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Décisions

Cass. crim., 25 janvier 2005, n° 04-81.620

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Castagnede

Avocat :

SCP Gatineau

Poitiers, ch. corr., du 19 févr. 2004

19 février 2004

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : X Serge, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 19 février 2004, qui, pour tromperie, l'a condamné à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 2 000 euro d'amende ; - Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de la directive 89-662 CEE du Conseil des Communautés européenne relative aux contrôles vétérinaires applicables dans les échanges intracommunautaires, des articles L. 213-1 du Code de la consommation, 427, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation de la loi et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a retenu la culpabilité de Serge X du chef de délit de tromperie ;

"aux motifs qu'il est indifférent que les services sanitaires néerlandais aient apposé leur estampille ; qu'en effet, ce qui est reproché à Serge X, c'est d'avoir tenté de tromper le consommateur en incluant dans la préparation spécifique qu'est la croquandine de veau des corps étrangers à une préparation annoncée comme "préparation à base de viande de veau hachée et de protéines végétales" ; que même si Serge X n'est pas vétérinaire, lui-même et son personnel sont des professionnels de l'agro-alimentaire et au regard des non conformités constatées, celles-ci auraient dû attirer leur attention ; qu'en tout état de cause il n'a jamais fait le moindre contrôle de qualité sérieux avant le hachage, pas plus d'ailleurs qu'en sortie du produit, pour vérifier que celui-ci contenait bien les produits de qualité annoncés qui devaient entrer dans la composition de la marchandise finie ; que les fautes commises dénotent donc une volonté délictueuse certaine ;

"1 - alors que la réglementation européenne destinée à permettre la libre circulation des marchandises interdit aux instances nationales et aux nationaux de mettre en doute le bien-fondé et le sérieux d'un certificat délivré officiellement par un autre Etat membre ; qu'ainsi, dans le commerce entre Etats membres de l'Union européenne, l'importateur doit pouvoir se fier aux certificats délivrés par les autorités de l'Etat de production ou par un laboratoire reconnu par ces autorités, ou, si la législation de cet Etat n'exige pas de tels certificats, à d'autres attestations présentant un degré de garantie analogue ; qu'en l'espèce, le demandeur a réceptionné des blocs de "maigre de tête de veau" d'origine hollandaise en vue de leur transformation en un produit dénommé "croquandine de veau" ; que les blocs étaient régulièrement estampillés par les services vétérinaires des Pays-Bas et accompagnés de tous les certificats sanitaires ; qu'en affirmant, pour déclarer Serge X coupable du délit de tromperie, qu'il est indifférent que les services vétérinaires néerlandais aient apposé leur estampille et qu'il aurait dû, en sortie de produit, vérifier que celui-ci contenait bien les produits de qualité annoncés qui devaient entrer dans la composition de la marchandise finie, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;

"2 - alors que le délit de tromperie est une infraction intentionnelle qui suppose la conscience chez le prévenu du caractère inexact des qualités qu'il prête au produit incriminé ; qu'en l'espèce, afin de retenir la connaissance par le prévenu que l'indication sous laquelle il présentait sa marchandise était de nature à tromper l'acheteur, la cour d'appel s'est contentée de relever qu'il aurait dû le savoir s'il avait procédé à des contrôles malgré les mentions des certificats délivrés ; qu'en retenant le prévenu dans les fins de la prévention non sur la connaissance de la fraude, mais sur celle qu'il aurait pu avoir, la cour d'appel a violé l'article L. 213-1 du Code de la consommation ;

"3 - alors que, au surplus, en prononçant ainsi, sans caractériser quelles étaient les non conformités constatées qui auraient dû attirer l'attention du prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

"4 - alors que le juge ne peut fonder sa décision que sur des faits qui lui sont apportés au cours des débats et contradictoirement discutés devant lui ; qu'il ne ressort ni des conclusions des parties ni du jugement de première instance ni des motifs de l'arrêt attaqué que la circonstance selon laquelle le demandeur aurait déjà fait l'objet d'un sérieux avertissement en 1997 ait été débattue ; que le rappel interdit de tels faits, expressément pris en considération par la cour d'appel pour déterminer la peine, affecte directement la légalité de la présente condamnation" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, lors d'un contrôle vétérinaire effectué dans l'entreprise de transformation de produits carnés dirigée par Serge X, il a été constaté que du maigre de tête de veau d'origine hollandaise, entrant dans la fabrication de "croquandines de veau", commercialisées comme préparation à base de viande de veau hachée, de protéines végétales et de panure, contenait, notamment, des ganglions lymphatiques et des muqueuses ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation du prévenu qui se prévalait du contrôle subi à l'origine par la marchandise communautaire et le déclarer coupable de tromperie, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine, qui caractérisent en tous ses éléments le délit reproché, la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions communautaires invoquées ; qu'en effet, le contrôle de la conformité des produits, effectué en application de l'article L. 213-1 du Code de la consommation en vue d'assurer la loyauté des transactions commerciales, s'exerce à tous les stades de la commercialisation ;

Attendu que, par ailleurs, hormis le cas où ils prononcent une peine d'emprisonnement sans sursis, les juges ne sont pas tenus de motiver spécialement le choix de la sanction qu'ils appliquent dans les limites fixées par la loi ; d'où il suit que le moyen, inopérant en sa dernière branche, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.