CA Paris, 18e ch. D, 25 février 2003, n° 02-35892
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Pétroles Shell (Sté), Sodigest (Sté), Descamps (Sté)
Défendeur :
Cohen (Epoux)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Linden
Conseillers :
Mmes Patte, Dujardin
Avocats :
Mes Courchinoux, Pinto
Faits et procédure
Par contrat de location-gérance du 28 novembre 1973, la société des pétroles Shell (ci-après société Shell) a confié à M. Cohen l'exploitation de deux fonds de commerce de station-service, situés à Paris, l'une, boulevard de la Chapelle (ci-après station-service Chapelle), l'autre, rue du colonel Driant (ci-après station-service Driant) ; en 1982, M. Cohen a créé avec son épouse et le frère de cette dernière, pour l'exploitation de ces fonds, la société à responsabilité limitée Errol, dont il a été nommé gérant statutaire ; il détenait 29 % des parts ; cette société a commencé son exploitation le 25 octobre 1982 ; la rémunération mensuelle de M. Cohen en qualité de gérant était en dernier lieu de 30 000 F.
Mme Cohen a travaillé à partir de 1973 dans la station-service Chapelle, puis dans la station-service Driant ; en 1982 elle est devenue salariée de la société Errol, dont elle détenait 20 % des parts, avec la qualification de directrice et caissière, au sein de la station-service Driant sa rémunération était en dernier lieu de 14 000 F.
Par lettre du 13 août 1997, la société Shell a mis un terme aux relations contractuelles, avec effet au 20 novembre 1997, et confié l'exploitation de la station-service Chapelle à la société Sodigest, celle de la station-service Driant à la société Descamps ; l'ensemble du personnel, à l'exception des époux Cohen, a été repris; le 21 novembre 1997, Mme Cohen s'est vu interdire l'accès à son ancien poste dans les locaux de la station Driant.
La société Shell occupait habituellement au moins onze salariés.
Revendiquant la qualité de travailleur au sens de l'article L. 781-1 de ce Code, M. Cohen a, le 28 novembre 1997, saisi le conseil de prud'hommes de Paris de demandes dirigées à l'encontre des sociétés Shell, Descamps et Sodigest, tendant au paiement d'indemnités diverses au titre de la rupture de la relation de travail ; Mme Cohen a formé des demandes analogues à l'encontre des sociétés Shell et Descamps sur le fondement de l'article L. 122-12 du Code du travail. Parallèlement, la société Errol a, le 1er décembre 1998, saisi le Tribunal de commerce de Paris d'une demande à titre de primes de fin de gérance en application des accords interprofessionnelles du pétrole ; cette procédure est pendante devant cette juridiction.
Par jugement du 2 mars 2000, la juridiction prud'homale, après avoir estimé que l'activité de M. Cohen entrait dans les prévisions de l'article 781-1 du Code du travail, a retenu sa compétence ; par une autre décision du même jour, elle s'est déclarée incompétente au profit de la juridiction commerciale pour statuer sur les demandes de Mme Cohen.
Le contredit formé par les sociétés Shell, Descamps et Sodigest à l'encontre de la première décision a été rejeté par arrêt de cette cour du 22 mars 2001 ; accueillant le contredit formé par Mme Cohen à l'encontre du second jugement, cette cour a déclaré la juridiction prud'homale compétente et renvoyé la cause et les parties devant le Conseil de prud'hommes de Paris.
Par jugement du 18 avril 2002, cette juridiction a condamné :
* les sociétés Shell, Descamps et Sodigest à payer à M. Cohen :
- 13 720,40 euro à titre d'indemnité de préavis
- 1 372,04 euro au titre des congés payés afférents;
- 15 244,90 euro à titre d'indemnité de licenciement;
- 27 244,90 euro à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- 400 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
* les sociétés Shell et Descamps à payer à Mme Cohen :
- 5 082,50 euro à titre d'indemnité de préavis
- 508,25 euro au titre des congés payés afférents;
- 15 244,90 euro à titre d'indemnité de licenciement;
- 12 805,70 euro à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;
- 400 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il a également été ordonné à la société Shell de remettre des documents sociaux conformes.
Les sociétés Shell, Descamps et Sodigest ont interjeté appel.
La cour se réfère aux conclusions des parties, visées par le greffier, du 28 janvier 2003.
Motivation
Sur les demandes de M. Cohen
Sur l'applicabilité de l'article L. 781-1 du Code du travail
En vertu du premier alinéa de l'article L.781-1 du Code du travail, les dispositions de ce code qui visent les apprentis, ouvriers, employés, travailleurs, sont applicables, en particulier, aux personnes dont la profession consiste essentiellement, soit à vendre des marchandises ou denrées de toute nature (...) qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise industrielle ou commerciale (...) lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par ladite entreprise.
Le fait, par M. Cohen, d'avoir, en qualité de gérant de la société Errol, saisi la juridiction commerciale de demandes à titre de primes de fin de gérance, avant que le caractère fictif de cette société ait été reconnu, ne caractérise pas à lui seul la manifestation d'une volonté claire et non équivoque de renoncer aux droits qu'il pouvait tenir à titre individuel dit Code du travail.
Il n'est pas contesté que les locaux dans lesquels exerçait M. Cohen étaient fournis par la société Shell ; l'approvisionnement des deux stations en carburants, lubrifiants et autres produits pétroliers était exclusivement assuré par cette société, la vente des produits de cette marque devait s'effectuer aux prix définis par celle-ci ; au vu des pièces versées au dossier et des débats, le chiffre d'affaires réalisé par la société Errol provenait presque exclusivement des produits fournis par la société Shell.
Il résulte du contrat que la société Shell imposait des conditions de vente à l'exploitant ; ainsi l'article 3 stipule qu'elle se réserve la possibilité d'accroître les activités du fonds de commerce en dotant la station des matériels et techniques nécessaires ; en vertu de l'article 6.1 la liste des produits vendus peut être modifiée par la société Shell : selon l'article 6.3, les quantités de produits confiées en dépôt à l'exploitant seront mises en place par la société Shell et sur son ordre par des transporteurs désignés par elle.
Les conventions conclues entre la société Shell et la société Errol stipulaient qu'étant conclues en considération de la qualité propre de cette dernière et du fait que M. Cohen en assurait effectivement et personnellement la direction, elles prendraient immédiatement fin si l'intéressé cessait d'exercer ses fonctions à l'intérieur de la société : ainsi la société Errol avait un caractère fictif. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. Cohen peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 781-1 du Code du travail.
Sur la qualification et la date de la rupture
La rupture intervenue est la conséquence de la décision unilatérale de la société Shell de mettre fin à la relation de travail ; elle constitue ainsi un licenciement.
M. Cohen fait valoir que la lettre du 13 août 1997, par laquelle la société Shell s'est bornée à faire connaître à la société Errol sa décision de mettre fin au contrat d'exploitation des stations-service, ne contient aucune mention relative à sa situation personnelle, mais dès lors qu'il est établi que cette société ne constituait qu'un écran, la rupture des relations contractuelles ne peut s'analyser qu'en un licenciement.
Par suite, la date de rupture doit être fixée au jour de la présentation de la lettre du 13 août 1997.
Sur le principe des demandes formées à l'encontre des sociétés Sodigest et Descamps
Le licenciement d'un salarié prononcé à l'occasion du transfert d'une entité économique autonome dont l'activité est poursuivie, est privé d'effet; le salarié peut, à son choix, demander au repreneur la poursuite du contrat de travail illégalement rompu ou demander à l'auteur du licenciement illégal la réparation du préjudice en résultant.
La société Shell a licencié M. Cohen alors que le poste de ce dernier n'était pas supprimé ; les sociétés Sodigest et Descamps ont refusé, bien que l'intéressé fût attaché à l'entité transférée, de poursuivre son contrat de travail, comme elles étaient légalement tenues de le faire, contribuant ainsi nécessairement au préjudice subi par M. Cohen du fait de la perte de son emploi.
Par suite, les sociétés Sodigest et Descamps, co-responsables de la rupture, sont tenues à l'égard de M. Cohen dans les mêmes conditions que la société Shell.
Sur le montant de la rémunération de M. Cohen devant être pris en considération pour le calcul des indemnités liées à la rupture
La société Errol avant un caractère fictif, il doit être considéré que le montant de la rémunération perçue par M. Cohen était avalisé par la société Shell, ce dernier faisant remarquer à juste titre que la comptabilité de la société Errol était soumise chaque mois à la société Shell.
Par suite, il convient, pour le calcul des indemnités liées à la rupture de la relation de travail, de prendre en considération le montant perçu par M. Cohen.
Sur la demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents
La lettre du 13 août 1997 s'analysant en une lettre de licenciement, M. Cohen a bénéficié d'un préavis de trois mois, jusqu'au 20 novembre 1997 ; il ne peut donc prétendre à une indemnité de préavis.
Sur la demande d'indemnité conventionnelle de licenciement
La société Shell n'établit pas avoir versé à M. Cohen en 1982 l'indemnité de fin de gérance instituée par les accords interprofessionnels du 25 avril 1973 et du 21 janvier 1977 ; en l'état, ce dernier n'a pas perçu d'indemnité de fin de gérance pour la période postérieure à 1982 ; par suite, il peut prétendre à une indemnité conventionnelle de licenciement, sur la base d'une l'ancienneté du 28 novembre 1973 au 20 novembre 1997.
En vertu de l'article 311 de la convention collective, le montant de l'indemnité de licenciement doit être calculé comme suit :
3/10 de mois par année d'ancienneté pour la tranche de zéro à cinq ans;
5/10 de mois par année d'ancienneté pour la tranche de cinq à dix ans;
8/10 de mois par année d'ancienneté pour la tranche au-delà de dix ans.
Toutefois, l'indemnité de congédiement résultant du barème ci-dessus ne pourra dépasser dix-huit mois.
Pour toute fraction d'année d'ancienneté au-delà de la première, l'indemnité sera calculée au prorata du nombre de trimestres écoulés, tout trimestre commencé étant compté pour la totalité.
Le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement dû à M. Cohen sur ces bases, compte tenu d'une ancienneté de 24 ans s'établit comme suit :
(15 + 25 + 112) / 10 x 4 573,47 = 69 516,73 euro.
Il sera en conséquence fait droit à la demande.
Sur la demande à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
À la suite de son licenciement. M. Cohen, alors âgé de 61 ans, a perçu des indemnités journalières jusqu'au 31 octobre 1999, puis a été privé de ressources, ne disposant pas des documents nécessaires au versement d'indemnités de chômage; il est à la retraite depuis le 22 août 2001.
Compte tenu de ces éléments, ainsi que de son ancienneté et des circonstances de la rupture, le préjudice subi par M. Cohen du fait de son licenciement sera réparé par l'allocation d'une somme que la cour est en mesure de fixer à 60 000 euro.
Sur la demande à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement
Les indemnités prévues par l'article L. 122-14-4 du Code du travail en cas de rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas avec celles sanctionnant l'inobservation des règles de forme de sorte que la demande formée de ce chef doit être rejetée.
Sur les intérêts et leur capitalisation
Les intérêts portant sur les sommes dues au titre des indemnités de rupture courent à compter du 4 décembre 1997.
Il convient d'ordonner leur capitalisation conformément à l'article 1154 du Code civil, dont les conditions d'application sont remplies.
Sur la remise de documents sociaux
Il convient d'ordonner la remise des documents sociaux sollicités sous astreinte dont les modalités seront précisées au dispositif du présent arrêt.
Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité en réparation du préjudice résultant de l'absence de remise des documents sociaux, ce préjudice ayant été pris en considération pour la détermination de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
Il sera alloué à M. Cohen, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, une somme globale de 2 200 euro.
