CA Bourges, 1re ch. civ., 8 décembre 1993, n° 537-93
BOURGES
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Caisse Régionale de Crédit Agricole (Sté)
Défendeur :
Dépeigne ; Pinoteau ; BNP (Sté) ; Cetelem (Sté) ; Finaref (Sté) ; Sofinco (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Couturier
Conseillers :
Mmes Perrin, Warein
Avocat :
Me Bangoura.
La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Cher est régulièrement appelante d'un jugement du 28 janvier 1993 par lequel le Tribunal d'instance de Bourges statuant en matière de surendettement des particuliers a notamment :
- ouvert la procédure de redressement judiciaire civil des consorts Pinoteau-Dépeigne ;
- débouté la société Cetelem de toutes ses réclamations ;
- fixé le plan d'apurement des créances BNP, Sofinco et Finaref suivant détail pour lequel il convient de se reporter au dispositif de la décision critiquée ;
- déclaré l'offre préalable de crédit de la CRCAM du Cher en date du 2 novembre 1990 non conforme aux dispositions de l'article 5 de la loi du 10 janvier 1978 ;
- sursis à statuer sur la fixation de cette créance et des conditions de son paiement, et invité la CRCAM du Cher à produire un décompte faisant application de l'article 23 de la loi du 10 janvier 1978 ;
- ordonné l'arrêt de toute poursuite à l'encontre des consorts Pinoteau-Dépeigne, du chef des créances figurant au plan de règlement et donné mainlevée de toutes les voies d'exécution pratiquées ;
Elle fait valoir que le tribunal a relevé d'office la non-conformité du contrat aux dispositions des articles 5 et 27 de la loi du 10 janvier 1978 sans qu'elle ait été mise à même de s'en expliquer et qu'en toute hypothèse le contrat litigieux ayant été signé le 2 novembre 1990, sa régularité ne pouvait être remise en cause au-delà du 2 novembre 1992 ;
Elle demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déclarée déchue de son droit aux intérêts contractuels et d'admettre sa créance dans son intégralité ;
Les consorts Pinoteau-Dépeigne ont sollicité la confirmation du jugement critiqué ;
Les autres créanciers n'étaient ni présents ni représentés à l'audience du 3 novembre 1993 bien qu'ayant été régulièrement convoqués par les soins du greffe de la cour, de sorte qu'il sera statué par arrêté réputé contradictoire ;
Sur quoi, LA COUR
Attendu que l'article 27 de la loi n° 71-22 du 10 janvier 1978 dispose que le tribunal d'instance connaît des litiges nés de l'application de ladite loi et que les actions engagées devant lui doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion ;
Attendu que si ce texte prévoit que toute action relative à l'application de ladite loi doit être introduite dans le délai de deux ans à compter de l'événement qui lui a donné naissance, il n'interdit nullement au juge saisi d'une demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire civil de soulever d'office la non-conformité du contrat de prêt aux dispositions de l'article 5 de cette même loi et ce quand bien même il se serait écoulé plus de deux ans, depuis tout événement qui aurait été susceptible d'ouvrir à l'une ou l'autre partie l'une quelconque des actions prévues par la loi ;
Que ce moyen n'est donc pas fondé ;
Que les parties ont été mises à même de débattre contradictoirement devant la cour de la non-conformité du contrat aux dispositions de l'article 5 de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 ;
Qu'il échet en conséquence de confirmer en son entier la décision querellée ;
Par ces motifs ; Statuant par arrêt réputé contradictoire ; En la forme déclare l'appel recevable ; Au fond le dit injustifié ; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ; Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Cher aux dépens d'appel.