CA Angers, 1re ch. A, 10 mai 1999, n° 98-00175
ANGERS
arrêt
PARTIES
Demandeur :
Besson (Epoux)
Défendeur :
Raulet Automobiles (SA) ; Sygma Banque (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Chauvel (faisant fonction)
Conseillers :
M. Lemaire, Mme Lourmet
Avoués :
Me Vicart, SCP Chatteleyn, George, SCP Gontier-Langlois
Avocats :
Mes Brenner, Champs
Le 25 janvier 1997, Monsieur Besson a passé commande auprès de la société Raulet Automobiles d'un véhicule automobile Porsche de type 911 Turbo pour le prix de 838 200 F. Il était prévu une livraison en juillet, une reprise d'un précédent véhicule Porsche pour la somme de 180 000 F sous déduction du solde d'un crédit, ainsi qu'un financement par un prêt, lequel a été obtenu de la société Banque Sygma à hauteur de 450 000 F.
Par actes des 23 septembre et 7 octobre 1997, les époux Besson ont fait assigner à jour fixe devant le Tribunal de grande instance du Mans la société Raulet Automobiles et la société Banque Sygma en résolution de la vente du véhicule pour défaut de livraison conforme à la commande et en "résiliation" du contrat, comme étant accessoire, de prêt.
Par jugement du 10 décembre 1997, le tribunal a:
- débouté les époux Besson de l'ensemble de leurs demandes et les a condamnés aux dépens (en écartant toute demande reconventionnelle de dommages-intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile).
Appel de cette décision a été interjeté par les époux Besson.
Vu les conclusions récapitulatives des appelants en date du 11 mars 1999, demandant à la cour, par voie d'infirmation, de:
- constater que la société Raulet Automobiles n'a pas rempli ses obligations contractuelles et n'a pas délivré la chose convenue,
- prononcer en conséquence la résolution de la vente aux torts exclusifs de celle-ci
- condamner la société Raulet Automobiles à leur rembourser la somme de 63 000 F et à lui payer celles de 20 000 F à titre de dommages-intérêts et de 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- résilier par voie de conséquence le prêt conclu avec la société Banque Sygma et condamner cette dernière à leur rembourser toutes sommes par eux versées au titre du contrat,
- subsidiairement, condamner la société Raulet Automobiles à les garantir de toutes condamnations et sommes qu'ils pourraient avoir à verser à cette banque.
Vu les conclusions récapitulatives de la société Raulet Automobiles, en dates du 10 mars 1999, aux fins de confirmation du jugement entrepris, sauf à ajouter condamnation in solidum des époux Besson à lui verser les sommes de 150 000 F en réparation des différents préjudices par elle subis, 20 000 F pour résistance abusive et procédure téméraire et vexatoire, 12 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile (subsidiairement en cas de résolution de la vente, 200 000 F à titre de dommages-intérêts).
Vu l'ensemble des conclusions de la société Sygma Banque aux fins principale de confirmation du jugement déféré et subsidiaire de condamnation des époux Besson au paiement de la somme de 450 000 F avec intérêts et aux fins d'allocation de la somme 7 500 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 11 mars 1999.
Motifs
Les documents produits établissent les faits suivants:
Le 25 janvier 1997, Monsieur Besson a donc passé commande d'un véhicule automobile Porsche type 911 Turbo, fabriquée sur commande et livrable en juillet.
Le 4 juillet 1997, la société Raulet Automobiles a établi une facture de 782 480 F pour un véhicule neuf de marque Porsche type 911 Turbo.
Monsieur Besson a signé un certificat d'immatriculation provisoire dudit véhicule pour la période du 5 juillet au 28 juillet 1997.
Le 12 juillet 1997, il a en outre apposé sa signature, précédée de la mention " reconnaissance de livraison et acceptation de déblocage des fonds au vendeur " au bas de la rubrique de l'offre de crédit de la société Banque Sygma, intitulée "demande de règlement et subrogation dans la réserve de propriété du vendeur" et en tête de laquelle le vendeur certifiait la livraison du matériel conforme au bon de commande.
Le 6 août 1997, il a déclaré "annuler et résilier" la commande du 5 janvier 1997 " non reçue à ce jour ". Le 11 août 1997, la société Raulet Automobiles a répondu que la vente était parfaite et que le véhicule serait remis dès versement du solde du principal, soit 269 507, 96 F.
La société Raulet Automobiles expose ici qu'au moment de la prise de possession du véhicule, Monsieur Besson a sollicité un délai pour se libérer en trois fois du solde dû, ce qu'elle n'avait pu accepter sans garantie et sans prévision initiale au contrat; qu'elle a donc retenu le véhicule, lequel a fait l'objet d'un vol dans ses locaux entre le 14 et le 18 août 1997; qu'elle n'en était alors plus que dépositaire et qu'elle ne peut répondre de sa perte par application de l'article 1929 du Code civil (et au besoin des articles 1624 et 1138 alinéa 2).
Le vol n'est pas contesté et a d'ailleurs fait l'objet tant d'un dépôt de plainte auprès des services de gendarmerie que d'une indemnisation par l'assureur.
Les époux Besson ne répliquent aucunement aux explications données par le vendeur sur la rétention du véhicule....
Ils prétendent que le véhicule fourni n'était pas conforme à la commande (volume du réservoir, forme des sièges) et qu'aux termes des conditions générales de vente, ils pouvaient précisément annuler la commande si le véhicule ne correspondait pas aux caractéristiques particulières à ladite commande. Ils insinuent même que le véhicule n'a jamais été commandé au fabricant. Mais il n'y avait aucune spécification sur ces points portée au bon de commande. La désignation du véhicule dans la facture adressée par la société Sonauto, fournisseur, à la société Raulet Automobiles, correspond à celle faite dans le bon de commande de Monsieur Besson. La lettre de résiliation adressée par ce dernier à la société Raulet Automobiles ne contient aucune allusion à un défaut de conformité à la commande. Enfin et surtout, il y a eu juridiquement réception sans réserve de l'acquéreur, par la signature des documents susvisés (certificat provisoire d'immatriculation, reconnaissance de livraison). Le reste des écritures des appelants repose sur des allégations qui ne sont étayées par rien.
Le jugement déféré sera par suite confirmé.
En cause d'appel, la société Raulet Automobiles réclame des dommages-intérêts à hauteur de 150 000 F, soit 50 000 F pour une surprime annuelle d'assurance liée au vol et 100 000 F au titre d'un manque à gagner, mais elle ne produit aucun justificatif, étant de surcroît observé, s'agissant du second poste, que les époux Besson sont déboutés de leur demande de résolution.
Il y a lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile dans les conditions du dispositif, ci-après.
La demande de dommages-intérêts de la société Raulet Automobiles pour résistance et procédure abusives n'est pas suffisamment justifiée, à tout le moins quant à la caractérisation d'un préjudice spécifique.
Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement et par arrêt contradictoire, - confirme le jugement entrepris, - condamne in solidum les époux Besson à verser, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la somme de 10 000 F à la société Raulet Automobiles et celle de 5 000 F à la société Banque Sygma, - déboute les parties de toute demande plus ample ou contraire, - condamne les époux Besson aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.