CA Versailles, 3e ch., 30 avril 1998, n° 96-00002269
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Drenne
Défendeur :
Tcherniavsky
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Falcone
Conseillers :
Mmes Simonnot, Prager Bouyala
Avoués :
SCP Fievet-Rochette-Lafon, SCP Keime-Guttin
Avocats :
Mes Raoult, Tessot
Faits procédure et moyens des parties
Par acte du 21 septembre 1993, Monsieur Drenne a acquis un véhicule Range Rover de Monsieur Tcherniavsky pour un montant de 160 000 F suite à une annonce que celui-ci avait passé dans la "Centrale des Particuliers"
Après quelques semaines d'utilisation, Monsieur Drenne a constaté que le véhicule prenait l'eau.
Monsieur Drenne a assigné Monsieur Tcherniavsky afin d'obtenir l'annulation de la vente.
Monsieur Tcherniavsky a appelé la société Carrosserie Travao en garantie de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
Par jugement du 8 septembre 1995, le Tribunal de grande instance de Versailles a :
- débouté Monsieur Drenne de l'ensemble de ses demandes,
- condamné Monsieur Drenne à payer à Monsieur Tcherniavsky une indemnité de 5 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
- condamné Monsieur Tcherniavsky à payer à la société Carrosserie Travao une indemnité de 5 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Monsieur Drenne a interjeté appel de ce jugement.
Il demande à la cour de :
- constater l'existence d'un vice caché affectant le véhicule,
- prononcer l'annulation de la vente,
- ordonner la restitution du véhicule et condamner Monsieur Tcherniavsky à lui rembourser la somme de 160 000 F, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure,
- condamner Monsieur Tcherniavsky au paiement d'une somme de 10 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Monsieur Drenne expose que le défaut d'étanchéité du véhicule était un vice caché de nature à rendre le véhicule impropre à sa destination au sens de l'article 1641 du Code civil.
Il fait valoir que le véhicule avait été accidenté et qu'il a eu connaissance de l'accident postérieurement à la vente, suite à des investigations qu'il a lui-même entreprises alors que toute personne qui passe une annonce par la "Centrale des Particuliers" déclare sur l'honneur que son véhicule n'a jamais été accidenté ; que cette dissimulation est constitutive de dol.
Monsieur Tcherniavsky conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de condamner Monsieur Drenne à lui verser une indemnité de 15 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il expose que le défaut d'étanchéité est un vice apparent insusceptible de rendre le véhicule impropre à sa destination.
Il conteste l'existence de date, expliquant qu'il a lui-même remis à Monsieur Drenne les factures de réparations consécutives à l'accident, remplissant ainsi son devoir d'information relatif à l'état du véhicule vendu.
Motifs de l'arrêt
Attendu que l'article 1641 du Code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ce qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus ;
Attendu que Monsieur Tcherniavsky a vendu son véhicule par l'intermédiaire de la "Centrale des Particuliers" qui a fait signer au vendeur une déclaration sur l'honneur selon laquelle le véhicule n'a jamais été accidenté ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que le véhicule vendu avait été accidenté le 7 juin 1993, soit trois mois avant la vente, et avait subi des réparations dont le coût s'est élevé à 58 000 F;
Attendu que l'importance des travaux a entraîné des séquelles d'étanchéité puisque les joints de vitre laissent passer l'eau de pluie ;
Que de plus, le côté caisse gauche, qui a été accidenté, commence à rouiller ;
Attendu que le défaut d'étanchéité du véhicule constitue un vice caché qu'un profane ne pouvait déceler puisqu'il a fallu des travaux d'aménagement pour que les désordres apparaissent ;
Que Monsieur Drenne justifie par une attestation de Monsieur Travao, garagiste, que c'est celui-ci qui lui a donné tous les éléments d'information concernant l'accident subi par le véhicule ;
Que Monsieur Tcherniavsky n'établit pas qu'au moment de la vente il a informé l'acquéreur du sinistre, alors qu'au contraire, il a déclaré sur l'honneur que le véhicule n'avait pas été accidenté ;
Attendu que si Monsieur Travao avait eu connaissance du grave accident subi par le véhicule et des séquelles qui subsistaient, soit il n'aurait pas acquis le véhicule, soit il en aurait donné un moindre prix ;
Que ces vices qui étaient cachés lors de la vente justifient la résolution de celle-ci ;
Qu'il sera fait droit à la demande ;
Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Drenne les frais irrépétibles qu'il a exposés.
Par ces motifs, Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort, Infirme le jugement entrepris, Prononce la résolution de la vente du véhicule Land Rover immatriculé 3894 YC 78, intervenue le 21 septembre 1993 entre Monsieur Tcherniavsky et Monsieur Drenne, Dit que Monsieur Drenne devra restituer le véhicule à Monsieur Tcherniavsky, Condamne Monsieur Tcherniavsky à rembourser à Monsieur Drenne la somme de 160 000 F, avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 1993, Condamne Monsieur Tcherniavsky à payer à Monsieur Drenne une indemnité de 8 000 F par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne Monsieur Tcherniavsky aux dépens de première instance et d'appel. Dit que ceux-ci seront recouvrés par la SCP Fievet-Rochette-Lafon, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.