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Décisions

Cass. com., 27 septembre 2005, n° 03-20.128

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Somelos Tecidos (SA)

Défendeur :

Triacca

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Tric

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

Me Spinosi, SCP Waquet, Farge, Hazan.

Versailles, 13e ch. civ., du 5 mai 2003

5 mai 2003

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Versailles, 5 mai 2003), qu'en mars 2000, la société de droit portugais Somelos Tecidos, qui fabrique des tissus pour chemises, a demandé à son agent commercial depuis 1991, M. Triacca, s'il représentait une société turque commercialisant des tissus pour chemises ; que l'agent a répondu qu'il avait été contacté par plusieurs sociétés turques mais qu'il n'en représentait aucune, sans préciser que son épouse, agent commercial, représentait une société turque ; que le 30 mai 2000, le mandant a mis fin au contrat ;

Sur le premier moyen : - Attendu que la société Somelos Tecidos reproche à l'arrêt d'avoir décidé que M. Triacca, agent commercial, n'avait pas commis de faute grave envers elle, mandant, et de lui avoir, en conséquence alloué les sommes de 200 000 francs à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 800 000 francs à titre d'indemnité de résiliation de son contrat d'agent commercial, alors, selon le moyen, que le manquement de l'agent commercial à son devoir de loyauté et d'information constitue une faute grave, exclusive du versement des indemnités de préavis et de résiliation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel constatait expressément que le fait pour M. Triacca d'avoir nié représenter une autre société et d'avoir refusé de se rendre au Portugal constituait un manquement à son devoir de loyauté envers le mandant qu'il aurait dû par ailleurs informer de la signature d'un contrat d'agent commercial de son épouse avec une entreprise concurrente ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations suivant lesquelles l'agent avait manqué à son devoir de loyauté et d'information envers son mandant, la cour d'appel a violé les articles L. 134-4, L. 134-11 et L. 134-13-1° du Code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la dissimulation de la représentation d'une société concurrente par l'épouse de l'agent commercial, qui n'était pas tenu d'une exclusivité au bénéfice de son mandant, ne constitue pas par nature une faute grave et qu'il convient d'en apprécier en l'espèce la gravité ; qu'il constate que l'agent commercial ne conteste pas que sa réponse au mandant et son refus de se rendre au Portugal au motif qu'il ne pouvait prendre l'avion constituent un manquement au devoir de loyauté mais retient, dans l'exercice de son pouvoir souverain, qu'un tel manquement n'est pas suffisamment grave pour priver l'agent commercial des indemnités auxquelles il a droit; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen : - Attendu que la société Somelos Tecidos reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à M. Triacca la somme de 300 000 francs à titre de reliquat de commissions, alors, selon le moyen, que la cour d'appel, qui a constaté que la créance de l'agent commercial dépendait du montant des factures non réglées "dont le montant n'est pas connu avec précision", et que les autres créances de M. Triacca étaient "justifiées dans leur principe mais nécessitent une évaluation," a nécessairement fixé de manière forfaitaire la somme due à l'agent commercial, en violation des articles 1134 du Code civil et L. 134-5 et suivants du Code de commerce ;

Mais attendu que M. Triacca ayant fait valoir sans être contredit qu'il ne pouvait chiffrer exactement les sommes complémentaires qui lui étaient dues par la société Somelos Tecidos d'un côté sur le reliquat de commissions dues sur la collection présentée de septembre à novembre 1999, et de l'autre sur les retours sur échantillonnage qu'il évalue d'après les commissions perçues au titre de la même saison l'année précédente, la mandante l'ayant laissé dans l'ignorance des livraisons faites après son départ et ne produisant aucune pièce tandis qu'elle est seule à détenir les factures et les commandes, l'arrêt relève que la société Somelos Tecidos ne conteste pas l'évaluation faite par l'agent dans ses factures pour livraisons et que les autres créances sont justifiées en leur principe mais ne peuvent que faire l'objet d'une évaluation; qu'ainsi, la cour d'appel a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.