Sur le principe des demandes de Mme Cohen
Il résulte des débats et de plusieurs attestations de clients de la station Driant que Mme Cohen exerçait principalement des fonctions de caissière et s'occupait en outre de la comptabilité, de l'accueil des clients, ainsi que de la prise de commandes et des livraisons, recevant des directives du gérant; le fait qu'elle ait été associée minoritaire et, selon le Crédit lyonnais, mandataire de la société Errol avec pouvoir limité aux opérations de gestion courante, est dépourvu de portée, le caractère fictif de celle-ci étant établi.
Par suite, Mme Cohen peut se prévaloir de la qualité de salariée de la société Shell.
La lettre du 13 août 1997, par laquelle la société Shell s'est bornée à faire connaître à la société Errol sa décision de mettre fin au contrat d'exploitation des stations-service, ne contient aucune mention relative à la situation personnelle de Mme Cohen, de sorte qu'elle ne peut s'analyser en une lettre de licenciement, étant observé que la rupture des relations contractuelles entre la société Shell et la société Errol n'entraînait pas nécessairement le licenciement de Mme Cohen.
Pour les motifs ci-dessus exposés, celle-ci doit être considérée comme avant été illégalement licenciée le 21 novembre 1997 ; les conditions d'application de l'article L. 122-12 du Code du travail étant remplies, son contrat de travail aurait dû être transféré au sein de la société Descamps ; or l'accès à la station-service lui a été interdit le 21 novembre 1997 ; par suite, les demandes dirigées à l'encontre de cette société sont, en leur principe, fondées.
La société Errol ayant un caractère fictif, il doit être considéré que le montant de la rémunération perçue par Mme Cohen était avalisé par la société Shell ; par suite, il convient, pour le calcul des indemnités liées à la rupture de la relation de travail, de prendre en considération le montant perçu par la salariée.
Sur la demande d'indemnité de préavis et de congés payés afférents
Les parties s'accordent à considérer que la convention collective applicable est la convention collective nationale des services de l'automobile.
L'article 4.10 de cette convention collective prévoit :
Après expiration de la période d'essai, la durée du préavis réciproque qui est dû, sauf en cas de faute grave, est fixée comme suit :
- personnel de maîtrise en position A : deux mois ;
- personnel de maîtrise en position B : trois mois ;
- cadres : trois mois.
Le personnel de maîtrise est défini par l'article 3 B 04 comme suit :
B Grande compétence dans l'activité, éventuellement associée à la connaissance et la résolution de problèmes présentant des aspects à la fois techniques, commerciaux et administratifs avec appréciation du coût des solutions. Autonomie importante (instructions de caractère général fixant un cadre d'activité et les conditions d'organisation), voire très large (directives indiquant les règles à respecter, les objectifs et les moyens). Responsabilité de l'organisation du travail dans le cadre fixé avec une certaine liberté dans le choix des moyens et la succession des étapes. Cette responsabilité est souvent caractérisée par l'encadrement d'ouvriers et employés, directement ou par l'intermédiaire de la maîtrise en position A ; elle peut également, le cas échéant, être élargie à tous les domaines du secteur d'activité considéré avec animation professionnelle des hommes qui en dépendent. Niveau de connaissances acquis par un diplôme obtenu après deux années de scolarité après le baccalauréat, ou par une formation ou une expérience équivalente. Mise en œuvre de méthodes, procédures et moyens de haute technicité associés à une certaine initiative en vue de l'objectif à atteindre. Cette maîtrise technique peut également s'étendre à la conception des instructions d'application et à l'organisation du programme de travail d'après les directives reçues. Contrôle par une personne le plus habituellement d'un niveau de qualification supérieur, voire par un cadre ou le chef d'entreprise lui-même, avec possibilité de recours vers ces derniers en cas de difficultés.
Connaissances des autres secteurs d'activité ou services de l'entreprise et aptitude à entrer en relation avec eux, lorsque la solution des problèmes posés dépend de leur intervention. Cette responsabilité peut aller jusqu'à la coordination d'activités diversifiées comportant le plus souvent une fonction d'encadrement.
A Activité caractérisée par l'exécution de travaux très qualifiés nécessitant une très bonne compétence dans la spécialité et une connaissance des techniques voisines. Instructions précises indiquant l'objectif à atteindre. Responsabilité de l'organisation du travail, à l'intérieur des instructions reçues. Niveau de connaissances acquis par le baccalauréat, ou par une formation ou une expérience équivalente.
Contrôle direct par une personne le plus habituellement d'un niveau de qualification supérieur. Possibilité d'avoir le contrôle technique du travail exécuté par un personnel de qualification moindre.
Eventuellement, existence d'une responsabilité hiérarchique d'encadrement d'un personnel d'exécution.
Compte tenu de sa formation et de ses fonctions, Mme Cohen, qui recevait ses instructions de son mari, lui-même agent de maîtrise, et lui demandait son avis chaque fois quelle avait un problème (cf attestation de M. Amoura), ne peut prétendre à la qualification d'agent de maîtrise en position B, de sorte que l'indemnité de préavis correspond à deux mois, soit un montant de 4 268,57 euro, outre les congés payés afférents.
Sur la demande d'indemnité conventionnelle de licenciement
En application de l'article 2.13 de la convention collective des services de l'automobile, le montant de l'indemnité de licenciement de Mme Cohen, âgée de moins de cinquante-sept ans, s'établit comme suit :
- 2/10 de mois par année, à compter de la date d'entrée dans l'entreprise;
- 1/10 de mois supplémentaire par année de présence au-delà de quinze ans.
L'ancienneté de Mme Cohen doit être calculée en prenant comme point de départ la date de son engagement au sein de la station Chapelle, soit le 28 novembre 1973, de sorte qu'elle est de vingt-quatre ans.
Le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement s'établit comme suit 2 134,29 x (48 + 9) / 10 = 12 297,94 euro.
Sur la demande à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le préjudice subi du fait de son licenciement par Mme Cohen, qui n'a perçu aucune indemnité, sera réparé, compte tenu notamment de son ancienneté et des circonstances de la rupture, par l'allocation d'une somme que la cour est en mesure de fixer à 30 000 euro.
Sur les intérêts et leur capitalisation
Les intérêts portant sur les sommes dues au titre des indemnités de rupture courent à compter du 4 décembre 1997.
Il convient d'ordonner leur capitalisation conformément à l'article 1154 du Code civil, dont les conditions d'application sont remplies.
Sur la demande à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement
Les indemnités prévues par l'article L. 122-14-4 du Code du travail en cas de rupture dépourvue de cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas avec celles sanctionnant l'inobservation des règles de forme de sorte que la demande formée de ce chef doit être rejetée.
Sur la remise de documents sociaux
Il convient d'ordonner la remise des documents sociaux sollicités sous astreinte dont les modalités seront précisées au dispositif du présent arrêt.
Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile
Il sera alloué à Mme Cohen, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, une somme globale de 2 200 euro.
Par ces motifs, LA COUR, Réformant le jugement déféré. Condamne solidairement les sociétés Shell, Sodigest et Descamps à payer à M. Cohen : - 69 516,73 euro (soixante neuf mille cinq cent seize euro et soixante treize centimes) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 1997 ; - 60 000 euro (soixante mille euro) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; - 2 200 euro (deux mille deux cents euro) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Condamne solidairement les sociétés Shell et Descamps à payer à Mme Cohen ; - 4 268,57 euro (quatre mille deux cent soixante huit euro et cinquante sept centimes) à titre d'indemnité de préavis ; - 426,86 euro (quatre cent vingt six euro et quatre vingt six centimes) au titre des congés payés afférents; - 12 197,94 euro (douze mille cent quatre vingt dix sept euro et quatre vingt quatorze centimes) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 1997; - 30 000 euro (trente mille euro) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; - 2 200 euro (deux mille deux cents euro) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Ordonne la capitalisation des intérêts selon les conditions de l'article 1154 du Code civil ; Dit que la société Shell devra remettre à M. et Mme Cohen, sous astreinte de 30 euro (trente euro) par document et par jour de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, et ce pendant deux mois, une attestation Assedic et un certificat de travail conformes; Condamne solidairement les sociétés Shell, Sodigest et Descamps aux dépens.