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Décisions

CCE, 27 novembre 2002, n° 2005-471

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Plaques en plâtre

CCE n° 2005-471

27 novembre 2002

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1216-1999 (2), et notamment ses articles 3 et 15, vu la décision de la Commission du 18 avril 2001 d'ouvrir la procédure dans la présente affaire, après avoir donné aux entreprises concernées l'occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission, conformément à l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 et au règlement (CE) n° 2842-98 de la Commission du 22 décembre 1998 relatif à l'audition dans certaines procédures fondées sur les articles 85 et 86 du traité CE (3), après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, vu le rapport final du conseiller-auditeur dans la présente affaire, Considérant ce qui suit:

1. PARTIE I - LES FAITS

1.1. Résumé de l'infraction

(1) Les entreprises suivantes sont destinataires de la présente décision pour infraction à l'article 81 du traité :

- BPB PLC (ci-après : " BPB ")

- Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG (ci-après : " Knauf Westdeutsche Gipswerke ")

- Société Lafarge SA (ci-après : " Lafarge ")

- Gyproc Benelux NV (ci-après : " Gyproc ")

(2) BPB, Knauf4, Lafarge et Gyproc ont conclu et participé sans discontinuer à un accord complexe et continu contraire à l'article 81, paragraphe 1, du traité et qui s'est manifesté par les comportements suivants, constitutifs d'accords ou de pratiques concertées :

- les représentants de BPB et Knauf se sont rencontrés à Londres en 1992 et ont exprimé la volonté commune de stabiliser les marchés du territoire de l'Allemagne (ci-après : " marché allemand "), du territoire du Royaume-Uni (ci-après : " marché britannique "), du territoire de la France (ci-après : " marché français "), des territoires des Pays-Bas, de la Belgique et du Luxembourg (ci-après : " marché du Benelux ") ;

- les représentants de BPB et Knauf ont mis en place, à partir de 1992, des systèmes d'échange d'informations, auxquels Lafarge et ensuite Gyproc ont adhéré, portant sur leurs volumes de ventes sur les marchés allemand, français, britannique et du Benelux des plaques en plâtre ;

- les représentants de BPB, Knauf et Lafarge se sont, à diverses reprises, informés réciproquement à l'avance des hausses de prix sur le marché britannique ;

- faisant face à des développements particuliers du marché allemand, les représentants de BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont rencontrés à Versailles en 1996, à Bruxelles en 1997 et à La Haye en 1998 en vue de se répartir ou tout au moins de stabiliser le marché allemand;

- les représentants de BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont informés réciproquement, à diverses reprises et se sont concertés sur l'application de hausses de prix sur le marché allemand entre 1996 et 1998.

(3) La durée de participation à l'infraction des entreprises concernées est la suivante :

- BPB : du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

- Knauf : du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

- Lafarge : du 31 août 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

- Gyproc : du 6 juin 1996, au plus tard, au 25 novembre 1998

1.2. La procédure

1.2.1. Vérifications au titre de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n° 17

(4) Le 25 novembre 1998, suite à des informations reçues (5), et agissant conformément à des décisions de la Commission en vertu de l'article 14, paragraphe 3, du règlement n°17, des agents de la Commission, accompagnés de représentants des autorités compétentes des États membres concernés, ont procédé à des vérifications simultanées et inopinées auprès des entreprises suivantes :

- BPB (Royaume-Uni)

- British Gypsum Ltd (Royaume-Uni),

- BPB Placo SA (France),

- Rigips GmbH (Allemagne),

- BPB Italia SA (Italie),

- Knauf (Allemagne),

- Lafarge Plâtres International SA (France),

- Gyproc (Belgique).

(5) Le 1er juillet 1999, la Commission a effectué d'autres vérifications en application de l'article 14, paragraphe 3, chez Etex SA (ci-après : " Etex ") en Belgique et chez Lafarge Gips GmbH en Allemagne.

1.2.2. Demandes de renseignements au titre de l'article 11 du règlement n° 17

(6) Le 27 janvier 1999, la Commission a adressé une demande de renseignements au titre de l'article 11 du règlement n° 17 à BPB portant sur des références figurant dans des documents obtenus durant la vérification effectuée dans ses locaux au mois de novembre 1998. BPB a fourni sa réponse le 17 mars 1999 (6), en y joignant une note à la Commission (7), dans laquelle il reconnaît certaines infractions à l'article 81 limitées à l'échange de renseignements commerciaux, mais en soutenant qu'elles n'avaient pas ou peu eu d'incidence sur la concurrence et niant avoir connaissance du moindre accord ou entente sur le partage du marché allemand. Le 28 mai 1999, BPB a également communiqué une déclaration (8) dans laquelle cette entreprise nie avoir eu connaissance d'un accord sur la fixation de parts de marché en Allemagne et y avoir participé. Le 21 septembre 1999, la Commission a adressé une seconde demande de renseignements à BPB. BPB a fourni une réponse le 28 octobre 1999 (9). Le 30 mars 2000, la Commission a adressé une troisième demande de renseignements à BPB. BPB a fourni une réponse le 18 mai 2000 (10).

(7) La Commission a adressé des demandes de renseignements au titre dudit article 11 à Knauf le 8 juillet 1999 et à Lafarge et Etex le 21 septembre 1999, dans lesquelles la Commission a demandé des informations portant sur des documents qu'elle a obtenus dans les locaux de ces entreprises durant les vérifications de novembre 1998 et juillet 1999. Knauf a répondu le 14 septembre 1999, Lafarge le 29 octobre 1999 et Gyproc le 2 novembre 1999. Gyproc a par ailleurs remis à la Commission, le 1er septembre 1999, une déclaration faisant suite à une réunion avec les services de la Commission au sujet de certains contacts entre concurrents (11).

(8) La Commission a adressé des demandes de renseignements au titre dudit article 11 à BPB, Gyproc, Knauf, Lafarge et Etex le 2 août 2002, portant sur diverses données financières et structurelles de ces entreprises, auxquelles celles-ci ont répondu (12).

1.2.3. La procédure administrative

(9) Le 18 avril 2001, la Commission a engagé la procédure dans la présente affaire et adopté une communication des griefs à l'encontre des entreprises BPB, Knauf, Lafarge, Etex et Gyproc.

(10) Tous les destinataires de la communication des griefs ont présenté des observations écrites en réponse aux griefs soulevés par la Commission.

(11) Les entreprises ont eu accès au dossier d'instruction de la Commission sous la forme d'une copie sur CD-ROM, qui leur a été envoyée le 17 mai 2001. Avec le CD-ROM, les entreprises ont reçu une liste énumérant tous les documents contenus dans le dossier d'instruction (paginé en continu), qui indique le degré d'accessibilité de chaque document. En outre, les entreprises ont été informées que le CD-ROM donne aux parties un accès complet à tous les documents obtenus par la Commission au cours de l'enquête, à l'exclusion des secrets d'affaires ou d'autres informations confidentielles.

(12) Une audition a eu lieu dans cette affaire le 17 juillet 2001. Toutes les entreprises destinataires de la communication des griefs y ont participé.

1.2.4. Mesures antérieures de la Commission

(13) Le 13 juillet 1994, la Commission a adopté la décision 94-601-CE (13), relative à une procédure d'application de l'article 85 (devenu 81) du traité CE et infligé une amende de 1 750 000 écus à la filiale de BPB, BPB De Eendracht NV, pour sa participation à une entente illicite dans le secteur du carton. Le Tribunal de première instance des Communautés européennes, le 14 mai 1998, dans l'affaire T-311-94, a ramené cette amende à 750 000 écus (14).

(14) Le 30 novembre 1994, la Commission a adopté la décision 94-815-CE (15), relative à une procédure d'application de l'article 85 (devenu 81) du traité CE et a infligé à Lafarge SA (alors dénommée Lafarge Coppée SA) une amende de 22 872 000 écus pour avoir participé à une entente illicite dans le secteur du ciment. Le Tribunal de première instance, le 15 mars 2000, dans l'affaire T-43-95, a ramené cette amende à 14 248 000 euro (16).

1.3. L'industrie des plaques en plâtre

1.3.1. Le produit

(15) Les plaques en plâtre sont tous les produits manufacturés se composant d'une couche de plâtre entre deux feuilles de papier ou toute autre matière et utilisés comme matériaux de construction préfabriqués.

(16) Les plaques en plâtre sont découpées en différentes tailles et épaisseurs. La dimension standard en Europe est constituée de plaques de 12,5 mm d'épaisseur et généralement de 1200 mm de largeur, sauf en Allemagne où la largeur standard est de 1250 mm. À côté de la plaque standard ("primaire"), on voit se développer un marché de plaques techniques qui sont stratifiées avec d'autres matériaux afin d'améliorer leurs propriétés ignifuges et d'isolation phonique. Les plaques peuvent également être revêtues de matière plastique pour former des éléments préfabriqués.

(17) Les plaques en plâtre sont généralement utilisées comme parement mural intérieur, pour former des cloisons à l'intérieur de bâtiments, comme revêtement de toit et comme revêtement de plafond pour locaux d'habitation, commerciaux et administratifs. La plaque en plâtre est un produit intéressant pour l'industrie du bâtiment en raison de sa stabilité, de sa durabilité, de sa facilité d'installation, de sa résistance au feu et de son coût peu élevé.

(18) Le procédé de fabrication de la plaque en plâtre, relativement simple, consiste à fabriquer un coulis de plâtre qui est ensuite mis en sandwich entre deux feuilles de papier de couverture, puis coupé aux dimensions et séché. Le plâtre est obtenu à partir de gypse naturel (extrait de carrières) ou sous forme de sous-produits d'autres procédés, et notamment du nettoyage des cheminées des centrales thermiques à houille qui produit du plâtre de désulfuration des gaz de fumée. Le gypse naturel est fourni sous forme de pierre broyée, laquelle doit ensuite être réduite en poudre (le plâtre de désulfuration est déjà sous forme de poudre). Dans les deux cas, toutefois, le plâtre doit être déshydraté avant d'être travaillé. La cuisson, étape suivante, est un procédé en continu par lequel la poudre est injectée directement dans un mélangeur situé en tête de la chaîne de fabrication, où elle est mélangée avec de l'eau et des additifs pour former un coulis. Celui-ci est ensuite amené au point de la chaîne où la première feuille de papier est déjà en position. Ensuite, la deuxième feuille de couverture est amenée par un jeu de rouleaux qui étale le coulis de plâtre uniformément sur toute la largeur de la plaque, à l'épaisseur voulue. La plaque avance en formant des bandes d'environ 200 à 400 mètres de long, tandis que le plâtre prend progressivement. Une fois que le plâtre a pris (mais sans être totalement séché), la plaque passe par un dispositif de coupe qui la coupe à la longueur voulue, puis elle est retournée (pour protéger la face supérieure) et transférée sur une chaîne de dessiccation où elle est durcie dans de grands fours. Une fois séchée, la plaque est coupée à finition pour lui donner la longueur exacte voulue.

(19) La production et les ventes sont généralement mesurées par la surface (en m²) de plaque produite, quelle qu'en soit l'épaisseur. Une autre méthode de mesure consiste à convertir la surface des différentes plaques dans l'équivalent théorique représenté par la plaque standard de 12,5 mm.

(20) Bien qu'il existe d'autres solutions pour certaines utilisations (par exemple, le plâtre humide en parement mural), il n'y a pas, dans l'industrie du bâtiment, de réel produit de remplacement des plaques en plâtre, compte tenu du coût et des avantages de manutention de celles-ci, ainsi que de leur facilité et rapidité d'installation.

1.3.2. Le marché des plaques en plâtre

1.3.2.1. L'offre

(21) En 1998, les marchés des plaques en plâtre dans l'Espace Economique Européen (EEE) représentaient une valeur d'environ 1 500 millions d'écus pour une production d'environ 870 millions de m². Au sein de l'EEE, environ 80 % du total des ventes étaient effectuées sur les marchés allemand, français, britannique et du Benelux visés par la présente procédure. La valeur totale annuelle de ces marchés était, en 1997 et 1998, d'environ 1210 millions d'écus pour un volume d'environ 692 millions de m² en 1997 et 710 millions de m² en 1998.

(22) Au cours de la période allant de 1992 à 1998 visée par la présente procédure, et suite aux restructurations décrites à la section 1.3.4, six producteurs étaient actifs sur les marchés de l'EEE des plaques en plâtre. Les trois plus grands étaient BPB, Knauf et Lafarge qui fournissaient l'Europe entière. Gyproc vendait au Benelux, en Allemagne et en France. Gyproc AB, dont BPB détenait 25 % du capital avant son rachat total en octobre 1998, vendait exclusivement dans les pays nordiques. Norgips A/S (ci-après : " Norgips "), entreprise norvégienne, est sortie du marché allemand en septembre 1993 au profit de Lafarge et s'est concentrée sur les marchés nordiques jusqu'en septembre 1998, date de son retour sur le marché allemand, approvisionné depuis son usine d'Opole en Pologne (voir les considérants (246) et suivants).

(23) S'agissant des marchés allemand, britannique, français et du Benelux, ainsi que pour le total de ces marchés, les ventes atteignaient approximativement en 1997 et 1998 le niveau indiqué dans le tableau 1 (17). Les ventes des producteurs de plaques en plâtre au cours de la période visée par la présente procédure sont détaillées par année à l'annexe de la présente décision.

<emplacement tableau>

(24) Le tableau 2 exprime, sur la base des chiffres du tableau 1, les parts de marchés des producteurs de plaques en plâtre sur les marchés allemand, britannique, français et du Benelux, ainsi que pour le total de ces marchés, en 1997 et 1998.

<emplacement tableau>

(25) Le tableau 3 indique la taille globale, en 2001, de chacun des destinataires de la présente décision, ainsi que leur importance relative sur les marchés des plaques en plâtre en 1997 et 1998 (19).

<emplacement tableau>

(26) Le marché a évolué à partir de la fin des années 80, passant d'une série de marchés " nationaux ", chacun dominé par le producteur local, à un marché plus " européen ", en ce sens que les principaux fournisseurs sont désormais présents sur tous les marchés nationaux (voir la section 1.3.4). Ainsi, à la suite de fusions, d'acquisitions et d'extensions, les trois principaux producteurs possèdent des usines dans plusieurs États membres. BPB a des usines au Royaume-Uni, en Allemagne, en France, en Irlande, en Espagne et en Scandinavie. Knauf produit essentiellement en Allemagne, mais possède aussi des usines de plaques au Royaume-Uni, en France, en Belgique, en Autriche, en Espagne, en Grèce et en Scandinavie. Quant à Lafarge, ses usines sont situées en France, au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Espagne.

(27) Chaque producteur coordonne à l'échelle européenne l'exploitation de ses usines respectives ainsi que l'équilibre entre l'offre et la demande, de sorte qu'un marché national donné peut être approvisionné par une usine implantée dans un autre État membre. C'est ainsi que BPB approvisionne régulièrement le marché allemand non seulement depuis ses usines situées dans ce pays, mais aussi en assez grandes quantités depuis l'Autriche, la France et l'Espagne. On relèvera qu'à l'exception des ventes de Norgips à partir de son usine polonaise à compter de septembre 1998, il n'y avait pas, durant la période visée par la présente procédure, d'importations significatives d'origine extra-européenne.

1.3.2.2. La demande

(28) La demande de plaque en plâtre est largement fonction des activités de construction, d'entretien et de remise en état de logements et de locaux industriels et commerciaux, la construction étant son déterminant principal. En l'absence, dans l'industrie du bâtiment, de réel produit de substitution aux plaques en plâtre, compte tenu du coût et des avantages de manutention de celles-ci, ainsi que de leur facilité et rapidité d'installation, l'élasticité de la demande par rapport aux prix est généralement faible ; et de toute façon, les fabricants de plaques en plâtre sont également les principaux fournisseurs de produits de rechange, comme le plâtre. De plus en plus, la plaque en plâtre est commercialisée non pas comme un produit de base, mais comme l'une des composantes d'un "système" de construction intégré, avec accessoires et dispositifs de fixation. La mise au point de nouveaux produits et les nouvelles applications constituent un élément important du marketing et des stratégies.

(29) En 1998, au sein de l'EEE, le plus grand marché national pour les plaques en plâtre est l'Allemagne avec quelque [240-250] millions de m², suivie de la France avec près de [200- 210] millions de m² et du Royaume-Uni où la consommation est de l'ordre de [190-200] millions de m². Le marché du Benelux était d'environ [60-65] millions de m². Au cours des dix dernières années, la demande annuelle de plaques en plâtre en Europe occidentale est passée d'environ 550 millions à plus de 870 millions de m2. L'utilisation des plaques en plâtre étant largement répandue dans le secteur du bâtiment, les clients finals sont très nombreux et vont du grand groupe multinational de construction aux particuliers qui font du bricolage. La plupart des clients finals s'approvisionnent auprès de revendeurs de matériaux de construction qui achètent les plaques en plâtre chez les producteurs, et seuls les très gros clients sont livrés directement par ces derniers. Nombre de ces revendeurs de matériaux sont des chaînes à succursales multiples implantées sur le territoire national ou dans plusieurs États membres. Les producteurs ont également recours à des distributeurs (grossistes) pour proposer une gamme de produits aux petits revendeurs de matériaux et aux gros utilisateurs finals. Les autres clients directs des producteurs de plaques sont les chaînes de magasins de bricolage, les grandes entreprises du bâtiment et les constructeurs de matériels, tels que les fabricants de stratifiés qui produisent des plaques secondaires.

1.3.2.3. La tarification

(30) La tarification des plaques en plâtre est complexe, avec une diversité de remises et de rabais qui font que les prix " tarif " théoriques sont parfois nettement supérieurs aux prix nets réels du marché. Les producteurs publient leurs tarifs sur chaque marché national, le prix de la plaque de 12,5 mm leur servant généralement de référence. En règle générale, les prix s'entendent marchandise rendue, une réduction étant consentie aux clients qui enlèvent les produits à l'usine. Les producteurs établissent pour leurs clients professionnels des tarifs qui font l'objet de remises types pour les différentes catégories de produits : remises promotionnelles pour livraison en stock, frais de service de chargement, avoir pour restitution de palettes, etc. Les entreprises qui achètent les plaques en plâtre directement auprès du fabricant pour des projets particuliers bénéficient également de prix spéciaux ou de remises.

(31) En outre, la structure tarifaire et la présentation des tarifs varient considérablement d'un marché à l'autre. À titre d'exemple, au Royaume-Uni, le mode de tarification a été modifié vers 1992, afin de réduire le fossé entre les prix "tarif" et les prix de gros nets réels qui avait incité les revendeurs à faire du prix "tarif" (théoriquement le prix d'achat) leur prix de revente. En Allemagne, en revanche, les tarifs commencent généralement par un " prix brut " (" Bruttopreis ") public qui fait l'objet d'une remise normale de distributeur de [...] %, d'une remise " chargement " (" Ladungsrabatt ") de [...] à [...] DEM/m² et de remises spéciales (" Sonderrabatte "), ce qui fait que le prix "net" facturé est inférieur de [...] % ou plus aux prix publics. Enfin, le prix "net net", après conditions de paiement particulières, escomptes et ristournes de fin d'année, est encore inférieur de [...] %.

(32) Lorsqu'ils prévoient une hausse des prix généralisée, les producteurs envoient à leurs clients des lettres qui les informent plusieurs mois à l'avance du changement de tarif. Quelle que soit la complexité apparente de la structure tarifaire, les modifications des prix sont exprimées et s'entendent en termes de hausse en pourcentage. Toutefois, une hausse "officielle" d'un certain pourcentage ne signifie pas une hausse identique en pourcentage des prix " net net ". Les tarifs indiquant les nouveaux prix sont envoyés à une date plus proche de la date d'effet de la hausse annoncée.

(33) Malgré l'" européanisation " du marché de la plaque en plâtre, il peut y avoir des différences de prix départ usine qui atteignent parfois 30 %, entre les différents pays européens, y compris les cinq grands marchés nationaux (Allemagne, France, Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique et Luxembourg), les prix étant significativement plus bas en Allemagne et en Italie.

1.3.2.4. Le commerce transfrontalier

(34) Bien que les principaux fabricants soient désormais présents sur tous les marchés nationaux et qu'ils puissent même approvisionner un marché à partir d'une usine située dans un autre État membre, le commerce transfrontalier au niveau des grossistes ou des distributeurs est limité, malgré des différences de prix substantielles. Les producteurs expliquent ce niveau relativement faible du commerce transfrontalier notamment par les différences de normes, les différences de largeurs standard des plaques entre les pays, l'impossibilité de trouver dans le pays de destination les accessoires nécessaires (pâtes d'étanchéité pour joints, profilés, etc.), les différences de langage technique dans le secteur de la construction.

1.3.2.5. Le marché pertinent au sens de la présente procédure

(35) Sans qu'il soit nécessaire de déterminer avec précision le marché du produit concerné, le marché pertinent pourrait être défini comme celui des plaques en plâtre, produits manufacturés se composant d'une couche de plâtre entre deux feuilles de papier ou toute autre matière et utilisés comme matériaux de construction préfabriqués. Comme on le verra, les preuves disponibles permettent de conclure que les producteurs européens de ce produit ont jugé nécessaire d'adopter des comportements anticoncurrentiels portant, ensemble, sur les marchés allemand, britannique, français et du Benelux. Bien que certains indices justifieraient de conclure à une entente au niveau européen couvrant non seulement le territoire de ces Etats membres mais aussi la Communauté, voire l'EEE, la Commission, au vu des preuves dont elle dispose, limite son appréciation auxdits marchés.

1.3.3. Les producteurs

1.3.3.1. BPB

(36) BPB est aujourd'hui l'un des plus grands groupes mondiaux de produits à base de plâtre. Il exploite 90 usines et vend dans 45 pays. BPB est le premier fournisseur de plaques en plâtre et de plâtres en Europe, au Canada et en Afrique du Sud. Le groupe fabrique une vaste gamme de matériaux de construction, plaques en plâtre, plâtres, carton, papier et matériaux d'emballage. Il fournit plus de 10 % de la demande mondiale de plaques en plâtre et détient, tant dans l'EEE que sur les marchés allemand, britannique, français et du Benelux, une part de marché d'environ [40-45] %. Premier producteur mondial de plâtre, il a vendu 3 millions de tonnes de ce matériau durant l'exercice 1998-99.

(37) Jusqu'au milieu des années 1980, BPB était un producteur de plâtre et de plaques en plâtre opérant essentiellement au Royaume-Uni et en Irlande (avec une position dominante sur ces marchés de sa filiale britannique British Gypsum), bien que s'étant déjà développé au Canada, en France, en Belgique et en Suède. A partir de cette date, BPB est devenu, à travers différents rachats (21), une entreprise d'envergure pleinement européenne avec production intégrée de gypse naturel et de couverture pour plaques en plâtre. En 1987, le groupe a notamment racheté Rigips, le deuxième fabricant de plaques en plâtre d'Allemagne, bien que ses capitaux soient suisses. Cette acquisition a donné à BPB une forte présence sur les marchés allemand, autrichien, néerlandais, suisse et italien, ainsi qu'une participation de 29 % dans TecnoKarton, une usine de couverture pour plaques en plâtre située en Allemagne et dont les autres actionnaires étaient le cartonnier Weig (45 %) et la société Knauf (26 %). BPB détient 46 % de Gyproc Benelux NV, une société créée en 1957 par BPB et Eternit (aujourd'hui Etex) et qui détient une licence pour la marque "Gyproc" au Benelux et en Allemagne. En France, BPB possède le fabricant de plaques en plâtre Placoplâtre (premier producteur avec plus de [40-45] % du marché national), ainsi que des carrières de gypse et des plâtreries. Au mois d'octobre 1998, le groupe BPB a racheté à Scancem AB la totalité du capital du producteur scandinave de plâtre et de plaques en plâtre Gyproc Group AB, dans lequel il détenait déjà 25 %. En Europe occidentale, BPB exploite une vingtaine d'usines de plaques en plâtre implantées dans les pays suivants : Royaume-Uni, France, Irlande, Grèce, Allemagne, Autriche, Italie et Espagne.

1.3.3.2. Knauf

(38) Entreprise fondée en 1932 et ayant son siège et un important site industriel à Iphofen en Bavière (Allemagne), Knauf comprend désormais un ensemble de sociétés non cotées en bourse et toujours détenues par une [...] de sociétaires appartenant à la famille Knauf (22). Cette entreprise se présente volontiers comme l'entreprise familiale Knauf Westdeutsche Gipswerke (23) : " L'entreprise Gebr. Knauf Westdeutsche Gipswerke, Iphofen, fondée en 1932, est aujourd'hui non seulement un des producteurs leaders de matériaux de construction en Europe, mais aussi un groupe mondial dont les activités ne se limitent pas à la production de matériaux à base de gypse. Malgré la croissance, Knauf reste une société familiale, qui reste la propriété de la famille d'Alfons et Karl Knauf. [...]. ".

(39) De fait, la plus ancienne des sociétés du groupe Knauf est Knauf Westdeutsche Gipswerke qui emploie un nombre important (plus de 1000) de salariés du groupe ; cette entreprise est actuellement une société en commandite dont [des représentants de haut niveau] sont MM. [B et C] (**). Cette société travaille en union spatiale et personnelle (24) avec une autre société, Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG, qui est également une société en commandite dont [des représentants de haut niveau] sont toujours MM. [B et C], et dont la fonction est d'administrer d'autres sociétés du groupe Knauf. On relèvera aussi qu'outre cette direction identique, les deux sociétés en commandite présentent exactement la même structure de détention des parts (mêmes personnes physiques détenant exactement la même partie du capital social (25)). Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG emploie un nombre très limité de salariés, toujours sur le site d'Iphofen.

(40) Knauf est aujourd'hui un producteur de matériaux de construction de stature mondiale qui possède plus de 60 usines en Europe. N'étant pas cotée en bourse, la société Knauf ne publie pas ses comptes. Environ [20-30] % de son chiffre d'affaires est réalisé avec le plâtre et les plaques en plâtre (26).

(41) Knauf est le deuxième producteur européen de plaques en plâtre et détient, tant dans l'EEE que sur les marchés allemand, britannique, français et du Benelux, une part de marché d'environ [25-30] %. Il fabrique également des matériaux d'isolation à base de polystyrène expansé. Knauf a des usines de plaques en plâtre en Allemagne, Espagne, France, Autriche, Danemark, Grèce et au Royaume-Uni. Il est entré sur le marché britannique en 1988 et a construit une usine de plaques à Sittingbourne (Kent) en 1989 et une autre à Immingham l'année suivante. Au début des années 90, Knauf a racheté le petit producteur belge Isolava et le producteur danois Danogips. Il s'approvisionne en plâtre auprès de la société allemande DSG et dans ses propres carrières de gypse en Espagne.

1.3.3.3. Lafarge

(42) Avec des usines dans 65 pays, Lafarge est l'un des plus grands fabricants mondiaux de matériaux de construction. Lafarge est organisée en cinq branches : ciment, agrégats et béton, revêtements de toiture, plâtre et produits techniques, le ciment et le béton représentant à eux deux les deux tiers des ventes de Lafarge. La branche Plâtre, qui exploite en Europe 46 usines, dont dix produisent des plaques en plâtre, représente environ 6 % des ventes du groupe. Lafarge détenait au cours de la période visée par la présente procédure, tant dans l'EEE que sur les marchés allemand, britannique, français et du Benelux, une part du marché européen d'environ [20-25] %, ses principaux marchés nationaux pour ce produit étant la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.

(43) La branche Plâtre de Lafarge est juridiquement formée à partir de sa filiale Lafarge Plâtres International détenue à 99,99 %, devenue Lafarge Gypsum International SA en 2000 (27). Celle-ci possède plusieurs filiales, parmi lesquelles la filiale française, Lafarge Plâtres (détenue à 99,92 %), et Lafarge Beteiligung GmbH (détenue à 100 %), détenant elle-même à 100 %, entre autres, la filiale allemande Lafarge Gips et la filiale britannique Lafarge Plasterboard. En 1997, à la suite d'une offre publique d'achat, Lafarge a racheté le groupe britannique de matériaux de construction Redland PLC, lequel avait ouvert une usine de plaques en plâtre au Royaume-Uni en 1988, puis l'avait vendue à Lafarge en 1990 (Redland Plasterboard Ltd). Après le rachat intégral de Redland PLC en 1997 suivi de son intégration, 1998 a été le premier exercice de consolidation des résultats de Redland avec ceux de Lafarge. En 1993, Lafarge a racheté au producteur norvégien Norgips son usine de plaques en plâtre située aux Pays-Bas, ainsi que sa société de distribution en Allemagne, Norgips GmbH, ce qui lui a donné une présence solide sur le marché allemand.

1.3.3.4. Gyproc

(44) Gyproc était au cours de la période visée par la présente procédure le quatrième producteur de plaques en plâtre d'Europe, avec une part de marché dans l'EEE d'environ [5- 7] % et, sur les marchés visés par la présente procédure, une part de plus de [7-10] %, même en prenant en compte le fait que Gyproc était absente du marché britannique. En 1972, Gyproc a pénétré sur le marché allemand et créé son propre réseau de distribution. En 1974, la société a créé avec Knauf, à Harteshofen, l'entreprise commune de production Gyproc GmbH, dans laquelle Knauf détient une participation de 30 %.

(45) Avec une participation de 54 %, le groupe belge de matériaux de construction Etex est l'actionnaire principal de Gyproc, BPB détenant les 46 % restants du capital. Créée en 1957, la société Gyproc avait alors pour principaux actionnaires BPB et Etex (anciennement Eternit), chacun détenant environ 45 % du capital (le reste était entre des mains privées). Gyproc a obtenu de BPB la licence de la marque et du nom Gyproc pour le Benelux et l'Allemagne. En 1987, Etex a racheté les quelque 10 % du capital détenus par des investisseurs privés, prenant ainsi le contrôle de la société. Cette évolution s'est produite dans le sillage de la dégradation des rapports entre Gyproc et BPB. En effet, aux dires d'Etex, le [représentant de haut niveau] de BPB à l'époque, qui avait pris l'initiative de servir d'" intermédiaire " pour permettre à Gyproc de racheter l'entreprise allemande Rigips, avait alors usé de sa position pour que cette entreprise revienne à BPB. En représailles contre BPB, Gyproc a alors pris pied sur les marchés britannique et français (mais s'est retiré du Royaume-Uni quelques années plus tard). BPB reste un important actionnaire minoritaire de Gyproc et nomme trois de ses administrateurs (dont l'un était M. [...], [représentant de haut niveau] de BPB de [...] à [...]). Etex nomme les quatre autres administrateurs.

1.3.3.5. Les autres producteurs

(46) Au cours de la période objet de la présente procédure, Gyproc AB était le premier fournisseur de plaques en plâtre des pays nordiques, avec plus de [50-55] % de ce marché et une position dominante en Suède, au Danemark et en Finlande. BPB détenait 25 % de son capital, le reste étant entre les mains de la firme suédoise Scancem AB. Il n'y avait aucun lien entre Gyproc AB et Gyproc (hormis le nom ainsi que la participation de BPB). Au mois d'octobre 1998, BPB a pris le contrôle total de Gyproc AB pour la somme de 95 millions de GBP (140 millions d'écus). En 1997, Gyproc AB a réalisé un chiffre d'affaires de 870 millions de SEK (100 millions d'écus).

(47) La société Norgips A/S est une entreprise familiale familiale qui a son siège en Norvège et qui approvisionne principalement ce pays, ainsi que la Suède et les États baltes. En septembre 1993, Norgips a vendu à Lafarge l'usine de plaques en plâtre qu'elle possédait aux Pays-Bas et qui approvisionnait surtout le nord de l'Allemagne, ainsi que sa société de distribution allemande, avec une clause lui interdisant de rentrer en concurrence sur ses précédents marchés d'Europe continentale pendant cinq ans, soit jusqu'en e septembre 1998 (28), Lafarge abandonnant au terme du même accord sa participation dans Norgips dans les pays scandinaves (29). Norgips possède une usine à Opole, en Pologne, qui a démarré son activité en janvier 1998 et vend à destination de l'Allemagne, où elle aurait réussi à conquérir une part de marché atteignant près de [5-7] % en 2001 (30).

1.3.4. La restructuration du secteur

(48) Jusqu'au milieu des années 80, le marché européen des plaques en plâtre était caractérisé par une multitude de producteurs à vocation régionale. Il s'agissait des producteurs suivants, présents sur les marchés indiqués :

- BPB, essentiellement au Royaume-Uni, en Irlande et en France mais aussi sur plusieurs autres marchés européens par le biais de ses filiales et sociétés apparentées ;

- Knauf en Allemagne, en Autriche, au Benelux, en Suisse, en Italie et en Scandinavie ;

- Rigips en Allemagne, en Autriche, au Benelux, en Suisse, en Italie et en Grèce ;

- Lafarge en France, en Italie, au Benelux et au Royaume-Uni ;

- Gyproc au Benelux, en Allemagne, en Autriche et en Suisse ;

- Gyproc AB en Scandinavie ;

- Norgips en Scandinavie, au Benelux, en Allemagne et en France ;

- Danogips en Scandinavie et en Allemagne ;

- Escogips en France, au Benelux et en Allemagne ;

- Epysa (détenue à 40 % par Lafarge) en Espagne, en France, au Royaume-Uni, en Irlande et au Benelux ;

- Arklow Gypsum en Irlande et au Royaume-Uni ;

- Isolava en Belgique.

(49) C'est en 1987 que le secteur est entré dans sa phase de concentration lorsque BPB, dans le cadre de sa stratégie d'expansion en Europe, a racheté le deuxième producteur allemand, Rigips, à ses détenteurs suisses. Ce rachat a eu un effet que BPB, par exemple, décrit comme " spectaculaire " (31), en ce qu'il a déclenché une série de fusions, d'acquisitions et de décisions stratégiques de la part des différents producteurs. C'est ainsi que Knauf a lancé son programme d'expansion en Europe en construisant deux usines au Royaume-Uni où BPB détenait un quasi-monopole. La firme allemande a également racheté Danogips et Isolava et construit des usines en Espagne et en France. Lafarge a construit une usine en Alsace et fait part de son intention de pénétrer sur le marché allemand. Redland PLC, le groupe britannique de matériaux de construction, a ouvert une usine de plaques près de Bristol en partenariat avec CSR, une société minière australienne. En outre, Redland a racheté Escogips en France et l'usine de Norgips aux Pays-Bas (il a cédé son activité de plaques en plâtre à Lafarge en 1990 et a lui-même été racheté par Lafarge en 1997). BPB a racheté d'autres sociétés en France (Plâtres Lambert, Henry) et, lors de la déconfiture de l'entreprise irlandaise Arklow, il a acheté les équipements de celle-ci qu'il a remontés dans une nouvelle usine en Italie. Quant à Gyproc, il a acquis 40 % du capital de Nida Gips, un producteur polonais qui appartenait à l'État et a été revendu à Lafarge en 2001. Gyproc AB a été racheté en totalité en 1998 par BPB.

(50) À la suite de ce processus de concentration du secteur dans les années 1980 et 1990, BPB, Knauf et Lafarge restent les seuls grands acteurs du marché européen, Gyproc occupant une quatrième place relativement minime, suivi depuis fin 1998 par Norgips.

(51) On relèvera que les grands producteurs ont un réseau interconnecté de participations minoritaires, de filiales communes et d'entreprises communes dans la fabrication de produits en amont, la fourniture de plâtre et, dans certains cas, la commercialisation de plaques en plâtre :

- BPB détient 46 % de Gyproc et nomme trois de ses administrateurs ;

- Knauf détient une participation minoritaire importante (30 %) dans deux filiales de Gyproc en Allemagne (Gyproc GmbH et Gyproc GmbH Baustoffproduktion & Co KG, toutes deux sises à Harteshofen) ;

- BPB et Knauf possèdent chacun une participation substantielle (29 % et 26 % respectivement) dans Technokarton, un producteur allemand de couverture pour plaques en plâtre ;

- BPB et Knauf possèdent une filiale commune en Espagne (32).

- Des approvisionnements en commun en gypse peuvent exister entre concurrents (33).

1.4. Détails de l'infraction

1.4.1. La réunion de Londres entre BPB et Knauf en 1992

(52) BPB a indiqué (34) qu'au début de 1992, M. [A], alors [représentant de haut niveau] de BPB, a rencontré à Londres MM. [B et C, Knauf], ses homologues au sein de l'entreprise éponyme : " L'exercice en question [l'exercice d'échanger des données entre [représentants de haut niveau] a commencé en 1992, suite à une réunion entre M. [A] et [MM. B et C, Knauf] à Londres au début 1992, réunion qui a été convoquée à l'initiative [de MM. B et C, Knauf], selon M. [A] ".

(53) La tenue de la réunion à Londres, " au début de 1992 " est confirmée par Knauf (35), qui indique toutefois que ses [représentants de haut niveau] ne se souviennent pas qui en a pris l'initiative, ce qui n'est pas important, selon cette entreprise.

(54) Il n'existe pas de compte rendu écrit de cette réunion ad hoc entre les deux concurrents, celle-ci ne s'inscrivant dans le cadre d'aucune réunion plus large de nature officielle ou sectorielle.

(55) BPB, interrogée sur l'échange d'informations entre [représentants de haut niveau] que les vérifications de la Commission ont permis de découvrir, a révélé (36) que lors de cette réunion, les représentants de BPB et de Knauf " sont tombés d'accord qu'il était de l'intérêt de BPB, Knauf et de l'industrie dans son ensemble (y inclus, finalement, les intérêts des consommateurs) qu'il soit mis fin à la ruineuse guerre des prix et que les producteurs s'efforcent d'être en concurrence à des niveaux économiques plus viables ".

(56) BPB a affirmé ultérieurement (37) que le mot " accord " (" understanding ") utilisée par elle, ne devrait être interprété que dans son sens le plus général de " consensus d'opinions " : Ayant discuté l'état de l'industrie, en particulier les prix bas et les marges faibles ou négatives, et les sombres perspectives, " M [A, BPB] et [MM. B et C, Knauf] ont exprimé des opinions similaires concernant le besoin des producteurs d'ajuster leurs objectifs stratégiques contradictoires concernant les parts de marché. [...] M. [A] a déclaré qu'il ne s'est pas mis d'accord lors de cette réunion avec [MM. B et C], expressément ou implicitement, que BPB et Knauf s'efforceraient collectivement effectivement de mettre fin à la guerre des prix, d'augmenter les prix ou de fixer les parts de marché ".

(57) Quant aux effets de la discussion de Londres entre les [représentants de haut niveau] de BPB et Knauf, BPB affirme qu'ils ont été de " courte durée " : " malgré la discussion, une fois que les prix sont repartis vers le haut [...], la concurrence est restée intense sur les différents marchés européens. Une fois passé le tournant, il y a eu une vigoureuse concurrence sur une base plus rationnelle et durable (38) ". BPB déclare plus loin que " il n'y avait pas d'accord pour fixer les prix ou les parts de marché. M. [A, BPB] a noté les opinions de [MM. B et C, Knauf] et observé les évènements ; il était sceptique mais finalement il a pris la mesure de la situation et les prix sont remontés marginalement. Une fois passé ce tournant, la concurrence entre les parties a continué et, en fait, les prix ont continué à chuter au Royaume-Uni alors qu'ils se stabilisaient (au moins temporairement) ailleurs " (39). BPB reconnaît également que la discussion " pourrait avoir été un facteur contribuant à accélérer la fin de la guerre des prix " (40), même si beaucoup de facteurs étaient à l'œuvre pour conduire à la fin de la guerre des prix, qui aurait pris fin d'une manière ou d'une autre (41).

(58) BPB a indiqué (42) dans sa description de la rencontre de Londres au début 1992, fondée sur une déclaration de M. [A, BPB], que celui-ci et [MM. B et C, Knauf] " lors de cette réunion se sont mis d'accord pour échanger les chiffres de leurs volumes de ventes 1991, afin de se doter d'une base fiable pour le futur pour vérifier que cet accord [original en anglais : " understanding "] était mis en œuvre (c'est-à-dire simplement pour se donner mutuellement une image plus précise de la taille globale du marché et donc de leurs propres parts de marché). Ceci était nécessaire car il n'y avait pas de statistiques industrielles fiables ".

(59) Ultérieurement, BPB a été moins affirmative quant à la date à laquelle l'échange d'informations entre les concurrents a été décidé. En effet, M. [A, BPB], de nouveau interrogé par BPB sur la question, a déclaré être moins sûr de s'être mis d'accord sur cette question lors de la réunion initiale de Londres et qu'il était plus probable que cet accord sur l'échange d'informations soit intervenu mais " plus tard en 1992, probablement aux environs du second trimestre 1992 " (43).

(60) La Commission constate donc, sur la base des déclarations de BPB, qu'il y a eu une convergence de vues exprimée entre BPB et Knauf lors de la réunion de Londres sur la nécessité de modifier leur comportement sur le marché des plaques en plâtre conformément à leur objectif commun de mettre fin à la concurrence agressive et destructrice. La Commission constate également qu'un tournant a effectivement pu être constaté dans l'évolution des prix sur les différents marchés suite à la réunion de Londres, ce qui établit que BPB et Knauf ont effectivement modifié leur comportement suite à cette réunion. La Commission constate en outre que, selon les déclarations de BPB, cette entreprise s'est engagée dans un échange d'informations avec Knauf lors de, ou immédiatement après, cette réunion de Londres, cet échange visant à mettre fin à la vive concurrence qui régnait dans l'industrie des plaques en plâtre au début des années 1990.

(61) Knauf, pour sa part, fait la description (44) suivante de la réunion : son objet aurait été la discussion de l'achat en commun par BPB et Knauf de gisements de gypse en France et en Italie. Mais, par ailleurs, Knauf déclare qu'à l'occasion de cette discussion, les représentants des deux entreprises ont eu des discussions plus larges, ce que Knauf juge normal. Knauf déclare (45) : " Contrairement à la supposition de la Commission, [la discussion] n'a pas abouti à un accord sur la fin de la guerre des prix. Ce qui peut s'être passé est peut-être que des appels réciproques à la raison commerciale aient pu être échangés afin de mettre un terme à l'évolution ruineuse des prix. Que la concurrence entre les parties ne pouvait pas continuer dans la durée dans ces conditions ruineuses, que par conséquent la guerre des prix devait prendre fin, était si clair à ce moment pour chacun qu'une compréhension commune exprimée (" reached an understanding ") avait la valeur d'un discours du dimanche de politicien ". Selon Knauf, un accord suppose un concours de volontés subjectif et objectif, qui n'était pas présent. De même, il n'y a pas eu d'explication réciproque du comportement que chacun adopterait sur le marché. Knauf précise plus loin (46) que " ce que [MM. B et C, Knauf] [...] savent de manière certaine, c'est qu'un accord sur la guerre des prix n'est pas intervenu ", ni sur une limitation de la concurrence destructive, ni sur des quotas.

(62) Selon Knauf (47), il convient de s'imaginer la situation du point de vue de [MM. B et C, Knauf]. Leur entreprise n'était alors pas depuis longtemps sur le marché britannique et [MM. B et C] n'étaient pas satisfaits de la position atteinte sur ce marché. S'ils s'étaient mis d'accord avec M. [A, BPB] sur le fait de mettre un terme à la guerre des prix, ils auraient dû aussi se satisfaire de la position atteinte sur le marché britannique, et cela leur était impossible, un accord aurait été contraire à leurs intérêts.

(63) Enfin, selon Knauf (48), les évènements survenus sur le marché n'établissent nullement qu'un accord ait eu lieu en 1992. En effet, la concurrence " violente " qui prévalait sur tous les marchés importants entre les opérateurs était ruineuse, car la concurrence ne pouvait se faire que sur les prix, vu les caractéristiques du marché des plaques en plâtres. La guerre des prix devait un jour ou l'autre prendre fin, et en 1992, cela aurait déjà dû avoir lieu depuis longtemps. En fait, selon Knauf, il n'y a eu, ni au Royaume-Uni ni en Allemagne, d'apaisement dans les années suivantes. Knauf prétend d'ailleurs que la Commission elle-même constaterait dans la communication des griefs (49) que la guerre des prix aurait continué au Royaume-Uni. Selon Knauf, si un accord avait eu lieu, il aurait dû se manifester au moins sur le plus important marché européen, à savoir le marché allemand, ce qui, toujours selon Knauf, n'a pas été le cas.

(64) Knauf indique (50) que " sur la base de la discussion avec [M. A, BPB], [MM. B et C, Knauf] se sont dit prêts à faire connaître les données relatives au chiffre d'affaires. ". Knauf admet par ailleurs, qu'un " accord " (51) a été trouvé pour échanger des données de vente pour les marchés britannique, français et allemand, ainsi que pour le marché belge, compte tenu de la participation de BPB dans Gyproc.

(65) La Commission constate, en premier lieu, que Knauf ne conteste pas la matérialité des faits décrits par BPB quant à la réunion de Londres : celle-ci non seulement a eu lieu, mais elle a été l'occasion d'une discussion sur la situation concurrentielle sur le marché. Knauf admet la possibilité que les deux entreprises y aient échangé des " appels réciproques à la raison commerciales " et exprimé une " compréhension commune ". Knauf, en revanche, conteste la portée de cette réunion telle que décrite par la Commission et estime, pour autant qu'on puisse comprendre le sens de cette phrase, qu'il n'y avait pas plus d'engagement réciproque dans les propos échangés que dans des promesses de politiciens. Toutefois, la Commission estime que les formules employées par Knauf permettent à tout le moins de confirmer l'existence d'une volonté de s'influencer réciproquement.

(66) En second lieu, la Commission constate que l'argument selon lequel un accord ne pourrait avoir eu lieu, car il aurait été contraire aux intérêts de Knauf en ce que cette entreprise n'était pas satisfaite de la position atteinte sur le marché britannique, n'apparaît pas pertinent pour déterminer si un accord a eu lieu ou non durant la réunion de Londres. Il n'appartient pas à la Commission de se prononcer sur le point de savoir si une telle discussion était stratégiquement adroite ou rationnelle, mais seulement de savoir si la discussion a eu lieu ou non et quelle était sa teneur. La Commission remarque d'ailleurs que Knauf qualifie de commercialement impossible un accord en vue d'une fin de la guerre des prix en 1992 portant sur le Royaume-Uni. Or, les éléments disponibles, et notamment les déclarations de BPB, conduisent à conclure que l'accord a eu un champ d'application s'étendant aux principaux marchés européens, mais que l'accord a mis plus de temps à atteindre ses objectifs sur le marché britannique, ne produisant ses effets que postérieurement à la restructuration du système de prix annoncée fin juillet 1992 par BPB à ses clients pour être effective au 31 août 1992 (52). Dès lors, l'interprétation de Knauf ne contredit pas en substance les autres éléments disponibles.

(67) En troisième lieu, la Commission constate que l'argument selon lequel la concurrence " violente " ou " guerre des prix " devait nécessairement prendre fin pour des raisons économiques, à supposer qu'il soit fondé en fait, ce qui n'est nullement établi, est dépourvu de pertinence pour déterminer les raisons pour lesquelles, et les conditions dans lesquelles, la " guerre des prix " a pris effectivement fin, et notamment le point de savoir si des comportements anticoncurrentiels des opérateurs sont à l'origine de cette évolution. La Commission constate également que l'appréciation de Knauf selon laquelle on ne pourrait constater que la concurrence " violente " a effectivement pris fin en 1992, et éventuellement un peu plus tard sur le marché britannique, est contredite à la fois par cette entreprise elle-même, lorsqu'elle suggère que la fin de la guerre des prix était inévitable, et par BPB et Gyproc qui reconnaissent que 1992 constitue un tournant pour les prix sur le marché des plaques en plâtre. Du reste, il faut relever que Knauf évoque de manière inexacte la communication des griefs, la Commission n'ayant pas indiqué que la guerre des prix se poursuivait au Royaume-Uni mais que le processus de retournement de l'évolution des prix avait pris plus de temps à se concrétiser sur ce marché que sur les autres grands marchés européens, et avait suivi une restructuration de la tarification de BPB intervenue après l'été 1992.

(68) La comparaison des déclarations de BPB et Knauf amène la Commission à conclure tout d'abord que, sans que cela soit contesté par ces deux entreprises, lors de la réunion de Londres au début 1992 entre BPB et Knauf, la situation concurrentielle sur le marché des plaques en plâtre en Europe a été évoquée par les participants, même si d'autres sujets ont pu être évoqués.

(69) La Commission constate ensuite que, si la nature exacte et la portée de la discussion menée lors de la réunion de Londres au début 1992 entre BPB et Knauf ne sont pas décrites de manière identique par les deux entreprises, les déclarations de celles-ci présentent néanmoins en substance des analogies. Ainsi, ce que Knauf décrit comme " appels réciproques à la raison commerciale " est décrit comme " accord " (" understanding ") par BPB, les deux entreprises reconnaissant par ailleurs que l'objet sur lequel portait cet échange d'opinions identiques était le souhait de voir prendre fin la " guerre des prix ". La Commission estime par ailleurs pouvoir prendre en compte les déclarations plus précises de BPB, dans la mesure où, premièrement, cette entreprise n'a pas de raison d'inventer des évènements dont le dévoilement est contraire à son intérêt en ce qu'il peut entraîner des sanctions pour l'entreprise (voir la section 2.1.1) et où, deuxièmement, les déclarations de BPB sont basées sur les déclarations précises d'un participant direct à la réunion, M. [A, BPB], alors que les déclarations de Knauf ne sont pas conclusives53 ; de plus et troisièmement, les déclarations de BPB sont cohérentes avec les autres éléments de fait objet de la présente procédure.

(70) Dans ces conditions, la Commission conclut que, dans la discussion de Londres au début 1992, BPB et Knauf ont exprimé l'analyse commune que la concurrence vigoureuse en vue de gagner des parts de marché qui prévalait entre elles, et plus généralement sur l'ensemble du marché des plaques en plâtre depuis plusieurs années, concurrence qui s'était traduite par des baisses de prix et de profonds changements structurels sur ce marché, devait prendre fin et que pour le futur, il était souhaitable pour les parties de décourager toute concurrence trop agressive et de stabiliser le marché dans la situation alors atteinte.

(71) La Commission constate par ailleurs que les déclarations de BPB et Knauf permettent de conclure que la situation du marché des plaques en plâtre a significativement évolué en 1992. BPB, qui a indiqué (54) que de 1988 à 1992 les prix réels avaient chuté de 50 à 75 % et que toutes les entreprises faisaient face à de lourdes pertes en 1992, reconnaît explicitement l'existence à cette date d'un " tournant ". Knauf, tout en prétendant que la guerre des prix a continué, affirme qu'il était évident pour tous les producteurs que celle-ci devait prendre fin. D'ailleurs, Knauf décrit (55) le marché des plaques en plâtre comme un oligopole étroit de commodités fonctionnant normalement ; l'étude (56), annexée à la réponse de Knauf, du professeur [...] sur le fonctionnement du marché allemand de 1992 à 1998 confirme cette conclusion. Or, Knauf a par ailleurs décrit le fonctionnement du marché avant 1992 comme un " non-sens économique " (57), ou encore comme ruineux et ne pouvant convenir à des dirigeants raisonnables (58). Force est donc de conclure qu'un changement est intervenu en 1992, qui a permis de passer d'un fonctionnement considéré par Knauf comme absurde, à un fonctionnement considéré par Knauf comme plus habituel du marché des plaques en plâtre.

(72) A titre subsidiaire, la Commission relève que les évolutions de parts de marché après 1992 et pour la durée des faits objet de la présente procédure ont été plus limitées que celles intervenues dans la période de temps analogue antérieure à la réunion de Londres (voir l'annexe de la présente décision). Enfin, à la différence de la période antérieure à 1992, il semble que les concurrents n'ont tenté ni de s'implanter sur des marchés où ils n'étaient pas présents, ni d'y gagner substantiellement des parts de marché par la création ou le développement de capacités de production au-delà de la croissance de la demande. La réunification allemande et l'ouverture des économies d'Europe centrale et orientale a créé à cet égard une situation particulière (voir la section 1.4.4).

(73) S'agissant de l'échange d'informations, la Commission conclut des déclarations des deux entreprises que BPB et Knauf ont décidé d'un commun accord de procéder à un échange de données internes à chacune des entreprises, à savoir le volume de ses ventes sur les principaux marchés européens.

1.4.2. L'échange des données sur les volumes de ventes sur les quatre principaux marchés européens de 1992 à 1998

1.4.2.1. Modalités

(74) Lors des vérifications effectuées chez BPB et Gyproc en novembre 1998, la Commission a découvert de nombreuses preuves directes des échanges d'informations entre concurrents effectués peu de temps auparavant.

(75) Il convient de signaler que BPB a procédé au début de l'année 1998, avant les vérifications de la Commission, à une investigation interne visant à vérifier la véracité d'allégations anonymes reçues par ses principaux actionnaires, selon lesquelles [M. D, représentant de haut niveau de BPB] aurait coordonné des arrangements collusoires en France avec Knauf et Lafarge et organisé un cartel européen concernant les plaques en plâtre (59). BPB a indiqué à la Commission que cette investigation interne n'avait pas permis de découvrir de documents révélant des infractions au droit communautaire de la concurrence (60). La Commission n'est pas en mesure de vérifier l'exactitude de cette affirmation de BPB mais constate que l'hypothèse que les faits en cause puissent faire l'objet d'une enquête a été discutée au sein de l'entreprise plusieurs mois avant que les vérifications de la Commission aient lieu, ce qui entraîne que l'absence d'effet de surprise doit être pris en compte dans l'analyse des résultats de ces vérifications.

(76) A cet égard, plusieurs documents découverts datant de l'automne 1998 révèlent les échanges intervenus entre M. [D, BPB] et les [représentants de haut niveau] de Knauf, Lafarge et Gyproc.

(77) Ainsi, un document manuscrit intitulé " Chiffres à fin octobre " (61) mentionne des chiffres en regard des initiales " K ", " F ", " GB ", " B ".

(78) BPB a indiqué (62) que ce document décrivait les volumes de ventes de plaques en plâtre de Knauf pour la période allant de janvier à septembre 1998 en Allemagne (" K "), en France (" F "), au Royaume-Uni (" GB ") et au Benelux (" B "), que M. [C, Knauf] a communiqué par téléphone à M. [D, BPB].

(79) Un autre document, intitulé " from Belgique " (63) donne les ventes de Gyproc pour la même période, en mètres carrés, comme l'a noté M. [D, BPB] à qui ces chiffres ont été communiqués par M. [E] (Gyproc). Les marchés concernés sont la Belgique et le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse et la France. Sur la même feuille, M. [D] a également noté à la main les chiffres arrondis des ventes réalisées par Lafarge durant la même période de neuf mois.

(80) Selon BPB (64), ces chiffres ont été communiqués à M. [D, BPB] par M. [F], successeur de M. [G] en tant que [...] de la branche plâtres de Lafarge à partir de [...].

(81) Un troisième document intitulé " Fin septembre 98 " (65) présente, pour le Royaume-Uni, le Benelux, la France et l'Allemagne, une colonne de chiffres non intitulée et dactylographiée ainsi que deux colonnes manuscrites et intitulées respectivement " BPB " et " K ".

(82) Selon BPB (66), la colonne dactylographiée correspond aux chiffres des volumes de ventes de BPB pour la période allant de janvier à septembre 1998, les colonnes manuscrites de la main de M. [D, BPB] correspondent aux chiffres qui ont été échangés par téléphone entre M. [D] et M. [B, Knauf]. On notera que la colonne manuscrite " BPB " mentionne des chiffres arrondis à cent mille mètres carrés près, mais sans distorsion apparente par rapport aux chiffres de la colonne dactylographiée qui sont exacts.

(83) Des traces parallèles des mêmes échanges ont été découverts par la Commission lors de ses vérifications chez Gyproc dans l'agenda où M. [E, Gyproc] notait un certain nombre d'informations.

(84) Ainsi, une page de l'agenda datée du 3 mars 1998 (67) donne les parts de marché de Gyproc, Knauf, BPB et Lafarge en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en France. Une autre page (68) donne les chiffres de chacun des quatre producteurs en Allemagne, en France et au Benelux pour les six et les neuf premiers mois de 1998.

(85) Une autre page du même agenda (69) de M. [E] indique les volumes de ventes réalisés par les quatre producteurs sur le marché allemand sur les neuf premiers mois de 1997.

(86) On relèvera que Gyproc ne vendait plus au Royaume-Uni depuis plus de sept ans au moment où ces informations ont été échangées en 1998. On relèvera aussi que les chiffres indiqués pour cette dernière période correspondent à ceux que M. [D, BPB] a notés pour les différents producteurs dans les documents " Chiffres à fin octobre ", " from Belgique ", et " Fin septembre 98 ". Dans l'agenda de M. [E, Gyproc], les chiffres de ventes en volume ont également été convertis en parts de marché. On relèvera enfin que les chiffres indiqués pour les neuf premiers mois de 1997 correspondent à ceux que M. [D] a notés pour l'Allemagne dans ses tableaux intitulés " 9 mois 97 " (70).

(87) Gyproc a confirmé cet échange en 1998 entre M. [E, Gyproc] et M. [D, BPB]. Dans sa déclaration (71), le [représentant de haut niveau] de Gyproc indique avoir fourni " pendant 9 mois en 1998 [...] par téléphone des chiffres détaillés à M. [D]. Ce dernier donnait en retour des informations sur les concurrents relatives aux marchés allemand, belge, français et néerlandais ". Gyproc a précisé (72) que M. [E] a envoyé un fax au domicile privé de M. [D] à Londres pour lui communiquer les volumes de ventes de Gyproc. Ultérieurement (73), Gyproc a précisé que M. [E] a communiqué des informations à M. [D] à trois reprises : " en avril 98 (chiffres du premier trimestre), en juillet 98 (chiffres du deuxième trimestre) et en octobre 98 (chiffres du troisième trimestre) ".

(88) En outre, lors des vérifications menées par la Commission chez BPB, deux séries de tableaux détaillant les ventes des quatre producteurs européens ont été découverts.

(89) Sur la première série de tableaux intitulés " parts de marché " (74), figurent des chiffres absolus et des pourcentages portant sur " France ", " Benelux ", " Allemagne ", " Grande Bretagne " et " total ", pour " I ", " II ", " III " et " IV ", et pour les années 1985, puis 1991 et 1992 ([année]), 1993 à 1995 (" H1 ", " H2 ", [année]) et 1996 à 1998 (" Q1 ", " Q2 ", " H1 ", " Q3 ", " 9 months ", " H2 ", [année]).

(90) La seconde série de tableaux (75) est composée de deux tableaux par année, le premier intitulé " Part de marché Europe [année] réelle ", et le second " Part de marché Europe [année] estimée ", pour les années 1995 à 1997, pour les pays ou régions suivants : " France ", " RFA ", " Suisse ", " Austria ", " Belgium ", " Holland ", " Benelux ", " Italie ", " Spain ", " Portugal ", " Iberica ", " UK ", " Eire ", " B.I. ", " Denmark ", " Suede ", " Norway ", " Skanska ", " Finland ", " Nordic ", " Europ W ", " Hungary ", " Czech ", " Slovakia ", " Poland ", " Romania ", " CEE(S) ", " CEE(E) ", " Total ". Les données sont exprimés en chiffres absolus et en pourcentages, pour les quatre entreprises ou groupes d'entreprises suivants : BPB, Gyproc, AB Gyproc, les trois additionnés donnant " BPB " ; Lafarge, Norgips, Epysa, les trois additionnés donnant " Lafarge " ; Knauf, Danogips, Isolava, les trois additionnés donnant " Knauf " ; " autres ".

(91) Lors de la vérification, M. [D, BPB] a été interrogé sur la seconde série de tableaux (tableaux " Part de marché réelle " et " Part de marché estimée "). Selon le compte rendu rédigé sur place par les inspecteurs de la Commission, il a indiqué (76) que les chiffres étaient exprimés en millions de mètres carrés, que les sources de ces chiffres " consistaient en un mélange de ses propres estimations et de discussions avec diverses personnes, essentiellement Gyproc et Knauf, mais que les chiffres donnés par ces derniers étaient seulement limités et de manière restreinte et se référaient seulement à l'Allemagne, la France, Le Royaume-Uni et le Benelux. Quant à la signification de " réelles " et " estimées ", M. [D] a répondu que le tableau contenait quelques chiffres bruts et que le second étaient ses propres estimations. Si les chiffres étaient les mêmes, cela signifiait que les deux étaient des estimations. A la question de savoir pourquoi il avait fait ces tableaux, M. [D] a répondu qu'il s'agissait d'un exercice intellectuel consistant à mélanger des chiffres bruts et des estimations. A la question de savoir comment il obtenait l'information, M. [D] a répondu l'avoir probablement reçue lors de conversations téléphoniques informelles et non pas dans des réunions formelles, que cet exercice était fait une fois par an par lui-même et que l'information n'était jamais reçue sous forme de papier et jamais transmise à d'autres et était utilisée seulement pour sa propre gouverne ".

(92) Il convient de relever que lorsque M. [D] évoque le terme de " chiffres bruts ", il faut comprendre qu'il s'agit des chiffres communiqués par ses homologues dans les entreprises concurrentes, et donc de chiffres réels - bien qu'il soit possible que les concurrents aient à l'occasion communiqué des chiffres délibérément erronés.

(93) Ultérieurement, BPB a indiqué (77) que, sur la première série de tableaux (tableaux " I ", " II ", " III " et " IV ") concernant les ventes respectives des producteurs sur les grands marchés, elle était elle-même désignée par " I ", Gyproc par " II ", Lafarge par " III " et Knauf par " IV ". BPB a également précisé que M. [D], à partir des renseignements obtenus des autres producteurs, compilait sur ordinateur des tableaux indiquant les ventes, avec mise à jour trimestrielle, des quatre producteurs sur chacun des marchés nationaux d'Europe.

(94) S'agissant de la seconde série de tableaux (tableaux " Part de marché réelle " et " Part de marché estimée "), BPB a indiqué (78) que ce dernier jeu de tableaux était tenu à jour par M. [D] afin de comparer la différence entre les données fournies par les autres [représentants de haut niveau] (intitulées " réelle ") et ses estimations personnelles (intitulées " estimée ") concernant la situation du marché. BPB ajoute que M. [D] avait parfois des doutes sur l'exactitude des chiffres qui lui étaient communiqués par ses homologues et considérait ses propres estimations comme plus exactes. BPB a aussi indiqué que la série " réelle " était " les chiffres qu'il [M. [D]] recevait des autres [représentants de haut niveau] " (79).

(95) Concernant les modalités concrètes d'échange d'informations entre concurrents, selon BPB (80), les chiffres étaient échangés lors de conversations téléphoniques. BPB a également indiqué (81) qu'en un nombre limité d'occasions, M. [D, BPB] a utilisé la voie du courrier envoyé au domicile de MM. [G, Lafarge] et [B, Knauf] pour communiquer des renseignements sur les ventes de BPB aux autres [représentants de haut niveau] et reçu des documents par le même moyen. De M. [E, Gyproc], M. [D] recevait plus souvent des informations sous forme documentaire : il recevait généralement à son domicile privé londonien des télécopies comprenant des informations parfois manuscrites et parfois dactylographiées, ce que Gyproc a confirmé (82), en précisant que M. [D] transmettait oralement par téléphone les chiffres à M. [E].

(96) Il faut noter que Knauf (83) et Lafarge (84), qui par ailleurs n'ont pas substantiellement contesté la description faite par la Commission dans la communication des griefs des échanges d'informations opérés entre les concurrents, n'ont pas fourni d'explication alternative sur la façon dont leurs données avaient pu être communiquées à M. [D, BPB] et ainsi être retrouvées dans des documents chez BPB.

(97) Concernant le champ d'application dans l'espace des échanges d'informations, la Commission constate en premier lieu que la plupart des documents portent sur les quatre grands marchés nationaux d'Europe, c'est-à-dire l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni et le Benelux et que M. [D, BPB] a déclaré lors de la vérification que les échanges de données ne portaient que sur ces marchés. BPB a ultérieurement réitéré cette affirmation (85).

(98) Pourtant, il apparaît en premier lieu que le document " from Belgique ", (86) qui, selon BPB, provient d'échanges avec M. [E] de Gyproc, mentionne des chiffres également pour l'Autriche et la Suisse. Ceci pourrait s'expliquer par le fait que Gyproc a accepté de fournir des documents pour la totalité de ses ventes, comme l'a déclaré M. [E].

(99) En outre, les tableaux " Part de marché réelle " et " Part de marché estimée " ne portent pas seulement sur les quatre principaux marchés européens, mais sur la totalité des marchés européens, y inclus la Norvège, la Suisse, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie, la Pologne et la Roumanie. Quant à savoir dans ces tableaux quelles données proviennent des concurrents, et pour quels marchés, la remarque de M. [D, BPB] concernant ces tableaux, selon laquelle " si les chiffres étaient les mêmes, cela signifiait que les deux étaient des estimations " ne permet pas de tirer une conclusion évidente. En effet, on peut conclure de cette affirmation de M. [D] que des chiffres différents entre les deux tableaux pour le même marché et pour la même période signifient que M. [D] aurait reçu une information directe d'un concurrent.

(100) Or, la comparaison détaillée des deux séries révèle que, s'agissant de Gyproc, les données " réelles " ne correspondent pas aux données " estimées " pour 1996 en Allemagne, et pour la totalité des marchés où Gyproc intervient en 1997, alors que la correspondance était parfaite en 1995. S'agissant de Lafarge (87), les chiffres qui diffèrent en 1995 sont ceux portant sur l'Italie ; en 1996, sur la France, l'Italie, l'Espagne et le Portugal ; en 1997, sur la France, l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, l'Espagne, le Portugal et le Royaume-Uni. S'agissant de Knauf (88), les chiffres qui diffèrent en 1995 sont ceux portant sur l'Allemagne, la Belgique, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie, la Pologne et la Roumanie ; en 1996, sur l'Allemagne, l'Espagne, le Portugal et la Pologne ; en 1997, sur la France, l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l'Espagne, le Portugal et le Royaume-Uni (89). On doit tirer de l'indication de M. [D] sur ses tableaux la conclusion qu'existaient des contacts avec Gyproc, Lafarge et Knauf, les concurrents de BPB, sur les résultats en 1995, 1996 et 1997, ne portant pas exclusivement sur les quatre grands marchés européens (France, Allemagne, Benelux, Royaume-Uni).

(101) Cependant, en l'absence d'éléments permettant de confirmer l'existence d'échanges sur des marchés autres que les quatre grands marchés européens (France, Allemagne, Benelux, Royaume-Uni), la Commission conclut que les échanges entre concurrents ont porté avec certitude sur la France, l'Allemagne, le Benelux et le Royaume-Uni. Cette conclusion est, en outre, validée par le fait que des preuves directes de contacts entre concurrents existent, confirmées par des déclarations des entreprises qui y ont participé, et que l'autre série de tableaux de M. [D] (tableaux " I ", " II ", " III " et " IV ") portant sur les années 1991 à 1998 a été décrite par BPB comme issue de renseignements obtenus des concurrents sur lesdits quatre grands marchés.

(102) Concernant la périodicité des échanges d'informations entre concurrents, BPB a indiqué (90) qu'il n'y avait pas, entre les dirigeants des entreprises concernées, d'arrangement visant à procéder à l'échange à des intervalles précis et réguliers. BPB souligne à l'appui de cette affirmation le fait qu'il était parfois arrivé qu'ils ne procèdent à l'échange des informations que deux mois environ après la fin de la période à laquelle se rapportaient les chiffres échangés. BPB a indiqué (91) qu'aucune disposition particulière n'a été prise pour échanger les volumes de ventes à une date précise ou en des occasions préétablies. Les chiffres étaient échangés lors de conversations téléphoniques portant sur d'autres questions liées à la vie des affaires ; M. [D, BPB] aurait appelé MM. [E] (Gyproc), [G] (Lafarge) et [B (Knauf)] dans certaines occasions via le standard des entreprises ou sur leur ligne directe, mais la discussion sur les volumes de ventes étant plutôt initiée par ses interlocuteurs. BPB a précisé (92), sur la base de la déclaration de M. [D] (93), qu'il y avait un intervalle de temps de plusieurs mois interrompu par un appel de Knauf ou Lafarge sur d'autres questions, et durant lequel les interlocuteurs prenaient conscience que du temps avait passé depuis le dernier échange et échangeaient alors leurs chiffres pour la période passée. L'échange n'avait pas un caractère de routine fixe et M. [D] recevait les données à intervalle variable.

(103) La Commission constate, cependant, que le caractère irrégulier n'est pas confirmé par les déclarations de BPB soulignant que les échanges menés avaient une régularité croissante dans le temps, avec un rythme successivement annuel, puis semestriel, et enfin trimestriel. De même, les tableaux de M. [D, BPB] témoignent d'informations collectées de manière systématique et régulière. En outre, le fait, comme le prétend BPB, que les parties n'auraient parfois échangé les informations que deux mois après la fin de la période à laquelle se rapportaient les chiffres échangés, à supposer qu'il soit avéré, n'est en lui-même nullement une preuve du caractère irrégulier de l'échange. Enfin, le fait que l'échange aurait été irrégulier, à supposer qu'il soit avéré, ne porte nullement préjudice au caractère continu de l'échange mené pendant toute la durée de la période objet de la présente procédure.

1.4.2.2. Objectif des parties dans leur participation à l'échange d'informations

(104) Interrogée par la Commission sur la communication des données entre concurrents révélée par cet ensemble de documents et reconnue par M. [D, BPB] lors des vérifications, BPB a fait, dans un premier temps (94), la description suivante de la communication réciproque des données qui s'est poursuivie jusqu'aux vérifications de la Commission européenne en novembre 1998 : " Les chiffres échangés dans le cadre de ces arrangements étaient des chiffres annuels pour les principaux marchés, c'est-à-dire le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne et le Benelux. A un moment donné, M. [D] est devenu responsable de l'échange des données relatives à la France et à l'Allemagne. Quand M. [H] a pris sa retraite de BPB en [1993], M. [D] s'est également chargé de l'échange de données concernant le Royaume-Uni et le Benelux. A un moment donné (M. [D] ne se rappelle pas exactement quand mais ses tableaux suggèrent 1993) les parties ont décidé d'échanger les informations sur une base plus régulière (c'est-à-dire environ tous les six mois) et plus tard (probablement en 1995) se sont mises d'accord pour les échanger sur une base approximativement trimestrielle. "

(105) BPB a indiqué (95) que M. [A, BPB] a cessé [en 1992] d'être [représentant de haut niveau] du groupe, mais a conservé [sa position comme membre] du conseil d'administration, jusqu'à son départ en retraite en 1997. [Représentant de haut niveau] de la division Plâtre de BPB, M. [H], est parti en retraite en [1993]. M. [D], jusque là [représentant de haut niveau] de BPB [dans un pays européen] et [représentant de haut niveau] du groupe pour toutes les activités en Europe continentale, l'a remplacé comme [représentant de haut niveau de] BPB. Ainsi, M. [A], jusqu'en 1997, savait que l'échange avait lieu. Selon la déclaration de M. [D] transmise par BPB à la Commission (96), celui-ci n'aurait informé M. [I], successeur de M. [A] comme [représentant de haut niveau] en 1997, que dans des " termes généraux " du fait qu'il cherchait " à estimer la taille du marché des plaques en plâtres en relation avec les autres producteurs ".

(106) BPB a ultérieurement (97) précisé que l'objectif de l'accord visant à échanger des informations avec Knauf était de fournir à M. [A, BPB] " une base pour évaluer s'il y avait un nouvel état d'esprit dans l'industrie ", c'est-à-dire que " l'échange d'informations à haut niveau fournirait un degré d'assurance mutuelle que la guerre des prix prenait fin ". BPB a d'ailleurs explicitement admis (98) que les échanges d'informations effectués par M. [A] avaient servi l'objectif de mettre fin à la vive concurrence qui régnait dans l'industrie des plaques en plâtre au début des années 1990 : " les deux échanges suivants de données historiques effectués par M. [A] peuvent avoir servi, et peuvent avoir été destinées à servir à aider à la fin de la guerre des prix ".

(107) BPB distingue ainsi, dans sa réponse à la communication des griefs (99), d'une part, les deux premiers échanges de données effectués par M. [A, BPB] en 1992 et 1993 et, d'autre part, les suivants, conduits par M. [D, BPB]. Ainsi les " échanges [A] " auraient un lien avec la discussion de Londres au début 1992 et la fin de la " guerre de prix " (100), alors que les " échanges [D] " seraient de nature et d'objet différents, à savoir un simple échange d'informations sans finalité autre qu'une meilleure connaissance du marché pour les participants, BPB acceptant d'ailleurs de reconnaître comme une infraction au droit de la concurrence un tel échange. De même, BPB affirme (101) que M. [A] n'était pas au courant de l'accélération du rythme des échanges en 1993 puis 1995, sous la conduite de M. [D].

(108) Mais, par ailleurs, M. [D, BPB] déclare, en annexe de la même réponse de BPB à la communication des griefs, que " M. [A, BPB] a recueilli les données en 1992, puis a délégué cette tâche à M. [H, BPB] et moi-même en 1993. Après le départ en retraite de M. [H] en [1993], je suis resté la seule personne chez BPB impliquée dans ces échanges, en pleine connaissance de cause de M. [A] qui, cependant, mettait en garde contre de trop fréquents échanges " (102). Par ailleurs, dans la même réponse à la communication des griefs (103), BPB a indiqué que M. [H] a initialement pris la responsabilité pour effectivement échanger les données avec Lafarge.

(109) BPB a également prétendu (104) que l'échange d'informations était favorable à la concurrence en augmentant la transparence du marché. BPB prétend (105) ainsi minimiser la portée de l'échange d'informations mené, en en limitant l'objectif à une meilleure connaissance du marché.

(110) BPB indique par ailleurs (106) que les tableaux réalisés par M. [D, BPB] pour ses propres objectifs de direction de son entreprise n'ont jamais été diffusés, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur de BPB, mais que celui-ci les a gardés pour lui.

(111) Force est cependant pour la Commission de relever la contradiction entre l'affirmation que M. [A, BPB] mettait en garde contre des échanges trop fréquents et l'affirmation que M. [A] n'était pas informé de l'accélération des échanges mise en œuvre par M. [D, BPB].

(112) De même, les informations sur le rôle respectif de MM. [A, BPB], [H, BPB] et M. [D, BPB] conduisent à renforcer l'idée que le rôle de M. [A], dès l'origine, a été d'initier l'échange, dont la mise en œuvre a été déléguée à d'autres responsables de BPB, avec l'implication directe de M. [D] sous la direction de M. [A] dès les échanges de 1993 portant sur les données de 1992 et le maintien d'une information de M. [A] jusqu'à son départ de l'entreprise en 1997, d'où découle plutôt l'apparence de continuité de l'organisation desdits échanges au sein de BPB sur toute la période visée par la présente décision. De plus, il faut relever la poursuite de 1992 à 1998 des mêmes modalités d'échanges, quoiqu'à un rythme progressivement plus soutenu. En outre, les affirmations de BPB sur deux types distincts d'échanges ne sont confirmées ni par Knauf ni par Lafarge. Enfin, BPB n'a fourni aucun élément démontrant qu'elle aurait indiqué aux autres participants une évolution de l'objectif de l'échange d'informations et se serait distanciée de l'objet des échanges antérieurement déterminé entre les concurrents.

(113) La Commission constate donc que la réponse de BPB à la communication des griefs apparaît davantage comme une ré-interprétation des faits destinées à séparer artificiellement les " échanges [A, BPB] " des " échanges [D, BPB] ", sans que des faits nouveaux soient de nature à soutenir cette ré-interprétation. La première réponse de BPB et les déclarations de M. [D] conduisent plutôt à conclure à un seul et même mécanisme d'échange d'informations.

(114) La Commission constate également que les déclarations de BPB permettent de conclure à l'existence d'un lien entre l'échange d'informations, la fin de la guerre des prix et la stabilisation du marché. Dès lors, si, de l'aveu même de BPB, les premiers échanges visaient à appuyer la stabilisation du marché, il faut nécessairement conclure que les échanges ultérieurs avaient la même finalité.

(115) Quant à l'argument selon lequel ces informations n'ont pas utilisées, à supposer même qu'il soit vérifié, il est dépourvu de pertinence, dans la mesure où leur usage limité par [le représentant de haut niveau] de l'entreprise a été admis par BPB et où, en toute hypothèse, le fait en lui-même de procéder à l'échange entre concurrents est susceptible de poser problème au regard des règles de concurrence (voir aussi le considérant (163)).

(116) Il convient enfin de relever que toute prétention de BPB quant à un éventuel caractère sinon innocent, du moins bénin, des échanges conduits par M. [D, BPB], est privé de fondement par l'interdiction signifiée par M. [D] lui-même fin mars 1998 à ses employés de ne pas discuter avec les concurrents sur les prix ou les parts de marché (voir le considérant (275)) : BPB, et M. [D] en particulier, connaissaient le caractère illégal des contacts auxquels celui-ci participait activement. (voir aussi les considérants (167) à (170)).

(117) Knauf a indiqué (107) que sa participation à l'accord concernant l'échange d'informations était basé, du côté de [MM. B et C, Knauf], sur le souhait de disposer de données sur le marché à leurs propres fins commerciales, alors que de telles données n'étaient pas disponibles. C'est avec cette unique finalité que [MM. B et C] ont manifesté leur accord pour mettre occasionnellement à disposition leurs chiffres de ventes.

(118) Selon Knauf (108), " Ceci a eu lieu au départ sur une base très irrégulière et ensuite à des intervalles de temps d'une demi-année et plus. Avec une telle mise en œuvre, une utilisation abusive de telles données en vue de contrôler un prétendu accord est simplement impossible. [...] Les données relatives au chiffre d'affaires sont de plus trop générales pour pouvoir servir à un contrôle. Elles étaient en outre communiquées a posteriori, de sorte qu'une manœuvre sur le marché n'était pas possible ". Knauf indique par ailleurs (109) que l'échange a été fait en faisant directement connaître à M. [D, BPB] des résultats de vente passés et en en recevant des données en retour. Personne chez Knauf comme chez BPB, en dehors des [représentants de haut niveau] respectifs, n'a été informé des chiffres ainsi reçus.

(119) Quant à la finalité de l'instrument mis en place, Knauf indique (110), après avoir contesté son usage à des fins de contrôle des concurrents, que le sens de ces échanges d'informations était " bien plutôt l'établissement d'un instrument interne d'information, afin d'évaluer de manière à peu près fiable la taille du marché. La valeur interne pour l'entreprise de ces informations réside entre autres dans ce que la planification interne en rapport avec les coûts de stockage et la sécurisation des matières premières pouvaient être utilisée de manière plus fiable. Il est bien connu que la plaque en plâtre n'est pas seulement un produit dépendant des matières premières, mais surtout, de manière défavorable, par rapport aux coûts de stockage et de transport ".

(120) Knauf indique (111) encore que le choix d'un échange direct a été fait car le système antérieur d'échange de données à travers un tiers neutre n'avait pas donné de résultats satisfaisants quant au degré d'exactitude. Mais Knauf prétend (112), en se référant à une note interne de BPB (113) du 6 janvier 1993 relative aux conditions de légalité d'un échange d'informations entre concurrents, qu'existait l'intention d'organiser l'échange d'informations dans " une forme irréprochable au regard du droit de la concurrence ".

(121) La Commission remarque, en premier lieu, que Knauf ne peut donner d'interprétation des faits qu'en ce qui la concerne, et donc qu'elle ne peut affirmer que les informations ainsi collectées n'ont pas été utilisées au sein de BPB. D'ailleurs, concernant la note interne de BPB, même à supposer que sa signification soit celle que Knauf prétend, et telle n'est pas l'interprétation qu'en donne la Commission, Knauf ne fournit aucune indication ou document prouvant qu'elle-même partageait l'intention qu'elle prête à BPB.

(122) En second lieu, la Commission remarque que si Knauf reconnaît le lien entre la réunion de Londres et l'échange d'informations entre ses dirigeants et ceux de BPB, elle ne fournit aucune précision sur les circonstances temporelles ou matérielles dans lesquelles les autres producteurs ont participé à cet échange ni ne date le commencement de cet échange.

(123) En troisième lieu, la référence exclusivement à M. [D, BPB] comme contact pour l'échange d'informations est en contradiction avec les données plus précises fournies par BPB, qui cite M. [A, BPB] comme participant de son côté à l'échange, jusqu'à ce que M. [D] " à un moment " (114) prenne la responsabilité de l'échange pour la France et l'Allemagne, avant de prendre également la responsabilité de l'échange pour l'échange concernant le Royaume-Uni et le Benelux après le départ de M. [H, BPB] en [1993].

(124) En quatrième lieu, la Commission constate que Knauf insiste sur l'inadéquation du système d'échange retenu pour un contrôle efficace du comportement des parties. Or, une telle insistance ne vient pas contredire l'existence d'une volonté de réaliser un tel contrôle, mais seulement la prétendue inefficacité du moyen retenu à cette fin.

(125) En dernier lieu, l'inefficacité alléguée par Knauf du système antérieur d'échange de données à travers un tiers neutre n'aurait pas dû, à l'évidence, dispenser cette entreprise de s'interroger sur la légalité d'un échange direct avec ses concurrents. D'ailleurs, la Commission relève que la référence au " système antérieur d'échange de données à travers un tiers neutre " renvoie vraisemblablement au système ayant existé sur le marché allemand dans les années 1980 (voir le considérant (213)) qui était le support d'une entente manifestement illégale visant à répartir le marché entre concurrents. S'agissant, enfin, de l'exactitude du système, il n'y a pas de raison pour présumer qu'un échange direct serait plus fiable qu'un échange à travers une tierce personne. La différence essentielle, et la valeur ajoutée en termes d'exactitude, entre l'échange à travers un tiers et un échange direct est, précisément, que ce dernier permet d'identifier la part de marché de chaque participant à l'échange.

(126) La Commission constate en conclusion que les déclarations de Knauf confirment largement la présentation des faits issue des déclarations de BPB en ce qui concerne l'échange d'informations et sa finalité, à savoir la surveillance mutuelle de l'évolution des parts de marché de chacun et par là, assurer qu'aucun producteur ne bouleverserait les positions acquises et la stabilité du marché.

(127) S'agissant de la participation de Lafarge à cet échange, la Commission relève que BPB a indiqué durant l'enquête (115) qu'après la réunion de Londres de 1992 entre BPB et Knauf le processus d'échange de renseignements a été étendu pour inclure Lafarge.

(128) Par ailleurs, la part de marché de Lafarge sur les principaux marchés européens est décrite en valeur absolue et en pourcentage dans les tableaux de M. [D, BPB] à partir de 1991 (voir le considérant (88)) et la Commission en conclut que les chiffres de Lafarge ont été connus de Knauf et BPB à partir de 1992, ce qui établit que Lafarge a participé à l'échange d'informations à partir de l'année 1992 en fournissant ses propres chiffres à ses concurrents.

(129) Lafarge reconnaît (116) avoir " effectivement progressivement participé à un système limité d'échange de volumes de ventes globales et historiques dirigé par M. [D] de la société BPB " mais indique que " sa participation s'arrête là et n'est en aucun cas liée à une quelconque concertation sur une stabilisation des parts de marché en Europe ". Cependant, alors même qu'elle souligne l'imprécision des indications initiales de BPB quant à la date du début de sa participation au mécanisme institué par Knauf et BPB, Lafarge ne fournit ni la date de son entrée dans le mécanisme d'échange d'informations commerciales, ni les circonstances qui l'ont conduite à s'engager dans un tel échange, et notamment quels contacts ont nécessairement eu lieu préalablement au commencement de l'échange en vue d'en déterminer les modalités essentielles, c'est-à-dire son objet, ses acteurs et sa périodicité.

(130) Lafarge indique (117) que " la réalité de l'échange de renseignements est très éloignée de la description qu'en fait la Commission. La participation de Lafarge à un tel système, et de toute évidence sa création par BPB, procèdent de la nécessité pour chacun des producteurs de mieux connaître les marchés. On a déjà souligné la complexité de ces marchés et leur manque de prévisibilité notamment en l'absence de statistiques. [...] Cette réalité était particulièrement marquée au début des années 1990, alors que les producteurs sortaient de leur marché traditionnel pour devenir des acteurs européens. Lafarge n'était alors surtout présent qu'en France. Il venait à peine de s'implanter au Royaume-Uni et ne procédait qu'à des exportations limitées à destination de l'Allemagne et des pays limitrophes. A cette période, les principaux marchés européens suivent également des tendances totalement différentes : le marché anglais est en baisse, le marché français est stable et le marché allemand en croissance, notamment à l'est. On rappelle d'ailleurs qu'au Royaume-Uni, le marché était complètement opaque parce que BPB, qui publiait ses statistiques de production et de vente lorsqu'il était seul sur le marché, en a suspendu toute communication au gouvernement à partir du moment où d'autres acteurs sont arrivés sur le marché. Cette réalité est l'unique raison de la participation de Lafarge à un tel échange de renseignements. A cet égard, il convient de signaler que le fait que Monsieur [G, Lafarge] n'en ait pas fait état n'est nullement une preuve de ce que l'échange aurait dissimulé une infraction. Lafarge, qui ne contrôlait pas cet échange, n'y a donc procédé que pour obtenir par ce biais quelques éléments de recoupement de ses informations trop souvent lacunaires sur ces quelques marchés qui lui importaient, tels que le Royaume-Uni et l'Allemagne. "

(131) Lafarge affirme aussi (118) que l'échange de renseignements ne constituait pas un moyen de détection destiné à désamorcer les conflits, car " de toute façon trop rudimentaire pour servir de moyen de détection ", faussé " étant donné que certaines des entreprises n'hésitaient pas à fournir de faux chiffres, ce qu'aucun n'ignorait ", et que le système n'a jamais été utilisé en tant que tel.

(132) Lafarge a, en outre, communiqué à la Commission, suite à l'audition, une déclaration de M. [G], [représentant de haut niveau] de la branche " plâtre " de Lafarge jusque [...], selon laquelle (119) face à la " forte indisponibilité des données relatives aux marchés concernés en Europe ", les concurrents de Lafarge ont proposé à M. [G] " d'échanger quelques informations très globales sur les volumes. N'ayant pas grand chose à perdre, [M. [G] a] saisi la chance, en contrepartie de quelques informations sommaires, de glaner en retour des connaissances plus précises que celles dont [M. [G] disposait] par ailleurs sur la taille exacte des marchés, principalement en Grande-Bretagne et en Allemagne ". M. [G] indique également n'avoir pas attaché une grande confiance aux chiffres qui lui ont été transmis, dont il craignait " qu'ils ne soient biaisés ou ne servent à intoxiquer " Lafarge, d'où le fait que M. [G] ne les aurait jamais communiqués aux divers responsables de Lafarge Plâtres sous son autorité et ne les aurait utilisés que comme éléments de recoupement. M. [G] indique enfin avoir suggéré la mise en place au niveau européen d'un système d'échange d'informations statistiques " conforme à la réglementation ", mais s'être heurté " à une certaine retenue de la part des leaders du marché, réticence difficilement compréhensible, sauf si l'on tente de deviner à qui l'obscurité de la situation qui en résultait pouvait profiter ".

(133) Dans sa réponse à la communication des griefs, BPB a précisé ses premières déclarations en indiquant (120) que " s'étant mis d'accord pour échanger des données avec Knauf, M. [A, BPB] (et probablement Knauf également) s'est arrangé pour échanger des données également avec Lafarge. M. [A] pense qu'il a directement approché [M. J] de Lafarge, bien qu'il dise qu'il est aussi possible que M. [H, BPB] ait procédé à cette approche, dans la mesure où ce dernier connaissait mieux M. [J]. (en tout cas, il semble que M. [H] a initialement pris la responsabilité d'échanger effectivement les données avec Lafarge. M. [A] ne peut se souvenir quand il a (ou quand M. [H] a) pour la première fois approché Lafarge, mais il pense que c'était au milieu de 1992 ".

(134) Invité à commenter la déclaration de BPB (121), Lafarge a indiqué que cette déclaration était " des plus hésitantes ", car n'identifiant pas " quelles données, sur quels marchés, s'il s'agissait d'un échange ponctuel ou périodique, et qui a effectué cette approche. Quant à la date à laquelle une telle approche aurait eu lieu, ce serait probablement au milieu de l'année 1992 mais BPB n'en a aucune certitude. M. [J, Lafarge], lui, n'a pas de souvenir d'une telle réunion et n'a donné aucune instruction qui concernait des échanges de données aux responsables de Lafarge Plâtres, à quelque période que ce soit ".

(135) La Commission constate que la déclaration de BPB dans sa réponse à la communication des griefs est à l'évidence un complément des informations déjà communiquées par cette entreprise et ne s'y substitue pas. Il est dès lors artificiel de prétendre, comme le fait Lafarge dans la déclaration reproduite au considérant (134), que l'objet de l'échange ou sa périodicité ne seraient pas identifiés. En outre, BPB n'hésite pas dans sa déclaration, mais au contraire s'efforce de préciser que le contact a été pris avec M. [J, Lafarge], soit par M. [A, BPB], soit par M. [H, BPB], alors que, selon Lafarge, M. [J] " n'a pas de souvenir d'une telle réunion ". La Commission relève également que BPB n'a pas évoqué une " réunion ", comme l'indique Lafarge, mais une " approche ", ce qui peut signifier toute forme de contact - téléphonique par exemple - aussi bien qu'une rencontre physique entre ces deux dirigeants d'entreprises concurrentes.

(136) Les déclarations de BPB étant plus précises et circonstanciées à cet égard que celles de Lafarge, la Commission conclut que la réponse de Lafarge ne vient pas infirmer les déclarations de BPB. Dès lors, la Commission conclut de la présence de chiffres de 1991 pour Lafarge dans les tableaux de M. [D, BPB], des déclarations de BPB et de la déclaration de M. [G, Lafarge] et de l'absence de contestation de Lafarge quant à sa participation à l'échange d'informations que BPB au moins a informé Lafarge au milieu de 1992, soit au plus tard à la fin du mois d'août 1992, de l'accord entre elle et Knauf sur les échanges de données et que, à cette occasion, Lafarge a adhéré à cet accord et l'a mis en œuvre.

(137) La Commission relève les fonctions exercées par M. [J, Lafarge], que BPB indique avoir approché : Lafarge a indiqué lors des vérifications en 1998 (122) que M. [J] était " [représentant de haut niveau] du groupe Lafarge ", ce que confirme sa notice biographique disponible sur le site internet du groupe [...] (123).

(138) En toute hypothèse, l'affirmation par Lafarge de la légitimité du but de l'échange ne peut résister à la circonstance que Lafarge a participé de manière certaine à des réunions explicitement collusoires, comme on pourra le constater plus loin à l'exposé des faits se rapportant à la réunion de Versailles en juin 1996 et à ses suites (voir le considérant (220)). Cette réunion, à tout le moins, aurait dû éclairer Lafarge, si cette entreprise l'ignorait, ce que ne saurait admettre la Commission, sur le fait que l'échange d'informations avait une portée autre que la simple information réciproque et prétendument innocente des concurrents, mais avait une visée anticoncurrentielle de stabilisation des marchés pour lesquels cette entreprise participait à un échange d'informations, c'est-à-dire, outre l'Allemagne, la France, le Royaume-uni et le Benelux.

(139) Par ailleurs, la Commission conclut des déclarations mêmes de M. [G, Lafarge], que Lafarge savait, ou pouvait raisonnablement savoir que l'échange d'informations constituait objectivement un mécanisme de surveillance du marché, quelles qu'aient été éventuellement les intentions de Lafarge en y participant. En effet, M. [G] lui-même s'est interrogé sur la légalité de cet échange, et pourtant y a engagé son entreprise. D'ailleurs, Lafarge indique bien que ce sont ses concurrents, donc BPB et Knauf, qui l'ont contacté, ce qui n'aurait pas dû laisser le moindre doute à Lafarge sur le caractère anticoncurrentiel de la démarche. De plus, le fait qu'il y avait des tricheries ou que M. [G] en soupçonnait ou en craignait l'existence indique précisément un tel objectif de surveillance : un simple échange tend à être fiable et il ne doit pas y avoir de raisons pour tricher, alors que dans un mécanisme de surveillance on essayera de tricher, pour ne pas dévoiler une percée sur un certain marché, que le mécanisme essaye précisément de maîtriser.

(140) Quant à l'affirmation de M. [G] selon laquelle il n'accordait pas de confiance aux données reçues, qui par conséquent n'auraient pas mérité d'être diffusées dans l'entreprise, la Commission constate qu'elle ne permet pas de comprendre pourquoi Lafarge aurait participé à un exercice d'échange d'informations pendant plus de six ans, si ces informations avaient été inutiles ou dépourvues de toute fiabilité.

(141) S'agissant de la participation de Gyproc à l'échange d'informations sur les principaux marchés européens engagé en 1992 par BPB, Knauf et Lafarge, la Commission relève d'abord que les données relatives à la part de marché de Gyproc sur les différents marchés européens sont décrites dans les tableaux établis par M. [D] de BPB à partir de 1991 et qu'il n'est discuté par aucune partie que l'accord sur l'échange des informations entre BPB, Knauf et Lafarge incluait également, dès l'origine, les données de Gyproc.

(142) BPB a déclaré immédiatement après avoir décrit le début des échanges d'informations en 1992 (124) que " M. [A, BPB] a aussi obtenu des chiffres de ventes de [M. K, Gyproc] (125) [...] et a échangé ces chiffres, ainsi que ceux de BPB, avec Knauf et Lafarge ". BPB a ultérieurement (126) reformulé ses déclarations antérieures en indiquant : " Environ au même moment [le milieu de 1992], M. [A] a également obtenu les chiffres des volumes de ventes de Gyproc pour 1991 que lui et M. [H, BPB] ont échangé avec Knauf et Lafarge, mais il n'a dit à personne chez Gyproc qu'il l'a fait. Par la suite, M. [A] ne peut se rappeler exactement quand, il a dit à M. [E] de Gyproc qu'il avait échangé les chiffres de BPB et Gyproc avec Knauf et Lafarge ". Par ailleurs (127), BPB a indiqué que " Gyproc a seulement participé directement aux échanges consécutifs à la guerre des prix à partir de 1994 ". BPB a aussi déclaré (128) que M. [D, BPB] participait aux réunions du conseil d'administration de Gyproc et recevait à cette occasion des informations sur les activités de la filiale commune de BPB et Etex.

(143) La Commission constate que les déclarations de BPB peuvent être interprétées comme signifiant que Gyproc ne recevait pas des informations de ses concurrents, ou même éventuellement uniquement de BPB, mais qu'à partir d'un certain moment que BPB ne peut préciser, MM. [K, Gyproc] et [E, Gyproc] savaient que leurs chiffres avaient été communiqués par BPB à leurs concurrents. On peut toutefois remarquer que le fait que M. [A, BPB] ait informé MM. [K] et [E] suggèrerait que cette information de Gyproc par BPB pourrait avoir eu lieu en 1992 ou 1993, puisque ensuite M. [D], devenu [représentant de haut niveau] de BPB, a repris de M. [A] son rôle actif dans l'échange d'informations avec les concurrents (voir le considérant (105)). Quant à la manière dont BPB était entrée en possession des chiffres de Gyproc, les déclarations de BPB ne permettent pas de conclure avec certitude si Gyproc a activement fourni ces chiffres à BPB ou si BPB a utilisé des chiffres reçus dans le cadre des relations entre une société mère et sa filiale.

(144) M. [E], [représentant de haut niveau] de Gyproc, a indiqué dans une déclaration à la Commission (129) " qu'il recevait depuis 1995 régulièrement de M. [D, BPB] les parts de marché allemandes des concurrents. Il n'obtenait rien d'autre. Dans les conseils d'administration de Gyproc, M. [D] recevait les volumes en m² de Gyproc dans tous les marché pertinents. M. [E] ignore si ces chiffres étaient communiqués aux concurrents par M. [D]. En mars 1998, M. [D] a averti Gyproc que BPB faisait l'objet d'un chantage dans la mesure où une tierce personne anonyme avait l'intention de déposer un dossier incriminant BPB à la Commission européenne. Le conseil de Gyproc a réagi en décidant de ne plus fournir les volumes de vente pays par pays. M. [D] ne recevrait plus qu'un chiffre global. En tant qu'actionnaire M. [D] a insisté auprès de M. [E] afin que celui-ci continue à fournir les chiffres en question. M. [E] a cédé à cette demande et, pendant 9 mois en 1998, a fourni par téléphone des chiffres détaillés à M. [D]. Ce dernier donnait en retour des informations sur les concurrents relatives aux marchés allemand, belge, français et néerlandais. Cet échange s'est arrêté à la fin de l'année 1998 ".

(145) Gyproc a précisé (130) qu'à partir de 1998, " à l'issue et en dehors de la réunion du conseil, M. [D, BPB] a fortement insisté pour continuer à avoir connaissance des chiffres propres à Gyproc. En contrepartie, il a proposé de communiquer à M. [E, Gyproc] les évaluations qu'il avait sur les marchés intéressant Gyproc. C'est pourquoi M. [D] téléphonait trimestriellement à M. [E] à son bureau à Anvers pour qu'il lui communique les informations, ce que M. [E] faisait en lui envoyant un fax à son domicile privé à Londres (Gyproc n'a plus copie de ces documents). Quelques jours après, M. [D] téléphonait à M. [E] à son bureau à Anvers pour lui donner les informations relatives au marché français, allemand et benelux. Ces échanges d'information ont débuté en 1998 et ont uniquement porté sur les trois premiers trimestres 1998 ".

(146) Ultérieurement (131), Gyproc a affirmé n'avoir eu aucune connaissance de l'existence d'un échange de renseignements avant début 1998. Toutefois, Gyproc souligne que, " à partir de 1997, Gyproc a eu des soupçons quant à la possible divulgation par BPB de ses chiffres à des tiers " (132). De même, s'appuyant sur une citation de la note de décembre 1997 de M. [E, Gyproc] à M. [L, Gyproc] (133) (" BPB connaît nos chiffres exacts et je pense, les communique aux autres "), Gyproc prétend (134) que " si un échange d'information portant sur les chiffres de Gyproc intervenait avec Knauf et Lafarge, c'était uniquement à l'initiative de [M. D, BPB] et certainement pas de propos délibéré dans le chef de Gyproc ".

(147) Par ailleurs, Gyproc précise (135) que " outre la limitation dans le temps susmentionnée (juin 1996 à 1998), la participation de Gyproc Benelux au système d'échange de renseignements incriminé par la Commission était également limitée dans ses modalités et dans l'espace. Dans ses modalités : Gyproc Benelux recevait de [M. D, BPB] des informations, que ce dernier présentait d'ailleurs comme des estimations, et ne lui en fournissait que dans le cadre ou en marge des réunions de son Conseil d'administration, c'est-à-dire dans le contexte de relations normales entre administrateurs. Ce n'est que de manière tout à fait exceptionnelle et dans des circonstances très particulières, à savoir la réunion de Versailles (136) et la négociation du rachat d'Opole [...] que Gyproc Benelux a communiqué aux autres producteurs (Knauf et Lafarge) ses volumes de vente sur le marché allemand. Dans l'espace: à l'exception des mois d'avril à octobre 1998, les informations communiquées par Gyproc Benelux et BPB concernaient uniquement le marché allemand. [...] Gyproc Benelux fut contactée pour la première fois par ses concurrents en vue de la conclusion d'un accord lors du congrès Eurogypsum de Versailles. Or, les contacts informels entretenus par les producteurs en marge de ce congrès ont porté uniquement sur la stabilisation du marché allemand. "

(148) Gyproc indique encore (137) que " c'est uniquement en sa qualité d'actionnaire incontournable, occupant la moitié des sièges au Conseil d'administration de Gyproc Benelux, que BPB obtenait des informations sur les chiffres de vente de Gyproc Benelux. Cet état de fait ne peut en aucun cas être reproché à Gyproc Benelux qui s'est effectivement contentée de respecter ses obligations en matière de droit des sociétés. Il est, en effet, impératif qu'un administrateur soit informé de données aussi élémentaires que les chiffres de vente de la société dont il est chargé de définir la stratégie commerciale et de contrôler les activités. Conformément aux articles 527 et suivants du Code des Sociétés belge, les administrateurs sont responsables de l'exécution du mandat qu'ils ont reçu et des éventuelles fautes commises dans leur gestion. Il est indubitable qu'en vue d'exécuter correctement leur mandat et gérer de manière adéquate la société, les administrateurs doivent notamment disposer d'une image précise et complète des activités de la société. Tous les documents communiqués à BPB et toutes les discussions entretenues avec celle-ci s'inscrivaient toujours dans le contexte de relations normales et usuelles entre administrateurs d'une même société (préparation des Conseils, discussions au cours des Conseils, informations intermédiaires entre deux Conseils, etc.). "

(149) La Commission constate d'abord que, pour la période postérieure à mars 1998, Gyproc a, de son propre aveu, activement échangé ses chiffres avec BPB pour les grands marchés européens sur lesquels Gyproc était actif - soit, compte tenu de ce que Gyproc n'était pas actif sur le marché britannique, les marchés allemand, français et du Benelux. Ainsi, Gyproc transmettait à BPB des chiffres de ventes dont cette entreprise savait qu'ils seraient communiqués à Knauf et Lafarge ; en contrepartie, Gyproc recevait les chiffres de ventes de BPB, Knauf et Lafarge.

(150) Pour la période antérieure à mars 1998, Gyproc admet avoir reçu dès 1995 des informations relatives aux chiffres de ventes de la part de [M. D, BPB] sur le marché allemand. En outre, Gyproc pouvait raisonnablement supposer que BPB n'obtenait pas les informations sur ses concurrents dans le marché allemand sans donner en échange les informations dont BPB disposait.

(151) Comme on le verra à la section 1.4.5.2, Gyproc a également reçu et communiqué à BPB, Knauf et Lafarge ses données sur les volumes de ventes en Allemagne, à partir de la réunion des dirigeants de ces quatre entreprises à Versailles en juin 1996. Gyproc a également participé aux contacts et échanges d'informations concernant les hausses de prix sur le marché allemand à partir de la fin 1994 (voir la section 1.4.6).

(152) La note interne à Gyproc de décembre 1997 (138) qui porte sur la rencontre de Versailles de juin 1996 indique que c'est lors de ladite réunion que les [représentants de haut niveau] se sont révélés leurs ventes sur le marché allemand, alors qu'il est établi que des échanges concernant l'échange mené au niveau européen et incluant le marché allemand avaient lieu depuis quatre ans, ce qui suggère l'absence de participation antérieure de Gyproc aux échanges d'informations.

(153) La Commission peut donc conclure qu'à partir de juin 1996 au plus tard, Gyproc a participé à l'échange d'informations avec BPB, Knauf et Lafarge concernant le marché allemand.

(154) Pour les autres marchés sur lesquels portait l'échange d'informations engagé en 1992 par BPB, Knauf et Lafarge, la Commission constate que les chiffres de Gyproc étaient connus de ses trois autres concurrents dès l'origine en 1992, comme en témoigne leur présence dans les tableaux de M. [D, BPB].

(155) Il faut relever que les déclarations de BPB selon lesquelles Gyproc aurait participé directement aux échanges d'informations à partir de 1994 ne sont pas corroborées par d'autres éléments.

(156) L'affirmation de Gyproc selon laquelle, jusqu'en mars 1998, les informations relatives aux ventes de Gyproc en Europe que BPB transmettait à Knauf et Lafarge provenaient de la participation des représentants de BPB aux conseils d'administration de Gyproc, mais sans en informer les dirigeants de Gyproc, est plausible.

(157) La note interne de Gyproc de décembre 1997 mentionnée au considérant (152) indique aussi que " BPB connaît nos chiffres exacts et je pense, les communique aux autres ". Cette indication, qui n'est pas limitée au marché allemand, pourrait confirmer que Gyproc a été informée de l'échange mené au niveau européen à partir de juin 1996.

(158) En toute hypothèse, au-delà de sa participation avérée aux échanges d'informations sur le marché allemand, Gyproc savait ou aurait dû savoir, au moins à partir de la réunion de Versailles en juin 1996 à laquelle ses dirigeants ont participé, que des contacts à visée anticoncurrentielle avaient lieu entre les producteurs de plaques en plâtre concernant les marchés européens. De plus, le fait que les échanges aient été menés par les plus hauts dirigeants des entreprises concernées, et pas uniquement par les cadres responsables pour l'Allemagne, aurait dû indiquer à Gyproc que l'échange avait une portée plus large que le seul marché allemand. Par ailleurs, les informations échangées par Gyproc, bien que concernant seulement le marché allemand, se situaient dans un mécanisme de communication parallèle et plus régulier que les contacts qui ont suivi la réunion de Versailles (voir les réunions de Bruxelles au considérant (246), et de La Haye, au considérant (255)). Sauf à considérer qu'un tel échange était une duplication inutile des échanges menés au niveau allemand dans le cadre de ces contacts, il était, ou aurait dû être, évident aux yeux des dirigeants de Gyproc qu'un tel échange s'intégrait dans un mécanisme différent.

(159) A partir de juin 1996 au plus tard, Gyproc ne pouvait donc ignorer que BPB communiquait, ou à tout le moins était susceptible de communiquer, les informations relatives aux ventes de Gyproc sur les marchés européens autres que le marché allemand à Knauf et Lafarge et qu'en ne s'opposant pas à la fourniture d'information à BPB via son conseil d'administration, elle permettait à BPB de communiquer ses chiffres aux concurrents.

(160) La Commission relève à cet égard qu'en mars 1998, Gyproc a cessé de fournir ces informations à BPB lors des conseils d'administration. Ainsi, quelles qu'aient été les obligations auxquelles Gyproc se jugeait tenue vis-à-vis de BPB, elle n'a pas hésité à s'en écarter lorsqu'elle l'a jugé nécessaire.

(161) Dès lors, la Commission conclut que Gyproc a participé à l'échange des données sur les volumes de ventes sur les quatre principaux marchés européens avec BPB, Knauf et Lafarge, par l'intermédiaire de BPB à partir de juin 1996.

(162) En conclusion, la Commission constate que BPB, Knauf et Lafarge cherchent à minimiser la portée de l'échange des données sur les volumes de ventes sur les quatre principaux marchés européens. La Commission constate ainsi que BPB, Knauf et Lafarge prétendent que les informations échangées n'ont pas (selon BPB et Lafarge) ou peu ( selon Knauf) été utilisées dans la définition de la stratégie des entreprises.

(163) Cet argument, à supposer même qu'il soit vérifié, est dépourvu de pertinence, dans la mesure où toutes ces entreprises ont admis l'usage limité de ces informations par les [représentants de haut niveau] des entreprises concernées (139). Par ailleurs, c'est le fait même que cette information soit susceptible d'être utilisée qui pose problème. En effet, sa non utilisation pourrait démontrer simplement que le comportement des participants à l'échange ne rend pas nécessaire une réaction particulière de la part des autres participants, précisément parce que chacun agit comme il a été convenu et que la surveillance réciproque a été efficace ; ou encore parce que les personnes qui recevaient ces informations, les [représentants de haut niveau] des entreprises, considéraient que le comportement des participants, bien que préjudiciable, ne portait pas atteinte à l'objectif fondamental des participants à l'échange, et que mieux valait une telle situation plutôt que l'absence de coordination.

(164) Du reste, ces entreprises de grande envergure n'expliquent pas pourquoi leurs [représentants de haut niveau] ont, pendant plus de six ans, mis en œuvre, personnellement et secrètement - ou à tout le moins, selon leurs propres dires, sans rien en communiquer à leurs collaborateurs - un échange d'informations. BPB, du reste, reconnaît (140) incidemment cette contradiction logique, en indiquant que l'échange d'informations devait bien avoir une certaine utilité, sinon les concurrents n'auraient pas persisté à le mener. Les entreprises concernées n'expliquent pas davantage pourquoi, si l'échange de renseignements était considéré comme une opération parfaitement anodine, il a été entouré de discrétion voire de secret, avec des télécopies, des lettres et des appels téléphoniques envoyés au domicile personnel de chacun et la connaissance de l'opération limitée aux [représentants de haut niveau] [...].

(165) Le fait en lui-même de procéder à l'échange entre concurrents dans les conditions décrites dans la présente décision et par des producteurs représentant la totalité ou quasi-totalité de l'offre sur un marché particulièrement concentré comme celui des plaques en plâtre est susceptible de fausser la concurrence. Au contraire de Lafarge qui développe (141) en substance l'argument selon lequel la " connaissance des marchés " est un objectif nécessairement légitime de nature à justifier valablement le comportement des entreprises, la Commission considère qu'une telle connaissance peut parfaitement, au contraire, justifier des comportements dont l'objet ou l'effet sont anticoncurrentiels, en ce qu'ils sont de nature à justifier une réduction de l'incertitude inhérente au fonctionnement du marché conformément à l'exigence d'autonomie sur laquelle repose l'économie du système de concurrence au sein de la Communauté.

(166) Par ailleurs, l'inadéquation prétendue par Knauf ou Lafarge entre l'échange et l'objectif de stabilisation n'est nullement avérée. En effet, les informations transmises dans le cadre de cet échange, quoique globales et portant sur des ventes réalisées quelque temps avant l'échange des informations, étaient pourtant suffisantes pour atteindre l'objectif défini par BPB et Knauf lors de la réunion de Londres. L'échange, par son existence même, permet parfaitement d'atteindre l'objectif de vérifier que chacun des producteurs reste dans les limites de ce que Knauf a appelé la " raison commerciale " : chaque producteur participant à l'échange peut vérifier qu'au cours de la période écoulée, aucun de ses concurrents n'a tenté de bouleverser la stabilité du marché en cherchant à gagner des parts de marché, en cassant les prix et en augmentant ses ventes, ce qui avait constitué jusqu'à cette date le facteur ayant entraîné la guerre des prix.

(167) D'ailleurs, les dirigeants de BPB, Knauf et Lafarge n'ignoraient pas les risques de telles pratiques au regard du droit de la concurrence et, dûment mis en garde, ils ont pourtant jugé nécessaire de poursuivre ces pratiques.

(168) Ainsi, les dirigeants de BPB étaient pleinement conscients, dès l'origine, des risques qu'ils couraient en matière de violation des règles communautaires de concurrence. Le 14 décembre 1992, MM. [A], [H] et [D] ont reçu une note de service (142) du directeur exécutif au conseil d'administration, qui, de toute évidence, ignorait tout du processus dans lequel ceux-ci étaient déjà engagés. Cette note leur rappelait les limites autorisées pour un système officiel de collecte et de diffusion de données statistiques à l'échelle d'un secteur. En outre, après avoir été à nouveau expressément averti en mars 1998 de la situation juridique dans le cadre du droit communautaire, M. [D] a poursuivi l'opération secrète sans relâche jusqu'à la date des vérifications.

(169) S'agissant de Knauf (143), ses conseils juridiques l'avaient informé des conditions dans lesquelles un échange d'informations était susceptible d'être toléré : anonymat et absence d'information précise sur les chiffres des concurrents, ce qui à l'évidence n'était pas le cas dans le système institué en 1992.

(170) Quant à Lafarge, la Commission relève que M. [G], [représentant de haut niveau] de la branche " plâtre " de Lafarge jusque [...], affirme lui-même (voir le considérant (132)) avoir suggéré en vain à ses concurrents la mise en place d'un système d'échange d'informations statistiques " conforme à la réglementation " au début de sa participation au mécanisme d'échange en 1992. En outre, dans sa déclaration communiquée à la Commission suite à l'audition, M. [G] précise avoir demandé en 1997 à son conseil juridique une analyse " sur la faisabilité d'un système statistique juridiquement acceptable " au niveau européen (144) et avoir obtenu une réponse " encourageante " à cet égard. La Commission présume qu'à cette occasion Lafarge a été dûment informée des limites strictes d'un tel échange.

1.4.3. Echanges d'informations sur les volumes et parts de marché concernant le marché britannique

(171) Un échange d'informations, distinct de celui mené au niveau des quatre grands marchés européens et qui incluait le Royaume-Uni, a été mené par les trois entreprises présentes sur le marché britannique, BPB, Knauf et Lafarge. Cet échange est différent du premier en ce qui concerne les personnes physiques qui l'ont mené, ses modalités et son champ d'application, limité aux ventes sur le marché britannique. Toutefois, sur ce marché, son objet était identique à celui du mécanisme décrit à la section 1.4.2, s'agissant de données relatives aux volumes de ventes et aux parts de marché. De plus, il a fonctionné parallèlement au mécanisme déjà décrit pendant la même période, à savoir de 1992 à 1998, s'arrêtant apparemment toutefois en mars 1998.

(172) BPB a d'abord indiqué que des données relatives aux parts de marché semblent avoir été échangées sur une base informelle (145). BPB a ensuite précisé (146) qu'en 1992, M. [M], alors [représentant] de British Gypsum, avait reçu des instructions de dirigeants du groupe BPB, MM. [H] et [A], lui demandant d'échanger des chiffres de ventes avec ses homologues chez les filiales de Knauf et de Lafarge. M. [M] a poursuivi ses contacts avec les concurrents de son entreprise jusqu'à sa promotion comme [représentant] du groupe BPB en 1995 mais, aux dires de BPB, la pratique de l'échange des chiffres de ventes a été poursuivie par son successeur chez British Gypsum, M. [N]. Ces échanges se sont poursuivis jusqu'en mars 1998, date à laquelle les contacts avec les concurrents auraient cessé.

(173) Ultérieurement, BPB a indiqué (147) que " les échanges auxquels M. [N, BPB] a pris part, jusqu'à ce qu'il cesse tout échange en 1998, étaient constitués de deux parties. L'information relative aux parts de marché du Royaume-Uni peut être analysée de manière identique aux échanges dans lesquels les autres étaient impliqués sur les quatre marchés et devrait être considérée comme " moins grave ". Les échanges étaient irréguliers mais, quand les données étaient échangées, elles concernaient des données mensuelles, ce qui les distingue de celles reçues par M. [D, BPB], dont la période variait en fonction de la fréquence des échanges. Un intervalle de six mois produirait une donnée de part de marché pour une période de six mois, un intervalle de trois mois produirait une donnée pour le dernier trimestre. Les échanges n'étaient jamais plus fréquents que cela ".

(174) La Commission constate que les instructions données à M. [M, BPB] ont suivi de près la rencontre qui a eu lieu à Londres entre [MM. B et C, Knauf] et M. [A, BPB].

(175) Par ailleurs, sur la base des déclarations de BPB, la Commission conclut que l'initiative de l'échange concernant le marché britannique a été prise par BPB, puisque cette entreprise a donné l'instruction à un de ses employés d'engager l'échange d'informations.

(176) BPB a indiqué (148) n'avoir pas gardé copie de toutes les notes de M. [M, BPB] concernant les chiffres reçus et présentés comme des " estimations ", mais a indiqué que deux documents, datés respectivement de juillet et septembre 1993 et découverts lors des vérifications, correspondaient à de telles communications. Ces documents sont deux fax adressés par M. [M] à M. [D] qui, à ce moment-là, était encore [représentant] de BPB [dans un pays européen], mais pratiquait désormais l'échange de renseignements avec [MM. B et C, Knauf] et M. [G, Lafarge] pour l'ensemble de l'Europe.

(177) Selon BPB, M. [M, BPB] croit que les premières données échangées portaient sur 1992 et que les données sur 1991 de ces documents sont des estimations purement internes. La Commission constate toutefois que BPB a admis que M. [M] a participé à des échanges à partir de 1992 (149).

(178) BPB a précisé (150) que M. [M, BPB], mécontent de ces instructions, avait d'abord communiqué à ses homologues chez Lafarge et Knauf des chiffres inexacts sur les ventes de sa société. Lorsque M. [M] a informé M. [D, BPB] de ce subterfuge, ce dernier lui a demandé de rectifier les chiffres concernant le Royaume-Uni. M. [M] a alors corrigé les chiffres communiqués, lentement afin de ne pas révéler à Knauf et Lafarge qu'il avait antérieurement communiqué des chiffres inexacts.

(179) On relèvera que BPB a reconnu (151) qu'au moment où M. [D, BPB] faisait corriger par M. [M, BPB] les chiffres communiqués à ses homologues sur le marché britannique afin de ne plus leur fournir des chiffres inexacts, M. [D] fournissait aux autres [représentants de haut niveau] des renseignements inexacts sur les ventes de BPB en France et en Allemagne. On peut en conclure que M. [D] n'hésitait pas à tricher quand il le jugeait nécessaire pour la réalisation de ses objectifs stratégiques. Dans ce contexte, on peut raisonnablement supposer que la fourniture de chiffres fiables pour le Royaume-Uni par BPB à ses concurrents par le canal britannique et par le mécanisme de M. [D] était susceptible de renforcer la crédibilité de ce dernier, et permettait à M. [D] de tricher vis-à-vis de ses concurrents concernant les deux autres marchés.

(180) Quant aux modalités concrètes de l'échange d'informations, BPB (152) indique que lorsque M. [M, BPB] en avait la charge, l'échange avait souvent lieu en marge de réunions professionnelles (identifiées comme celles du Gypsum Products Development Association, GPDA (153)) et était mené oralement, " sur une base ad hoc irrégulière ". Les échanges n'avaient pas lieu durant les réunions elles-mêmes, mais " plutôt lors de rencontres informelles séparées, avant ou après ces réunions ". M. [M] reprenait alors les chiffres sur papier et les communiquait à la direction du groupe BPB comme des " estimations ". M. [N, BPB], a continué ces échanges lorsqu'en 1995 M. [M] a été promu. Toujours selon BPB (154), M. [N] n'a reçu aucune instruction particulière de continuer la pratique consistant à échanger des informations avec les concurrents, il s'est contenté de maintenir les contacts préexistants. M. [N] a procédé " parfois en personne aux échanges, mais plus généralement par téléphone ". BPB a précisé que les personnes avec qui M. [N] avait échangé des informations étaient M. [O] (Knauf) et MM. [P] puis [Q] (Lafarge) (155).

(181) BPB, par ailleurs, a communiqué à la Commission, en réponse à une demande d'information (156), un tableau qui comprend une série d'informations détaillées concernant les ventes sur le marché britannique de "A", "B" et "C". Ces lettres correspondent respectivement à BPB, Lafarge et Knauf (157). Le tableau décrit ainsi les chiffres absolus des volumes de ventes, en statique et en glissement, et l'évolution des parts de marché en pourcentage, à la décimale près, en cumul mensuel, trimestriel et annuel de janvier 1993 à février 1998. Le tableau décrit aussi les évolutions des ventes et des parts de marchés, ainsi que les ventes par jour ouvrable.

(182) On relèvera donc que ces informations sont en substance de même nature que celles échangées par M. [D, BPB] au niveau européen, à la réserve près qu'il ne s'agit que du marché britannique et que les données les plus détaillées sont, durant toute la période, mensuelles.

(183) La date d'interruption de cette collecte de chiffres n'est pas indiquée par BPB, de même que ses causes, mais on peut constater qu'elle correspond à la date où le conseil d'administration de BPB a mis en œuvre une politique de mise en conformité avec le droit de la concurrence (" compliance programme ").

(184) BPB a d'abord indiqué (158) que le tableau cité au considérant (181) comprend des chiffres historiques obtenus par M. [N, BPB] de ses homologues chez Lafarge et Knauf. BPB indique qu'il est " possible que les chiffres historiques soient les mêmes que ceux échangés par M. [M, BPB] ". Selon BPB, ce tableau a été constitué à partir du moment où M. [N] est devenu [représentant de haut niveau] de British Gypsum, soit en 1995 (159). Ultérieurement (160), BPB a modifié sa présentation des faits, en indiquant d'une part que M. [N] a procédé à l'échange de novembre 1996 à environ mars 1998, et d'autre part que les chiffres pour la période antérieure s'expliquent par le fait qu'il aurait reçu de ses homologues chez Knauf et Lafarge un paquet de données historiques remontant à 1993, données qu'il aurait alors stockées sur son ordinateur puis mises à jour périodiquement.

(185) Toutefois, rien dans ce tableau ne permet de confirmer cette indication donnée par BPB, les chiffres apparaissant sous une forme identique pour la période où M. [M, BPB] en avait la charge et pour la période postérieure où cette tâche a été dévolue à M. [N, BPB].

(186) BPB a minimisé, tant dans ses réponses aux demandes d'information de la Commission que dans sa réponse à la communication des griefs, la portée de l'échange d'informations ainsi mené. BPB indique ainsi tout d'abord que les informations échangées avaient " apparemment été peu utilisées " (161). Plus particulièrement, BPB cherche à démontrer que les chiffres ainsi échangés ne sont pas entrés dans le processus de définition de la stratégie de sa filiale, se fondant sur le fait que plusieurs documents internes de cette filiale ont recours à des chiffres différents de ceux obtenus des concurrents (162). BPB indique ensuite que l'objectif de cet échange avec les concurrents était d'avoir une meilleure connaissance de la taille du marché britannique et de la part de British Gypsum sur celui-ci, puisqu'il n'y avait pas de données officielles ou professionnelles disponibles (163). En outre, BPB justifie le recours au type d'échange mis en place par la méfiance de M. [A, BPB] vis-à-vis de Knauf en cas de mise en place d'un mécanisme d'échange via une partie tierce, car ce dirigeant suspectait Knauf d'avoir fourni des informations fausses au système qui avait existé dans le passé sur le marché allemand (164).

(187) Pourtant, il reste que BPB a participé à cet échange de manière durable, au plus haut niveau de sa filiale britannique, et que le type d'échange retenu a fait l'objet d'une réflexion au plus haut niveau du groupe lui-même, puisqu'une autre modalité (mécanisme d'échange via une partie tierce) a été rejeté par [un représentant de haut niveau] du groupe. Une telle réflexion invalide l'idée d'une activité accidentelle ou involontaire. Du reste, la méfiance de M. [A, BPB] vis-à-vis de Knauf en cas de mise en place d'un mécanisme d'échange via une partie tierce ne saurait en aucune manière justifier la mise en place d'un échange direct entre concurrents. Comme il a déjà été souligné au considérant (125), il n'y a aucune raison objective pour présumer qu'un échange direct serait nécessairement plus fiable qu'un échange à travers une tierce personne.

(188) En outre, le fait que des informations fausses aient été transmises par BPB à ses concurrents rend peu vraisemblable l'idée que BPB, de son côté, aurait admis sans analyse critique les chiffres fournis par ceux-ci. Comme BPB le reconnaît d'ailleurs (165), il est clair que cette entreprise redressait les chiffres reçus avant de les utiliser. Dès lors, la non-concordance entre les chiffres transmis dans l'échange et ceux mentionnés dans les documents de stratégie de la filiale de BPB n'établit aucunement que les premiers n'ont pas servi à l'élaboration des seconds.

(189) Enfin, quoi qu'il en soit de l'usage effectif des données ainsi mises en circulation, et même à admettre l'hypothèse de BPB selon laquelle cet exercice au plus haut niveau aurait été mené sans finalité autre qu'une contribution marginale à la connaissance du marché, le fait reste que cet échange entre concurrents a eu lieu (voir le considérant (163)).

(190) Knauf, dans sa réponse à la communication des griefs (166), reconnaît avoir participé à l'échange d'informations décrit dans la communication des griefs : " des échanges irréguliers entre M. [N] de BPB et ses homologues de Knauf et Lafarge " ont eu lieu, portant sur des données passées. Ces données, servant " des buts statistiques internes ", facilitaient pour Knauf " l'évaluation des volumes du marché et des tendances, et donc par exemple la planification des stocks de matières premières puisque la totalité du plâtre utilisé par Knauf dans ses usines de Grande-Bretagne était importé ". Knauf ne fournit toutefois aucune information complémentaire quant aux modalités de cet échange, ni ne conteste la description faite par BPB.

(191) Lafarge, dans sa réponse à la communication des griefs (167), ne prend pas position sur les échanges menés avec ses concurrents au Royaume-Uni, sinon pour déclarer que " les tableaux de Monsieur [N, BPB], illisibles, ne permettent pas à Lafarge de commenter leur contenu. Lafarge ne recevait d'ailleurs pas ces tableaux ".

(192) La Commission, qui ne prétend pas que les tableaux en question aient été communiqués par BPB à ses concurrents, constate que Lafarge ne présente aucun élément pour reconnaître ou contester avoir participé à l'échange d'informations mené sur le marché britannique, en particulier par ses employés cités par BPB, MM. [P] et [Q].

(193) Plus généralement, la Commission constate que les trois entreprises ont mis en place, pour le marché britannique, une ligne de communication entre [des représentants de haut niveau] de leurs filiales respectives au Royaume-Uni. Le fait que la communication ait eu lieu au niveau des filiales ne change rien au fait qu'il s'agit bien des mêmes entreprises que celles engagées dans des contacts au niveau européen. Du reste, aucune des trois entreprises n'a prétendu arguer de la différence des personnes juridiques concernées pour contester à cet égard la pertinence de la présentation de la Commission dans la communication des griefs.

(194) La Commission constate également que cet exercice d'échange a présenté une remarquable constance dans la durée (sept années consécutives). Les affirmations de BPB sur son caractère irrégulier et ad hoc sont contredites en premier lieu par la déclaration de cette entreprise elle-même sur la manière dont M. [M, BPB] a lentement corrigé ses chiffres initialement faux : une communication occasionnelle n'aurait pas permis un tel caractère progressif. Plus fondamentalement, les affirmations de BPB sont contredites par le caractère manifestement systématique et très détaillé du tableau de M. [N, BPB], qui supposait nécessairement une information régulière et quantitativement importante quant aux résultats des deux autres entreprises.

(195) Il ne résulte pas du dossier que l'échange d'informations entre [des représentants de haut niveau] de leurs filiales respectives au Royaume-Uni aurait eu un objet différent de celui de l'échange mené parallèlement au niveau européen par [des représentants de haut niveau] des entreprises concernées. Les échanges apparaissent semblables et aucun élément ne conduit à présumer une autre finalité. Du reste, les entreprises en question n'ont pas mis en avant de finalités différentes. Le fait, admis par BPB, que cette entreprise fournissait délibérément à ses concurrents des chiffres fiables pour le Royaume-Uni par le canal britannique et que M. [D, BPB], dans le même temps, trichait sur les autres marchés, conduit à conclure que pour BPB, le mécanisme britannique renforçait l'utilité du mécanisme européen de M. [D]. On peut donc conclure de ce fait un lien entre les deux mécanismes d'échanges.

(196) La Commission relève par ailleurs que les parts de marché sur le territoire du Royaume-Uni des producteurs de plaques en plâtre destinataires de la présente décision ont présenté une grande stabilité au cours de la période concernée (voir l'annexe de la présente décision).

1.4.4. Echange de données relatives aux hausses de prix sur le marché britannique

(197) Un certain nombre d'éléments, preuves directes ou déclarations d'entreprises, révèlent qu'au-delà de l'échange d'informations sur les volumes, ont existé des contacts entre les [représentants des entreprises] au sujet des prix et des initiatives tarifaires coordonnées. Par ailleurs, il ressort du dossier qu'un certain nombre d'augmentations parallèles des prix ont eu lieu sur le marché britannique.

(198) La Commission constate tout d'abord qu'après une tentative de hausse en mars 1992 qui s'est apparemment soldée par un échec (168), British Gypsum a annoncé le 21 juillet 1992 un nouveau tarif devant entrer en vigueur fin août 1992, prévoyant notamment la réduction des ristournes à 5 %. Il ressort du dossier que Redland PLB (Lafarge) et Knauf ont procédé à un alignement de leurs tarifs et ristournes à l'initiative de BPB (169). A cet égard, la Commission relève que ces mouvements de prix ont entraîné des critiques de la part de fédérations professionnelles auprès de BPB et de l'OFT (170).

(199) Il ressort ensuite de documents émanant de BPB que cette entreprise a mené une hausse en mars 1993 (171) et qu'elle a annoncé en novembre 1993 une hausse de 12 % devant entrer en vigueur en janvier 1994. Il ressort des mêmes documents que Lafarge a suivi cette annonce de hausse mais que Knauf ne l'a pas suivie totalement (172). Finalement, la Commission constate que Knauf a annoncé le 29 septembre 1994, une hausse d'environ 6,5 % devant entrer en vigueur le 1er mars 1995 (173), que BPB a annoncé, le 2 décembre 1994, une hausse de 9 % avec effet le 27 février 1995 (174) et que cette hausse a été suivie par l'annonce d'une hausse identique par Lafarge le 6 janvier, devant entrer en vigueur à la même date (175).

(200) La Commission constate ensuite que le 22 septembre 1995, British Gypsum a annoncé une augmentation de prix de 12 % pour les plaques standard avec effet au 1er janvier (176). Cette annonce a apparemment été suivie par Lafarge qui a annoncé la même augmentation le 13 octobre, avec effet au 1er janvier (177) et par Knauf qui a annoncé la même augmentation le 27 octobre, avec effet à la même date (178).

(201) Le 7 septembre 1996, c'est-à-dire deux jours avant l'envoi par British Gypsum des lettres annonçant une augmentation de ses tarifs de 3 à 4 % selon les produits devant entrer en vigueur le 4 novembre, un directeur régional de Knauf a indiqué à son homologue de British Gypsum lors d'une " journée de golf " d'entreprise que " Knauf suivrait la hausse des prix décidée par BG lorsque les intentions de British Gypsum seront précisées noir sur blanc " (179).

(202) Knauf admet (180) l'existence de cette discussion, mais indique qu'il est impossible que celle-ci révèle l'existence d'un accord entre concurrents car leur employé concerné n'avait pas de compétence ou de pouvoir en matière d'augmentation de prix et qu'en outre l'augmentation de BPB était déjà en cours. En ce qui concerne Lafarge, la Commission constate qu'elle a envoyé sa lettre de hausse le 20 septembre 1996, indiquant une hausse d'approximativement 4 % avec la même date d'effet, à savoir le 4 novembre 1996 (181).

(203) Par ailleurs, la Commission constate que le 3 juin 1997, British Gypsum a annoncé une augmentation de 3,8 % pour les plaques standard, avec effet au 1er août 1997 (182). Lafarge a annoncé pour sa part une augmentation de 3,7 % avec effet au 4 août (183) et Knauf a annoncé une augmentation de 3,7 % avec effet à la même date que celle de Lafarge (184).

(204) La Commission constate en outre que le 27 janvier 1998, British Gypsum a annoncé une augmentation de prix de 4,4 %, avec effet au 1er avril (185). Lafarge a annoncé pour sa part une augmentation de 4,1 % avec effet au 6 avril (186) et Knauf a annoncé la même augmentation de 4,1 % avec effet au 1er avril (187).

(205) Lors d'une autre journée de golf qui s'est déroulée avant l'annonce de l'augmentation par British Gypsum le 8 septembre 1998 d'une hausse de 5 % avec effet au 1er novembre 1998, [un représentant] de Lafarge a indiqué à un responsable de British Gypsum que, pour des raisons budgétaires, Lafarge n'était pas disposé à aller de l'avant avec la hausse de prix au début de janvier de l'année suivante (188).

(206) BPB prétend que des contacts sur les prix entre les [représentants] des trois fournisseurs britanniques étaient inutiles parce que le marché était particulièrement transparent et que les clients veillaient, dans le cadre du processus normal de négociation commerciale, à ce que les producteurs fussent informés des intentions de chacun d'eux.

(207) Pourtant, BPB (189) reconnaît qu'il y a eu ce qu'elle appelle des " occasions isolées " où M. [N, BPB] a téléphoné aux [représentants] de Lafarge et de Knauf au Royaume-Uni pour les informer des intentions de British Gypsum en matière de prix, ainsi que de la "fourchette de hausse" envisagée. Ces appels téléphoniques, dont BPB ne fournit pas, même approximativement, la date, sont qualifiés d' " appels de pure courtoisie " : selon BPB, M. [N] n'a rien dit à ses homologues dont ils ne fussent déjà au courant et il les a seulement informés d'une décision que British Gypsum avait déjà prise.

(208) Knauf (190) admet que des contacts entre [des représentants de haut niveau] des filiales britanniques existaient, de même que la possibilité qu'une information des concurrents sur des initiatives de hausses de prix ait été diffusée. Toutefois, Knauf conteste qu'un accord entre concurrents ait été conclu à cette fin.

(209) Lafarge indique (191) que " les faits sur lesquels se fonde la Commission manquent à tout le moins de précision et ne semblent pas clairement établis ", que " à supposer même qu'un ou deux contact(s) téléphonique(s) ai(ent) été pris par Monsieur [N, BPB], on ignore totalement leur contenu et le contexte ne permet d'en tirer aucune conclusion ". Sans contester le fait qu'en une ou deux occasions isolées, BPB l'aurait informé de ses intentions de hausse et de leur niveau, Lafarge affirme (192) qu'en tant que tel, " ce comportement ne constitue nullement (ce qui n'est d'ailleurs aucunement soutenu par la Commission) une infraction à l'article 81. En effet, le fait qu'un concurrent informe deux autres producteurs d'une intention qu'ils connaissent déjà ou sont censés connaître est un pur comportement unilatéral nullement de nature à modifier leur comportement. Il a en effet déjà été souligné ci-dessus que les clients des producteurs les informaient régulièrement et précisément des augmentations et des prix des autres [...] ".

(210) En ce qui concerne la majorité des augmentations de prix citées aux considérants (197) et suivants, la Commission ne peut que constater l'existence d'un parallélisme de comportement entre des entreprises concurrentes qui, faut-il le rappeler, entretenaient pendant l'époque concernée des contacts collusoires.

(211) Toutefois, la Commission conclut que concernant certaines hausses, les mouvements de prix ont été précédés de contacts portant sur leur modalités, et que ces contacts doivent être mis en lien avec l'objectif des trois producteurs présents sur le marché britannique de mettre fin à la guerre des prix, d'en éviter la répétition et de stabiliser le marché.

(212) La Commission relève par ailleurs que, comme l'indiquent BPB (193) et Lafarge (194), les prix sur le marché britannique on eu tendance à remonter ou tout au moins à se stabiliser au cours de la période concernée, ce qui tranche nettement avec la tendance ayant prévalu de 1988 à 1992.

1.4.5. Discussions visant à la stabilisation du marché allemand et échanges d'informations sur les volumes

1.4.5.1. Historique

(213) Un accord de partage du marché allemand, évoqué dans une note interne de Gyproc (voir le considérant (221)) et dont l'existence est confirmée tant par BPB (195), par Gyproc (196) que par Lafarge (197), a été passé en Allemagne en 1984 ou 1985, dans lequel la part de Gyproc était de [10-15] %. Les participants en étaient Knauf, Gyproc GmbH (filiale de Gyproc), Rigips (qui est devenue filiale de BPB en 1987), et la filiale néerlandaise de Norgips (rachetée en septembre 1993 par Lafarge). La description faite par Gyproc souligne le lien entre cet accord et la mise en place parallèle, par les parties à cet accord, d'un système de communication de leurs volumes de ventes à un bureau d'étude neutre. Sur la base de ces données, le bureau calculait les parts de marché puis donnait à chaque concurrent sa part de marché (mais non pas les parts des autres).

(214) Selon Gyproc, à un moment donné, M. [K], [représentant de haut niveau] de Gyproc, s'est rendu compte que les concurrents ne fournissaient pas toujours des chiffres exacts au bureau d'étude, dans le but, selon Gyproc, de minimiser l'importance de leur volume sur le marché allemand et par conséquent, de réduire la taille du marché en question. De la sorte, ils faisaient surestimer par les concurrents leurs propres parts de marché. Gyproc indique qu'à partir de ce moment, elle ne se sentait plus liée par l'accord. Par ailleurs, toutes les parties ont arrêté la fourniture de chiffres au bureau d'étude après l'achat de Rigips par BPB en 1987. Selon Gyproc comme les autres parties, la situation concurrentielle sur le marché allemand a radicalement changé avec le rachat de Rigips par BPB en 1987 et la pénétration de Lafarge sur ce marché à travers des importations en provenance de l'ancienne usine Norgips aux Pays- Bas et de son usine d'Alsace, la concurrence devenant alors plus intense.

(215) La Commission relève pourtant que la formulation retenue dans la note interne de Gyproc (voir le considérant (221)) suggère plutôt qu'en 1988, l'accord en question sur le partage du marché n'avait pas été abandonné, au moins formellement.

(216) La Commission relève également que selon Gyproc pourtant, de 1988 à 1994, BPB et Knauf ont régulièrement accusé Gyproc d'avoir un comportement " agressif " sur le marché (198). Ces accusations ont été portées contre M. [E, Gyproc] par MM. [D, BPB] et [B et C, Knauf`] à l'occasion des congrès "Eurogypsum" et des réunions du conseil d'administration de Gyproc (auquel participaient les représentants de BPB) ou de Gyproc GmbH (auquel participaient les représentants de Knauf) (199). À cet égard, les données relatives aux parts de marché qui ont été échangées à partir de 1992 entre les [représentants de haut niveau] ont donné à MM. [D] et [B et C] des arguments à l'appui de leurs reproches, fondés sur une connaissance précise du marché obtenue dans leurs contacts (voir la section 1.4.2).

(217) La Commission relève enfin qu'il existe dans les documents découverts chez BPB/Rigips, des éléments indiquant qu'il y aurait eu des contacts entre les producteurs sur le marché allemand, au cours desquels ils se seraient communiqué leurs volumes de ventes entre 1990 et 1994 (200). BPB a indiqué être entré en possession de ces données internes de Knauf car elles auraient été remises à l'un de ses distributeurs, dans un café, par un homme qu'il n'avait jamais rencontré auparavant (201). Toutefois, sans préjudice des échanges de données sur les principaux marchés européens, y inclus le marché allemand, décrits à la section 1.4.2, la Commission entend limiter son appréciation à la période postérieure à la réunion de Versailles en juin 1996 en ce qui concerne les discussions visant à la stabilisation du marché allemand.

(218) Il convient de rappeler également que depuis 1992, BPB, Knauf et Lafarge échangeaient régulièrement des données relatives à leurs volumes de ventes, entre autres sur le marché allemand, et que depuis 1995, cet échange régulier avait pris un rythme trimestriel.

(219) Par ailleurs, les réponses des parties à la communication des griefs suggèrent qu'en 1996, la construction d'usines nouvelles (202) en Allemagne par tous les producteurs et le développement d'importations depuis l'Europe de l'est, et notamment la Pologne, étaient de nature à pouvoir entraîner de profonds bouleversements sur le marché allemand et à provoquer une nouvelle " guerre des prix " comme celle qui avait existé jusqu'en 1992 (203).

1.4.5.2. Les discussions visant à la stabilisation du marché allemand lors des réunions de Versailles en juin 1996, Bruxelles en décembre 1997 et La Haye en mai 1998

(220) Au mois de juin 1996, à Versailles, [des représentants de haut niveau] des quatre entreprises (MM. [D, BPB], [B, Knauf], [G, Lafarge] et [E, Gyproc]) se sont rencontrés pour évoquer la situation du marché allemand.

(221) La Commission a découvert lors de ses vérifications chez Etex, dans les bureaux des [représentants de haut niveau] de Gyproc, une note (204) intitulée " confidentiel, à détruire ", qui établit la tenue de cette réunion. Gyproc a précisé ultérieurement (205) que cette note était " un document rédigé par [M. E, Gyproc], destiné à M. [L, Gyproc] pour l'informer de la situation sur les différents marchés de Gyproc, à l'occasion de sa nomination en tant [que représentant de haut niveau] de Gyproc en [1997] ".

(222) La note indique (206) que :

" en 1988, [M. K, Gyproc] m'a dit qu'il y avait un accord sur le marché et que la part de marché de Gyproc devait être de [10-15] %. De 1988 à 1994, la part de marché de Gyproc, suivant nos estimations internes a oscillé entre [7-10] % et [10- 15] %. Cette période correspondait également au renforcement de la position de Lafarge. Pendant la même période, BPB et Knauf ont toujours reproché à Gyproc son attitude trop agressive. En juin 1996 [M. D, BPB]/[B, Knauf]/[G, Lafarge]/[M. E, Gyproc] - lors d'une réunion confidentielle à Versailles - ont convenu de divulguer leurs chiffres réels pour l'année 1995 et de se conformer à sa part de marché. Les résultats furent les suivants :

millions de m²

K [100-110]

BPB [70-75]

L [30-35]

GB (207) [20-25]

(Marché) [230-240]

Et en conséquence les parts de marché étaient :

%

K [40-45]

BPB [30-35]

L [10-15]

GB [10-15]

(Marché) 100,0 %

A la même époque, Gyproc estimait le marché 1995 à [210-220] Mio m². J'ai confirmé à [M. D, BPB] que nous maintenions notre accord préalable à [10-15] %. Depuis 1996, nous disposons de renseignements plus précis du marché allemand suite à la communication de nos chiffres à un expert indépendant. "

(223) Suit un tableau qui indique les résultats suivants, présentés comme des " estimations " (208) :

<emplacement tableau>

(224) La note conclut (209) par les remarques suivantes : " BPB connaît nos chiffres exacts et je pense, les communique aux autres. Durant la période 1988-1994, nous estimons que la part de marché de Gyproc en Belgique a baissé de [55-60] % à [45-50] %. Elle est aujourd'hui stabilisée. En Hollande, pendant la même période, nous avons perdu [3-5] % et notre part est stabilisée à [35-40] %. En France notre part de marché est ca. [3-5] %. "

(225) La Commission constate, en outre, que la rencontre de Versailles a également été évoquée dans un document issu de BPB (210). Ce document est constitué d'un tableau daté du 9 octobre 1997 relatif aux parts de marché de 1995 à 1997 (janvier-septembre) en Allemagne des quatre producteurs (211). Le tableau porte des annotations manuscrites, identifiées par BPB (212) comme celles de M. [R, BPB] [...], et donc responsable du suivi du marché allemand chez BPB : " rappelé à [M. S, BPB] qu'il ne devrait pas y avoir des choses comme " Versailles " et qu'il devrait sortir si c'est évoqué. Accord de [M. M, BPB] ".

(226) L'explication donnée à ces annotations par BPB (213) est la suivante : lors d'une réunion interne de la direction, M. [S] de Rigips avait signalé des gains notables de part de marché en Allemagne pour Rigips et Gyproc, apparemment au détriment de Knauf. À M. [R, BPB] qui lui demandait comment la concurrence avait réagi, M. [S] a répondu qu'un représentant de Gyproc lui avait déclaré que Rigips avait commis " une rupture de Versailles ". Selon BPB, ni M. [R] ni M. [S] ne savaient ce que signifiait " Versailles ".

(227) Quoi qu'il en soit de la connaissance ou de l'ignorance des deux personnes en question, et quelle qu'ait été par ailleurs la nature exacte, qui pourrait être sujette à caution au regard du droit de la concurrence, du contact mentionné entre Gyproc et BPB, la Commission constate qu'un représentant de Gyproc a utilisé devant BPB la référence à " Versailles " pour évoquer manifestement des quotas fixés entre concurrents, et que cette personne n'aurait pas utilisé un tel argument si elle n'avait pas été convaincue que, pour BPB, " Versailles " avait valeur contraignante. En outre, la Commission ne peut que constater que les déclarations de BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc présentées aux considérants (229) à (243) conduisent à conclure que la réunion de Versailles, de même que l'échange de renseignements depuis la réunion de Londres en 1992, relevait des niveaux les plus élevés de ces entreprises et que, par conséquent, l'absence de connaissance des niveaux inférieurs ne signifie nullement que ces trois entreprises n'étaient pas parties à un accord.

(228) La Commission constate tout d'abord que toutes les entreprises concernées (214) ont confirmé la tenue de cette réunion à l'occasion du congrès Eurogypsum tenu à Versailles les 5 et 6 juin 1996, entre [des représentants de haut niveau] des quatre sociétés, MM [D, BPB], [B, Knauf], [G, Lafarge] et [E, Gyproc]. Les parties ont en revanche exprimé des opinions variables sur l'objet et le résultat de la réunion de Versailles.

(229) Ainsi, Gyproc a indiqué (215) que " dans le but de stabiliser le marché allemand, M. [D, BPB] et ses collègues ont proposé un accord sur les volumes. Chacun a révélé son volume de vente en m² pour 1995 et sur cette base, des parts de marché ont été attribuées. M. [E, Gyproc] s'est vu allouer une part d'à peu près 10 %. Il n'en était pas satisfait et voulait [10- 15] %. Pour souligner le bien-fondé de ses revendications, il s'est référé à l'ancien accord qui prévoyait pour [Gyproc] une part de [10-15] %. Un niveau supérieur à 10 % était crucial parce que [Gyproc] venait d'augmenter sa capacité de production avec une nouvelle usine implantée à Peitz en 1995 ".

(230) Interrogé par la Commission sur le suivi donné à cet accord, M. [E, Gyproc] a indiqué (216) que " l'accord ne fonctionnait pas bien. Le 4 décembre 1997, les concurrents se sont rencontrés à Bruxelles pour discuter à nouveau la stabilisation souhaitée du marché allemand. L'occasion concrète était la nouvelle capacité de production créée par Norgips à Opole, Pologne. [...] En 1998, Les concurrents se sont à nouveau rencontrés dans le cadre d'un congrès Eurogypsum à La Haye pour discuter de la situation allemande. Ces discussions n'ont pas donné de résultats concrets " (voir les considérants (246) et (255)).

(231) La Commission a invité Gyproc à expliquer la mention de la note visée au considérant (221), selon laquelle M. [E, Gyproc] avait " confirmé à [M. D, BPB] que nous maintenions notre accord préalable à [10-15] % ". Gyproc a indiqué (217) que " à l'issue de la réunion de Versailles et lors d'une occasion ultérieure dont M. [E] ne se rappelle plus la date, ce dernier a exprimé son désaccord à M. [D]. M. [D] a répliqué que cet accord était devenu caduc car, depuis lors, le marché allemand avait fortement changé suite au rachat de Rigips par BPB, au rachat de Norgips Hollande par Lafarge et à la pénétration de Lafarge sur le marché allemand par l'exportation des produits fabriqués par son usine établie en France ".

(232) Gyproc est ultérieurement (218) revenue sur la note et les déclarations pourtant explicites de M. [E, Gyproc] en affirmant que " l'accord dit de Versailles n'a été qu'une tentative et n'a jamais fait l'objet d'une mise en œuvre effective " et encore que "il n'y a jamais eu un véritable concours de volonté entre les participants, et certainement pas dans le chef de Gyproc, au sujet de toutes les modalités du partage du marché allemand. En effet, les parties ne se sont jamais entendues sur la part de marché précise devant revenir à Gyproc. [...] Gyproc a ainsi fait échouer la tentative de conclusion d'un accord à quatre ".

(233) La Commission constate cependant que ces déclarations de Gyproc, de valeur probante moindre en principe que la note précitée et les déclarations volontaires de M. [E, Gyproc], ne viennent infirmer ni le contenu ni l'objectif des discussions menées, mais éventuellement seulement son résultat.

(234) BPB, de son côté, affirme (219) que deux réunions séparées ont eu lieu à Versailles, d'une part entre MM. [D, BPB], [B, Knauf] et [G, Lafarge], d'autre part entre MM. [D] et [E, Gyproc] ; BPB se base sur une déclaration de M. [D] (220) communiquée à la Commission.

(235) BPB indique (221) que " l'objectif de la réunion était de discuter le marché allemand, où les prix continuaient de baisser. Une proposition de stabiliser le marché sur la base des parts de marchés 1995 a été discutée, mais, en fait, la proposition n'a pas conduit à un accord formel ou informel entre les producteurs parce qu'elle a été rejetée par Gyproc Benelux ". BPB indique par ailleurs (222) que ces discussions visaient " à se mettre d'accord pour fixer les parts du marché allemand ", mais que " les participants à ces discussions n'ont pas trouvé d'accord d'aucune forme concernant les parts de marchés en Allemagne, principalement parce que M. [E, Gyproc] ne voulait pas accepter la part de marché proposée à Gyproc Benelux ". BPB indique encore (223) qu'il y a eu une " tentative, admise par BPB, de trois des parties de parvenir à un accord de partage de marché en Allemagne lors de la réunion de Versailles ".

(236) Par ailleurs, BPB souligne ce qui lui paraît constituer une contradiction interne à la note de Gyproc et aux déclarations initiales de M. [E, Gyproc] entre, d'une part, l'affirmation qu'un accord aurait été atteint et, d'autre part, la revendication réitérée de M. [E] d'une part de marché supérieure à ce que BPB, Knauf et Lafarge voulaient accepter d'accorder à Gyproc.

(237) La Commission relève tout d'abord qu'aucune des autres parties ne fait une description de deux réunions, notamment pas Gyproc, qui évoque (224), sur la base de la déclaration de M. [E, Gyproc], une convocation de ce dernier dans la chambre d'hôtel de [M. D, BPB], où il aurait retrouvé également " des représentants de Knauf et Lafarge ", identifiés par ailleurs (voir le considérant (222)) comme MM. [B, Knauf] et [G, Lafarge].

(238) La Commission constate ensuite que BPB reconnaît que BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc ont discuté à Versailles d'un partage du marché allemand afin de le stabiliser. BPB n'évoque cependant de tentative d'accord qu'entre BPB, Knauf et Lafarge, et donc n'associe pas Gyproc à cette tentative, tout en soulignant que l'échec de cette tentative est dû à la position de M. [E, Gyproc] qui ne voulait pas accepter la part de marché qui lui avait été proposée pour Gyproc, ce qui implique nécessairement une association de Gyproc à cette discussion, sous une forme ou une autre.

(239) La Commission constate aussi que la contradiction alléguée par BPB porte sur le résultat de la discussion plus que sur l'objet de celle-ci ou sur la volonté des parties à celle-ci de parvenir à un accord sur le partage du marché allemand.

(240) S'agissant de Knauf, cette entreprise indique (225) qu'une discussion personnelle et " inattendue " entre les dirigeants des quatre entreprises a eu lieu, dont l'objet initial était des questions relatives aux matières premières et à des difficultés du négociant [...]. Dans ce contexte, et sans que [MM. B et C, Knauf] s'y attendent, l'évolution " peu réjouissante " du marché allemand a été évoquée. Knauf indique qu'elle " n'avait pas d'intérêt à un partage du marché et des parts de marché, mais qu'elle voulait au contraire renforcer sa position comme leader du marché allemand, son marché d'origine et le plus important pour les plaques en plâtre et pour ce faire reprendre des parts de marché. Cette situation ne permettait pas, du côté de Knauf, une explication aux autres opérateurs sur ses volontés - en tout cas pas dans le sens indiqué par la Commission, et il n'y a donc eu aucune explication de ce genre ". Il n'y a pas eu davantage d'accord sur des quotas ou sur une stabilisation. " Ce qui peut toujours s'être passé et ce que M. [E, Gyproc] peut avoir compris, était pour [MM. B et C] de l'ordre d'appels plus ou moins explicites à la raison commerciale des participants ". " La discussion est restée bien plutôt sans résultat ; la conclusion d'un accord n'était pas le but de la réunion selon [MM. B et C]. Ils n'ont pas compris ainsi la discussion ". D'ailleurs après cette réunion, aucune accalmie n'a pu être constatée sur ce marché.

(241) La Commission constate que Knauf emploie la même expression d'" appel à la raison commerciale " que pour l'accord de Londres en 1992 (voir le considérant (61)). La portée de cette " raison commerciale " n'est pas expliquée par Knauf et elle ne paraît pas incompatible avec l'existence d'une entente, celle-ci pouvant être parfaitement " raisonnable " d'un point de vue purement commercial. La Commission constate par ailleurs que la déclaration de Knauf confirme la tenue de la réunion entre les concurrents, une discussion de la situation sur le marché allemand et la communication d'informations entre concurrents. Quant au fait que cette réunion ait permis la conclusion d'un accord, la déclaration de Knauf n'est pas dépourvue d'ambiguïté : en effet, le fait que Knauf n'ait pas intérêt à partager le marché ne vient nullement, en soi, contredire le fait que cette discussion pourrait avoir eu lieu en présence et avec l'assentiment de Knauf ; cette entreprise pourrait en effet avoir participé à la réunion contre ses intérêts ou encore y avoir participé dans l'intention d'induire en erreur ses concurrents.

(242) S'agissant de Lafarge, M. [G], [représentant de haut niveau] de la branche plâtre de Lafarge, confirme avoir été invité " à une réunion particulière " lors de ce congrès Eurogypsum et précise (226) que l'objet de la réunion " était d'appréhender la taille du marché allemand qui faisait alors l'objet d'une importante controverse. Il y avait, du moins chez nous au sein de Lafarge Plâtres, un écart important entre les estimations [...] qui dépassait les [15-20] %. Les thèmes évoqués lors de cette réunion ont donc porté sur le volume global du marché et son évolution, sa croissance et les moteurs de celle-ci. Nous souffrions cruellement de l'absence de statistiques, alors que nous venions tous d'investir dans de grosses unités de production autour de Berlin. [...] Ayant annoncé nos volumes de ventes globalisés, il apparut que le marché allemand était encore plus important que ce que nous croyions, de l'ordre de [30-35] % au moins selon la date de référence retenue. Malgré la déception de se situer encore très loin des positions de BPB et Knauf, davantage que nous ne l'espérions, cette constatation ne pouvait finalement être que réjouissante pour nous car nous étions plutôt contents d'avoir investi dans un marché encore plus vigoureux que nous ne le pensions. Mais la réaction du groupe Gyproc fut totalement contraire. M. [E], [un représentant de haut niveau de Gyproc], constata à cette occasion que sa part de marché était, par voie de conséquence plus faible qu'il ne croyait, alors qu'il avait, semble-t-il connu une époque où existait entre les producteurs allemands un accord, totalement ignoré de Lafarge Plâtres qui n'était pas présent à cette époque en Allemagne. Je me rappelle fort bien M. [E] penser qu'il avait été victime d'une conjuration entre BPB, Knauf et Lafarge Plâtres, en vue de le maintenir à un niveau plus faible que sa revendication, cette dernière telle que basée sur cet accord ancien. La réalité est que personne, à part M. [E], n'avait annoncé la moindre prétention en matière de part de marché et que nous ne cherchions qu'à appréhender l'importance de ce marché. J'affirme qu'il n'y a eu, au cours de la réunion de Versailles, aucune discussion sur une quelconque allocation de parts de marché et c'est en lisant la communication des griefs de la Commission que j'ai appris l'existence d'un soi-disant " traité de Versailles ", traité qui n'a jamais existé que dans la tête de M. [E], dépité et frustré de devoir brutalement prendre conscience que d'acteur n° 3 en Allemagne, il était passé au rang d'acteur n° 4. S'il est possible qu'un vieil accord impliquant Gyproc à propos du marché allemand ait été appliqué dans les années 1980, on ne m'a, pour ma part, jamais proposé d'accord durant la période 1992-1998 et je n'en ai jamais discuté avec mes homologues. Enfin, je n'aurais pas pu le souhaiter car il eût été improbable que ses concurrents reconnaissent à Lafarge Plâtres, nouveau venu en Allemagne, une part de marché aussi importante que celle visée par nous ".

(243) La Commission constate que la déclaration de Lafarge confirme en substance la tenue de la réunion entre les concurrents et la communication d'informations entre eux dont les preuves directes et les déclarations des autres parties établissent la réalité. Quant à l'objectif de cette réunion la déclaration de M. [G, Lafarge] est contredite tant par la note de Gyproc (voir les considérants (221) à (224)) que par les déclarations convergentes de Gyproc et BPB.

(244) La Commission a découvert, lors de ses vérifications dans les locaux de Gyproc, une annotation de l'agenda de M. [E, Gyproc] (227) qui témoigne d'une conversation du 4 mars 1997 de celui-ci avec M. [T], l'un des [représentants] de la branche plâtre de Lafarge : " il me dit qu'il y a un mois, il a dû stopper la négociation qui se présentait favorablement parce qu'il n'a pas reçu le mandat final de BPB, Knauf et surtout Gyproc. Le problème semble résider sur la part de marché de Gyproc en Allemagne. Knauf veut augmenter de 1 % au détriment de Gyproc, 12 ??11 (Allemagne). BPB semble se désintéresser de l'affaire et a récemment refusé de communiquer à [M. U, consultant indépendant] sa part de marché. Ils sont sur le point de conclure un accord pour le gypse en Pologne et construire une usine. Il y associerait Gyproc s'il le veut bien mais dans ce cas abandonnerait Opole qui ne marche toujours pas. Tout le problème réside dans le 1 % de part de marché en Allemagne ".

(245) La Commission relève que l'annotation de l'agenda de M. [E, Gyproc] établit l'existence d'un contact entre Lafarge et Gyproc où la situation concurrentielle a été évoquée, et où l'opinion de tierces parties, Knauf et BPB, semblait particulièrement bien connue. En outre, cette annotation vient confirmer l'existence de discussions ou même de négociations portant sur la part de marché de chaque producteur, ainsi qu'un lien apparent entre ces discussions et le système d'échange organisé sous l'égide de M. [U, consultant indépendant] (voir le considérant (271)). Enfin, l'annotation rend compte du rapport entre ces discussions et le " projet Opole ".

(246) Le 4 décembre 1997 à Bruxelles, MM [D, BPB], [G, Lafarge], [B et C, Knauf], [K Gyproc], [L, Gyproc] et [E, Gyproc] (228) se sont à nouveau rencontrés, cette fois dans les locaux de Etex.

(247) BPB a indiqué (229) que l'objet de la réunion était d'étudier le projet de rachat en commun par les quatre producteurs de l'usine d'Opole, en Pologne, appartenant au producteur norvégien indépendant Norgips.

(248) Comme il a déjà indiqué au considérant (230), Gyproc a affirmé (230) que " selon M. [E, Gyproc], l'accord [sur les volumes destiné à stabiliser le marché allemand] ne fonctionnait pas bien. Le 4 décembre 1997, les concurrents se sont rencontrés à Bruxelles pour discuter à nouveau de la stabilisation du marché allemand. L'occasion concrète était la nouvelle capacité de production créée par Norgips à Opole, Pologne. Les concurrents essayaient de trouver une formule qui permettrait à une partie d'acquérir l'usine tandis que les autres contribueraient pour compenser le goodwill (appelé par les concurrents " valeur de nuisance ") qui devrait être payé par cet acquéreur ".

(249) D'après les déclarations de BPB et les réponses de cette entreprise aux demandes d'information de la Commission, qui n'ont ni les unes ni les autres été contestées par les autres participants à ces réunions (231), Norgips avait en effet indiqué que son usine était à vendre et en avait fixé un prix jugé ridiculement haut car, selon BPB, Norgips espérait que l'un ou plusieurs des producteurs de plaques en plâtres l'achèterait. Pour valoriser l'usine aux yeux de l'un des quatre grands, Norgips avait apparemment fait savoir qu'il projetait de viser le marché allemand dans une campagne agressive sur les prix à compter de son retour sur ce marché en 1998. Étant donné ce prix beaucoup trop élevé - la valorisation excessive représentant la " valeur de nuisance " d'Opole -, aucun des [représentants de haut niveau] ne souhaitait l'acheter tout seul.

(250) BPB a indiqué (232) avoir étudié en juin 1997 un rachat de Norgips en commun avec Knauf, mais y avoir renoncé sur la recommandation de ses conseils juridiques. BPB a également indiqué (233) que l'usine d'Opole avait été proposée à Lafarge qui, quelques années plus tôt, avait racheté l'usine Norgips aux Pays-Bas. Lafarge aurait alors demandé aux autres producteurs leur avis sur un éventuel " rachat en commun " d'Opole, voire de la société Norgips.

(251) Knauf, pour sa part, considère (234) que l'offre de Norgips méritait d'être discutée et que différents modèles ont bien été débattus, sans l'intérêt de tous les producteurs. C'est ainsi que le recours à la part de chacun sur le marché allemand permettait d'estimer la part de chacun dans l'achat pour qu'aucun ne perde de chiffre d'affaires.

(252) Knauf a également indiqué (235) que la réunion de Bruxelles a une fois encore été l'occasion pour [MM. B et C, Knauf] d'appeler les concurrents à la " raison commerciale ", dont la Commission relève qu'il s'agit d'un terme déjà utilisé pour décrire les réunions de Londres en 1992 et de Versailles en 1996.

(253) Lafarge, tout en indiquant (236) que l'acquisition en commun d'Opole n'était qu'un projet parmi d'autres pour son implantation en Pologne, explique la réunion de Bruxelles entre les quatre concurrents par le fait que Norgips avait fait monter les enchères pour le prix de son usine, et que Lafarge n'avait pas le budget pour acquérir seul cet équipement industriel. Toutefois aucun accord n'a été atteint, et à aucun moment il n'a été question de stabilisation des parts de marché en Allemagne. Lafarge conclut que " la discussion du 4 décembre a donc constitué un exercice purement intellectuel et ponctuel, qui ne débouchera sur rien. Quand bien même le niveau des parts de marché en Allemagne pour le futur aurait été évoqué, il n'en aurait donc résulté aucune conséquence ".

(254) De nombreuses discussions ont eu lieu dont la Commission a retrouvé des indices (237). Le projet Opole a fait l'objet de plusieurs autres discussions (238) entre M. [D, BPB] et M. [G, Lafarge] et entre M. [G] et M. [L, Gyproc] qui avaient participé à la réunion de décembre et différents scénarios ont été étudiés jusqu'en 1998.

(255) A l'occasion du congrès Eurogypsum qui s'est tenu du 13 au 15 mai 1998 à La Haye, [quatre représentants de haut niveau] ainsi que MM. [K, Gyproc] et [L, Gyproc] se sont rencontrés.

(256) M. [E, Gyproc] a ainsi déclaré (239) que " les concurrents se sont à nouveau rencontrés [...] pour discuter de la situation allemande. Ces discussions n'ont pas donné de résultats concrets ".

(257) Ultérieurement, Gyproc a indiqué (240) que " le premier sujet abordé a été la suite de la réunion de Bruxelles de décembre 1997 et relatif au partage éventuel de la " nuisance " en cas du rachat de Norgips. M. [D, BPB] a signalé qu'il ne participerait plus à de telles discussions, et de ce fait, le sujet fut clos. Les participants ont ensuite évoqué la part de marché qui pourrait être celle de Norgips en Allemagne au départ de son usine polonaise. Les avis étaient divergents et de ce fait aucune conclusion n'a été prise. Les participants ont également échangé leurs volumes de vente en Allemagne pour les quatre premiers mois 1998. Gyproc et Lafarge ont communiqué leurs chiffres et BPB et Knauf leurs chiffres provisoires, qui ont été confirmés quelques jours après par téléphone. Chacun a également évoqué la part de marché qu'il souhaitait en Allemagne : Lafarge : [10-15] %, Gyproc : [10-15] %, Knauf : [40-45] %, BPB : [30-35] % [...]. Comme le total donnait 101 %, les participants ont tenté de convaincre Gyproc de se limiter à [10-15] %. Gyproc a refusé et il a été question que chacun partage le pourcent excédentaire au prorata de sa part de marché, mais aucune décision n'est finalement intervenue ". Effectivement, les notes de M. [E, Gyproc] (241), contemporaines de la réunion, rendent compte des chiffres échangés en question.

(258) Ces discussions relatives à l'usine d'Opole ne paraissent pas avoir abouti. Mais ceci n'épuise pas l'analyse, car la tenue même de discussions et le fait qu'elles s'appuient sur l'information réciproque sur les volumes de ventes et les stratégies conduit à considérer qu'elles se situent dans la suite de la rencontre de Versailles. L'importance de l'affaire du rachat d'Opole ne réside donc pas dans la réussite ou l'échec de cette opération, mais dans le simple fait qu'elle a pu être débattue.

(259) En effet, la prémisse qui sous-tendait les discussions résidait tout entière dans l'existence d'un intérêt commun au maintien de la stabilité du marché, et les [représentants de haut niveau] des quatre entreprises étaient en principe disposés à y consacrer des sommes substantielles au titre de leurs "apports" respectifs. Ainsi, en discutant de leur possible contribution à l'achat par Lafarge de l'usine d'Opole ou de Norgips, les quatre concurrents évoquaient une opération qui aurait eu pour effet, sinon pour objet, d'éliminer du marché un concurrent indépendant dont l'existence était considérée comme une nuisance, voire une menace, pour tous.

(260) Il convient de souligner en outre que ces entretiens, par-delà l'évocation du projet Opole, révèlent que les [représentants de haut niveau] ont évoqué leurs ambitions respectives en matière de parts de marché en Allemagne et cela dans la droite ligne des discussions tenues à Versailles en juin 1996.

(261) Il faut également rappeler à cet égard les termes de la déclaration de M. [E, Gyproc] à la Commission (242) selon lesquels " l'accord ne fonctionnait pas bien " et " les concurrents se sont réunis à Bruxelles pour discuter à nouveau de la stabilisation souhaitée du marché allemand ". M. [E] déclare ensuite que l'occasion concrète qui a permis de mener cette discussion était la proposition Opole et que " ces discussions n'ont pas abouti ", sans que M. [E] ait précisé s'il visait seulement les discussions relatives à Opole - discussions qui, elles, ont effectivement échouées de manière avérée - ou bien également un accord général sur les parts de marché.

(262) BPB affirme (243) de son côté que les discussions sur les parts de marché en Allemagne n'étaient qu'une simple formulation d'hypothèses, qu'il n'y a eu aucun " accord " global sur quoi que ce soit: s'il y a eu accord, il portait uniquement sur la valeur effective des parts atteintes en 1997. BPB a affirmé que certains des participants avaient refusé toute restriction de leurs futures parts de marché en Allemagne. Dans la mesure où le projet, hypothétique, de " prime " Opole supposait des parts de marché constantes en Allemagne, la proposition n'a jamais abouti. BPB (244) rejette les calculs de M. [D, BPB] comme de simples "notes" dépourvues de toute portée et déclare que, du point de vue du groupe BPB, le rachat d'Opole, voire de Norgips, était " voué à l'échec ". Le conseil d'administration de BPB n'a étudié aucune des propositions. Finalement, aux dires de BPB, le projet d'" achat en commun " a échoué.

(263) Au vu de l'ensemble des éléments qui précèdent, La Commission constate en premier lieu qu'il n'est contesté par aucune partie que la réunion de Versailles a été l'occasion pour les quatre opérateurs concernés de se révéler leurs chiffres de ventes sur le marché allemand. De même, la Commission constate que BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont communiqué des informations relatives à leur situation sur le marché allemand, incluant la divulgation de leurs ventes et de leur part de marché, lors des réunions de Bruxelles et La Haye.

(264) En second lieu, la Commission considère comme établi que la tenue de la réunion de Versailles révèle l'existence d'un accord sur le principe d'un partage entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc, bien qu'un accord sur des pourcentages concrets n'ait pu être atteint ni lors de cette réunion ni lors des réunions ultérieures de Bruxelles et La Haye. Les quatre entreprises en question avaient pour objectif de stabiliser le marché en fixant à chaque opérateur une part de marché et avaient toutes accepté que leurs parts de marché soient fixées d'un commun accord. La Commission relève à cet égard que plusieurs éléments tirés de la note visée au considérant (221) ainsi que des déclarations de M. [E, Gyproc] pourraient conduire à conclure qu'un accord sur le principe de la stabilisation des parts de marché en Allemagne a été conclu lors de la réunion de Versailles. Selon les termes de ladite note de M. [E] à M. [L, Gyproc], l'objectif des opérateurs est de " se conformer à sa part de marché ". De même, dans ses déclarations à la Commission, M. [E] évoque explicitement un " accord " visant à " stabiliser le marché allemand ", par lequel les concurrents se révèlent leurs parts de marché et se voient allouer une part de marché. M. [E] déclare aussi que " l'accord ne fonctionnait pas bien ".

(265) En troisième lieu, la Commission conclut qu'à partir de la réunion de Versailles, les parts de marché sont devenues un sujet constant de discussion entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc, comme le démontrent non seulement les trois réunions mais aussi les contacts qui ont eu lieu en vue d'éviter un braconnage des clients des uns et des autres. D'ailleurs, certains éléments indiquent que les participants n'osaient pas viser une part plus important de marché sans en discuter avec les autres ; ainsi, lorsque les producteurs concernés ont eu l'intention d'augmenter leur part de marché, ils se sont consultés mutuellement (voir les considérants (354) à (366)).

(266) En quatrième lieu, la Commission considère que, lors de la réunion de Versailles, nonobstant la position prise par Gyproc, les trois autres entreprises, BPB, Knauf et Lafarge, se sont mutuellement indiquées les parts de marché sur lesquelles elles seraient d'accord et que ces parts de marché correspondaient aux parts que ces entreprises détenaient effectivement.

(267) En dernier lieu, la Commission constate que le déroulement de la discussion, d'abord à trois entre BPB, Knauf et Lafarge, puis à quatre avec Gyproc (ou même, selon la présentation de BPB, entre cette dernière seulement et Gyproc) indique une concertation par moments plus poussée entre BPB, Knauf et Lafarge. Or, cette manifestation de volonté de chacune de ces trois entreprises pouvait être comprise par ses concurrentes comme une assurance quant à son comportement futur sur le marché, au moins dans le sens qu'elle n'a pas l'intention de suivre une stratégie d'augmentation de sa part de marché.

1.4.5.3. Les échanges de données sur les volumes de ventes sur le marché allemand suite à la réunion de Versailles

(268) La situation qui prévalait avant la réunion de Versailles était que trois des producteurs, BPB, Knauf et Lafarge, participaient à un échange d'informations sur les quatre principaux marchés européens, incluant donc ainsi le marché allemand (voir la section 1.4.2). Il apparaît que ces trois opérateurs ont jugé nécessaire de faire participer Gyproc à l'échange en ce qui concerne le marché allemand où cette entreprise, par ailleurs nettement plus petite que les trois autres globalement, détenait une part de marché significative.

(269) Pour BPB, Knauf et Lafarge, les échanges d'informations ont continué à suivre le schéma établi suite à la réunion de Londres en 1992. En plus de ces échanges à distance, lors des réunions de Versailles, de Bruxelles et de La Haye, ces entreprises se sont révélé mutuellement leurs données de ventes sur le marché allemand, avec la participation active additionnelle de Gyproc.

(270) Gyproc, à compter de la date de la réunion de Versailles, a d'une part participé aux échanges d'informations concernant le marché allemand réalisés lors des réunions de Versailles, de Bruxelles et de La Haye (voir les considérants (220), (246) et (255)). D'autre part, Gyproc a reçu et fourni via BPB des informations aux autres entreprises, selon le schéma suivi par les trois autres entreprises depuis la réunion de Londres en 1992, mais seulement en ce qui concerne le marché allemand (voir les considérants (144) et suivants).

(271) Par ailleurs, les quatre entreprises ont mis sur pied en octobre/novembre 1996 un système d'échange de renseignements passant par un expert indépendant, M. [U] (245). L'opération était placée sous l'égide du " Industriegruppe Gipskartonplatten " ou IGG, une sous-commission de l'association allemande des fabricants de plaques en plâtre. [Un représentant de haut niveau] de l'IGG était à l'époque M. [V], [représentant] de Rigips. Chaque producteur remettait ses chiffres à titre confidentiel à M. [U] et les résultats étaient compilés par le bureau de ce dernier pour donner un chiffre global qui était ensuite communiqué aux participants. Ce chiffre permettait à chacun de calculer sa propre part de marché, mais pas celle des autres. Tous les trimestres, les participants - Gyproc, Rigips, Knauf/Dano et Lafarge - fournissaient leurs chiffres de ventes respectifs (en mètres carrés) à M. [U] qui les collationnait, puis communiquait à chacun un chiffre global pour l'ensemble du marché (246). Les producteurs ont également communiqué à M. [U], à titre confidentiel, les chiffres de janvier à décembre 1995 et ceux de janvier à septembre 1996.

(272) La note de M. [E, Gyproc] à M. [L, Gyproc] (247), contemporaine des faits objet de la présente procédure, souligne le lien entre les contacts entre producteurs et leurs échanges de données d'une part et, d'autre part, le " système [M. U, consultant indépendant] ". Ce lien découle du fait que ce système a été institué chronologiquement quelques mois seulement après la réunion de Versailles. En outre, les producteurs ne se sont pas limités à calculer leurs propres parts de marché sur la base des données communiquées de façon anonyme. La note suggère clairement le lien entre ce système et l'échange d'informations sur le marché allemand engagé lors de la réunion de juillet 1996 à Versailles. Comme le montre le tableau du document en question (248), les participants ont utilisé l'échange de renseignements effectué par l'intermédiaire de M. [U] comme complément et mécanisme de contrôle de l'échange de données réalisé à Versailles.

(273) Le fait, souligné par toutes les parties, que le " système [M. U, consultant indépendant] " ne soit pas en lui-même contraire au droit de la concurrence, ne doit pas être analysé de manière isolée. La Commission estime que ce système n'a été mis en place par les producteurs que pour compléter leurs échanges directs, et assurer ainsi l'exactitude des chiffres échangés. La Commission relève à cet égard l'analogie avec le système qui avait existé dans les années 1980 concernant le marché allemand et dont certaines parties étaient les mêmes (voir le considérant (213)).

(274) Rigips s'est retiré du système d'échange de renseignements sous l'égide de M. [U, consultant indépendant] en avril 1998, les dernières données communiquées portant sur janvier 1998 (249).

(275) Ce retrait fait apparemment suite à des instructions formelles du conseil d'administration et du comité de direction de BPB données à tous les cadres dirigeants leur enjoignant de respecter la législation relative à la concurrence. Le 24 mars 1998, M. [R, BPB] a envoyé à certains cadres de BPB une note (250) intitulée " questions de concurrence " leur indiquant que " lors d'une réunion du comité de direction cette semaine, M. [D, BPB] a encore vivement insisté qu'il ne doit pas y avoir de réunions/discussions avec des concurrents autres que celles qui ont lieu en tant que réunions reconnues d'associations professionnelles. Lors de ces réunions, il ne doit pas y avoir de discussions sur les prix ou les parts de marché. Quoi que ceci corresponde depuis longtemps à la politique que vous pouvez attendre comme faisant partie des efforts de BPB pour être considérée comme respectant clairement la législation, un effort plus grand va être fourni dans ce domaine ". Le 26 mars 1998, M. [D] lui-même a signé une note (251) à M. [S] de Rigips lui signifiant de cesser immédiatement toute communication avec l'association allemande des fabricants de plaques en plâtre. Par télécopie datée du 6 avril 1998, M. [V] de Rigips a informé Knauf, Lafarge, Gyproc et M. [U, consultant indépendant] de la décision de sa société de se retirer de l'échange de statistiques (252).

(276) BPB a indiqué ultérieurement (253) que suite à son retrait de ce système d'information, il a demandé un avis juridique sur la question, qui a conclu à la légalité de ce système. Mais BPB, par mesure de prudence, a préféré ne pas participer à ce système s'il n'était pas notifié à la Commission - ce qui n'a jamais été le cas.

(277) La Commission ne peut que relever que BPB elle-même a décidé de ce retrait pour des motifs de respect du droit de la concurrence, ce qui établit, à tout le moins, que cette entreprise a eu, à cette date, des doutes sur la légalité du système d'échange de renseignements sous l'égide de M. [U, consultant indépendant], ou a craint que sa participation à ce système soit considérée comme un indice de comportement anticoncurrentiel.

(278) La Commission relève également que M. [D, BPB], alors même qu'il donnait des instructions très strictes à ses subordonnés, poursuivait pourtant son échange des mêmes éléments concurrentiels avec les autres [représentants de haut niveau] selon le système existant depuis la réunion de Londres en 1992.

(279) De toute évidence, le retrait de Rigips du système d'échange de renseignements sous l'égide de M. [U, consultant indépendant] a éveillé des craintes chez les autres producteurs. Le 8 juin 1998, M. [W] de Knauf a fait parvenir à M. [V], son homologue chez Rigips, la copie d'une consultation juridique des avocats de Knauf indiquant que les statistiques ne posaient " absolument aucun problème du point de vue de la concurrence " (254). Il convient de noter que juste deux jours avant la vérification de la Commission, Rigips a annoncé, lors de la réunion IGG, qu'il s'associait à " l'opération [M. U, consultant indépendant] ", pour s'en retirer à nouveau en décembre (255). Ce souci scrupuleux manifesté par Knauf au sujet des formalités concernant le respect du droit de la concurrence doit être apprécié à la lumière du fait que, au même moment, cette entreprise était engagée dans d'autres contacts avec ses concurrents.

(280) Il est significatif que, dans une note (256) " personnelle et confidentielle " adressée à M. [G, Lafarge] le 8 juin 1998, M. [X] de Lafarge Gips, évoquant la décision des autres producteurs (Knauf, Dano, Lafarge, Gyproc) de poursuivre les " échanges [M. U, consultant indépendant] " sans Rigips, remarque ceci : " Nous sommes partis de l'hypothèse que Rigips détient une part de marché de [30-35] % ". Or, l'hypothèse de part de marché de Rigips pour 1998 correspond exactement à la part obtenue par ce producteur en Allemagne en 1997, soit [30-35] % comme l'ont noté à la fois Gyproc et Lafarge (voir les considérants (285) et (286)).

(281) Une connaissance aussi précise et exacte ne peut étonner, à partir du moment où les entreprises en question et BPB continuaient à participer activement à un échange d'informations qui couvrait, entre autres, le marché allemand. Cette information vient confirmer le lien existant entre l'échange direct d'informations entre concurrents et le système mené sous l'égide de M. [U, consultant indépendant].

(282) Knauf également (257) cherche à minimiser la portée du système d'échange de renseignements conduit par M. [U] en soulignant que Norgips ne faisait pas partie de ce système, ce qui invaliderait la possibilité de l'utiliser comme mécanisme de contrôle. Pourtant, Knauf lui-même souligne (258) que Norgips a été actif " jusque 1993 et à partir de la fin 1997 ", ce qui revient à fortement atténuer la portée de la remarque précédente, à partir du moment où le système d'échange de renseignements conduit par M. [U] a vu son fonctionnement perturbé dès le début 1998 suite au départ de BPB.

(283) Les chiffres de la note de M. [E, Gyproc] à M. [L, Gyproc], visée au considérant (221), figurent exactement dans un tableau d'une note (259) datée du 19 janvier 1998 découverte lors de la vérification effectuée chez Gyproc, intitulée " Évolution des parts de marché, potentiel du marché allemand ". La note indique que les chiffres de chaque producteur, outre Gyproc, pour 1995, 1996 et 1997 sont des " estimations fondées sur des informations commerciales ". L'évolution des parts de marché a fait l'objet des remarques suivantes :

- " G a réalisé >50 % de la croissance du marché, le reste ([5-7] millions) est allé à R

- il a manqué à K [5-7] millions m² pour conserver sa part de marché de [40-45] %

- L a perdu [0,5-1] % de part de marché ou [0-3] millions m². Ceux-ci sont aussi probablement allés à R. "

(284) Le même tableau est également inséré dans l'agenda de M. [E, Gyproc] (260) avec ses notes concernant une rencontre avec [un représentant de haut niveau] d'Etex le 27 janvier 1998. Ceci invalide l'idée défendue par certaines parties, notamment Lafarge et BPB (261), selon laquelle les chiffres en question relèveraient d'une désinformation de M. [K, Gyproc] par M. [E] en vue de mettre en valeur son travail et son importance : ces chiffres étaient des chiffres utilisés par les dirigeants de Gyproc dans leur stratégie et leur activité commerciale.

(285) Dans une autre note interne (262) découverte chez Gyproc, datée du 26 janvier 1998 et intitulée " Strictement confidentiel " et " correction de la note 19/1/98 ", certains chiffres de ventes et parts de marché ont été légèrement modifiés. On dit que les nouveaux chiffres avaient été jugés " aujourd'hui comme les meilleurs disponibles ". Les chiffres sont les suivants :

1996

K [40-45] % [95-100] Mm²

G [10-15] % [20-25] Mm²

L [10-15] % [30-35] Mm²

R [30-35] % [70-75] Mm²

1997

K [40-45] % [100-110] Mm²

G [10-15] % [30-35] Mm²

L [10-15] % [30-35] Mm²

R [30-35] % [75-80] Mm²

(286) Or, on relèvera que les pourcentages de parts de marché indiqués (avec deux décimales) pour 1996 et 1997 dans la note de Gyproc sont exactement les mêmes que ceux qui ont été utilisés dans le plan marketing 1998 de Lafarge Gips (263), document interne non publié par cet entreprise et dont Gyproc n'avait aucune raison d'avoir connaissance. La correspondance exacte des données de Lafarge Gips et de Gyproc indique que, dans le cadre des contacts entre les producteurs sur le marché allemand postérieur à l'accord de Versailles, les chiffres de ventes étaient connus au niveau national par les directeurs exécutifs ou commerciaux. Ces documents indiquent que ceux-ci s'appuyaient sur les informations relatives aux parts de marché pour se positionner avec soin sur le marché et maintenir la stabilité de leurs parts en Allemagne. La Commission note aussi la précision de ces données, qui constitue un indice supplémentaire du fait que ces chiffres provenaient d'un échange direct entre concurrents (264).

(287) La Commission conclut de ce qui précède que les contacts sur le marché allemand apparaissent étroitement liés aux échanges existant au niveau européen. Les producteurs, déjà engagés dans un système d'échange d'informations au niveau européen, ont jugé utile, de 1996 à 1998, de mettre sur pied un système plus sophistiqué concernant le marché allemand, comprenant des échanges d'informations et un système anonyme permettant un contrôle de l'exactitude des données échangées.

(288) Il était nécessaire, afin d'assurer la stabilité du marché allemand, de renforcer les échanges d'informations préexistants, de livrer des informations plus exactes et vérifiables (système [M. U, consultant indépendant]), et de se rencontrer régulièrement pour vérifier le comportement de chacun (ce qui a été fait au moyen d'une rencontre annuelle en marge des congrès Eurogypsum). Un tel mécanisme est parfaitement cohérent avec le mécanisme général mis en place au niveau européen : l'objectif est toujours d'éviter une guerre de prix et de stabiliser le marché.

(289) La Commission relève par ailleurs que les parts de marché sur le territoire allemand des producteurs de plaques en plâtre destinataires de la présente décision ont présenté une certaine stabilité au cours de la période concernée (voir l'annexe de la présente décision).

1.4.6. Echanges de données relatives aux hausses de prix sur le marché allemand

(290) La Commission a découvert lors de ses vérifications le 25 novembre 1998 chez Lafarge Gips GmbH, la filiale allemande de la branche plâtre de Lafarge, une note (265) datée du 7 octobre 1998, adressée par M. [X], [représentant] de Lafarge Gips, à MM. [F], [un représentant de haut niveau] de la branche plâtre de Lafarge, et [Y], de Lafarge Gips. Cette note, contemporaine des vérifications, est intitulée " Prix en Allemagne (plaques en plâtre) ". La note, rédigée en anglais, décrit successivement le " processus habituel des hausses de prix ", la " hausse de prix pour octobre 1998 ", le " résultat des initiatives " prises à l'occasion de cette hausse, " ma compréhension personnelle (et aussi celle d'autres) ", c'est-à-dire la compréhension qu'a l'auteur de la note des hausses de prix, la " prochaine opportunité réaliste " d'augmenter les prix, avant de décrire l'" histoire " récente des hausses de prix depuis 1993, les " différences de prix entre concurrents ", le " rapport entre plaques techniques et standards " ; des annotations manuscrites, en français, ont été rajoutées pour mentionner " les effets de la situation des prix sur une restructuration du secteur " pour " Gyproc " et " Norgips ". La note s'achève sur le souhait qu'elle permettra aux destinataires de " comprendre le mécanisme du marché allemand ".

(291) Les aspects se rapportant plus particulièrement à l'augmentation d'octobre 1998 sont développés au considérant (373)). S'agissant de la description plus générale des " prix en Allemagne ", la note indique (266) :

" A. processus habituel des hausses de prix un des deux grands acteurs (Knauf/Rigips) annonce une augmentation de prix ; les autres suivront un peu plus tard ; habituellement l'annonce est pour dans trois mois.

[...]

C. Ma compréhension personnelle (et aussi celle d'autres) Une augmentation de prix ne peut fonctionner que s'il n'y a pas de projets avec des prix spéciaux sur le marché. Chaque concurrent doit être sûr qu'il ne va pas perdre de parts de marché et qu'il est content avec sa part actuelle. Dès que l'un commence à saper l'action, les prix vont revenir à leur ancien et bas niveau. "

(292) La note poursuit en indiquant (267) que de faibles hausses ont été opérées en 1993 et 1994, mais ont très vite été éliminées. Une hausse plus forte entrée en vigueur le 1er février 1995 a été jugée " assez réussie ", mais une deuxième qui, d'après Lafarge, est entrée en vigueur le 1er janvier 1996 a été " très vite détruite " : " Après la dernière hausse réussie le

1.2.97, une seconde suit le 1.9.97, mais avec les mêmes circonstances qu'aujourd'hui (beaucoup de projets, anciens prix pour les clients clés...). Depuis lors les prix se sont effondrés jusqu'au niveau actuel ". Un graphique est annexé à la note, qui décrit l'évolution des prix facturés pour les plaques standard sur le marché allemand.

(293) Pour expliquer les " différences de prix entre concurrents ", la note indique (268) que " jusqu'en 93/94 Lafarge a essayé de conquérir des parts de marché et était considéré comme un importateur étranger. Les prix différaient jusque -,40/m². En 95/96 Lafarge a atteint le niveau de Gyproc et Dano et les prix étaient approximativement -,20/m² plus bas que ceux de Knauf /Rigips. Depuis 97 toutes les compagnies produisent en Allemagne et fournissent un assez bon service. Depuis lors les différences de prix sont seulement de [-,10 /-,20] /m². En 98, nous sommes déjà capables d'atteindre le niveau de Rigips alors qu'ils descendent du niveau de Knauf. Finalement on pourrait dire : Knauf [100-110], Rigips/Lafarge : [90-95], Gyproc/Dano : [90-95], Norgips : [80-85] " (une annotation manuscrite en français précise : " avant ristournes éventuelles aux applicateurs (cf. plus bas) ". Suit une explication de la tarification complexe utilisée dans le secteur et de sa mise en pratique par chaque producteur.

(294) La note indique encore, concernant les plaques standard et techniques, les développements du marché, avec le " très bon " développement " à l'Est " des plaques techniques imprégnées " par tous les acteurs " " dans les années du boom (90-97) ". La part des plaques techniques a ainsi atteint 40-45 % des plaques standard, le niveau sur toute l'Allemagne étant de 35-37 % (et [30-35], % pour Lafarge en 1997, sa meilleure année). Mais, selon la note, tous les concurrents font désormais face au même problème, à savoir une baisse à l'Est. Les commentaires manuscrits sur la note précisent l'enjeu des plaques spéciales : ce segment d'environ 15 millions de mètres carrés, soit 6 % du marché est en forte croissance, à forte valeur ajoutée, et très concentré (Knauf [70-80] %).

(295) La Commission constate que cette note, par sa rédaction même, ne se contente pas de viser l'augmentation d'octobre 1998, mais a pour objet d'informer de manière générale le nouveau dirigeant de la branche plâtre de Lafarge sur le fonctionnement du marché allemand, à l'occasion des hausses de prix.

(296) La Commission relève que l'auteur de cette note décrit un processus habituel de hausse de prix par lequel Knauf ou BPB annonce la hausse, et est suivi par les autres producteurs. Or, M. [X, Lafarge] précise la condition qui permet la réussite de ce schéma, à savoir que chaque concurrent doit " être sûr qu'il ne va pas perdre de parts de marché " et être " content de sa part de marché ". Il convient donc de vérifier tant la manière dont les producteurs déterminent et suivent la hausse des prix, que la portée exacte de la condition posée par M. [X] quant à la satisfaction de chaque producteur avec sa part de marché actuelle.

(297) La Commission relève que Lafarge, dans sa réponse à la communication des griefs, s'est abstenue de toute observation sur les conclusions tirées par la Commission dans ladite communication des griefs quant à l'interprétation à donner aux remarques de M. [X], en dehors d'une référence incidente concernant la hausse de prix d'octobre 1998.

(298) BPB a commenté (269) cette note de Lafarge en prétendant que son utilisation par la Commission révélait son penchant à tirer des conclusions erronées de documents innocents. En effet, cette note décrirait essentiellement comment fonctionnent les hausses de prix sur un marché comme les plaques en plâtre et " les évènements de 1998 [...] suggèrent davantage la concurrence que la coordination sur le marché ". En outre, " la description par la note de l'histoire des hausses de prix en Allemagne constitue une image dévastatrice pour l'affaire de la Commission ". La Commission relève cependant que BPB s'abstient de commenter les autres parties de la note de Lafarge, y compris celles qui concernent directement son propre comportement concurrentiel sur le marché allemand.

(299) Knauf considère (270) cette note comme une simple description du fonctionnement du marché et, pas plus que BPB, ne commente les autres parties de la note de Lafarge, y compris celles concernant directement son propre comportement concurrentiel sur le marché allemand.

(300) Gyproc, en revanche, s'appuie (271) sur cette note pour souligner son comportement suiviste en cas de hausses de prix.

(301) Pourtant, il apparaît que les concurrents se sont, au moins à partir de la fin de 1994, informés de leurs intentions concernant les hausses de prix, voire concertés sur celles-ci. Il apparaît en particulier que le mécanisme décrit dans la note de M. [X, Lafarge], selon lequel le mouvement de hausse était déclenché par Knauf ou BPB/Rigips ne correspondait pas exclusivement à un simple suivisme des deux leaders du marché par des concurrents informés par leurs clients cherchant à négocier de meilleurs prix, mais bien à un processus organisé d'information des concurrents entre eux - ce processus n'étant, d'ailleurs, pas toujours couronné de succès, chacun étant tenté de tricher pour profiter de la hausse pour gagner des parts de marché.

(302) S'agissant du " suivi de la part de marché " mentionné par M. [X, Lafarge] au point D de sa note, il faut rappeler que non seulement les parts de marché en Allemagne étaient suivies dans le cadre des statistiques " [M. U, consultant indépendant] ", mais les [représentants de haut niveau] des groupes - MM [D, BPB], [F, Lafarge], [B, Knauf] et [E, Gyproc] - échangeaient également les chiffres de ventes pour le Royaume-Uni, la France, le Benelux et l'Allemagne pour la période se terminant en septembre 1998 (272) et avaient du reste confirmé leurs ambitions de part de marché pour l'Allemagne en mai 1998 à La Haye (273).

(303) Au début de l'enquête de la Commission, BPB a indiqué (274) de manière générale qu'en Allemagne, les acteurs sur le marché avaient une bonne idée des listes de prix de leurs concurrents, " habituellement " via leurs clients. Ultérieurement, BPB n'a pas développé quelle(s) pouvai(en)t être la ou les éventuelles sources alternatives d'information ainsi suggérées.

(304) La Commission constate que Knauf, à plusieurs occasions à tout le moins, a informé non seulement ses clients directs, mais aussi ses concurrents de ce qu'elle prévoyait une hausse de prix, et que cette entreprise, de surcroît, a justifié à plusieurs reprises cette pratique.

(305) Une note (275) adressée le 15 novembre 1993 par le [représentant] de Knauf, M. [Z], à M. [B, Knauf] au sujet des perspectives concernant la hausse prévue pour le 1er janvier 1994 suggère d'ailleurs que cette pratique correspondait à des instructions internes au plus haut niveau : " Notre nouvelle liste de prix a été envoyée fin octobre à tous les clients directs. En même temps, tous les concurrents ont été informés par l'envoi d'un exemplaire ".

(306) De même, à l'occasion de la hausse devant entrer en vigueur le 1er octobre 1998, au moment où Knauf a envoyé à ses clients son annonce de hausse de prix, c'est-à-dire le 21 août 1998, il en a adressé copie (276) aux [représentants de haut niveau] respectifs de ses concurrents BPB/Rigips (à l'adresse privée de M. [ZA]), Lafarge, Gyproc (à l'adresse privée de M. [ZB]) et Norgips.

(307) Interrogée sur cet envoi, Knauf a indiqué (277) que " étant donné que les annonces officielles de changement de prix des concurrents sont envoyées fréquemment et de toute façon par les clients aux autres producteurs - ceci en rapport avec la demande de bénéficier des anciennes conditions de livraison - la pratique s'est établie depuis longtemps d'envoyer ces communications avec les listes de prix, etc, non seulement aux clients mais aussi directement en même temps aux concurrents. Il n'est en rien inhabituel sur d'autres marchés de produits homogènes que les concurrents s'informent réciproquement d'un changement de prix prévu. "

(308) Knauf a ultérieurement reconnu (278) que l'envoi aux concurrents de lettres annonçant les hausses de prix pouvait avoir eu lieu " occasionnellement ".

(309) BPB a déclaré (279), concernant l'envoi de listes de prix que " En Allemagne Knauf a déclaré qu'il relevait de la pratique normale d'envoyer des copies de ses annonces de hausses de prix à ses concurrents. Cela peut avoir été peu judicieux mais il est difficile de concevoir que cela ait pu affecter les choses étant donné que les concurrents auraient reçu, dans le cours normal des choses, des copies par la voie normale des clients après très peu de temps. BPB conteste pour sa part avoir jamais envoyé de copie de ses propres listes de prix directement à ses concurrents et la Commission n'a fourni aucune preuve que BPB le faisait ". BPB ajoute que " On peut également noter que la lettre d'annonce d'août 1998 envoyée par Knauf était envoyée à Norgips ainsi qu'aux autres producteurs et un nombre de clients. Si l'intention de Knauf avait été de la notifier à ses " co-conspirateurs " pourquoi Norgips aurait-il été inclus ? La Commission a également attiré l'attention sur le fait que les lettres ont été envoyées aux adresses privées de certains représentants de sociétés. Toutefois dans d'autres cas, les lettres ont été envoyées aux adresses de bureau ".

(310) Lafarge n'a pas formulé de commentaire sur l'éventuel envoi par un producteur à ses concurrents de ses annonces de hausses de prix et Gyproc n'a formulé aucune observation sur cette question.

(311) La Commission constate aussi qu'aucun élément, et en particulier aucune déclaration des parties, ne permet de conclure qu'un producteur se serait opposé à la réception des informations envoyées par un concurrent - et tout au moins par Knauf, dont il est avéré qu'il a transmis ses annonces préalables de hausse de prix dans certains cas au moins.

(312) La Commission relève en outre qu'au cours de ses vérifications dans les locaux de BPB/Rigips et de Lafarge Gips, elle a découvert de nombreuses copies d'annonces de hausses de prix émanant des concurrents des entreprises concernées (280).

(313) La Commission prend note de l'explication donnée par Lafarge et BPB, détentrices de ces lettres, selon lesquelles elles ont été obtenues de clients. Cependant, la Commission relève tant le caractère quasi systématique de la présence de telles lettres des concurrents, que les déclarations précitées de Knauf qui viennent contredire cette explication.

(314) La Commission constate également que la détention de ces lettres doit être analysée à la lumière de la note de M. [X] de Lafarge visée au considérant (291) selon laquelle Knauf et BPB, les deux plus grands producteurs, annonçaient d'abord les hausses de prix. En effet, l'envoi préalable de l'annonce de hausse de prix par un producteur qui est le ou l'un des deux leaders du marché à ses concurrents, comme Knauf a reconnu l'avoir fait et en a justifié la pratique, est de nature à modifier le fonctionnement concurrentiel du marché (voir la section 2.2).

(315) La Commission a, par ailleurs, découvert au cours de son enquête plusieurs autres éléments de nature à établir l'existence de contacts collusoires entre concurrents à l'occasion des hausses de prix sur le marché allemand.

(316) Ainsi, la note précitée (281) du 15 novembre 1993 de M. [Z, Knauf] à M. [B, Knauf] au sujet des perspectives concernant la hausse prévue pour le 1er janvier 1994 indique également que, compte tenu des prix bas toujours pratiqués sur le marché pour les " projets spéciaux ", il sera difficile de faire passer la hausse et donne les conseils suivants :

" Je répondrais de la manière suivante à votre question, comment une amélioration de la situation présente est possible :

a) L'autorité sur les prix ne doit pas être partagée à trop de personnes.

b) [Des représentants de haut niveau] doivent s'occuper eux-mêmes activement de ce thème.

c) Il faut rester strictement dans les limites.

d) Le braconnage sur les terres d'autrui dans les zones étrangères avec des prix bas doit cesser.

e) L'information réciproque doit refléter la réalité.

f) Sans contacts honnêtes avec les firmes partenaires et éventuellement les concurrents, la dégradation des résultats est programmée. [...]

L'exigence ne peut être que : l'un avec l'autre plutôt que l'un contre l'autre, nous ne pouvons pas avoir de pensées égoïstes. "

(317) Cette note révèle une discussion interne sur le moyen de parvenir à une hausse des prix. Dans ce contexte, M. [Z, Knauf] a recommandé que [des représentants de haut niveau] (ceci peut avoir visé MM. [B et C, Knauf]) discutent des augmentations de prix, que la guerre des prix cesse dans les zones " étrangères ", et que des contacts " honnêtes " avec les entreprises partenaires et " éventuellement " les concurrents soient établis. Enfin, M. [Z] a recommandé en termes généraux dans sa conclusion une coopération, sans préciser entre qui celle-ci est supposée s'appliquer.

(318) Knauf a commenté (282) cette note, en indiquant que celle-ci avait un caractère purement interne, et que les remarques relatives au fait de rester dans les limites ou d'éviter le braconnage avaient également une portée interne, puisque des employés se faisaient concurrence dans leurs zones respectives. Knauf n'a, en revanche pas commenté le passage de la note relatif aux " contacts honnêtes avec les firmes partenaires et éventuellement les concurrents ".

(319) La Commission considère tout d'abord que le point de savoir si les recommandations de M. [Z, Knauf] ont été suivies est strictement distinct de celui de leur interprétation. Or, à cet égard, la Commission estime que l'interprétation donnée par Knauf sur le caractère purement interne de cette note, compte tenu de la remarque de ladite note sur les " contacts honnêtes avec [...] les concurrents " et du contexte général décrit dans la présente décision, peut légitimement être écartée au profit d'une lecture plus simple de ces considérations, à savoir que M. [Z] estimait nécessaire une forme de coordination entre entreprises concurrentes et une auto-restriction de chaque entreprise dans son comportement concurrentiel.

(320) Une hausse des prix a eu lieu en février 1995. On rappelle que la note de Lafarge du 7 octobre 1998, visée au considérant (292), a jugé cette hausse " assez réussie ".

(321) Une note interne d'octobre 1994 découverte chez BPB/Rigips (283) relative à la situation sur le marché allemand indique que tous les producteurs ont préparé le terrain à une hausse des prix à mettre en œuvre le 1er février 1995. Cette hausse devait s'élever, pour tous, à environ 0,35 DEM/m² net pour les plaques standard (12,5 mm). Les producteurs ont annulé les remises spéciales et stabilisé les prix consentis aux gros revendeurs à [2,5-3] DEM/m² (Knauf, BPB/Rigips) et [2,5-3] DEM/m² (Lafarge). Toutefois, Gyproc n'a pas suivi le même mouvement et gardé des contrats à environ [2-2,5] DEM/m². La note indique que M. [ZB], [représentant] de Gyproc, s'est plaint que son entreprise a perdu des parts de marchés et devait en regagner. La note interne souligne que " en ce moment, le plus gros problème c'est vraiment Gyproc! ". La note conclut en ces termes : " On pense que les prix seront gelés au niveau ci-dessus et qu'une hausse de prix aura lieu à partir du 1er février 1995 avec une augmentation de 0,35 DM/m² net pour toutes les plaques. Cela signifie pour Rigips que les prix pour les plaques de 12,5 mm augmenteront de [2,5-3] DM/m² actuellement (pour les stocks) jusque [2,5-3] DM/m². "

(322) Le résultat de cette augmentation des prix a permis, en mars 1995, aux prix nets de Knauf d'atteindre environ [2,5-3] DEM, à ceux de Lafarge un niveau légèrement inférieur (284). Toutefois, la réussite initiale de la hausse s'est trouvée diluée (285). Selon un commentaire en marge d'un tableau découvert chez BPB/Rigips, qui compare les prix nets annoncés après la hausse et la situation en juillet 1995 (286), " Gyproc n'a jamais atteint son niveau estimé et a commencé à vendre moins cher dès le lendemain de la hausse ".

(323) BPB a ultérieurement indiqué (287) que les commentaires rédigés par M. [S, BPB] dans la note interne d'octobre 1994 découverte chez BPB/Rigips reflètent l'appréciation innocente de celui-ci de l'état du marché allemand, basée sur sa connaissance de celui-ci grâce aux informations collectées par le personnel commercial de BPB/Rigips. En outre, BPB précise que " des lettres annonçant des augmentations de liste de prix effectives depuis février 1995 ont été envoyées à partir de novembre 1994. Il est par conséquent presque certain qu'au moment où M. [S] a écrit la note à la mi-octobre 1994, les producteurs (Knauf en particulier) auraient déjà été en train de consulter leurs clients à propos de leurs propositions et de prendre des mesures pour faciliter leur mise en œuvre fructueuse, telles celles décrites dans la note. La Commission n'a fourni aucune preuve suggérant que ces actions n'ont pas été entreprises par les producteurs indépendamment, sur la base d'informations légitimes sur le marché concernant les intentions des uns et des autres, qui auraient été disponibles par l'intermédiaire des clients. De l'avis de BPB, il n'y a rien de suspect dans la référence de M. [S] à Gyproc Benelux comme étant "vraiment le plus gros problème en ce moment". Au contraire, dans sa note M. [S] déclare clairement comprendre que M. [ZB], [représentant] de Gyproc pour l'Allemagne, était sous pression pour regagner des parts de marché que Gyproc pensait avoir perdues (ce qui, en soi, ne paraît pas être cohérent avec toute suggestion de collusion entre les producteurs portant sur les prix ou les parts de marché). Selon M. [S], il va de soi que M. [ZB] aurait par conséquent été sous une pression particulière émanant de Gyproc Benelux au moment de prendre des mesures sur les prix, ce qui aurait risqué d'amoidrir toute tentative par les autres producteurs d'augmenter leurs prix net net, d'où la référence à Gyproc Benelux étant " le plus gros problème" ". BPB ajoute que les documents cités par la Commission ne reflètent que le fonctionnement typique du marché en cas de hausses de prix et que la connaissance que BPB/Rigips avait des niveaux de prix était basé sur la connaissance générale des pratiques de ses concurrents en termes de rabais.

(324) Lafarge a affirmé (288) que cette hausse " ne révèle absolument aucune concertation, mais au contraire le fait que Knauf n'a pas pu anticiper la réaction de ses concurrents ". Selon Lafarge, cette hausse a échoué et ne démontre aucune forme de coordination. Lafarge souligne ainsi qu'en novembre 1994, Knauf " semble être le premier " à annoncer une hausse effective au 1er février 1995 (289). Rigips lance sa propre annonce de hausse le 24 novembre, effective à la même date (290). Lafarge envoie la sienne le 24 novembre, avec la même date d'application que les deux précédentes (291). Lafarge indique (292) qu'elle " avait [...] tout intérêt à stabiliser ses prix dès lors que les deux autres producteurs avaient déjà annoncé une hausse. En effet, en 1995 Lafarge importe toujours ses plaques, ce qui dans le contexte de la chute des prix, le conduit tout naturellement à profiter de la hausse annoncée par ses concurrents pour remonter ses prix ". Lafarge reconnaît que les prix ont effectivement augmenté à partir du 1er février mais indique qu'ils sont redescendus très rapidement pour retrouver un niveau à peine supérieur à ce qu'ils étaient avant l'annonce de la hausse. Lafarge relève encore que dès le mois de mars, Knauf observe (293) que les prix de ses concurrents sont de [0-0,5] à [0-0,5] DEM inférieurs à ses propres prix, ce qui lui a fait déjà fait perdre quelques grands projets intéressants et que Rigips, au mois de mai, note (294) également que " jusqu'à présent la hausse de prix n'a pas encore été complètement réalisée ". Commentant le document de Rigips du mois de juillet 1995 (295) cité par la Commission, Lafarge indique ensuite que ce document rappelle la situation des prix mais espère la compenser par une augmentation des volumes et que l'auteur de la note prévoit que les prix vont continuer à baisser en raison des prix bas pratiqués par Gyproc.

(325) Lafarge conteste (296) que le parallélisme des annonces, de même que l'annulation de remises spéciales par tous les producteurs au mois d'octobre 1994 pour préparer les annonces de hausses suggère l'existence de contacts collusoires. Ainsi, concernant la remarque " On pense que les prix seront gelés au niveau ci-dessus ", " le fait que M. [S] indique que " it is expected " que les différents producteurs ne descendront pas en dessous des niveaux évoqués n'est en rien révélateur d'une concertation, mais montre (i) uniquement le bon niveau d'information dont dispose M. [S] [...] et (ii) l'expression d'un sentiment personnel sur la suite des événements ".

(326) La Commission relève que Lafarge, en parlant d'échec de cette hausse, revient dans sa réponse à la communication des griefs sur les indications données par M. [X, Lafarge] dans sa note d'octobre 1998. Il suffit ici de constater que M. [X], directement impliqué dans le fonctionnement du marché, considérait cette initiative de prix comme un succès.

(327) La Commission constate cependant qu'il n'est nullement exclu que ce " bon niveau d'information " provienne, précisément, de contacts entre concurrents.

(328) En outre, la Commission estime pertinent d'analyser les évènements intervenus et les documents au regard du commentaire formulé par M. [X, Lafarge] dans sa note de 1998 décrivant le fonctionnement du marché allemand (voir le considérant (291)), selon laquelle " une augmentation de prix ne peut fonctionner que s'il n'y a pas de projets avec des prix spéciaux sur le marché. Chaque concurrent doit être sûr qu'il ne va pas perdre de parts de marché et qu'il est content avec sa part actuelle. Dès que l'un commence à saper l'action, les prix vont revenir à leur ancien et bas niveau ". En effet, la Commission constate que les évènements semblent correspondre au schéma décrit par M. [X], la hausse n'ayant eu un succès que relatif en raison du comportement de Gyproc.

(329) De plus, la Commission estime que la teneur de la note d'octobre 1994 de BPB/Rigips visée au considérant (321), en raison de la phrase " on pense que les prix seront gelés au niveau ci-dessus ", en ce qu'elle est basée sur une connaissance précise de la stratégie des concurrents et qu'elle témoigne d'un contact direct entre cette entreprise et Gyproc, révèle l'existence de contacts collusoires entre les producteurs pour se positionner en vue de la réussite de l'application de la hausse. De même, l'utilisation dans le tableau mentionné au considérant (322) (297) des termes " Gyproc n'a jamais atteint son niveau estimé ", joint au parallélisme étroit du comportement des producteurs, est de nature à révéler une concertation directe sur la hausse des prix. Toutefois, en l'absence de preuve directe d'une telle concertation, la Commission se contente de conclure que les concurrents se sont mutuellement informés de leurs intentions.

(330) Une hausse des prix était prévue pour le 1er décembre 1995. Il convient de rappeler que la note de Lafarge visée au considérant (292), la datant du 1er janvier 1996, indique qu'elle a été " très vite détruite ".

(331) L'augmentation a été annoncée aux clients en septembre 1995 (298). Le nouveau prix "brut" des plaques standard de 12,5 mm devait être de [5-5,5] à [5-5,5] DEM/m², ce qui devait donner un prix "net" d'environ [3-3,5] à [3-3,5] DEM/m².

(332) L'échec de cette initiative de hausse de prix est confirmé par toutes les parties. Bien plus, en 1996, en Allemagne, les prix nets ont enregistré une baisse, passant de leur plus bas niveau de [2,5-3] DEM/m² en janvier à [2-2,5] DEM/m² en août (299). De surcroît, aucune hausse de prix n'a été mise en œuvre dans le courant de 1996.

(333) On rappellera qu'en juin 1996, BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc, les producteurs de plaques en plâtre opérant sur le marché allemand se sont rencontrés à Versailles (voir les considérants (220) et suivants).

(334) En revanche, une hausse des prix était prévue pour le 1er février 1997. La hausse a été annoncée en octobre et novembre 1996. La lettre datée d'octobre 1996 de BPB/Rigips (300) informait les clients que des hausses généralisées des coûts rendaient inévitable une hausse du prix de tous les types de plaques en plâtre. La diffusion du nouveau tarif était prévue pour novembre. La lettre prévenait les clients en termes emphatiques que toutes les livraisons postérieures au 31 janvier 1997 seraient facturées aux nouveaux prix. Les autres producteurs ont envoyé des lettres rédigées en des termes globalement identiques : les tarifs de Danogips (301) et de Lafarge (302) indiquent que le nouveau prix "net" (après déduction de la remise distributeur de [...] % et de la "remise chargement" de [...] DEM) était de [3-3,5] DEM/m², alors que leur prix de liste était de [4,5-5] DEM/m², comme celui annoncé par Gyproc (303).

(335) Par ailleurs, la Commission a découvert au cours de l'enquête une note (304) datée du 17 décembre 1996 portant la mention " strictement confidentiel et personnel ! ", adressée par M. [X, Lafarge] à M. [G], [représentant de haut niveau] de la branche plâtre de Lafarge et à d'autres [représentants] de cette entreprise. La note relate les discussions qui se sont déroulées lors de la réunion de l'association allemande des fabricants de plaques en plâtre organisée à Francfort le 16 décembre 1996. Il n'y a pas de traces de ces discussions dans le procès-verbal officiel de la réunion de l'IGG. La note de M. [X] indique :

" Au-delà de divers sujets sur le marketing et le recyclage, nous avons encore discuté la situation actuelle sur le marché allemand. Mon impression est la suivante :

1. BPB/Rigips recherche encore de plus en plus des clients sur le marché qui pourraient les aider dans leur chaîne de distribution. M. [V, BPB] nous a dit qu'ils n'ont pas les mêmes ressources pour les ventes et le marketing que Knauf et donc ils ont besoin de se concentrer sur des clients clés agissant dans ce qu'on appelle le Dealer/Dealer-Business.

Ces clients vendent de plus petites quantités à de plus petits revendeurs (1-6 palettes). Pour cela ils ont besoin d'une marge de 0,40 à 0,50 DM/m². Donc le prix offert à ceux-ci sera inférieur au niveau de prix actuel le plus bas convenu (R : [2,5-3] et L : [2,5-3]). Probablement, ils vendront à [2,5-3] DM/m².

Sûrement ces clients utiliseront leurs bas prix également pour les projets. Cela va encore conduire à une déstabilisation.

2. Knauf

Ils ont déjà négocié avec beaucoup de clients clés et leur ont accordé des prix pour les projets jusqu'en mai 97 à un niveau inférieur au niveau de prix convenu.

Avec nous, ils insistent sur la discipline pour la hausse de prix.

3. Gyproc

Bien que l'annonce de prix a été faite partout, ils ont encore réduit leurs prix dans certaines zones ([2-2,5] DM/m²)

Stratégie contre Knauf dans certaines régions, mais aussi contre nous

4. Le niveau actuel de prix pour les spécialistes et les distributeurs A (les projets sont plus bas)

Knauf : [2,5-3] DM/m²

Rigips : [2,5-3] DM/m²

Lafarge : [2,5-3] DM/m²

Gyproc : [2-2,5] DM/m²

Dano : [2-2,5] DM/m²

Notre prix net/net est probablement le plus haut aujourd'hui parce que Knauf et Rigips ont des accords élevés de bonus et travaillent aussi avec des paiements de cocontractants.

5. Augmenter le prix au niveau convenu ([2,5-3] DM/m²) va encore être très difficile. Nous allons essayer de faire de notre mieux, mais nous devons aussi atteindre nos objectifs de volume. "

(336) Lafarge a donné de cette note l'interprétation suivante (305) : le fait de dire " le niveau de prix le plus bas convenu " signifiait le prix convenu chez Lafarge par [un représentant de haut niveau] de la branche Plâtre et ses subordonnés de Lafarge Gips et non un prix convenu entre les producteurs, et lorsqu'il est dit en parlant de Knauf : " avec nous, ils insistent sur la discipline pour la hausse des prix " (ce qui tranche avec la négligence apparente de Knauf), cela voulait dire " tout comme nous [Lafarge], ils [Knauf] insistent sur la discipline de la part des clients " et non " en ce qui nous [Lafarge] concerne, ils [Knauf] insistent sur la discipline, etc ".

(337) Lafarge a ultérieurement indiqué (306) que, si l'on examine la note de M. [X, Lafarge] dans le contexte d'une hausse de prix déjà annoncée où le prix que BPB/Rigips avait l'intention d'appliquer était connu de Lafarge via les clients qui l'en avait informée, " il apparaît clairement que la réunion de Francfort du 16 décembre 1996 est donc loin d'avoir été une occasion innocente pour les producteurs de décider ensemble de leur hausse de prix ". Par ailleurs, " les commentaires [de M. [X] dans sa note] ne sont donc pas les conclusions auxquelles les participants seraient parvenus, mais les impressions personnelles [d'un représentant de haut niveau] de Lafarge à la suite des quelques réflexions échangées sur le marché avec les autres participants à la réunion ".

(338) De plus, Lafarge indique (307) que " la note révèle qu'à l'occasion de ce Congrès, Rigips aurait déclaré qu'ils n'avaient pas les mêmes moyens que Knauf, ce qui les obligeait à se concentrer sur des clients " importants ". A ce propos, la note relève que Rigips va donc probablement offrir des prix inférieurs à la hausse qu'il a annoncé [...]. Cette indication ne résulte nullement de la réunion. Il s'agit d'une part d'une référence au prix minimum de Rigips tel qu'annoncé par ce dernier au marché au mois de novembre et d'autre part d'une pure supposition de Lafarge que ce prix ne sera pas maintenu ". En outre, " le terme " convenu " ne doit pas être mal interprété. Ainsi que Lafarge l'a expliqué dans sa réponse à une demande de renseignements [...] la notion de prix convenu ne concerne que Lafarge. La Commission a refusé de prendre en compte le document versé au dossier par Lafarge pour expliquer qu'il s'agissait du niveau de prix convenu entre Lafarge Plâtres et sa filiale, en dessous duquel cette dernière ne devait en principe pas descendre. Lafarge réaffirme pourtant avec force cette explication, d'autant que depuis cette demande de renseignements, Lafarge a engagé des recherches plus approfondies qui la confirment totalement. En effet, Lafarge est en mesure de démontrer que [2,5-3] DM était très précisément le prix budget en 1997 sur lequel Lafarge Plâtres et sa filiale s'étaient mis d'accord. On retrouve d'ailleurs chez d'autres que Lafarge cette notion de prix budget en deçà desquels les forces commerciales n'étaient pas censés descendre (Cf. notamment chez Gyproc, p. 5552) ".

(339) Enfin, selon Lafarge (308), le " fait que Knauf ait insisté à l'égard des autres producteurs sur son souhait que la hausse de prix fonctionne (" with us they insist on discipline for the price increase ") n'apporte rien de plus. Il s'agit d'une pure déclaration unilatérale, à laquelle les autres participants n'ont pas souscrit. Bien au contraire, le [représentant de haut niveau] de Lafarge évoque plus loin dans sa note qu'il ne pourra probablement pas maintenir son prix budget. "

(340) Knauf a prétendu (309) que la note de M. [X, Lafarge] n'avait qu'une portée interne à Lafarge, en dehors éventuellement de la description des discussions entre BPB/Rigips et Lafarge. Knauf conteste également (310) qu'un accord entre producteurs sur le marché allemand, tel que l'expression " niveau de prix convenu " dans ladite note le suggère, ait été conclu avec sa participation. Knauf, enfin, s'est abstenu de commenter la phrase de la note " avec nous, ils insistent sur la discipline pour la hausse des prix ", et a affirmé que cette note ne pouvait révéler aucune forme de coordination entre les producteurs. M. [X] n'a fait aucune déclaration à M. [W] de Knauf lors de cette réunion de l'IGG.

(341) BPB a initialement nié (311) que M. [V] de Rigips aurait discuté des prix avec M. [X, Lafarge] lors de la réunion de l'IGG le 16 décembre 1996 et affirmé que "comme la note était écrite en anglais, ce qui n'est pas la langue maternelle de M. [X], il peut avoir dit "convenu " alors qu'il voulait dire "annoncé" ".

(342) BPB a formulé ultérieurement (312) les observations complémentaires suivantes : " BPB a noté qu'il y a au moins cinq autres mémos rédigés par les [représentants de haut niveau] de Lafarge (un par [M. ZC] à [M. ZD], daté du 12 janvier 1996 et quatre par [M. X] à [M. G] et autres, datés des 5 janvier, 3 mars, 2 avril et 5 octobre 1998) rendant compte des prix de chacun des concurrents à différents types de négociants. [...] Le premier de ces mémos déclare que "Notre équipe de vente donne des informations quotidiennes sur le comportement de nos concurrents concernant les prix. Vous trouverez ci-joint une étude de la présente situation jusqu'à aujourd'hui". Les prix donnés dans chaque mémo sont précisément exprimés en deutschemarks et pfennigs, souvent dans des fourchettes. Le niveau de détail est similaire à celui utilisé dans le mémo de [M. X] du 17 décembre 1996 et suggère que les informations sur les prix présentant ce niveau de détail étaient, de manière routinière, collectées par les équipes de ventes de Lafarge et auraient été disponibles sur le marché, comme BPB l'a suggéré dans sa déclaration du 28 mai 1999. La source des informations de Lafarge découle encore plus clairement du tableau, compilé à l'évidence par M. [X] et qui a été dévoilé par la Commission à la page 6859 du dossier. Le tableau fait état de prix fournis par les concurrents de Lafarge à des clients nommés en particulier et semble avoir été compilé soit pour une réunion de Lafarge concernant les ventes internes, soit sur la base d'informations reçues lors d'une telle réunion. Il semblerait constituer la matière première pour les rapports mensuels compilés par M. [X] et envoyés au management de Lafarge ".

(343) S'agissant des explications données par Lafarge, la Commission constate que l'explication de cette entreprise sur le caractère interne des discussions que la note de M. [X, Lafarge] révèlerait ne tient pas compte du fait que la note se réfère également à Knauf et à BPB/Rigips.

(344) En outre, la Commission prend note des remarques de Lafarge selon laquelle la réunion " est [...] loin d'avoir été une occasion innocente pour les producteurs de décider ensemble de leur hausse de prix " et encore que " les commentaires [de M. [X, Lafarge] dans sa note] ne sont donc pas les conclusions auxquelles les participants seraient parvenus, mais les impressions personnelles du [représentant de haut niveau] de Lafarge à la suite des quelques réflexions échangées sur le marché avec les autres participants à la réunion ". La Commission constate que cette déclaration de Lafarge vient confirmer le texte même de la note de M. [X] selon laquelle les concurrents ont " encore discuté la situation actuelle sur le marché allemand ". Cette note, dont la Commission n'a jamais prétendu qu'elle constituait un relevé de conclusions de la réunion entre les concurrents, et la déclaration de Lafarge, établissent incontestablement l'existence des contacts directs entre concurrents dans lesquels ceux-ci ont exprimé des analyses et, comme le révèle la suite de la note, des intentions. En outre, cette phrase établit que d'autres " discussions " du même type ont eu lieu précédemment.

(345) En outre, la Commission considère que, compte tenu des termes que cette note emploie et du contexte général décrit dans la présente décision, l'interprétation donnée par Lafarge de la notion de " niveau de prix convenu " peut légitimement être écartée au profit d'une lecture plus simple de son contenu. Dans ce contexte, le " niveau de prix le plus bas convenu " ou " niveau de prix convenu " de [2,5-3] DEM pour BPB/Rigips et [2,5-3] DEM pour Lafarge est le prix net facturé que les producteurs avaient convenu entre eux. On relèvera d'ailleurs que cette interprétation de la Commission est cohérente avec l'information contenue dans une autre note de Lafarge (voir le considérant (293)) (313), selon laquelle il y avait en général un écart de prix de [0-0,5] DEM/m² entre Knauf et BPB/Rigips d'une part, et Lafarge d'autre part.

(346) La Commission estime que la note de M. [X, Lafarge] visée au considérant (335), dans le contexte d'une augmentation des prix annoncée par tous les producteurs pour le 1er février 1997, reflétait sa préoccupation devant le comportement de ses concurrents et des politiques de prix, et en particulier de rabais, qu'ils mettaient en œuvre. Ainsi, les nouveaux prix que BPB envisageait de proposer aux clients "inter-distribution" étaient inférieurs de 0,20 DEM au prix minimum convenu de [2,5-3] DEM. Les distributeurs allaient pouvoir se servir de leurs bas prix facturés ([2,5-3] DEM, moins d'autres remises) non seulement pour dégager une marge de 0,40 à 0,50 DEM sur la revente aux plus petits distributeurs, mais aussi pour proposer le produit aux entreprises de construction pour leurs projets spéciaux. Knauf avait négocié d'avance, pour les projets spéciaux jusqu'en mai 1997, des prix inférieurs au niveau convenu ([2,5-3] DEM), tout en insistant auprès de Lafarge pour que celui-ci respecte le prix le plus bas convenu ([2,5-3] DEM pour lui). Gyproc avait annoncé la hausse des prix à ses clients mais la sapait en proposant de conserver les anciens prix (jusqu'à [2-2,5] DEM) dans certains secteurs. Compte tenu du bas niveau des prix nets facturés - [2-2,5] DEM - qui était encore proposé aux distributeurs au mois de décembre, il allait être difficile pour Lafarge de relever le niveau de son prix à [2,5-3] DEM; Lafarge Gips allait faire de son mieux pour atteindre cet objectif de prix tout en ne pouvant pas se permettre de perdre des parts de marché par une attitude trop rigide sur la hausse.

(347) S'agissant des explications données par BPB, la Commission relève que le fait que Lafarge ait une connaissance du marché via ses employés et responsables commerciaux et que cette connaissance puisse éventuellement expliquer le niveau de détail des informations dans les notes de Lafarge citées par BPB ne vient en rien invalider les conclusions que la Commission peut tirer à la lecture de la note du 17 décembre 1996 de M. [X, Lafarge]. Cette note, en effet, se réfère explicitement à des discussions entre concurrents. La Commission pourrait même théoriquement tirer la conclusion inverse de celle de BPB concernant les notes de Lafarge citées par BPB : ces autres notes pourraient avoir été enrichies d'informations collectées directement auprès des concurrents. La Commission maintient enfin, sur la base de cette note contemporaine des faits, et malgré la dénégation de BPB, que M. [X] et M. [V, Rigips/BPB] ont eu une discussion sur l'état du marché et en particulier les prix.

(348) Concernant les déclarations de Knauf, la Commission constate que cette entreprise s'abstient de toute explication des phrases " niveau de prix convenu " et " avec nous, ils insistent sur la discipline pour la hausse des prix ", sinon pour nier de manière générale l'existence d'une discussion entre Knauf et Lafarge et contester toute participation à un accord ou à une coordination.

(349) La Commission conclut de la note de M. [X, Lafarge] qu'après avoir publiquement annoncé la hausse, les producteurs ont examiné, à l'occasion de la réunion de l'association allemande des fabricants de plaques en plâtre organisée à Francfort le 16 décembre 1996, la façon de l'appliquer avec succès.

(350) La hausse de prix de février 1997 a été qualifiée de " réussie " par M. [X, Lafarge] en octobre 1998 (voir le considérant (292)) mais de " demi-succès de courte durée " et même d'échec par Lafarge ultérieurement (314). Cette appréciation est contredite par le graphique annexé à la note de M. [X] d'octobre 1998 (315), visé au considérant (292), qui montre une nette augmentation des prix, qui ne se maintiennent pas à leur plus haut niveau, mais malgré un fléchissement progressif ont néanmoins conservé un niveau durablement plus élevé que celui qui prévalait à la fin de 1996.

(351) Les raisons du fléchissement ont été analysées par Lafarge (316) ou BPB/Rigips (317) comme provenant du comportement de Gyproc qui a conservé, par rapport aux autres producteurs, une différence de prix, non révélée aux autres producteurs, pouvant atteindre 0,30 DEM/m² pour les plaques standard de 12,5 mm. Gyproc facturait à ses clients les nouveaux prix, mais leur accordait des avoirs mensuels, des produits gratuits, etc. Lafarge a ainsi noté que Gyproc " a probablement gagné [...] un peu de part de marché parce qu'ils n'ont jamais appliqué la hausse de prix de février aussi rigoureusement que Knauf et nous ".

(352) La Commission conclut de l'ensemble des documents et déclarations des parties, ainsi que du parallélisme étroit du comportement des producteurs, que, à l'occasion de la hausse des prix de février 1997, une concertation directe sur la hausse des prix est intervenue entre les concurrents, et que, à tout le moins, les concurrents se sont mutuellement informés de leurs intentions en prévision de cette hausse.

(353) Les producteurs ont prévu la hausse suivante pour septembre 1997. Les lettres annonçant la hausse de septembre ont été envoyées dès le mois de mai (318). Après le 1er septembre 1997, le nouveau prix net s'est affiché officiellement à [3-3,5] DEM/m² pour Knauf et [3-3,5] DEM/m² pour Lafarge, Gyproc et Danogips, mais des prix inférieurs ont été signalés pour certains clients et pour des projets spéciaux (319).

(354) Toutefois, comme l'a souligné M. [X, Lafarge] dans sa note d'octobre 1998, le succès des hausses de prix impliquait que chaque opérateur se satisfasse de sa part de marché. La hausse de prix de septembre 1997 a été l'occasion, selon les preuves dont dispose la Commission, de diverses démarches montrant le lien entre stabilité des parts de marché, contrôle des clients et/ou des distributeurs et initiatives de hausses de prix.

(355) Une illustration en est fournie par les contacts visant à éviter que chacun des grands producteurs " braconne " les gros clients des autres, pour reprendre les termes de la note de novembre 1993 de Knauf (voir le considérant (316)).

(356) Il apparaît ainsi dans une note interne de Knauf (320) datée du 1er juillet 1997 que M. [W, Knauf], a eu une rencontre quelques jours auparavant (321) avec M. [X, Lafarge Gips]. Lors de cette réunion, M. [X] a examiné avec Knauf, afin d'obtenir son feu vert, une liste de clients qu'il se proposait de démarcher. Knauf a répondu (322) à la requête de la Commission que la liste jointe à la note de Knauf sur cette question n'existait plus. Toujours selon la note de Knauf, M. [X] a prétendu qu'il s'agissait d'anciens clients réguliers de Lafarge que Knauf lui avait pris, et que la raison de sa démarche était qu'il cherchait à accroître de 1 à 2 % sa part de marché dans le sud de l'Allemagne.

(357) Après s'être interrogé sur le point de savoir s'il s'agissait vraiment de clients de Lafarge, M. [W, Knauf] conclut que la démarche de Lafarge était un geste hostile.

(358) Knauf n'a initialement (323) pas fourni d'explication au sujet de cette note. Ultérieurement (324), cette entreprise a indiqué qu'il s'agissait d'un comportement " clairement concurrentiel ", qui ne montrerait rien d'autre que la tendance occasionnelle des entreprises françaises à faire preuve d'arrogance dans leurs rapports avec leurs concurrents. " Avec une telle annonce, Knauf pouvait se décider soit pour une guerre de prix au sujet de ces clients, soit de reculer au nom de la raison commerciale. Lafarge était manifestement d'avis, avec cette annonce, de pouvoir raccourcir le chemin. Evidemment, Knauf [...] a défendu ses clients. "

(359) Lafarge a indiqué (325) qu'il " est exact que Lafarge avait décidé de faire le nécessaire pour reprendre d'anciens clients que Knauf avait réussi à détourner à son profit [...]. Lafarge voulait augmenter ses parts de marché dans le sud de l'Allemagne [...]. Cependant à aucun moment Lafarge n'a cherché à " négocier " le retour de ces clients avec Knauf. Le responsable commercial de Lafarge n'a fait que déclarer à Knauf sa décision de récupérer d'anciens clients importants. Cette démarche signifiait simplement à l'égard de Knauf que Lafarge avait décidé de ne pas se laisser faire et défendrait fermement ses positions. Toute nouvelle attaque de clients conduirait donc aux mêmes réactions. Cette démarche n'a cependant pas ému Knauf, qui se borne à noter qu'un contact a été pris avec les plus importants clients pour leur faire de nouvelles propositions ".

(360) Quelles qu'aient été les réactions effectives des deux entreprises suite à cette rencontre entre M. [W, Knauf] et M. [X, Lafarge] - réactions sur lesquelles aucun élément autre que les déclarations desdites deux entreprises n'est disponible - force est pour la Commission de constater que Knauf et Lafarge ont eu une discussion sur leurs clients importants dans le sud de l'Allemagne. Même dans l'hypothèse où ces deux entreprises se seraient contentées d'évoquer leurs intentions concernant leurs clients, ce fait suffit à établir une forme de coordination entre deux concurrents.

(361) Une autre illustration du lien entre stabilité des parts de marché, contrôle des clients et/ou distributeurs et initiative de hausses de prix est fournie par le fait que, selon des preuves documentaires issues de Lafarge (326), la succursale de Hambourg des négociants [ZE] a fait de la publicité en date du 9 septembre 1997 pour une promotion spéciale sur la vente des plaques de 12,5 mm à [2,5-3] DEM/m² à compter du 1er octobre 1997. Cette action aurait mis en péril la hausse des prix. Knauf l'a signalé le 24 septembre 1997 à Lafarge, le fournisseur de [ZE]. Or, le même jour, M. [X], de Lafarge, a assuré à M. [W, Knauf] que Lafarge était aussi ennuyé que Knauf dans une télécopie (327) : " Comme déjà discuté lors de la réunion de l'IGG, cette action de [ZE] est une action isolée et non discutée avec la centrale. En attendant, le directeur de l'établissement local peut se faire du souci pour son job. Selon nos informations, cette action entre temps a été retirée et n'a pas été poursuivie ".

(362) Lafarge a souligné (328) que " la réalité est toute autre [que celle décrite par la Commission]. La promotion de [ZE, négociant] à Hambourg était loin d'être un acte isolé mais relevait en fait d'une politique systématique de Lafarge. Dès le début du mois de septembre, il était d'ailleurs clair pour les concurrents que Lafarge n'appliquait pas la hausse qu'il avait annoncée, comme le démontrent les notes internes de Rigips en date du 10 septembre 1997 (p. 2282) et du 12 septembre 1997 (p. 2275). Au surplus, aucune mesure n'a été prise contre [ZE] et ses achats auprès de Lafarge pour l'année 1997 ont progressé de [2400-2500] % par rapport à l'année précédente (p. 5603). Quand bien même Knauf aurait interpellé Lafarge à propos de [ZE] à l'occasion d'une réunion IGG, cette interpellation est en réalité la preuve que Lafarge suivait une politique autonome et qu'elle n'a en rien modifié le comportement de Lafarge. "

(363) Knauf a indiqué (329) que les contacts concernant [ZE, négociant] ne peuvent constituer des preuves de coordination. En effet, ce distributeur bénéficiait, de l'avis de Knauf, de conditions très favorables de la part de Lafarge. Avec sa promotion spéciale, [ZE] menaçait de réduire à néant la totalité de la hausse des prix. C'est dans ce contexte que " M. [W] de Knauf a directement discuté avec son homologue chez Lafarge. Cependant, de toute évidence, aucune action précise de Lafarge n'était présente, comme on le voit d'après sa réponse. Il est clair sur la base des documents de la procédure que Rigips aussi observait de près la situation, voir par exemple page 6.2275, et livrait même [ZE] ou l'avait livré. Un arrangement, comme la Commission le suggère, n'a pas été conclu. Lafarge a eu le souci, en vertu d'une décision propre de l'entreprise, que l'offre de [ZE] n'entre pas en vigueur. On devrait pouvoir comprendre qu'une hausse de prix serait contrecarrée par une telle mesure de [ZE]. "

(364) Quelles que soient les dénégations ultérieures de ces deux entreprises, la Commission conclut de cet échange de notes que Lafarge et Knauf étaient en contact, et n'ont pas hésité à agir de manière concertée sur un distributeur, afin de faire respecter une hausse de prix issue de leur volonté commune et à la demande d'un concurrent.

(365) La Commission relève qu'encore une fois, une réunion de l'IGG a fourni l'occasion d'un contact entre concurrents où ceux-ci ont évoqué des questions se rapportant à leur situation concurrentielle.

(366) La Commission considère donc que ces deux échanges entre Knauf et Lafarge confirment l'existence d'une concertation sur le niveau des prix et d'un contrôle sérieux des prix pratiqués par les distributeurs respectifs, notamment à l'occasion des réunions de l'IGG.

(367) La hausse des prix du 1er septembre 1997 a échoué comme le notait M. [X, Lafarge] dans sa note d'octobre 1998 (voir le considérant (292)). Chaque producteur en a rejeté la faute sur les autres et sur leur comportement commercialement agressif. En novembre 1997, le prix "net net" en Allemagne était tombé à [2-2,5] DEM/m².

(368) Dans une note interne de septembre 1997 de BPB/Rigips (330), Lafarge était accusé d'être le concurrent " le plus agressif ". BPB/Rigips, dans une autre note interne (331) du 8 novembre 1997, indique que " depuis octobre 1997 la situation concurrentielle en Allemagne concernant le secteur des plaques en plâtre s'est clairement aggravée. Au début de l'année commerciale, Gyproc et Lafarge ont essayé de gagner des parts de marché additionnelles et ont donc agi de manière extrêmement agressive sur les prix. Nous avons réagi avec souplesse aux agressions et avons réussi à défendre notre part de marché. Manifestement Knauf n'y est pas parvenu et tente depuis octobre de regagner les parts de marché perdues. Depuis ce moment Knauf diminue ses prix de vente sur une large échelle et essaie à tout prix à regagner les parts de marché perdues. Jusqu'ici, toutes les tentatives de notre part de stabiliser le prix ont échoué. L'augmentation des prix de septembre a échoué et vu la situation, nous pensons que la hausse prévue pour mars ne pourra pas être réalisée ". Dans une autre note interne datée du 10 novembre 1997 (332), [un représentant de haut niveau] de BPB indiquait de la même manière que Knauf " fait de plus en plus de bruit pour manifester qu'il est mécontent de ses pertes de part de marché " et redoutait le déclenchement d'une nouvelle guerre des prix compte tenu de la volonté de chacun de conserver sa part de marché.

(369) Dans une note interne de janvier 1998 (333) où il rend compte [à un représentant de haut niveau] de la branche plâtre de Lafarge, M. [X] de Lafarge Gips explique la hausse des ventes moindre qu'espérée notamment par le fait que depuis octobre 1997 " Rigips et Knauf se sont trouvés en concurrence directe - Knauf veut récupérer des parts de marché de Rigips - les prix sont descendus d'environ DEM [2,5-3] par m² en septembre à [2,5-3] par m² maintenant ". Concernant les prix, " il y a maintenant une situation très instable et aussi longtemps que Knauf et Rigips ne sont pas en mesure de fixer leur propre position, il y aura une pression sur les prix ici, en Allemagne ". Cependant M. [X] ne prévoit pas plus que 0,10 à 0,20 DEM par m² de baisse additionnelle : " nos espoirs se basent sur un hiver pas trop difficile et sur un arrêt des hostilités sur le marché entre Knauf et Rigips ".

(370) Selon une note interne de M. [W] de Knauf d'octobre 1997 (334), Lafarge a insisté auprès de lui sur le respect du maintien du niveau de prix de [3-3,5] DEM et a reproché à Knauf l'apparition sur le marché du prix de détail de [2,5-3] DEM.

(371) D'autres indications confirment que Knauf, à la même période, semble avoir été particulièrement sensible à la réduction de ses parts de marché, ce qui a fortement contribué à rendre plus difficile un maintien ou a fortiori une hausse des prix. Ainsi, selon les annotations de l'agenda de M. [E, Gyproc] faisant suite à une conversation avec un [représentant] de Lafarge (voir le considérant (244)), Knauf faisait à ce moment savoir à ses concurrents qu'il voulait accroître sa part du marché allemand de 1 %, et qu'il escomptait voir Gyproc la lui céder. On rappellera plus généralement qu'en 1997, les quatre producteurs présents sur le marché allemand discutaient activement, mais sans parvenir à un accord précis, sur leurs parts de marché respectives (voir la section 1.4.5.2). Cette situation pourrait avoir contribué à empêcher le succès des hausses de prix.

(372) En mai 1998, BPB/Rigips a pris l'initiative d'annoncer une hausse de prix de 4 à 7 % devant prendre effet au 21 septembre 1998, comme en témoigne un compte rendu de direction de BPB (335). La lettre type annonçant cette hausse a été envoyée aux clients début juin, la hausse annoncée pour les plaques de 12,5 mm étant d'un montant net de 8,5 % (336). Le nouveau tarif BPB/Rigips a été publié en juillet, le prix net prévu se situant au niveau "nominal" de [2,5-3] DEM/m² (337).

(373) Dans la note déjà évoquée du 7 octobre 1998 (338), M. [X] de Lafarge évoque aussi cette hausse en la datant d'octobre, et indique que " Rigips l'a annoncé il y a environ huit semaines, mais que Knauf ni aucun autre producteur ne l'a suivi immédiatement ; de plus BPB/Rigips a commencé à accorder les anciens prix à ses gros clients et pour les grands projets spéciaux (> 10 000 m²) jusqu'à la fin de l'année à approximativement [2-2,5]/m². C'est seulement au début de septembre que Knauf a annoncé sa hausse, mais en garantissant aussi des prix spéciaux pour les comptes clés. Fin septembre, Lafarge a fait une annonce fin septembre pour le 12.10.98. Gyproc et Dano n'ont encore rien écrit à leurs clients. "

(374) En fait, Knauf a prévenu ses clients par lettre du 21 août 1998 (339) d'une hausse d'un montant non précisé devant entrer en vigueur le 1er octobre. La lettre de Lafarge (340), rédigée dans des termes analogues à ceux de Knauf, a été envoyée le 26 août, soit quelques jours plus tard avec, pour date d'effet, le 5 octobre 1998. Danogips et Gyproc (341) ont, eux aussi, envoyé à la fin du mois d'août leurs lettres annonçant une hausse à compter du 1er octobre.

(375) Or, au moment où Knauf a envoyé à ses clients son annonce de hausse de prix, c'est-à-dire le 21 août 1998, il en a adressé copie (342) aux directeurs généraux ou commerciaux respectifs de ses concurrents BPB/Rigips (à l'adresse privée de M. [ZA]), Lafarge, Gyproc (à l'adresse privée de M. [ZB]) et Norgips.

(376) Le 26 août 1998, M. [W] de Knauf a observé dans une note de service (343) qu'il avait "aussi" obtenu confirmation téléphonique de M. [ZB] de Gyproc que la lettre de sa société adressée aux clients avait été postée la veille : il note que " maintenant, la boucle est bouclée ".

(377) Le 23 octobre 1998, M. [W], [représentant] de Knauf, a faxé à M. [X] de Lafarge, à son adresse personnelle, une copie des instructions du 22 octobre (344) qu'il avait données au personnel commercial de Knauf pour imposer la hausse : pas d'"actions" spéciales; pas de rabais sur les projets spéciaux au-delà du 31 décembre; faire courir le bruit sur le marché que les prix allaient encore monter de 0,50 DEM/m² au premier trimestre 1999.

(378) La note de service (345) adressée le 21 octobre 1998 par M. [X] de Lafarge à son personnel commercial est à peu près identique aux instructions données par ses homologues. La mention manuscrite " personnelle - confidentielle " portée sur l'une des deux copies que la Commission a trouvée chez Lafarge Gips pourrait signifier qu'elle a été faxée en dehors de l'entreprise Lafarge dans le cadre de la même série de contacts entre producteurs, puisqu'il n'y a en soi aucune raison qu'un document diffusé de manière interne à de nombreux destinataires reçoive une telle classification.

(379) Le 1er novembre 1998, M. [ZB] de Gyproc a envoyé à M. [X, Lafarge], également à son adresse privée, une copie de ses instructions du 25 octobre (346) dans ce sens aux vendeurs de son entreprise.

(380) Selon une note (347) rendant compte de la réunion du conseil d'administration de BPB/Rigips du 13 octobre 1998, BPB/Rigips " a exécuté avec détermination la hausse de prix annoncée depuis le 1er octobre 1998 ". Knauf est décrit comme ayant essayé d'imposer les prix voulus, mais avec un certain nombre d'exceptions. Lafarge avait informé (348) ses clients qu'il augmentait ses prix de 0,15 DEM/m², mais seulement à partir du 12 octobre (et non du 1er octobre, comme annoncé précédemment). Gyproc ne manifestait pas le moindre signe d'augmentation de ses prix. La note ajoute : " Notre objectif reste clairement que Rigips impose avec détermination la hausse de prix. Si nous réussissons et quand nous aurons atteint une certaine stabilité, nous devrons essayer d'exécuter une autre hausse de prix durant les trois premiers mois de 1999. "

(381) On relèvera qu'une autre hausse de 0,50 DEM/m² prévue pour début 1999 a été évoquée. Les instructions de Gyproc et de Lafarge mentionnent la date du 1er février 1999. Il s'agissait là de l'ordre de grandeur général de la hausse que M. [X, Lafarge] avait esquissée dans sa note (349) du 7 octobre 1998 (voir le considérant (291)), évoquant la date du 1er mars 1999 :

"D. La prochaine opportunité réaliste :

Seulement si le point C est OK, nous pouvons le tenter pour le 1.3.99.

Annonce de tous les acteurs doit être sur le marché avant Noël.

Si 3 ont besoin de le faire, j'essaierais vraiment une hausse de 25-30 % jusque approx. [2,5-3] /m² facturé (pas de notes de crédit !).

Si bon contrôle de l'application de notre part de marché.

Mais :

E. Comment va réagir Norgips ? Dano ? Gyproc

Est-ce que les autres vont accepter une part de marché de 3-4 % ?

Qui donne combien à N ? "

(382) Lafarge souligne (350) l'échec de la hausse d'octobre 1998 qui ne parviendra pas plus à interrompre la chute des prix brutale constante depuis septembre 1997, " et ce malgré la tentative désespérée de Knauf par laquelle il " fait passer le message " à ses concurrents que lui-même va respecter la hausse ". " Le décalage de dates démontre qu'il n'y a pas eu concertation. " L'échec s'explique selon Lafarge, qui fait référence à sa note (351) du 21 octobre 1998, par l'absence de toute hausse réelle par Gyproc et Danogips et une hausse seulement partielle pour Rigips et Knauf.

(383) Par ailleurs, Lafarge affirme (352) que " l'envoi par Knauf de son annonce de hausse aux autres producteurs n'était qu'une tentative toute aussi vaine que désespérée ". " Le fait que Knauf ait adressé sa lettre d'annonce au domicile d'autres producteurs mais également d'importants vendeurs n'est pas synonyme de réciprocité de la part des autres producteurs. En effet, le fait qu'une entreprise fasse une annonce de manière unilatérale de sa prochaine hausse n'apporte nullement la preuve d'une concertation avec son destinataire. Par ailleurs, cette initiative unilatérale de Knauf ne pouvait produire que des conséquences très limitées, puisqu'à chacune des hausses précédentes, cette information était parvenue aux autres producteurs sans intervention de Knauf. D'ailleurs sur la liste des destinataires, sont également présentes des centrales d'achat importantes comme [...], également clientes de Lafarge (p. 6946), qui n'auraient pas manqué d'informer Lafarge de la hausse des prix de Knauf. On note enfin que Knauf n'a procédé à l'envoi aux autres producteurs que le 26 alors que l'envoi aux clients datait du 21. Il est donc tout à fait possible que lorsque les producteurs ont reçu l'annonce de Knauf, ils en avaient déjà eu communication par leurs clients. "

(384) Lafarge souligne encore (353) qu'il " est évident qu'aucune " confiance " n'existait ", faisant référence à la crainte exprimée lors de la réunion mensuelle de Rigips (354) que leurs concurrents ne suivent pas la hausse, ou encore à une note interne de Lafarge (355). De plus, " le fait que Monsieur [W] (Knauf) aurait obtenu confirmation de la part de Monsieur [ZB] (Gyproc) que celui-ci venait d'annoncer sa hausse et aurait considéré en conséquence que la boucle était bouclée ne constitue pas la preuve d'une confiance, mais simplement qu'un contact entre ces deux entreprises avait eu lieu et qu'il semblait dès lors que tout le monde avait annoncé la hausse sur la base de ses informations ". D'ailleurs, " le comportement de Gyproc ne pouvait réellement inspirer aucune confiance à Knauf : Gyproc est très vraisemblablement le producteur qui avec constance a le moins suivi les mouvements de hausse ".

(385) Lafarge indique enfin (356) : " Dans un tel contexte, les courriers envoyés par Gyproc et Knauf à Lafarge selon lesquels des instructions auraient été données aux forces de vente pour faire réussir l'augmentation doivent être traités comme des " actes d'intoxication " destinés à tromper encore un peu plus les concurrents comme le démontre l'étude du marché allemand de Rigips. En effet, le producteur note que le prix des plaques a baissé au cours de la seconde partie de l'année de 12 %, ce qui signifie non seulement que cette communication d'instructions n'a pas eu d'effet, mais au surplus que Gyproc et Knauf n'ont vraisemblablement pas eux-mêmes suivi ces instructions (p. 4234). Les courriers envoyés par Lafarge (p. 6951), Gyproc (p. 6957) et Knauf (p. 6955) à leurs clients respectifs selon lesquels ils mettaient un terme aux rabais jusqu'à la fin de l'année ne prouve encore une fois qu'une seule chose : les producteurs concernés se sont alignés sur l'initiateur de cette mesure après en avoir été informés par leurs clients. Tout espoir de voir les prix remonter était en effet une occasion à ne pas laisser passer ". " Ces mesures n'ont cependant eu aucun effet puisque les prix de Lafarge n'ont pas cessé de baisser pour atteindre [2-2,5] DM au mois de mars 1999 ".

(386) BPB de son côté, a indiqué (357) " le déroulement des évènements [...] démontre clairement que s'il y avait une collusion entre les producteurs - ce dont BPB n'a en tout cas aucune connaissance - BPB n'aurait pas pu y être incluse. La chronologie démontre que BPB a envoyé sa lettre d'augmentation de prix et publié ses nouveaux prix longtemps avant que les autres sociétés aient informé leurs clients de leurs intentions. Toute opération de " renforcement de confiance " n'aurait pas pu logiquement inclure BPB, qui avait agit de manière indépendante quand il avait envoyé ses lettres de hausse de prix en juin 1998. S'il y avait une " boucle " à boucler, ce qu'il appartient à la Commission de démontrer, cela n'aurait pas pu concerner BPB. Dans ces conditions, il est clair que les citations extraites par la Commission du conseil d'administration de Rigips du 13 octobre 1998 sont totalement innocentes. Il n'est pas surprenant qu'à cette réunion le conseil d'administration ait discuté le comportement des concurrents de Rigips sur le marché".

(387) Knauf affirme (358) que les faits décrits par la Commission montrent seulement des décisions individuelles d'acteurs du marché, qui suivent ou ne suivent pas les initiatives de prix des autres acteurs. Knauf, par ailleurs, confirme l'envoi par M. [W, Knauf] en octobre 1998 des instructions à son personnel commercial à Lafarge. Toutefois, Knauf affirme qu'il ne s'agit là que d'un cas différent de toutes les autres tentatives de hausses des prix et d'une initiative personnelle de M. [W], ignorée de [MM. B et C, Knauf], et qui ne fait pas partie d'un processus de coordination.

(388) Gyproc n'a pas contesté la présentation dans la communication des griefs de la Commission des faits se rapportant à la hausse de septembre/octobre 1998.

(389) Concernant la tentative de hausse de septembre/octobre 1998, la Commission constate que l'initiative de BPB/Rigips en mai 1998 n'a pas rencontré au départ de succès auprès de ses concurrents. Cependant, Knauf a finalement manifesté sa volonté de mettre en œuvre cette hausse et a transmis directement à ses concurrents BPB, Lafarge et Gyproc ses listes de hausses de prix - ainsi qu'à Norgips, qui venait de rentrer sur le marché et dont la présence avait un effet déstabilisateur reconnu par tous les autres producteurs. Knauf a également adressé à Lafarge les instructions internes à son personnel commercial. Gyproc a adressé à Lafarge et Knauf les instructions internes à son personnel commercial.

(390) La Commission constate donc, sur la base des éléments de preuve dont elle dispose, que Knauf et Gyproc ont activement agi pour informer leurs concurrents, et que BPB/Rigips et Lafarge ont reçu ces informations. Ces deux dernières entreprises n'ont pas prétendu ne pas avoir reçu ces informations ni avoir refusé leur réception. Du reste, le fait que la Commission ait découvert durant ses vérifications les documents en question conservés dans les bureaux des [représentants] des deux entreprises généralement impliqués dans les échanges suffit à établir que la réception de l'information n'a pas été accidentelle, mais participe bien de l'ensemble des comportements d'échange et de concertation. Dans le contexte général décrit dans la présente décision, cet échange est une manifestation supplémentaire de la concertation menée entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc sur le marché allemand.

(391) La communication de cette information à Norgips n'invalide nullement les conclusions de la Commission sur l'existence d'une forme de coordination entre les quatre producteurs déjà installés sur le marché allemand : la communication d'informations doit être appréciée dans son contexte (voir la section 2.2). En outre, il n'est pas exclu que ces quatre producteurs aient pu envisager d'associer Norgips à leurs arrangements si les vérifications de la Commission n'avaient pas eu lieu peu de temps après la rentrée sur le marché de cette dernière entreprise.

(392) L'échange entre producteurs de la preuve qu'ils tenaient le cap s'est poursuivi après l'entrée en vigueur de la hausse. Cet échange apparaît comme destiné à donner confiance aux concurrents : avant de s'engager, chacun des producteurs voulait probablement s'assurer que les autres avaient déjà publiquement bougé sur les prix.

(393) La Commission constate que Gyproc, dans sa réponse à la communication des griefs (359), ne conteste pas la description des faits de la Commission, mais se contente, d'une manière générale, de souligner la nature particulièrement limitée de sa participation aux " tentatives de hausses de prix concertées sur le marché allemand ". La Commission estime que cette admission confirme ses conclusions.

(394) La Commission conclut de l'ensemble de ces éléments que, sur le marché allemand, les quatre producteurs, à compter de la hausse des prix de février 1995 et jusqu'aux vérifications de la Commission, se sont informés, au moins à certaines occasions, de leurs intentions concernant la date et le niveau des hausses envisagées. Ils se sont aussi, à certaines occasions, contactés en vue d'assurer la réussite de la hausse concertée. Le fait que la communication ait eu lieu au niveau des filiales ne change rien au fait qu'il s'agit bien des mêmes entreprises que celles engagées dans des contacts au niveau européen. Du reste, aucune des quatre entreprises n'a prétendu arguer de la différence des personnes juridiques concernées pour contester à cet égard la pertinence de la présentation de la Commission dans la communication des griefs.

(395) La Commission relève par ailleurs que, comme l'indiquent BPB (360) et Lafarge (361), les prix sur le marché allemand ont eu tendance à remonter ou tout au moins à se stabiliser au cours de la période concernée, ce qui tranche nettement avec la tendance ayant prévalu de 1988 à 1992.

1.5. Preuves économiques en vue de démontrer l'absence d'entente

(396) Les participants à l'infraction tentent de démontrer, notamment par le recours à des analyses économiques faisant état du fonctionnement du marché entre 1992 et 1998, qu'il est impossible, qu'il y ait eu pendant cette période une entente sur le marché des plaques en plâtre. Ils déduisent de la nature du marché et du fait qu'une concurrence vigoureuse se serait maintenue sur les marchés concernés pendant cette période au niveau des prix et des parts de marché, qu'aucune collusion ne les a animés pendant la période litigieuse (362).

(397) Les arguments développés par les parties sont sensiblement similaires, à savoir que la volatilité des prix " net net ", les changements dans les parts de marché, les mouvements substantiels au niveau de la clientèle et les efforts des producteurs pour augmenter leur efficacité et réduire la structure de leurs coûts, démontrent l'existence d'une concurrence vigoureuse qui ne laisse aucune place à l'existence d'une entente concernant la fixation des prix ou la répartition des parts de marché (363). A cet égard, la Commission mentionne toutefois que les descriptions de la structure du marché des produits faites par Lafarge et Knauf diffèrent substantiellement sur certains points (364).

(398) La Commission ne peut retenir ces arguments, en ce qu'ils ne sont pas pertinents pour démontrer qu'aucune entente n'a existé sur le marché des plaques en plâtre entre 1992 et 1998 entre BPB, Knauf, Lafarge et par la suite Gyproc.

(399) Tout d'abord, il faut constater que la Commission ne se base pas sur un simple parallélisme de comportements, ni n'utilise de preuves économiques pour établir l'existence de l'infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité mais qu'elle se base notamment sur des preuves directes établissant l'existence de l'entente. Les analyses économiques fournies par les parties ne sont pas de nature à donner un éclairage différent aux diverses preuves documentaires directes citées par la Commission pour établir l'existence de la violation de l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(400) En outre, la Commission ne prétend en aucune manière que l'existence de l'entente aurait dû avoir pour effet d'éliminer toute forme de concurrence sur le marché des plaques en plâtre. Par conséquent, l'existence d'un certain degré de concurrence n'est aucunement incompatible avec la conclusion selon laquelle une entente a eu lieu. A cet égard, le fait qu'une concurrence ait lieu et que les objectifs des hausses de prix n'aient pas toujours et intégralement été atteints ne signifie nullement que les participants n'ont pas contribué à la mise en œuvre des accords conclus au sein de l'entente ou qu'une infraction à l'article 81 ne puisse pas être constatée. En effet, même les membres d'une entente ne peuvent s'affranchir totalement de la situation sur le marché, celle-ci pouvant aussi dépendre de conditions qu'ils ne peuvent pas entièrement maîtriser. Il n'en reste pas moins qu'en convenant des quotas de parts de marché et des prix cibles, les membres d'une entente disposent d'une marge de manœuvre accrue sur le marché pour exploiter leurs clients grâce à des prix plus élevés. Qui plus est, le Tribunal a déjà constaté, dans ses arrêts relatifs à l'entente sur le carton, qu'une entreprise qui ne se comporte pas sur le marché d'une manière conforme à celle convenue avec les concurrents peut simplement tenter d'utiliser l'entente à son profit (365).

(401) Il importe à cet égard de souligner que l'infraction établie par la Commission ayant un objet anticoncurrentiel (366), il est de jurisprudence constante que la prise en considération des effets concrets d'un accord est superflue (367). Par ailleurs, le fait qu'une entreprise participant avec d'autres à des réunions au cours desquelles sont prises des décisions en matière de prix ne respecte pas les prix convenus n'est pas de nature à infirmer l'objet anticoncurrentiel de ces réunions et, dès lors, la participation de l'entreprise intéressée aux ententes, mais tendrait tout au plus à démontrer qu'elle n'a pas mis en œuvre les accords en question (368).

(402) Pour le surplus, il importe de souligner que le fait que les parties admettent une évolution entre la situation sur le marché avant 1992 et après cette date établit déjà l'existence d'un changement sur le marché (369).

2. PARTIE II - APPRECIATION JURIDIQUE

2.1. Application des règles de concurrence

2.1.1. Valeur des déclarations comme preuve de l'infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité

(403) Lafarge a contesté le recours de la Commission aux déclarations de BPB et de Gyproc dans le cadre de la communication de la Commission concernant la non-imposition d'amendes ou la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (370) (ci-après " communication sur la clémence "), en vue d'établir l'existence de certains faits, en ce que ces déclarations seraient intéressées et ne seraient pas corroborées par des preuves. Lafarge s'appuie en particulier sur l'arrêt du Tribunal de première instance dans les affaires " ciments " (371).

(404) La Commission constate à titre préliminaire que les points de cet arrêt cités par Lafarge, à savoir les points 1837 et 1838, concernent un cas dans lequel la Commission se base sur un seul document. Or, en l'espèce, Lafarge reproche à la Commission de se baser sur des déclarations et non sur des documents.

(405) En ce qui concerne la valeur probante des déclarations litigieuses, la Commission souligne premièrement que, de manière générale, elle ne s'est pas basée uniquement sur ces déclarations pour établir l'existence de l'infraction objet de la présente décision. Au contraire, la Commission dispose de nombreuses preuves directes établissant les faits et elle utilise les déclarations des parties pour compléter, éclaircir ou mettre en lumière certains faits dans la mesure où elle le considère comme nécessaire.

(406) Il convient ensuite de rappeler, que les preuves doivent être appréciées dans leur ensemble en tenant compte de toutes les circonstances factuelles pertinentes (372). Or, au regard des autres éléments de preuve disponibles, les déclarations de BPB et Gyproc, faites par ces entreprises sans qu'elles connaissent tous les éléments dont disposait la Commission, apparaissent parfaitement crédibles et non contradictoires sur l'essentiel de la description des faits. A cet égard, la Commission souligne que les déclarations contestées de BPB et Gyproc ne sont contredites ni par des éléments de faits, ni, pour l'essentiel, par d'éventuelles déclarations qui auraient pu être faites par d'autres parties concernées par les déclarations litigieuses de BPB et Gyproc.

(407) En ce qui concerne la véracité et l'authenticité des preuves et des déclarations de Gyproc ou de BPB qui ont été fournies dans le cadre de la communication sur la clémence, la Commission signale le fait que les tribunaux communautaires n'ont, à aucun moment, mis en question la légalité de la politique de la clémence et ont même procédé à la réduction d'amendes, dans l'exercice de leur pleine juridiction, en application de ladite communication (373).

(408) La Commission constate en outre qu'en l'espèce les déclarations litigieuses de BPB et de Gyproc sont une reconnaissance de leur participation à une infraction et que partant, elles constituent l'admission du caractère infractionnel par ces entreprises de leur comportement. Par ailleurs, ni BPB, ni Gyproc ne tentent, dans ces déclarations, de se disculper en essayant de faire supporter la responsabilité de l'infraction par une autre entreprise. Dans ces circonstances, la Commission conclut que les déclarations litigieuses étant plutôt contraires à l'intérêt de BPB et de Gyproc, elles sont de cette manière extrêmement crédibles. La Commission n'a donc aucune raison de croire qu'il y ait rien d'exagéré ou d'inventé dans ces déclarations, bien au contraire.

(409) Par conséquent, il résulte de l'ensemble de ces considérations que la Commission peut se référer aux déclarations litigieuses de BPB et de Gyproc comme elle le fait dans la présente décision.

2.1.2. Accords et pratiques concertées

(410) En vertu de l'article 81, paragraphe 1, du traité, sont incompatibles avec le Marché commun et interdits, tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du Marché commun, et notamment ceux qui consistent à fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction, limiter ou contrôler la production, les débouchés et répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(411) L'interdiction de ces formes de coordination et de collaboration doit être comprise à la lumière de la conception inhérente aux dispositions du traité relatives à la concurrence, et notamment l'article 81, paragraphe 1, du traité, selon laquelle tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique commerciale qu'il entend suivre à l'intérieur du Marché commun. Cette exigence d'autonomie s'oppose rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre les opérateurs économiques, qui a pour objet ou pour effet d'influencer leur comportement sur le marché et qui a pour objet ou pour effet d'aboutir à des conditions de concurrence qui ne correspondraient pas aux conditions normales du marché en cause (374).

(412) Cette coordination ou collaboration peut indifféremment se réaliser sous une des formes visées à l'article 81, paragraphe 1, du traité et notamment sous la forme d'un accord ou d'une pratique concertée.

(413) Dans l'arrêt rendu le 20 avril 1999 dans les affaires PVC II (375), le Tribunal de première instance déclare que "selon une jurisprudence constante, pour qu'il y ait accord, au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée". L'accord n'a pas besoin d'être formulé par écrit, aucune formalité n'est nécessaire et il n'est pas nécessaire qu'il soit imposé de sanctions contractuelles, ni de mesures d'exécution. Le fait de l'accord peut être explicite ou implicite dans le comportement des parties.

(414) La notion de "pratique concertée" appréhende une forme de coordination entre entreprises qui, sans avoir été poussée jusqu'à la réalisation d'un accord proprement dit, substitue sciemment une coopération pratique entre elles aux risques de la concurrence (376). Ce comportement peut tomber sous le coup de l'article 81, paragraphe 1, du traité comme étant une "pratique concertée", même lorsque les parties n'ont pas explicitement souscrit à un projet commun définissant leur action sur le marché, mais qu'elles adoptent sciemment ou adhèrent à des dispositifs collusoires qui facilitent la coordination de leur comportement commercial (377).

(415) Même si, aux termes de l'article 81, paragraphe 1, du traité, la notion de pratique concertée exige non seulement la concertation, mais aussi un comportement sur le marché qui est le fruit de la concertation et se trouve dans un rapport de causalité avec celle-ci, on peut présumer, jusqu'à preuve du contraire, que les entreprises qui participent à une telle concertation et restent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché, et ce d'autant plus si la concertation a lieu sur une base régulière au cours d'une longue période (378).

(416) En outre, une pratique concertée relève de l'article 81, paragraphe 1, du traité, même en l'absence d'effets anticoncurrentiels sur le marché. D'abord, il découle du texte même de ladite disposition que, comme dans le cas des accords entre entreprises et des décisions d'associations d'entreprises, les pratiques concertées sont interdites, indépendamment de tout effet, lorsqu'elles ont un objet anticoncurrentiel. Ensuite, si la notion même de pratique concertée présuppose un comportement des entreprises participantes sur le marché, elle n'implique pas nécessairement que ce comportement produise l'effet concret de restreindre ou de fausser la concurrence (379).

2.1.3. Notion d'accord complexe et continu

(417) Le terme "accord" peut être appliqué tant à un projet global ou aux conditions expressément convenues, qu'à l'exécution de ce qui a été convenu sur la base des mêmes mécanismes et dans la poursuite du même objectif commun. Le fait que, en droit, une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité est réalisée dès la conclusion de l'accord illicite, ne signifie pas que l'"accord" ne peut être continu; aussi longtemps qu'il est exécuté, il continue à exister jusqu'à sa résiliation.

(418) Un tel accord, qualifié de complexe, peut donc être considéré comme une seule infraction continue pendant la durée de son existence. L'éventualité qu'un ou plusieurs éléments d'une série d'actions ou d'une ligne de conduite continue puissent, individuellement et en eux-mêmes, constituer une violation de l'article 81, paragraphe 1, du traité, ne s'oppose pas à la conclusion que ces éléments puisse constituer un accord complexe.

(419) En effet, comme la Cour de justice l'a déclaré, confirmant ainsi l'arrêt du Tribunal de première instance, il ressort des termes formels de l'article 81, paragraphe 1, du traité qu'un accord peut consister non seulement en un comportement isolé, mais aussi en une série de comportements ou en une ligne de conduite (380).

(420) Dans la présente affaire, la Commission établit, comme on le verra aux considérants

(428) et suivants, l'existence d'un tel accord complexe.

2.1.4. Notion d'infraction unique

(421) L'infraction unique est une série d'infractions individuelles liées entre elles par une identité objective (même finalité de l'ensemble des éléments) et subjective (identité des parties conscientes de concourir à l'objectif commun) (381).

(422) Il n'est pas nécessaire, notamment dans le cas d'une infraction unique de longue durée, que la Commission soit tenue de qualifier l'infraction comme étant exclusivement une forme ou une autre de comportement illicite. Les notions d'accord et de pratique concertée sont mouvantes et, parfois, se chevauchent. Au demeurant, il peut même s'avérer impossible d'établir cette distinction de manière réaliste, car il arrive qu'une infraction présente simultanément les caractéristiques de chacune des formes de comportement illicite, alors que, considérées isolément, certaines de ses manifestations pourraient être assimilées avec précision à une de ces formes plus qu'à une autre. Toutefois, sur le plan de l'analyse, il serait artificiel de subdiviser en plusieurs formes discontinues d'infraction ce qui, à l'évidence, est une entreprise commune continue ayant un seul et même objectif global. C'est pourquoi une entente peut être à la fois un accord et une pratique concertée. L'article 81 du traité ne définit pas de catégorie particulière pour les infractions complexes du type de l'espèce (382).

(423) Dans son arrêt PVC II, le Tribunal de première instance a confirmé qu'on ne saurait exiger de la Commission que, dans le cadre d'une infraction unique qui a impliqué plusieurs producteurs pendant plusieurs années poursuivant un objectif de régulation en commun du marché, elle qualifie précisément l'infraction, pour chaque entreprise et à chaque instant donné, d'accord ou de pratique concertée, dès lors que, en toute hypothèse, l'une et l'autre de ces formes d'infraction sont visées à l'article 81, paragraphe 1, du traité (383).

(424) En effet, si l'article 81, paragraphe 1, du traité distingue la notion de pratique concertée de celle d'accord entre entreprises ou de décisions d'associations d'entreprises, c'est dans le dessein d'appréhender, sous les interdictions de cette disposition, différentes formes de coordination et de collusion entre entreprises. En effet, la comparaison entre les notions d'accord et de pratique concertée au sens de cet article fait apparaître que, du point de vue subjectif, elles appréhendent des formes de collusion qui partagent la même nature et ne se distinguent que par leur intensité et les formes sous lesquelles elles se manifestent. Il s'ensuit que si ces notions comportent des éléments constitutifs partiellement différents, elles ne sont pas réciproquement incompatibles. Partant, la Commission n'est pas tenue de qualifier chacun des comportements constatés d'accord ou de pratique concertée, mais peut qualifier certains de ces comportements, à titre principal, d'accords et d'autres, à titre subsidiaire, de pratiques concertées (384).

(425) Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu'une infraction unique peut être qualifiée d'infraction complexe, lorsqu'elle comporte à la fois des éléments devant être qualifiés d'" accords " et des éléments devant être qualifiés de " pratiques concertées " et que face à une infraction de ce type, la Commission est en droit de la qualifier d' "accord et de pratique concertée ", cette double qualification devant être comprise non comme une qualification exigeant simultanément et cumulativement la preuve que chacun des éléments de fait présente les éléments constitutifs d'un accord et d'une pratique concertée, mais bien comme désignant un tout complexe comportant des éléments de fait dont certains ont été qualifiés d'accords et d'autres de pratiques concertées au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité (385).

(426) Finalement, il faut souligner que bien qu'une entente soit une entreprise conjointe, chaque participant à l'accord peut jouer un rôle qui lui est propre. Un ou plusieurs d'entre eux peuvent jouer un rôle dominant de chef de file. Il peut y avoir des conflits et des rivalités internes, voire des tricheries, mais aucun de ces éléments n'empêche un tel arrangement de constituer un accord ou une pratique concertée au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité lorsque les parties s'entendent en vue d'un objectif unique, commun et permanent.

(427) Le simple fait que chaque participant à l'entente puisse jouer un rôle qui lui est propre n'exclut pas sa responsabilité pour l'infraction dans son ensemble, y compris les actes commis par les autres participants, mais qui partagent le même objectif illicite et le même effet anticoncurrentiel. Une entreprise participant à une telle infraction par des comportements qui contribuent à atteindre cet objectif commun est également responsable, pour toute la période de sa participation à ce système commun, des comportements d'autres entreprises dans le cadre de la même infraction. Tel est, en toute hypothèse, le cas lorsqu'il est établi que l'entreprise en question connaissait les comportements illicites des autres participants ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir ou en avoir connaissance et qu'elle était prête à en accepter le risque (386).

2.2. Nature de l'infraction en l'espèce

(428) Dans le présent cas, la Commission constate qu'entre les années 1992 et 1998, les représentants des entreprises BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc sont entrés en contact à diverses reprises, ont conclu des accords et ont participé à des pratiques concertées restrictives de concurrence, affectant leurs comportements respectifs sur le marché des plaques en plâtre, au minimum en Allemagne, France, Benelux et Royaume-Uni, ces comportements étant les manifestations d'un accord complexe et continu au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(429) Il importe tout d'abord de constater ce qui suit :

- les représentants de BPB et Knauf se sont rencontrés à Londres en 1992 et ont exprimé la volonté commune de stabiliser les marchés allemand, français, britannique et Benelux des plaques en plâtre ;

- les représentants de BPB et Knauf ont mis en place, à partir de 1992, des systèmes d'échange d'informations, auxquels Lafarge et ensuite Gyproc ont adhéré, portant sur leurs volumes de ventes sur les marchés allemand, français, britannique et Benelux des plaques en plâtre ;

- les représentants de BPB, Knauf et Lafarge se sont, à diverses reprises, informés réciproquement à l'avance des hausses de prix sur le marché britannique ;

- faisant face à des développements particuliers du marché allemand, les représentants de BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont rencontrés à Versailles en 1996, à Bruxelles en 1997 et à La Haye en 1998 en vue de se répartir ou tout au moins de stabiliser le marché allemand ;

- les représentants de BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont informés réciproquement, à diverses reprises et se sont concertés sur l'application de hausses de prix sur le marché allemand entre 1996 et 1998.

(430) La conjonction de ces divers éléments permet d'affirmer que les entreprises concurrentes étaient animées, sans discontinuer à partir de 1992 et jusqu'en 1998, d'une volonté commune de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens. En d'autres mots, les parties visaient à atténuer la concurrence entre les principaux opérateurs sur les marchés, les divers comportements relevés par la Commission étant les manifestations de cette volonté commune qui, par son objet, constitue une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(431) La Commission considère qu'entre 1992 et 1998, BPB, Knauf, Lafarge et dans une moindre mesure (387), Gyproc, ont, par leur adhésion à diverses manifestations à caractère anticoncurrentiel, que ces manifestations aient été menées au niveau des quatre grands marchés européens ou bien à des niveaux plus locaux et qu'elles aient pris la forme d'accords et/ou de pratiques concertées, participé à la commission d'une infraction unique, complexe et continue à l'article 81, paragraphe 1, du traité, sur le marché des plaques en plâtre.

(432) Ces différentes manifestations apparaissent, par ailleurs, clairement complémentaires compte tenu du fonctionnement du marché des plaques en plâtre. L'amélioration de la situation économique des entreprises par le biais d'une augmentation des prix rendait nécessaire une coordination de ces entreprises au niveau des parts de marché. Comme le reconnaissent les entreprises concurrentes à de nombreuses reprises, pour qu'une hausse de prix soit réussie, il était nécessaire que les concurrents soient satisfaits de la part de marché qu'ils détenaient. Il fallait en effet éviter que les hausses de prix soient utilisées par une des entreprises concurrentes pour gagner des parts de marché. Les différents éléments de l'infraction unique se complètent donc parfaitement, cette complémentarité témoignant également de l'identité d'objet des diverses manifestations de cette infraction.

(433) A cet égard, la Commission se réfère à l'arrêt du Tribunal de première instance dans l'affaire Rhône Poulenc (388). Dans cette affaire, le Tribunal a relevé, dans un cas où les différentes pratiques concertées observées et les différents accords conclus s'inscrivaient, en raison de leur identité d'objet, dans une série d'efforts des entreprises en cause poursuivant un seul but économique, à savoir fausser l'évolution normale des prix sur le marché du polypropylène, qu'il serait artificiel de subdiviser ce comportement continu, caractérisé par une seule finalité, en y voyant plusieurs infractions distinctes. En effet, les parties ont pris part, pendant des années, à un système intégré de systèmes qui constituent une infraction unique qui s'est progressivement concrétisée tant par des accords que par des pratiques concertées illicites.

(434) Compte tenu de ce qui vient d'être exposé, la Commission considère qu'il a existé, entre 1992 et 1998 au minimum sur les quatre grands marchés européens des plaques en plâtre, un accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence entre les destinataires de la présente décision, à savoir BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc.

(435) A cet effet, la Commission souhaite également souligner qu'il n'est pas exclu que d'autres manifestations de cet accord complexe qui existait à l'époque aient eu lieu. Elle ne dispose toutefois pas de preuve ou de preuve suffisante pour établir l'existence de ces faits.

(436) Les diverses manifestations de cet accord complexe continu, qui ont été constatées par la Commission, sont examinées aux considérants (437) et suivants.

(437) Lorsque les représentants des entreprises BPB et Knauf ont décidé de se rencontrer à Londres en 1992, la situation sur le marché européen des plaques en plâtres était d'une gravité telle que ces derniers ont échangé des considérations à ce propos. Ni l'existence de la réunion, ni la teneur des propos échangés ne font vraiment l'objet de contestations par ces deux entreprises. BPB a tout d'abord affirmé que BPB et Knauf " sont tombés d'accord qu'il était de l'intérêt de BPB, Knauf et de l'industrie tout entière (y inclus, finalement, les intérêts de consommateurs) de mettre fin à la ruineuse guerre des prix et que les producteurs s'efforcent d'être en concurrence à des niveaux économiques plus viables " (389). BPB a ensuite précisé, d'une part, que M. [A, BPB] et [MM. B et C, Knauf] ont exprimé des opinions similaires concernant le besoin de producteurs d'ajuster leurs objectifs stratégiques contradictoires concernant les parts de marché, mais que, d'autre part, M. [A] avait déclaré ne pas s'être mis d'accord lors de cette réunion avec [MM. B et C] expressément ou implicitement, que BPB et Knauf s'efforceraient collectivement effectivement de mettre fin à la guerre des prix, d'augmenter les prix ou de fixer les parts de marché. Knauf a, pour sa part, affirmé qu'il y avait eu des appels à la raison commerciale : " que la concurrence entre les parties ne pouvait pas continuer dans la durée dans ces conditions ruineuses et que par conséquent la guerre des prix devait prendre fin était si clair à ce moment que l'expression d'une compréhension commune avait la valeur d'un discours de politicien du dimanche " (390). Il faut souligner que BPB ne conteste pas que cette réunion, parmi d'autres facteurs, ait pu contribuer à l'accélération de la fin de la guerre des prix sur le marché (391).

(438) Si les parties contestent qu'un accord formel ait été conclu à Londres (392), il n'en est pas moins certain que les deux entreprises concurrentes s'y sont rencontrées et qu'elles ont échangé des considérations sur la situation concurrentielle sur le marché des plaques en plâtre tel qu'il vient d'être exposé. En outre, il ressort clairement de leurs déclarations qu'une convergence de vues a été exprimée concernant la nécessité de modifier leur comportement sur le marché. En effet, l'objectif était de sortir d'une situation où les stratégies, totalement antagonistes, s'étaient traduites par un bouleversement complet de la structure du marché et une guerre des prix menée en vue de gagner des parts de marché. Les stratégies convergentes des deux entreprises n'étaient plus, à partir de la réunion de Londres, d'entrer sur des marchés, de prendre des parts aux concurrents, voire de faire disparaître ces concurrents. Il leur importait de sortir de la guerre des prix et d'assurer une situation de statu quo sur le marché.

(439) La Commission considère dès lors qu'il ressort des déclarations de BPB et Knauf que lors de la réunion de Londres en 1992, BPB et Knauf se sont informés qu'ils partageaient la même opinion sur la situation du marché et se sont mutuellement informés qu'ils jugeaient nécessaire une modification du comportement des producteurs en vue d'un ajustement de leurs objectifs. Si les parties contestent avoir été jusqu'à la réalisation d'une convention proprement dite, BPB et Knauf ont, au cours de cette réunion, eu des contacts directs qui avaient manifestement pour objet ou pour effet d'influencer leur comportement sur le marché. BPB a d'ailleurs expressément reconnu que les contacts entre concurrents ayant eu lieu lors de cette réunion étaient interdits et que ces contacts peuvent être qualifiés de pratiques concertées (393).

(440) Il est de jurisprudence constante que pour qu'il y ait accord, au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, il suffit que les entreprises en cause aient exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché de manière déterminée. Tel est le cas lorsqu'il existe entre plusieurs entreprises un gentlemen's agreement représentant la fidèle expression d'une volonté commune et portant sur une restriction de concurrence. Dans ces circonstances, il est sans pertinence d'examiner si les entreprises se sont considérées comme tenues - juridiquement, factuellement ou moralement - d'adopter le comportement convenu entre elles (394).

(441) La Commission considère, dès lors, que ces contacts doivent être qualifiés d'accord au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, les éléments constitutifs de l'accord étant réunis conformément à la jurisprudence en la matière. Le fait que l'accord était plutôt un accord sur le principe et ne réglait pas tous les détails envisageables est sans pertinence. En effet, comme il ressort des déclarations de BPB et Knauf, en réalité ces contacts de Londres constituent la première manifestation pratique, peut-être encore vague dans sa formulation, de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(442) Il ressort également des déclarations de BPB et Knauf que, soit lors de cette réunion de Londres (395), soit peu après (396), ils se sont mis d'accord pour échanger des informations portant sur leurs volumes de ventes sur les quatre principaux marchés européens et que cet échange de données a continué jusqu'en 1998. La Commission détient de nombreuses preuves directes des échanges dont la réalité n'est d'ailleurs pas contestée par les parties. BPB, Knauf et ensuite Lafarge ont échangé des données individualisées lors de conversations téléphoniques ou par courrier adressé au domicile privé des [représentants de haut niveau], avec une régularité croissante dans le temps (rythme successivement annuel, puis semestriel et enfin trimestriel). Il importe également de souligner qu'il semble que des tricheries aient eu lieu dans le cadre de cet échange d'informations.

(443) Aux dires de BPB, le but de l'échange d'informations avec Knauf était initialement de fournir une base pour évaluer s'il y avait un "nouvel état d'esprit dans l'industrie". BPB affirme en outre "qu'un tel échange d'informations à haut niveau fournirait un degré d'assurance mutuelle que la guerre des prix prenait fin " (397). BPB soutient toutefois que si les " échanges [M. A, BPB] " avaient un lien avec la discussion de Londres et la fin de la guerre des prix, les " échanges [M. D, BPB] " étaient de nature et d'objet différents, à savoir un simple échange d'informations sans autre finalité qu'une simple connaissance du marché. Comme la Commission l'a préalablement exposé (398), elle ne peut faire droit à cette réinterprétation des faits. En outre, il importe de souligner que BPB est la seule partie à invoquer la modification de l'objectif de l'échange.

(444) Divers éléments justifient la position de la Commission selon laquelle BPB et Knauf ont conclu un accord mettant en place un système d'échange de renseignements anticoncurrentiel afin d'assurer la surveillance du marché et d'éviter, de cette manière, toute concurrence jugée trop agressive par les parties sur les quatre grands marchés européens.

(445) Tout d'abord, la Commission souligne le fait que cet échange a été mis en place entre les deux concurrents, à savoir BPB et Knauf, qui avaient exprimé lors de la réunion de Londres, la volonté commune de mettre un terme à la guerre des prix les opposant. La Commission souligne ensuite l'existence des deux affirmations de BPB concernant l'objectif initial de l'échange de renseignements. En outre, il ressort des déclarations de Knauf que cet échange avait pour objectif d'établir la transparence sur le marché, dans une forme directe par un échange de chiffres individualisés, et qu'il était un instrument d'information interne pour évaluer le volume du marché de manière à peu près fiable, permettant une planification de plusieurs paramètres (notamment les stocks de matières premières) (399). D'autre part, il ressort des faits que les concurrents ont échangé des données individualisées pendant presque sept ans, à un rythme annuel, devenu semestriel en 1993 et ensuite trimestriel entre 1995 et 1998, de manière multilatérale et par téléphone ou par courrier envoyé au domicile privé des personnes intéressées.

(446) Le fait que les données échangées aient été " historiques " ne suffit pas pour écarter la possibilité que ce système d'échange de données ait permis l'existence d'un contrôle mutuel par les parties à cet échange. Dans l'affaire Poutrelles, le tribunal a constaté que le contrôle mutuel s'opérait par référence aux chiffres du passé, les parties tendant au maintien du " flux traditionnel " des échanges. Ce faisant, cet échange tendait donc au cloisonnement des marchés par référence aux flux traditionnels (400). Lors de la fixation de l'amende, le Tribunal a considéré qu'un échange d'informations sur des quantités passées était analogue à une répartition des marchés (401). En effet, la seule explication plausible d'un échange d'informations qui se veut, comme en l'espèce, secret et qui se base sur des chiffres n'ayant pas une grande valeur pour définir une stratégie pour l'avenir, est qu'il y a, entre les parties, un accord tacite de respecter les flux traditionnels.

(447) L'argument de certaines des parties selon lequel le système ne pouvait pas servir de système de surveillance, notamment parce que les données échangées n'étaient pas effectivement utilisées, n'est pas pertinent (402). A cet égard, la Commission souligne tout d'abord que Knauf a déclaré utiliser les données dans sa planification et que, par conséquent, cette dernière utilisait les données échangées activement.

(448) En outre, comme la Commission vient de le démontrer, le système avait pour objet la surveillance du marché, ce qui implique que la seule connaissance des parts de marché des concurrents suffit pour que le système atteigne cet objectif. En effet, chaque entreprise se savait surveillée de près par ses concurrents et pouvait, le cas échéant, réagir au comportement de ceux-ci si cela s'avérait nécessaire pour faire respecter la volonté commune de restreindre la concurrence. Il s'ensuit dès lors que les informations reçues par les entreprises dans le cadre de cet échange étaient capables d'influencer leur comportement de façon sensible (403). A cet égard, il faut souligner que, compte tenu notamment de la structure très concentrée du marché et de sa transparence, un engagement en matière de volumes équivalait à renoncer à une concurrence agressive. Le fait de devoir communiquer toute percée aurait en effet déclenché une riposte immédiate et ciblée des concurrents qui aurait frustré l'effort entrepris.

(449) Par ailleurs, la Commission souligne que la jurisprudence a confirmé le caractère particulièrement nuisible de tout échange d'informations dans le cadre d'un marché oligopolistique (404). En effet, un échange d'informations constitue en lui-même une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité s'il permet de violer l'exigence d'autonomie selon laquelle tout opérateur sur le marché doit définir son comportement sur le marché de manière autonome. Or, cette exigence d'autonomie sera sans aucun doute affectée si l'échange a lieu dans un marché très concentré et s'il remet en cause le risque d'incertitude de l'opérateur commercial.

(450) Ces deux conditions sont manifestement remplies en l'espèce dans la mesure où il s'agit d'un marché oligopolistique (405) et où l'incertitude a disparu depuis qu'à Londres, les parties se sont mises d'accord pour mettre un terme à l'agressivité régnant sur le marché, cette volonté étant en outre manifestée à diverses reprises sur les marchés concernés. La Commission considère dès lors que le système constitue une infraction à l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(451) Finalement, le fait que les parties aient, à certains moments, sciemment échangé des données incorrectes, confirme que cet échange était effectivement utilisé comme mécanisme de surveillance (406) et ne porte pas atteinte au caractère anticoncurrentiel de l'échange. A cet égard, il faut souligner que selon une jurisprudence constante, le fait qu'une entreprise ne respecte pas les engagements convenus n'est pas de nature à infirmer le caractère anticoncurrentiel du comportement et dès lors, la participation de l'entreprise intéressée à l'entente (407).

(452) Cet ensemble d'indices permet à la Commission d'affirmer que l'accord de Londres portant sur l'échange de données initié en 1992, tel qu'il a continué jusqu'en 1998, avait pour objectif de permettre à ses participants de surveiller le comportement de leurs concurrents au moins sur les marchés concernés et constitue une manifestation de la volonté commune des parties de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre sur les quatre grands marchés européens. Ce faisant, la Commission qualifie cet accord de restrictif de concurrence au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, comme étant une manifestation particulière de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(453) Dans l'hypothèse où ce système devrait être qualifié de pratique concertée, la Commission considère que, compte tenu des éléments exposés, il doit être considéré que cette pratique avait pour objectif de permettre à ses participants de surveiller le comportement de leurs concurrents et ce, au moins, sur les quatre grands marchés concernés.

(454) En outre, il importe de souligner qu'il est de jurisprudence constante qu'il y a lieu de présumer que, sous réserve de la preuve contraire qu'il incombe aux opérateurs intéressés de fournir, les entreprises participant à la concertation et qui demeurent actives sur le marché tiennent compte des informations échangées avec leurs concurrents pour déterminer leur comportement sur ce marché. De plus, il ressort de la jurisprudence qu'une pratique concertée relève de l'article 81, paragraphe 1, du traité, même en l'absence d'effets anticoncurrentiels sur le marché. D'abord, il découle du texte même de ladite disposition que, comme dans le cas des accords entre entreprises et des décisions d'associations d'entreprises, les pratiques concertées sont interdites, indépendamment de tout effet, lorsqu'elles ont un objet anticoncurrentiel. Ensuite, si la notion même de pratique concertée présuppose un comportement des entreprises participantes sur le marché, elle n'implique pas nécessairement que ce comportement produise l'effet concret de restreindre, d'empêcher ou de fausser la concurrence (408).

(455) En ce qui concerne la participation de Lafarge à cet accord, la Commission constate l'existence de divers éléments lui permettant d'établir que Lafarge savait ou aurait dû savoir qu'en prenant part à cet échange, il adhérait à un échange dont l'objectif n'était pas seulement l'échange de données individualisées fiables mais qu'un tel échange servait de mécanisme de surveillance du marché (409).

(456) Dans ces conditions, la Commission conclut que Lafarge a adhéré dès le milieu de 1992 à l'accord de Londres portant sur l'échange d'informations entre [représentants de haut niveau] sur les quatre marchés principaux. L'argument de Lafarge selon lequel il n'aurait pas pu adhérer à un tel accord, l'existence de cet accord n'étant pas établie, n'est pas pertinent, la Commission ayant établi à bon droit son existence.

(457) En ce qui concerne l'adhésion de Gyproc à l'accord portant sur l'échange d'informations initié à Londres, en 1992, par BPB et Knauf, auquel Lafarge a adhéré au milieu de 1992, la Commission constate l'existence de divers éléments lui permettant d'établir que Gyproc savait ou à tout le moins aurait dû savoir que les comportements anticoncurrentiels auxquels il prenait part s'étendaient au-delà du marché allemand (410).

(458) Dans ces conditions, la Commission considère que Gyproc a adhéré à l'accord mettant en place le système d'échange d'informations sur les volumes de ventes sur les quatre principaux marchés européens à partir de la réunion de Versailles de juin 1996.

(459) Quant à l'échange d'informations sur les volumes et parts de marché portant spécifiquement sur le marché britannique, la Commission constate qu'à partir de 1992, BPB, Knauf et Lafarge ont mis en place un système d'échange d'informations d'une durée de sept ans et dont le caractère systématique et détaillé découle des pièces du dossier (411). Il ressort des circonstances de fait, à savoir notamment du fait que les instructions de mettre en place ce système d'échange ont été données rapidement après la réunion de Londres, que les entreprises impliquées sont les mêmes que celles impliquées dans l'échange initié à Londres et que des tricheries ont eu lieu, que ce système d'échange de renseignements avait un objet identique à celui initié à Londres, à savoir la surveillance du marché. Par ailleurs, il n'y a aucune raison pour supposer que l'échange sur le marché britannique, similaire et même plus régulier que l'échange mené au niveau des quatre marchés européens, avait un objet ou un effet différent de ce dernier.

(460) Dans ces conditions, l'affirmation que les données échangées n'auraient pas été utilisées n'est pas un élément pertinent pour établir que l'échange ne pouvait remplir un rôle de surveillance et ce, pour les mêmes raisons que celles qui ont déjà été exposées (412).

(461) La Commission conclut dès lors que cet échange doit être qualifié de pratique concertée au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité en ce qu'il constitue des prises de contacts entre concurrents de nature à influencer leur comportement sur le marché et qu'il constitue une manifestation particulière de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(462) Quant à la rencontre qui s'est déroulée à Versailles entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc en 1996, et aux rencontres de Bruxelles en 1997 et de La Haye en 1998, elles s'inscrivent dans le contexte général de stabiliser les marchés et, ce faisant, de restreindre la concurrence et en constitue une manifestation régionale plus poussée liée à la situation du marché allemand à l'époque. A cet égard, il faut souligner qu'au cours de ces réunions, les entreprises concurrentes ont échangé des données sur leurs parts de marché en vue de parvenir à un accord sur la répartition du marché allemand (413). Il ressort des faits qu'un des éléments spécifiques au marché allemand en 1996 était la construction de nouvelles usines par tous les producteurs et le développement d'importations depuis l'Europe de l'Est qui étaient de nature à pouvoir entraîner de profonds bouleversements sur le marché allemand et à provoquer une nouvelle guerre des prix comme celle qui avait existé en 1992 (414). Un autre élément spécifique à ce marché était notamment le fait que BPB et Knauf ressentaient le comportement de Gyproc, détenant une part de marché significative sur le marché allemand, comme particulièrement agressif (415).

(463) A l'occasion de la rencontre de Versailles, BPB, Knauf, Lafarge ont exprimé le souhait de s'en tenir aux parts de marché qu'ils détenaient sur le marché allemand et ont tenté de conclure un accord à ce propos avec Gyproc qui a refusé la part de marché qu'on voulait lui attribuer, tout en acceptant le principe d'un partage de marché. Lors de cette réunion, les concurrents ont échangé des informations relatives à leur situation sur le marché allemand ainsi qu'ultérieurement, au cours des réunions de Bruxelles et de La Haye concernant le rachat d'Opole.

(464) En ce qui concerne sa participation aux discussions qui ont eu lieu lors de la réunion de Versailles, Knauf soutient qu'elle a été surprise par le contenu de ces discussions et notamment par le fait qu'elles aient concerné la répartition du marché allemand entre les concurrents. A cet égard, la Commission rappelle qu'il est de jurisprudence constante que, dès lors qu'une entreprise participe à des réunions entre entreprises ayant un objet anticoncurrentiel et qu'elle ne se distancie pas publiquement du contenu de celles-ci, donnant ainsi à penser aux autres participants qu'elle souscrit au résultat des réunions et qu'elle s'y conformera, il peut être considéré comme établi qu'elle participe à l'entente résultant desdites réunions (416).

(465) Quand bien même les discussions qui ont eu lieu à Versailles et dans le cadre des discussions sur le rachat de l'usine d'Opole n'auraient pas donné lieu à la conclusion d'un accord, il n'en demeure pas moins que la Commission peut constater que BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc se sont concertés à diverses reprises sur la répartition du marché allemand en vue de se le répartir et de tout au moins le stabiliser, objectif qu'ils poursuivaient de manière générale sur les quatre grands marchés européens. Il ressort en effet des circonstances de fait et des contacts existant déjà à l'époque entre les parties que même si elles ne sont pas arrivées à la conclusion d'un accord spécifique portant sur la répartition entre elles du marché allemand, elles ont exprimé à nouveau à cette occasion leur volonté commune de se comporter sur ce marché de manière déterminée, à savoir restreindre la concurrence. L'existence de cette volonté commune se trouve encore confirmée, si besoin est, par les termes d'une déclaration de M. [E, Gyproc] selon lesquels : " l'accord ne fonctionnait pas bien " et " les concurrents se sont réunis à Bruxelles pour discuter à nouveau de la stabilisation du marché allemand " (417).

(466) Par ailleurs, BPB, Knauf et Lafarge se sont mutuellement indiquées lors de la réunion de Versailles les parts de marché avec lesquelles elles seraient d'accord et que ces parts de marché correspondaient aux parts que ces entreprises détenaient effectivement. Or, ce dévoilement réciproque de leurs intentions est à l'évidence anti-concurrentiel car contraire à l'exigence d'autonomie des opérateurs économiques, qui s'oppose rigoureusement à toute prise de contact directe ou indirecte entre de tels opérateurs ayant pour objet ou pour effet soit d'influencer le comportement sur le marché d'un concurrent actuel ou potentiel, soit de dévoiler à un tel concurrent le comportement que l'on est décidé à, ou que l'on envisage de, tenir soi-même sur le marché. D'ailleurs, le fait même d'indiquer ne pas souhaiter une part de marché supérieure à celle déjà détenue suffit pour une entreprise à informer ses concurrents sur un élément essentiel de sa stratégie.

(467) Il faut souligner que contrairement à ce que prétendent certaines parties, les faits évoqués par la Commission ne sauraient être qualifiés de simple tentative d'accord, avec pour conséquence qu'on ne peut en déduire un comportement anticoncurrentiel dans leur chef. En effet, en l'espèce, à travers les diverses réunions auxquelles les participants étaient présents, les entreprises concurrentes ont instauré un processus continu de " diplomatie " commerciale visant à concilier leurs intérêts respectifs, notamment sur le marché allemand. La question des parts de marché sur le marché allemand est devenue un sujet constant de discussion et il apparaît que les entreprises n'osaient pas viser une part plus importante de marché sans en discuter avec leurs concurrents (418).

(468) A cet égard, la Commission se réfère au jugement du Tribunal de première instance dans l'affaire HFB. Dans cette affaire, le Tribunal commence par déclarer que les faits invoqués ne peuvent être qualifiés de simples tentatives d'accord. Le Tribunal déclare ensuite qu'il ressort de la succession de réunions au cours desquels les parties ont discuté de la répartition des parts de marchés, qu'au moins à un certain moment, les entreprises ont exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d'une manière déterminée et qu'il doit dès lors être constaté que, même s'il n'a pas existé un accord portant sur tous les éléments qui faisaient l'objet des négociations, une volonté commune de restreindre la concurrence a régi ces négociations (419).

(469) La Commission conclut dès lors que même si BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc n'ont pas effectivement conclu un accord portant sur la répartition des parts de marché en Allemagne, ils ont une nouvelle fois, et Gyproc pour la première fois à cette occasion, exprimé leur volonté commune de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre. La Commission considère dès lors qu'un accord a été conclu entre les parties, ces dernières tendant à se répartir le marché allemand ou à tout le moins à le stabiliser, cet accord constituant une manifestation particulière de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(470) En ce qui concerne l'échange de données sur les volumes de ventes qui s'est déroulé sur le marché allemand à partir de la réunion de Versailles ainsi que le " système [M. U, consultant indépendant] " mis sur pied par les parties en octobre/novembre 1996, la Commission constate qu'ils constituent également une manifestation de la volonté commune des parties de stabiliser le marché et de restreindre la concurrence, cette manifestation particulière étant justifiée par les développements particuliers du marché allemand. Il est en effet inconcevable que, compte tenu de l'ensemble des manifestations par les parties de leur volonté commune de stabiliser le marché européen et en particulier le marché allemand - cette volonté ayant été réaffirmée lors des réunions de Versailles et des discussions sur Opole -, cet échange d'informations n'ait pas, d'une manière ou d'une autre, servi leurs intentions. L'existence d'un lien apparent entre l'échange d'informations et la volonté des parties de stabiliser le marché a d'ailleurs été confirmée (420). La Commission conclut dès lors à l'existence d'une pratique concertée constituant une manifestation particulière de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(471) La Commission constate également l'existence d'un échange de données relatives aux hausses de prix entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc sur le marché allemand. Il ressort des faits que les quatre producteurs se sont mutuellement informés, à compter de la hausse des prix de février 1995 et jusqu'aux inspections de la Commission, au moins à certaines occasions, de leurs intentions concernant la date et le niveau des hausses envisagées. Cet état de fait doit être également envisagé dans le contexte de l'époque qui, faut-il le rappeler, était caractérisé par un ensemble de manifestations anticoncurrentielles relevant d'une volonté commune des concurrents de stabiliser le marché des plaques en plâtre dans les quatre grands marchés européens.

(472) Certaines parties ont reconnu s'être, au moins à certaines occasions, mutuellement informées de leurs intentions sur les dates et les hausses de prix. Toutefois, il n'en est pas moins vrai que même si l'augmentation du prix (ou le prix lui-même) n'était pas toujours décidée à l'avance, et même si l'information n'était pas toujours entièrement mutuelle (ce qui signifie que tous les concurrents ne communiquaient pas toujours directement aux autres leurs hausses de prix), le fait que les leaders sur le marché concerné aient informé leurs concurrents de leurs intentions, et ce au moins à diverses occasions, ne révèle pas un comportement purement unilatéral. La jurisprudence admet en effet que la condition de réciprocité d'une pratique concertée est satisfaite lorsque la divulgation, par un concurrent à un autre de ses intentions ou de son comportement futur sur le marché, a été sollicitée ou, à tout le moins, a été acceptée par le second (421). La Commission en conclut que la transmission continue de l'information par le leader en matière de prix, sans réaction contraire de la part des concurrents, respecte la condition de réciprocité.

(473) A cet égard, il faut également souligner que le Tribunal de première instance a considéré que dans une espèce où il y a eu des contacts directs entre les concurrents, l'entreprise qui se limite à la seule réception d'informations relatives au comportement futur de ses concurrents sur le marché a non seulement poursuivi le but d'éliminer par avance l'incertitude relative au comportement futur de ses concurrents, mais a dû nécessairement prendre en compte, directement ou indirectement, les informations obtenues pour déterminer la politique qu'elle entendait suivre sur le marché (422).

(474) Concernant le fait que les informations sur les prix transmises étaient connues par les clients de l'entreprise concernée avant leur communication aux concurrents et que, de ce fait, les informations dévoilées auraient déjà pu être collectées sur le marché par ces derniers, le Tribunal a retenu que cet argument n'avait aucune incidence pour les raisons suivantes : en premier lieu, à supposer que le leader en matière de prix communique de manière préalable et régulière les prix qu'il a l'intention de pratiquer, ce fait n'implique pas que, à ce moment, ces prix constituent une donnée objective du marché, repérable de façon immédiate. En deuxième lieu, les participants avaient connaissance de ces informations de façon plus simple, rapide et directe que par le biais du marché. En troisième lieu enfin, la participation systématique des entreprises aux réunions leur permettait de créer un climat de certitude mutuelle quant à leurs politiques futures de prix (423).

(475) Par conséquent, la Commission conclut qu'en l'espèce, le système d'échange de données relatives aux hausses de prix entre BPB, Knauf, Lafarge et Gyproc sur le marché allemand constitue une pratique concertée s'inscrivant dans le cadre général de la volonté commune des parties de stabiliser le marché et constituant une manifestation particulière de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

(476) En ce qui concerne l'échange de données sur les hausses des prix sur le marché britannique, la Commission conclut à l'existence de contacts admis par BPB, Knauf et Lafarge qui ont accompagné certaines hausses de prix. Elle constate également que, tout comme sur le marché allemand, ces hausses ont été coordonnées quant à leurs modalités (424). La Commission analyse dès lors ces échanges sur la base des principes déjà exposés.

(477) En outre, compte tenu de l'existence simultanée sur le marché britannique de diverses manifestations anticoncurrentielles entre BPB, Knauf et Lafarge, à savoir l'échange de renseignements au niveau des [représentants de haut niveau], l'échange organisé au niveau des filiales et l'échange de données sur les hausses de prix, la Commission conclut que cet échange de données ne peut être examiné en dehors du contexte existant. A cet égard, l'existence d'une concertation sur les hausses de prix sur le marché allemand pendant la même période confirme que l'échange britannique n'était pas un acte isolé, mais qu'il s'inscrivait dans une stratégie nécessairement plus large. Dans ces conditions, la Commission considère qu'il constitue une pratique concertée s'inscrivant dans les manifestations particulières de l'accord complexe continu ayant pour objet de restreindre la concurrence sur le marché des plaques en plâtre au minimum sur les quatre grands marchés européens.

2.3. Restriction de la concurrence

(478) L'article 81, paragraphe 1, du traité mentionne expressément comme accords restreignant la concurrence ceux qui consistent à :

- fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction;

- limiter ou contrôler la production, les débouchés ou le développement technique;

- répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement.

(479) Comme la Commission l'a exposé précédemment (425), l'ensemble des accords et pratiques concertées du cas d'espèce s'inscrivent dans une série d'efforts des entreprises en cause poursuivant un seul but économique, à savoir la restriction de la concurrence et constituent les diverses manifestations d'un accord complexe continu qui a eu pour objet et pour effet de restreindre la concurrence. Compte tenu du fait que les accords et pratiques concertées précités ont concrétisé, de manière ininterrompue depuis 1992 et jusqu'à 1998, la manifestation de la volonté commune des parties de stabiliser et, partant, de restreindre la concurrence au moins sur les marchés allemand, français, britannique et Benelux des plaques en plâtre, la Commission qualifie l'infraction d'unique, complexe et continue.

(480) Par ailleurs, compte tenu de l'objet manifestement anticoncurrentiel de l'infraction unique, complexe et continue, point n'est besoin de démontrer un effet négatif sur la concurrence.

(481) En outre, l'existence de l'objet anticoncurrentiel de l'infraction permet à la Commission d'affirmer que l'intention et la motivation de chaque entreprise pour avoir organisé ou pris part aux échanges d'informations sont des éléments sans pertinence. A cet égard, la Commission se réfère à la jurisprudence qui dispose que pour déterminer si un accord a pour objet de restreindre la concurrence, il n'est pas nécessaire de savoir lequel des deux contractants a pu prendre l'initiative d'insérer telle ou telle clause ou de vérifier si les parties ont eu une intention commune au moment de la conclusion de l'accord. Il s'agit, par contre, d'examiner les buts poursuivis par l'accord en tant que tel, à la lumière du contexte économique dans lequel l'accord doit être appliqué (426).

2.4. Effet sur le commerce entre États membres

(482) L'article 81, paragraphe 1, du traité vise les accords qui sont susceptibles d'entraver la réalisation d'un marché unique entre les États membres, que ce soit en scindant les marchés nationaux ou en affectant la structure de la concurrence à l'intérieur du Marché commun.

(483) Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de justice qu'un accord, "pour être susceptible d'affecter le commerce entre États membres, sur la base d'un ensemble d'éléments objectifs de droit et de fait, doit permettre d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'il puisse exercer une influence directe et indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d'échange entre États" (427). En tout état de cause, l'article 81, paragraphe 1, du traité n'exige pas que les accords mentionnés dans cette disposition aient réellement affecté le commerce entre États membres, mais plutôt qu'il soit établi que les accords sont capables d'avoir cet effet (428).

(484) Le marché des plaques en plâtre est caractérisé par un volume substantiel d'échanges entre les États membres. Il est significatif que les producteurs s'approvisionnent pour leurs propres besoins sans tenir compte des barrières nationales, tout en essayant de contrôler ou d'empêcher un négoce "parallèle" du produit. Toutefois, l'application de l'article 81, paragraphe 1, du traité à des ententes n'est pas limitée à la partie des ventes des participants qui implique le transfert de biens d'un État à un autre. De même, pour que cette disposition s'applique, point n'est besoin de démontrer que le comportement individuel de chaque participant, par rapport à l'ensemble de l'entente, a un effet sensible sur le commerce entre États membres (429).

(485) En l'espèce, les ententes illicites ont couvert les échanges à l'intérieur des quatre principaux marchés de la Communauté dans cet important secteur industriel. L'existence d'arrangements collusoires ne pouvait qu'entraîner ou être susceptible d'entraîner le détournement automatique des courants d'échange du cours qu'ils auraient normalement suivi (430).

2.5. Durée de l'infraction unique

(486) La collusion a commencé au début de 1992 avec l'accord conclu à Londres entre Knauf et BPB, et élargi peu après pour inclure Lafarge au milieu de l'année 1992. Considérée comme une infraction unique, complexe et continue, l'infraction commise par ces entreprises a continué au moins jusqu'à la date des vérifications effectuées par la Commission à la fin de 1998.

(487) Aux fins du calcul de la durée de l'infraction, et bien que la date réelle de ladite réunion soit vraisemblablement antérieure, la Commission retient comme date de calcul le dernier jour du premier trimestre 1992. En effet, BPB indique qu'il est possible que les deux entreprises ne se soient pas accordées sur la mise en place de l'échange d'informations lors de la réunion initiale mais " plus tard en 1992, probablement aux environs du second trimestre 1992 ". La Commission en tire donc la conclusion que la réunion initiale a eu lieu auparavant, au premier trimestre et donc au plus tard le 31 mars 1992 et retient donc cette date du 31 mars 1992 comme date du début de l'infraction.

(488) En ce qui concerne Lafarge, la Commission retient comme date d'adhésion à l'infraction le milieu de 1992, à savoir au plus tard le 31 août 1992 (431).

(489) S'agissant de Gyproc, les preuves disponibles ne permettent pas de conclure à une participation active à la collusion engagée en 1992 par Knauf et BPB avant la réunion de Versailles les 5 et 6 juin 1996 (432). Toutefois, à partir de cette date, Gyproc savait ou aurait du savoir que BPB, Knauf et Lafarge entretenaient des relations anticoncurrentielles dont l'objet s'étendait au-delà du marché allemand (433).

(490) A cet égard, il est de jurisprudence constante qu'une entreprise peut être tenue pour responsable d'une entente globale même s'il est établi qu'elle n'a participé directement qu'à un ou plusieurs des éléments constitutifs de cette entente dès lors qu'elle savait ou devait nécessairement savoir, d'une part, que la collusion à laquelle elle participait s'inscrivait dans un plan global et, d'autre part, que ce plan global recouvrait l'ensemble des éléments constitutifs de l'entente (434). De même, une entreprise ayant participé à une infraction unique et complexe par des comportements qui lui étaient propres et qui visaient à contribuer à la réalisation de l'infraction dans son ensemble peut être également responsable des comportements mis en œuvre par d'autres entreprises dans le cadre de la même infraction pour toute la période de sa participation à ladite infraction, lorsqu'il est établi que l'entreprise en question connaissait les comportements infractionnels des autres participants ou qu'elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu'elle était prête à en accepter le risque. Une telle conclusion ne contredit pas le principe selon lequel la responsabilité pour de telles infractions a un caractère personnel et n'aboutit pas à négliger l'analyse individuelle des preuves à charge, au mépris des règles applicables en matière de preuve, ou à violer les droits de la défense des entreprises impliquées (435).

(491) La Commission retient par conséquent la responsabilité de Gyproc pour la commission de l'infraction unique, complexe et continue à partir du 6 juin 1996.

2.6. Responsabilité de l'infraction

2.6.1. Considérations générales

(492) Le sujet des règles de concurrence dans le traité est l'"entreprise", une notion qui n'est pas nécessairement identique à celle de personne morale en droit des sociétés ou en droit fiscal national. Le terme "entreprise" n'est pas défini dans le traité mais a été largement discuté dans la jurisprudence (436). Il peut désigner toute entité qui exerce une activité commerciale. Dans le cas d'une grande entreprise multinationale, la myriade de filiales, le réseau complexe de l'actionnariat et de la structure du capital ainsi que l'organisation, aux fins de gestion, des activités du groupe en divisions opérationnelles ou fonctionnelles distinctes ou en zones géographiques qui ne correspondent pas nécessairement à la structure de l'entreprise, peuvent créer des complications. Selon les circonstances, il peut être opportun de traiter comme destinataires concernés, aux fins de l'article 81 du traité, l'ensemble du groupe, des sous-groupes individuels ou des filiales.

2.6.2. BPB

(493) La décision est adressée à BPB directement impliquée dans l'infraction, sans que cette entreprise ait contesté son implication directe ni mis en avant des questions de structure qui devraient conduire la Commission à modifier son analyse à cet égard.

(494) Dans le cas de BPB, compte tenu de la participation active et personnelle à l'infraction des dirigeants du plus haut niveau, il est indiscutable que la décision doit être adressée à cette société. Le fait que le produit faisant l'objet de l'accord n'est que l'un des produits fabriqués par le groupe n'est pas déterminant, d'autant que les plaques en plâtre figurent parmi les principaux produits de BPB.

2.6.3. Knauf Westdeutsche Gipswerke

(495) Il est constant que Knauf a activement participé à tous les comportements anticoncurrentiels décrits dans la présente décision et que [des représentants de haut niveau] du groupe Knauf, MM. [B et C], ont été personnellement impliqués dans ces comportements.

(496) La décision est adressée à Knauf Westdeutsche Gipswerke, compte tenu de la structure particulière du groupe Knauf. En effet, la Commission n'est pas en mesure d'identifier une personne morale qui dirige le groupe de sociétés constituant l'entreprise. Dès lors, il n'y a pas une personne juridique qui, à sa tête, aurait pu, en tant que responsable de la coordination de l'action du groupe, se voir imputer les infractions commises par les diverses sociétés la composant.

(497) Or, Knauf Westdeutsche Gipswerke, dont MM. [B et C] sont [représentants de haut niveau], est la société la plus représentative de cette entreprise. En particulier, en ce qui concerne Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG dont la fonction est d'administrer d'autres sociétés du groupe Knauf, il faut noter que celle-ci dépend de Knauf Westdeutsche Gipswerke, tant pour ses locaux que pour son personnel, au moins en partie.

(498) Dans ces conditions, et afin d'éviter que des questions purement formelles ne puissent s'opposer à la constatation du comportement sur le marché des plaques en plâtres de Knauf aux fins de l'application des règles de concurrence, la Commission estime que Knauf Westdeutsche Gipswerke doit être tenue pour responsable de l'ensemble des agissements de Knauf. Par ailleurs, Knauf Westdeutsche Gipswerke ne s'est pas opposé au fait que la Commission lui ait été envoyé les griefs, qui pourtant établissaient que la Commission entendait la tenir pour responsable de l'ensemble des comportements de Knauf (437).

(499) La Commission considère (438) qu'en vue de l'éventuelle imposition d'une amende (voir la section 3.), le chiffre d'affaires à retenir aux fins de la présente décision est celui de l'" entreprise " au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, c'est-à-dire, en l'occurrence le chiffre d'affaires mondial réalisé par l'ensemble des sociétés du groupe Knauf, tel que communiqué (439) par Knauf à la Commission.

(500) Le fait que le produit faisant l'objet de l'accord n'est que l'un des produits fabriqués par le groupe n'est pas déterminant, d'autant que les plaques en plâtre figurent parmi les principaux produits de Knauf.

2.6.4. Lafarge

(501) La décision est adressée à Lafarge. Les activités plâtrières, dont les plaques en plâtre, sont l'une des cinq branches de Lafarge, constituée sous la forme juridique de Lafarge Plâtres International SA (440). En ce qui concerne son implication dans l'entente, force est de constater que Lafarge Plâtres International n'a pas agi de manière autonome par rapport à Lafarge.

(502) A cet égard, la Commission se réfère à la jurisprudence de la Cour dans l'affaire Stora selon laquelle en présence de la détention de la totalité du capital de la filiale, la Commission peut légitimement supposer que la société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale et que dans ces conditions, il incombe à la requérante de renverser cette présomption par des éléments de preuve suffisants (441).

(503) En l'espèce, il est incontestable que Lafarge Plâtres International SA est contrôlée à 99,99 % par Lafarge et que ses comptes sont consolidés dans ceux de Lafarge.

(504) La Commission constate en outre l'existence d'autres éléments renforçant la présomption visée au considérant (502). Tout d'abord, il ressort de la documentation commerciale que Lafarge Plâtres International SA est présentée comme la branche Plâtre de Lafarge (442). Par ailleurs, il importe de souligner que dans une déclaration communiquée à la Commission suite à l'audition, M. [G], ayant exercé les fonctions de [représentant de haut niveau] de Lafarge Plâtres International jusqu'en [...], se présente lui-même comme " [un représentant de haut niveau] de l'activité " plâtre " du groupe Lafarge " au cours de la période 1992-1998 objet de la présente procédure (443). Ensuite, il ressort des faits que M. [F], successeur de M. [G] en tant que [représentant de haut niveau] de Lafarge Plâtres International depuis [...] est [représentant de haut niveau] de Lafarge et qu'il a participé à des échanges de renseignements litigieux avec les entreprises concurrentes (444). Le fait qu'il n'ait exercé une double fonction que pendant une période limitée, qu'il n'ait pas participé à des réunions collusoires et qu'il ait mis un terme à cet échange après les vérifications exercées par la Commission ne constitue pas un élément qui permet d'affirmer que Lafarge Plâtres International était autonome vis-à-vis de Lafarge (445).

(505) Finalement, il ressort du dossier que BPB a, en 1992, contacté M. [J], exerçant les fonctions de [représentant de haut niveau] du groupe Lafarge entre 1989 et 1994 et ensuite les fonctions de [représentant de haut niveau] du groupe, en vue d'organiser l'échange d'informations (446). Cet état de fait n'est pas contesté par Lafarge qui se borne à indiquer que M. [J] n'a pas de souvenir d'une telle réunion (447), sans toutefois affirmer que M. [J] n'a jamais contacté BPB au sujet de cet échange d'informations. Il est donc incontestable que Lafarge exerçait une influence déterminante sur sa filiale Lafarge Plâtres International.

(506) Dans sa réponse à la communication des griefs adressée à Lafarge, Lafarge Plâtres International tente de renverser la présomption selon laquelle Lafarge exerçait effectivement une influence déterminante sur sa filiale Lafarge Plâtres International en soumettant à la Commission une lettre de M. [G] à M. [J] du 27 novembre 1997 (448). Or, ce courrier constitue en fait un dossier d'investissement présentant le projet d'acquisition des activités d'Opole, exposant les avantages et les inconvénients du projet et en recommandant l'acquisition à certaines conditions. Le simple fait que M. [G] adresse ce courrier à M. [J] démontre, à nouveau, si besoin est, la dépendance de la filiale par rapport à la société mère. En effet, l'existence de ce courrier apporte la preuve du rôle joué par la société mère dans la politique suivie par sa filiale.

(507) Il est donc incontestable que Lafarge Plâtres International est, tant juridiquement qu'économiquement, pleinement intégrée dans la structure de Lafarge.

(508) Dans ces conditions, la Commission peut dès lors, à bon droit, adresser la présente décision à Lafarge en ce qu'elle est responsable des agissements de sa filiale Lafarge Plâtres International.

(509) La Commission note que Lafarge déclare (449) être " une holding ", ayant " uniquement pour objet la prise et la gestion de participations dans d'autres sociétés. En tant que telle, elle ne dégage pas de chiffre d'affaires propre ". Dans ces circonstances, la Commission considère qu'en vue de l'éventuelle imposition d'une amende (voir la section 3.), le chiffre d'affaires à retenir aux fins de la présente décision est celui de l'" entreprise " au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, dirigée par Lafarge, cette entreprise ayant commis l'infraction. Le chiffre d'affaires de cette entreprise est constitué par le chiffre d'affaires mondial réalisé par l'ensemble des sociétés du groupe dirigé par Lafarge, tel que communiqué (450) par Lafarge à la Commission (451).

2.6.5. Gyproc

(510) Etex disposait d'une participation majoritaire dans le capital de Gyproc (54 %, contre 46 % détenus par BPB). Toutefois, la participation de [représentants de haut niveau] d'Etex, MM. [K] et [L], à des comportements visés par la présente décision n'est avérée que pour les réunions de Bruxelles de fin 1997 et de La Haye de mai 1998, auxquelles ils ont participé en leur qualité [de représentants de haut niveau] de Gyproc (452).

(511) BPB, quoique minoritaire, a pesé d'un poids important dans la commission de l'infraction par Gyproc, tant en raison des liens structurels (capital, marque commerciale et brevets) que du comportement propre des dirigeants de BPB, qui notamment profitaient de leur participation au conseil d'administration de Gyproc dans leur arrangements collusoires avec Knauf et Lafarge et disposaient d'une influence sur Gyproc. Toutefois, les dirigeants de Gyproc ont bénéficié d'une marge de manœuvre qui, si elle est difficile à évaluer, est toutefois non négligeable.

(512) Il faut souligner qu'en outre, Gyproc n'a pas fourni à la Commission d'éléments permettant d'exclure sa propre responsabilité et de rendre clairement responsable BPB ou Etex de ses agissements. Dans ces conditions, il est opportun de considérer Gyproc comme seule responsable de son comportement propre.

2.6.6. Etex

(513) La Commission considère que compte tenu des éléments dont elle dispose, la participation des dirigeants d'Etex à des comportements directement collusoires n'est avérée que pour les réunions de Bruxelles de fin 1997 et de La Haye de mai 1998. Cela étant, la Commission considère que ces éléments ne sont pas suffisants pour établir la participation d'Etex à l'infraction unique, complexe et continue. Etex n'est, par conséquent, pas destinataire de la présente décision.

3. MESURES CORRECTIVES

3.1. Article 3 du règlement n° 17

(514) Conformément à l'article 3 du règlement n° 17, si la Commission constate une infraction aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité, elle peut obliger les entreprises concernées à y mettre fin.

(515) En l'espèce, les membres de l'entente ont déployé des efforts considérables pour dissimuler leurs agissements illicites. Pratiquement toutes les traces documentaires des activités de l'entente ont été effacées: il ne subsiste guère de comptes rendus ou procès-verbaux, listes de participants ou invitations. Dans ces conditions, il est impossible de déclarer avec une certitude absolue que tous les participants ont mis fin à l'infraction. La Commission doit par conséquent exiger des entreprises destinataires de la présente décision qu'elles mettent fin à l'infraction, si elles ne l'ont pas déjà fait, et qu'elles s'abstiennent à l'avenir de tout accord, de toute pratique concertée et de toute décision d'association pouvant avoir un objet ou un effet identique ou similaire.

3.2. Article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17

3.2.1. Considérations générales

(516) En vertu de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes d'un montant de mille euro au moins et d'un million d'euro au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(517) L'entente a constitué une infraction délibérée (453) à l'article 81, paragraphe 1, du traité : tout en étant parfaitement conscients du caractère restrictif et de l'illégalité de leurs agissements, les principaux producteurs se sont entendus pour instaurer un système secret et institutionnalisé destiné à restreindre la concurrence dans un secteur industriel important (voir les considérants (167) à (170)).

(518) Pour déterminer le montant de l'amende, la Commission doit prendre en considération toutes les circonstances pertinentes, et notamment la gravité et la durée de l'infraction, qui sont les deux critères explicitement visés à l'article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17.

(519) Le rôle joué par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction sera apprécié cas par cas. Plus particulièrement, la Commission tiendra compte, pour la fixation du montant de l'amende, des éventuelles circonstances aggravantes ou atténuantes et appliquera, le cas échéant, la communication sur la clémence.

3.2.2. Montant des amendes

(520) Le montant des amendes est déterminé par le calcul d'un montant de base qui est majoré pour tenir compte d'éventuelles circonstances aggravantes ou réduit pour prendre en considération d'éventuelles circonstances atténuantes.

3.2.2.1. Le montant de base

(521) Le montant de base est déterminé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction.

Gravité de l'infraction

(522) Pour apprécier la gravité de l'infraction, la Commission tient compte de sa nature propre, de son impact concret sur le marché lorsqu'il est mesurable, et de l'étendue du marché géographique concerné. Elle prend également en considération la capacité économique de l'auteur de l'infraction de créer un dommage important aux autres opérateurs, et notamment aux consommateurs, ainsi que la nécessité de déterminer le montant de l'amende qui lui assure un caractère suffisamment dissuasif.

(523) Gyproc estime (454) qu'au regard des critères de gravité, impact et étendue du marché géographique concerné, l'infraction qu'elle a commise doit être considérée comme étant peu grave. En effet, selon Gyproc, son infraction correspondrait à la définition des infractions peu graves selon les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l'article 15, paragraphe 2, du règlement n°17 et de l'article 65, paragraphe 5, du traité CECA (455), dans le cas de restrictions visant à limiter les échanges mais dont l'impact sur le marché reste limité et qui ne concernent qu'une partie substantielle mais relativement étroite du marché communautaire.

(524) Gyproc indique également (456) que sa participation aux infractions incriminées par la Commission a été " d'une nature radicalement différente de celle des autres producteurs concernés " et " particulièrement limitée ". Gyproc fonde cette conclusion notamment sur le postulat " qu'elle n'a pas participé à l'entente globale de 1992 à 1998 entre [représentants de haut niveau] des producteurs de plaques en plâtre sur certains marchés nationaux européens décrite dans la communication des griefs ".

(525) Toutefois, la Commission estime que cette entreprise a participé, à partir de juin 1996, certes selon des modalités et une intensité propres, à l'infraction unique et continue commise par l'ensemble des parties à l'entente. Dès lors, il n'est pas pertinent de distinguer en soi une infraction différente qui aurait été commise par cette entreprise. Quant au degré de participation de cette entreprise à ladite infraction et aux conséquences qu'il convient d'en tirer pour la fixation du montant de l'amende, la Commission renvoie à l'examen des circonstances atténuantes (voir les considérants (570) et suivants).

(526) BPB considère (457) que la Commission devrait conclure au caractère peu grave des infractions concernées, cette entreprise ne prenant en compte dans son analyse que les comportements pour lesquels elle admet que la Commission pourrait retenir la qualification d'infractions. BPB distingue ainsi plusieurs types d'échanges : les échanges initiés par M. [A, BPB], BPB affirmant que les contacts entre concurrents étaient limités à un petit nombre d'individus, que [MM. B et C, Knauf] avaient pris l'initiative du premier contact et que les échanges étaient au plus annuels ; les échanges conduits par M. [D, BPB], dont le seul élément illégal, selon BPB, était l'échange de données individuelles relatives aux entreprises, mais qui a eu peu ou pas d'impact perceptible sur la concurrence, et devrait donc être considéré comme moins grave que n'importe quelle discussion, même vague, sur les prix ; quant aux échanges relatifs au Royaume-Uni, ils étaient irréguliers et doivent être considérés de nature peu grave ; il en va de même des " une ou deux " annonces préalables d'augmentation de prix aux concurrents que M. [N, BPB] a admis avoir transmises aux concurrents.

(527) Cependant, la Commission ne retient pas la même qualification juridique ou la même appréciation de la gravité des faits que BPB. En outre, force est pour elle de constater que, même pris séparément, chacun des comportements visés ne mérite pas l'appréciation bienveillante que veut en faire BPB et qu'a fortiori, considérés comme des manifestations d'un accord complexe et continu, la qualification des comportements alléguée par BPB ne peut être retenue.

Nature de l'infraction

(528) Il ressort des faits décrits à la partie I que la présente infraction a pris la forme d'un accord complexe et continu visant à restreindre la concurrence, constitué de diverses manifestations par lequel les concurrents ont cherché à mettre fin à la guerre des prix et à stabiliser le marché, ont procédé à des échanges d'informations confidentielles entre concurrents sur une longue durée ainsi que, au Royaume-Uni et plus encore en Allemagne, à des échanges d'informations sur certaines initiatives d'augmentation des prix. Un tel accord appartient par nature à la catégorie des violations les plus graves de l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(529) Les principaux opérateurs de l'EEE ont participé aux arrangements constitutifs de l'entente, qui étaient conçus, dirigés et encouragés à des niveaux élevés de la hiérarchie de chaque entreprise participante. Par sa nature même, la mise en œuvre de ce type d'entente entraîne automatiquement une grave distorsion de concurrence, qui se fait au bénéfice exclusif des producteurs qui y participent et porte hautement préjudice aux clients et, par conséquent, au consommateur final.

(530) La Commission considère donc que la présente infraction constitue par nature une infraction très grave à l'article 81, paragraphe 1, du traité.

Impact concret de l'infraction

(531) BPB a affirmé (458) que la Commission ne dispose d'aucune preuve d'un effet sur la concurrence, que notamment l'échange d'informations ne pouvait avoir que peu ou pas d'effet sur la concurrence, notamment en ce que les informations échangées se rapportaient au passé, étaient globales et n'étaient pas diffusées au sein des entreprises concernées. BPB indique également (459) que les annonces d'augmentation de prix aux concurrents transmises en avance, qu'elle a admises concernant le Royaume-Uni, ne pouvaient guère avoir d'impact sur la concurrence étant donné la divergence entre prix officiels de liste et prix " net net " ainsi que le processus de consultation préalable des clients.

(532) Lafarge a, de même (460), minimisé la portée et l'incidence de l'échange d'informations, en prétendant que " l'échange de renseignements n'a pas eu pour effet de maintenir un système de concurrence limitée ". " Pendant l'intégralité de la période 1992-1998, la concurrence a été effective à tous les niveaux. La concurrence acharnée par les prix est l'élément le plus visible.[...] Si les producteurs avaient connu le confort d'une concurrence limitée, les prix auraient remonté sur tous les marchés pour revenir à leur niveau de 1989-1990. Il en est de même de la concurrence acharnée sur les volumes, qui est à l'origine d'une telle concurrence par les prix. Le fait que les parts de marché puissent rester assez stables sur de courtes périodes n'a rien d'étonnant et ne révèle en aucun cas une concurrence à un niveau limité. En effet, la forte mobilité de certains segments de la clientèle fait que les producteurs sont toujours en lutte constante soit pour en profiter soit pour retrouver un débouché lorsqu'un client est perdu (mais dans ce cas c'est le plus souvent à l'un des trois autres grands producteurs qu'il reprend lui-même un client). Ainsi une analyse de la clientèle en Allemagne, réalisée par Lafarge en 1998 (pp. 10633 et s.), faisant état des variations entre 1996 et 1997 des 200 premiers clients, révèle que 45 % de la clientèle est en mouvement chaque année. L'attitude offensive de Lafarge sur le marché est documentée de manière extensive dans le dossier et démontre à quel point il est impossible que Lafarge ait accepté une stabilité des parts de marché en faveur des autres producteurs. La concurrence sur les capacités et les matières premières est également manifeste. [...] Enfin, la concurrence par l'innovation qui a eu lieu au cours des années 1990 [...] signifie également que le marché est hautement concurrentiel ".

(533) Gyproc a affirmé (461) de son côté " qu'il y a lieu également de tenir compte de l'absence d'effet sensible des pratiques incriminées sur le marché, particulièrement pendant la période au cours de laquelle Gyproc Benelux a participé à l'infraction. De fait, tant les parts de marchés des acteurs que les niveaux de prix sur le marché allemand ont subi des modifications significatives entre 1996 et 1998. Ainsi, on peut constater que les tentatives de hausses de prix concertées se sont presque toujours révélées infructueuses et n'ont jamais eu un effet durable sur le niveau des prix de vente des plaques en plâtre en Allemagne. Bien au contraire, il ressort du dossier de la Commission que les prix de vente sur le marché allemand ont fléchi de manière significative au cours de la période litigieuse. [...] Soucieux d'acquérir des parts de marché, les acteurs, et tout particulièrement Gyproc Benelux, ont continuellement développé des politiques de prix agressives. [...] D'une manière plus générale, il apparaît clairement qu'une concurrence sévère a continué à régner sur le marché des plaques en plâtre pendant la période au cours de laquelle Gyproc Benelux a participé aux pratiques incriminées ".

(534) En réalité, la Commission considère que l'infraction, commise par des entreprises qui, pendant la période couverte par la présente décision, ont représenté la totalité ou la quasi-totalité de l'offre de plaques en plâtre dans les quatre marchés sur lesquels a porté l'entente, a eu un impact concret sur ces marchés, dans la mesure où la quasi-totalité de l'offre y était soumise à des comportements anti-concurrentiels ; ainsi, quelle qu'ait été l'intensité de ces comportements, ils ont fait sentir leurs effets sur la quasi-totalité des marchés concernés. En outre, cet impact a été renforcé par le fait établi (et d'ailleurs nullement contesté par les entreprises concernées) que les plaques en plâtre constituent un marché de structure très concentrée et oligopolistique, par le simple fait que la concurrence tend à être plus limitée sur un tel marché. L'entente a donc inévitablement eu une incidence sur le comportement des opérateurs et, partant, sur les marchés. Enfin, cet impact résulte aussi du fait que les différentes manifestations de l'entente ont été mises en pratique, en ce que, notamment, les entreprises ont effectivement modifié leur comportement suite à la réunion de Londres (voir le considérant (60)) ; que les prix ont effectivement eu tendance à remonter ou, à tout le moins, à se stabiliser (voir les considérants (212) et (395)) ; que les parts de marché ont connu une relative stabilité au cours de la période (voir les considérants (71), (196), (289) et l'annexe de la présente décision), en tout cas plus grande qu'au cours de la période antérieure de 1988 à 1992 qualifiée par les parties de " guerre des prix " ; et que cette stabilité résulte de manière déterminante de la poursuite de cet objectif par les parties; que les échanges d'informations décidés ont été effectivement mis en œuvre sur toute la période, tant sur les principaux marchés que plus spécifiquement sur les marchés britannique et allemand ; que les contacts relatifs aux hausses de prix sont liés effectivement à la publication de listes de prix ultérieurement repris dans les prix facturés aux clients.

(535) Il en va ainsi à l'évidence de la volonté de stabiliser les principaux marchés européens exprimée à partir de 1992. Il en va de même de toute forme de coordination des hausses de prix, au Royaume-Uni ou en Allemagne, ou de la volonté de stabilisation du marché allemand à partir de 1996 sur la base des parts de marché existantes. La finalité même des comportements collusoires visés était de modifier le comportement des entreprises actives sur le marché en évitant une concurrence jugée destructrice et en cherchant à parvenir à une hausse des prix des plaques en plâtre, possible si et seulement si chaque entreprise se contentait de sa part de marché. Ceci vaut également pour les échanges de données sur un marché oligopolistique comme celui des plaques en plâtre. La communication de données relatives aux volumes, compte tenu notamment de la structure très concentrée du marché et de sa transparence, équivalait à renoncer à une concurrence agressive (voir notamment les considérants (449) et (450)). Comme l'a indiqué la Cour de justice dans l'affaire des tracteurs anglais (462), l'échange d'informations sur le marché est de nature à permettre aux entreprises de connaître les positions sur le marché et la stratégie commerciale de leurs concurrents, et ainsi à altérer sensiblement la concurrence qui subsiste entre les opérateurs économiques. Le fait de devoir communiquer toute percée aurait en effet déclenché une riposte des concurrents qui aurait réduit à néant l'effort entrepris.

(536) En outre un système d'échange d'informations confidentielles peut avoir un objet (voir les considérants (446) et (448)), mais aussi un effet analogue à une répartition des marchés selon les flux traditionnels, dans la mesure où un échange d'informations du type visé équivaut à un accord de répartition de quotas et indique l'existence d'un accord tacite de respecter les flux traditionnels.

(537) S'agissant de l'information sur les hausses de prix, ainsi que le Tribunal de première instance l'a établi dans l'affaire " Carton " (463), le fait que les entreprises ont effectivement annoncé les augmentations de prix convenues et que les prix ainsi annoncés ont servi de base pour la fixation des prix de transaction individuels suffit, en soi, pour constater que la collusion sur les prix a eu tant pour objet que pour effet une restriction de la concurrence. Comme il a déjà été indiqué, ce fait est établi en l'espèce. Il n'est donc pas nécessaire de déterminer si les variations des prix de transaction obtenus ont évolué parallèlement à celles des prix annoncés pour démontrer que l'entente a eu un impact concret sur les marchés des plaques en plâtre concernés. D'ailleurs, comme il a déjà été précisé à la section 1.5, une entente est compatible avec un certain degré de concurrence, la Commission ne devant pas prouver l'inexistence de concurrence. Par ailleurs, la circonstance que certaines hausses de prix ont été un échec ou ont eu un succès mitigé n'invalide nullement la conclusion que l'entente a produit certains effets.

(538) Enfin, la Commission estime qu'il n'est pas concevable, eu égard, notamment, aux risques encourus et bien connus des participants (voir par exemple les considérants (167) à (170)), que les parties aient convenu de manière répétée de prendre des contacts, de se réunir, d'échanger des informations d'une manière suffisamment secrète pour justifier des communications faites depuis et/ou vers des domiciles privés pendant une période aussi longue, si elles avaient considéré que l'entente n'avait pas d'incidence, ou seulement une incidence limitée, sur les marchés des plaques en plâtre concernés (464).

Étendue du marché géographique concerné

(539) L'entente a couvert les quatre principaux marchés au sein de la Communauté, à savoir l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et le Benelux.

(540) Gyproc indique (465) que " seule une partie étroite du marché communautaire était concernée par les comportements de Gyproc Benelux, à savoir essentiellement l'Allemagne. A l'exception de la période d'avril à octobre 1998, les informations sensibles reçues ou communiquées par Gyproc Benelux concernaient effectivement le seul marché allemand. De même, les hausses de prix auxquelles les autres producteurs ont proposé à Gyproc Benelux de participer ne portaient que sur l'Allemagne ".

(541) En fait, les échanges auxquels a participé Gyproc portaient effectivement sur les quatre marchés, bien que cette entreprise n'ait d'activités que pour l'Allemagne, la France et le Benelux.

(542) La Commission considère que l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et le Benelux, qui sont les quatre principaux marchés des plaques en plâtre au sein de la Communauté, constituent une part importante du marché communautaire, tant géographiquement qu'en valeur, avec environ 80 % de la valeur totale de ce marché.

Conclusion de la Commission sur la gravité de l'infraction dans son ensemble

(543) Vu la nature des comportements examinés, leur impact concret sur le marché des plaques en plâtre et le fait qu'ils ont visé les quatre principaux marchés au sein de la Communauté, dont la valeur atteignait 1210 millions d'euro la dernière année complète de l'infraction, la Commission estime que les entreprises destinataires de la présente décision ont commis une infraction très grave à l'article 81, paragraphe 1, du traité.

(544) Dans la catégorie des infractions très graves, l'éventail des amendes permet d'appliquer aux entreprises un traitement différencié qui tienne compte de leur capacité économique réelle à porter un important préjudice à la concurrence et de fixer l'amende à un niveau qui garantisse un effet dissuasif suffisant.

Classification des participants à l'entente

(545) Dans les circonstances de l'espèce, qui concerne plusieurs entreprises, il faut, lors de la fixation du montant de base des amendes, tenir compte du poids spécifique de chaque entreprise, et donc de l'effet réel de son comportement illicite sur la concurrence. À cette fin, les entreprises concernées peuvent en principe être divisées en catégories selon leur importance relative sur le marché en cause, sous réserve d'un ajustement pour tenir compte, le cas échéant, d'autres facteurs, et spécialement de la nécessité d'assurer une dissuasion effective.

(546) La Commission juge qu'il convient en l'espèce de prendre pour base la part de marché basée sur le chiffre d'affaires tiré de la vente du produit sur les quatre principaux marchés au sein de la Communauté, à savoir l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France et le Benelux, pour comparer l'importance relative des entreprises sur le marché concerné par les effets de cette entente. Cette méthode est validée par le fait qu'il s'agit d'une entente s'étendant à ces quatre marchés. La comparaison se fait sur la base du chiffre d'affaires tiré de la vente du produit sur ces quatre marchés en 1997, dernière année complète de l'infraction. La Commission prend également en compte la valeur importante du marché en question. Le tableau 3 figurant au considérant (25) fournit les données nécessaires.

(547) BPB, avec environ [40-45] % de part de marché sur le total de ces quatre marchés, en est le plus gros producteur et est par conséquent placée dans une première catégorie. Knauf et Lafarge, avec respectivement environ [25-30] % et [20-25] % de part de marché, sont placées dans une deuxième catégorie. Gyproc, avec environ [7-10] % de part de marché, est par conséquent placée dans une troisième catégorie.

(548) Gyproc a fait état (466) de sa qualité d'acteur " très modeste " comme un facteur à prendre en compte pour déterminer la gravité de l'infraction commise. La Commission estime que la présente classification des participants à l'entente est de nature à répondre à la demande de Gyproc.

(549) Sur cette base, la Commission fixe comme suit les montants des amendes en fonction de la gravité:

- BPB : 80 millions d'euro

- Knauf Westdeutsche Gipswerke : 52 millions d'euro

- Lafarge : 52 millions d'euro

- Gyproc : 8 millions d'euro

Montant suffisamment dissuasif

(550) Afin de prendre en compte la taille et les ressources globales de l'entreprise et d'assurer à l'amende un effet suffisamment dissuasif, la Commission estime qu'il convient de procéder à un ajustement de ce montant de départ à l'égard de l'une ou l'autre des entreprises.

(551) Comme le Tribunal de première instance l'a dit dans l'affaire ABB - Conduites précalorifugées (467), " quant à la fixation d'un tel taux multiplicateur, il y a lieu d'observer que la prise en compte de l'effet dissuasif que doivent avoir les amendes est tout à fait conforme à la jurisprudence selon laquelle la gravité des infractions doit être établie en fonction de nombreux éléments tels que, notamment, les circonstances particulières de l'affaire, son contexte et la portée dissuasive des amendes, et ce sans qu'ait été établie une liste contraignante ou exhaustive de critères devant obligatoirement être pris en compte. Il convient de rappeler, à cet égard, que le pouvoir de la Commission d'infliger des amendes aux entreprises qui, de propos délibéré ou par négligence, commettent une infraction aux dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du traité constitue un des moyens attribués à la Commission en vue de lui permettre d'accomplir la mission de surveillance que lui confère le droit communautaire. Cette mission [...] comporte également le devoir de poursuivre une politique générale visant à appliquer en matière de concurrence les principes fixés par le traité et à orienter en ce sens le comportement des entreprises ".

(552) Dans ces conditions, la Commission estime qu'il y a lieu de majorer pour Lafarge (468) le montant de départ de l'amende pour tenir compte de sa taille et de ses ressources globales.

(553) Sur cette base, la Commission considère qu'afin d'assurer un caractère dissuasif, il convient de majorer le montant de départ de l'amende déterminé au considérant (549) de 100 % pour le porter à 104 millions d'euro dans le cas de Lafarge. Durée de l'infraction

(554) La Commission a établi que Knauf et BPB ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité à partir du 31 mars 1992, au plus tard, jusqu'au 25 novembre 1998. Aux fins du calcul de l'amende, la Commission prend en compte les mois pleins et retient donc comme durée de l'infraction de ces deux entreprises une durée de six ans et sept mois.

(555) Lafarge a commis la même infraction du 31 août 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998. Aux fins du calcul de l'amende, la Commission prend en compte les mois pleins et retient donc comme durée de l'infraction de cette entreprise une durée de six ans et deux mois.

(556) Quant à Gyproc, elle a activement participé à l'infraction du 6 juin 1996, au plus tard, au 25 novembre 1998. Aux fins du calcul de l'amende, la Commission prend en compte les mois pleins et retient donc comme durée de l'infraction de cette entreprise une durée de deux ans et quatre mois.

(557) La Commission conclut que l'infraction a été de longue durée (plus de cinq ans) pour Knauf, BPB et Lafarge et de durée moyenne (de un à cinq ans) dans le cas de Gyproc, et en conséquence majore de 65 % le montant de base de l'amende infligée à BPB et Knauf Westdeutsche Gipswerke, de 60 % le montant de base de l'amende infligée à Lafarge et de 20 % le montant de base de l'amende infligée à Gyproc.

Conclusion relative au montant de base

(558) En conséquence, la Commission fixe comme suit le montant de base des amendes:

- BPB : 132 millions d'euro

- Knauf Westdeutsche Gipswerke : 85,8 millions d'euro

- Lafarge : 166,4 millions d'euro

- Gyproc : 9,6 millions d'euro

3.2.2.2. Circonstance aggravante : récidive

(559) Comme il a été indiqué aux considérants (13) et (14), BPB et Lafarge ont déjà fait l'objet de mesures antérieures de la Commission dans des affaires d'entente par, respectivement, les décisions 94-601-CE et 94-815-CE.

(560) Les faits présentés dans la présente décision établissent que BPB et Lafarge ont continué plus de quatre ans à participer activement à une entente dans le secteur des plaques en plâtre après que leur aient été notifiées ces décisions . La circonstance que ces entreprises ont répété le même type de comportement dans un secteur autre que celui pour lequel elles avaient été sanctionnées révèle que la première sanction infligée n'a pas conduit ces entreprises à modifier leur comportement et constitue donc, pour la Commission, une circonstance aggravante.

(561) S'agissant de BPB, la circonstance que la décision 94-601-CE a été adressée à une filiale de BPB, BPB De Eendracht NV, n'est pas de nature à interdire d'appliquer une telle circonstance aggravante dans la présente affaire. En effet, BPB De Eendracht NV étant une filiale de BPB à la date de ladite décision, la Commission estime qu'il s'agit d'une seule et même entreprise, au sens de l'article 81 du traité, et qu'il est de la responsabilité d'une entreprise condamnée par la Commission non seulement de cesser ses comportements anticoncurrentiels mais également de conformer sa politique commerciale dans l'ensemble de la Communauté à la décision individuelle qui lui a été signifiée, ce que BPB n'a pas fait, bien au contraire, comme en témoigne la présente décision (469).

(562) BPB a indiqué (470) à cet égard que " il faut souligner ce qui suit. La Commission a conclu que la filiale était une composante insignifiante et involontaire de l'entente et que les représentants de la société s'étaient retirés de réunions où des discussions illégales avaient eu lieu. Il n'y avait dès lors pas de participation active. La filiale était fautive, sur le plan procédural, de ne pas s'être distanciée clairement et complètement du but commun poursuivi par les autres. En bref, il a été conclu qu'elle avait violé l'article 85 (maintenant article 81) sur base de sa participation passive. Cet état de fait a été reflété par la réduction de l'amende en appel. Les obligations des entreprises étant confrontées à une telle situation n'étaient pas, selon nous, légalement claires à l'époque où l'infraction a été commise ". Cet arrêt ne pourrait, selon BPB, être considéré comme la preuve " d'aucune récidive, de négligence de la part de la société ou d'indifférence par rapport aux règles de concurrence. Le dernier exemple en particulier a démontré une grande sensibilité aux règles de la part de la société mais elle a sous-estimé ce qui était requis pour soustraire la société aux conséquences négatives liées à la participation à un cartel ".

(563) Sans même qu'il soit nécessaire de discuter l'appréciation par BPB de la décision de la Commission ou de l'arrêt du Tribunal de première instance, la Commission considère que la seule circonstance que la même entreprise a déjà fait l'objet d'une constatation d'infraction, et que malgré cette constatation et la sanction imposée, elle a continué par ailleurs à être engagée dans une autre infraction analogue à la même disposition du traité, est constitutif de récidive.

(564) Dès lors, la Commission estime nécessaire d'aggraver la sanction qui lui est imposée en majorant le montant de base de 50 % dans le cas de BPB et de Lafarge.

3.2.2.3. Circonstances atténuantes

Rôle exclusivement passif ou de suiveur sous la pression d'une autre entreprise

(565) Gyproc affirme (471) avoir joué un rôle exclusivement " suiviste " dans la réalisation des pratiques collusoires et souvent ne pas les avoir appliquées. Gyproc prétend que manifestement, vu sa taille, elle " ne pouvait se permettre de faire front et d'entrer en conflit ouvert en refusant toute discussion avec les trois grands producteurs qui contrôlent près de 95 % du marché européen des plaques en plâtre ". Gyproc prétend aussi que, dans la pratique, elle " a continué à développer une politique commerciale indépendante et agressive en vue de conquérir de nouveaux clients et accroître ses parts de marché. De plus, Gyproc Benelux n'a jamais pris l'initiative des échanges d'informations confidentielles ou des hausses concertées de prix. Gyproc Benelux s'est contentée, dans certains cas, de suivre le mouvement lancé par les trois grands producteurs tout en s'abstenant, dans un très grand nombre de cas, de respecter les objectifs recherchés. Gyproc Benelux a, ainsi, souvent adopté un comportement commercial indépendant qui allait à l'encontre des initiatives adoptées par ses concurrents ". Gyproc indique enfin avoir été " limitée dans sa marge de manœuvre par les liens contractuels et structurels qui l'unissent à BPB. Outre sa participation importante dans le capital de la société, BPB dispose de prérogatives significatives au sein du Conseil d'administration de Gyproc. BPB est également propriétaire de la marque "Gyproc" utilisée par Gyproc pour la commercialisation de la très grande majorité de ses produits. De plus, Gyproc dépend de l'assistance technique et technologique fournie par BPB. De toute évidence, Gyproc n'a pu ignorer cette influence de BPB dans la détermination de l'attitude à adopter vis-à-vis de ses concurrents dont un des principaux est un actionnaire important ".

(566) Force est de constater, à l'analyse même des arguments de Gyproc, que cette entreprise n'était pas soumise aux autres entreprises, ou même seulement à BPB, au point de ne pas pouvoir s'en distancier en pratique en trichant par rapport aux arrangements collusoires auxquels elle participait. Un comportement passif ou suiviste aurait impliqué, précisément, de ne pas se démarquer des autres participants aux comportements visés. Par ailleurs, tout indique que Gyproc a eu une participation active à la réunion de Versailles et aux réunions qui ont suivi.

(567) Dans ces conditions, la Commission conclut qu'elle doit rejeter cette prétention de Gyproc comme circonstance atténuante. Cessation des infractions dès la première intervention de la Commission

(568) Gyproc indique (472) avoir mis fin à l'infraction dès la première intervention de la Commission, en ce sens que Gyproc a mis fin à tout échange d'informations avec M. [D, BPB] ainsi qu'à toute pratique collusoire sur le marché allemand dès la première intervention de la Commission, à savoir dès la vérification effectuée au siège de Gyproc le 25 novembre 1998.

(569) Cependant, le caractère flagrant et notoirement infractionnel des comportements visés ne faisant pas de doute, la Commission est en droit d'attendre que ceux-ci cessent immédiatement après les vérifications, sans que cela soit susceptible de continuer une circonstance atténuante. Dans ces conditions, la Commission considère qu'il convient de rejeter la prétention de Gyproc.

Autres circonstances atténuantes

(570) Gyproc souligne (473) le caractère limité de sa participation aux différentes manifestations de l'entente, tant au niveau européen des [représentants de haut niveau], qu'au niveau allemand et son absence de participation à l'entente en ce qui concerne le marché britannique. