limité au 17 novembre 1995, à défaut d'avoir effectué les réparations visées dans le procès verbal.

Vu le courrier de la Drire du 24 septembre 1996 confirmant que la date limite de validité du visa était bien le 17 novembre 1995.

Constater qu'à la date de la cession, soit le 30 novembre 1995, le véhicule vendu à M. Paul était interdit à la circulation.

Dire et juger qu'il s'agit d'un vice rédhibitoire et essentiel justifiant la résolution de la vente.

En conséquence,

Condamner la société Volvo Aquitaine SA à verser à M. Paul :

- la somme de 30 150 F correspondant au prix de la cession ;

- la somme de 2 603 F correspondant aux formalités d'immatriculation ;

- la somme de 10 000 F à titre de dommages et intérêts ;

- la somme de 3 500 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

Y ajoutant,

Recevoir M. Paul en son appel incident.

Débouter la société Volvo Aquitaine en toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamner la société Volvo Aquitaine à payer à M. Paul la somme de 20 000 F à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive, outre la somme de 15 000 F sur le fondement de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'en tous les dépens que pourra recouvrer Me Touton-Pineau-Figerou, avoués aux offres de droit."

DISCUSSION

La Drire chargée du contrôle technique a reconnu que lors de la visite du véhicule l'expert technique de ses services avait :

- "par erreur donné une validité de 1 an sur le certificat d'immatriculation au lieu du délai de circulation d'un mois", soit au 17 octobre 1996,

- rectifié le procès verbal de visite à l'origine daté du 17 octobre 1995 en portant par surcharge le 17 octobre 1996 ; il en résulte :

- que l'erreur portée sur le certificat d'immatriculation n'est pas imputable à la société Volvo,

- qu'il existe un doute sur la date précise portée sur le procès-verbal.

M. Paul qui poursuit la résolution de la vente, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que le carnet d'entretien et le procès-verbal du 17 octobre 1995 ne lui ont pas été remis au moment de la vente et du contrat de dépôt vente.

Par ailleurs, il est reconnu par M. Paul dans son courrier du 1er avril 1996 que le véhicule n'a été acquis, le 30 novembre 1995, qu'avec le seul objectif, non de le mettre directement en circulation, mais de lui permettre de conserver son inscription au registre des transporteurs, d'ailleurs le même jour était conclu un contrat de dépôt vente.

M. Paul est un transporteur professionnel et il n'est pas crédible qu'il ait acquis un camion pour le faire circuler sans même le visiter ainsi qu'il le prétend dans ses courriers, en tout cas il ne peut en cette qualité reprocher au vendeur les vices apparents qu'il impute au véhicule dans ses courriers (trous dans la carrosserie ...).

La preuve d'un dol, ou d'un vice caché portant sur les qualités substantielles du véhicule vendu, au sens de l'article 1644 du Code civil n'est pas rapportée.

Le jugement doit donc être infirmé et M. Paul débouté de ses demandes.

Il n'est pas justifié d'un préjudice susceptible de fonder la demande en dommages et intérêts.

Il est équitable enfin de laisser à la charge de la société Volvo les frais irrépétibles engagés par elle.

DECISION

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Infirme le jugement, Déboute M. Paul de toutes ses demandes, Déboute la société Volvo Aquitaine SA de ses demandes en paiement de dommages et intérêts et de frais irrépétibles, Condamne M. Paul aux entiers dépens, application étant faite de l'article 699 du NCPC.