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Décisions

Cass. com., 27 septembre 2005, n° 04-16.677

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Béton Travaux (SA), Unibéton (SA), RMC France (SAS), Société brignolaise de béton et d'agglomérés (SARL)

Défendeur :

Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, DGCCRF, Procureur général près la CA Paris

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Beaudonnet

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Célice, Blancpain, Soltner, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, Me Ricard

Cass. com. n° 04-16.677

27 septembre 2005

LA COUR : - Joint les pourvois n° 04-16.677, formé par la société Béton Travaux, n° 04-16.678, formé par la société RMC France et la Société brignolaise de bétons et d'agglomérés, et n° 04-16.713, formé par la société Unibéton, qui attaquent le même arrêt ;

Sur le second moyen des pourvois n° 04-16.678 et n° 04-16.677, pris en leurs deuxième et troisième branches, et la quatrième branche du moyen unique du pourvoi n° 04-16.713, réunis : - Vu les articles L. 464-8 du Code de commerce, 561 et 562 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 9 octobre 2001, Bull IV n° 160), que, saisi par le ministre de l'Economie de pratiques constatées sur le marché du béton prêt à l'emploi de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur d'une demande de mesures conservatoires afférentes aux pratiques visées dans la saisine au fond, le Conseil de la concurrence (le Conseil) a statué sur les mesures conservatoires par décision 94-MC-10 du 14 septembre 1994 ; que le recours contre cette décision a été rejeté par arrêt de la cour d'appel du 3 novembre 1994, les pourvois contre cet arrêt ayant été rejetés par la Chambre commerciale, financière et économique par arrêts du 4 février 1997 ; que, statuant sur la saisine au fond par décision n° 97-D-39 du 17 juin 1997, le Conseil, après avoir rejeté des moyens tirés de la nullité de la procédure d'enquête, a infligé à treize entreprises des sanctions pécuniaires d'un montant compris entre 50 000 francs et 40 millions de francs et a ordonné la publication de sa décision, en raison d'ententes se manifestant par des fixations concertées de prix, de répartition de marchés et de pratiques de prix prédateurs aux fins d'éviction de certains concurrents ; que, par arrêt du 20 octobre 1998, rectifié par arrêt du 24 novembre suivant, la Cour d'appel de Paris a rejeté les recours en annulation ou réformation formés contre la décision du Conseil par dix des entreprises sanctionnées ; que, par arrêt précité du 9 octobre 2001, la Chambre commerciale, financière et économique a cassé et annulé cette décision en toutes ses dispositions et a renvoyé les parties devant la Cour d'appel de Paris autrement composée ; que les sociétés RMC France, Brignolaise de bétons et d'agglomérés, Unibéton et Béton Travaux ont saisi la cour d'appel qui, après avoir annulé la décision du Conseil en raison de violations de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales résultant de ce que des membres du Conseil statuant au fond avaient également statué sur les mesures conservatoires et de la participation du rapporteur et du rapporteur général au délibéré du Conseil statuant au fond, a renvoyé l'affaire devant le Conseil pour qu'il soit à nouveau statué et a ordonné la restitution des sommes versées par les entreprises entre les mains du Trésor public ;

Attendu que, pour renvoyer l'affaire devant le Conseil, après avoir annulé la décision rendue par celui-ci, la cour d'appel retient qu'elle n'est pas tenue de statuer en fait et en droit sur les griefs notifiés au cours de la procédure ayant donné lieu à la décision qu'elle annule et que, " sans qu'il y ait lieu d'examiner autrement la régularité de la procédure suivie devant le Conseil avant la décision annulée, il est d'une bonne administration de renvoyer l'affaire à la connaissance du Conseil de la concurrence, dès lors que le ministre, autorité de poursuite en l'espèce, se bornant à se fonder sur les dispositions de la décision annulée pour demander la "réformation" de celle-ci, aucune qualification des faits n'est proposée à la cour et qu'il est opportun de permettre au Conseil d'examiner le mérite des critiques formées par les sociétés requérantes contre la procédure suivie, de sorte qu'il puisse y apporter la solution qu'il estimera convenable " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, peu important que le ministre de l'Economie n'ayant pas formé de recours à l'encontre de la décision du Conseil ne soit pas partie à l'instance, alors que, saisie par des parties en cause d'un recours en annulation ou en réformation de la décision du Conseil, la cour d'appel, qui, après avoir annulé cette décision, était tenue de statuer en fait et en droit sur les demandes des parties tendant à l'annulation de l'enquête et de l'instruction ayant conduit à la décision qu'elle annulait et, le cas échéant, sur les griefs notifiés et maintenus par le rapport, a violé, par refus d'application, les textes susvisés ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juin 2004, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée.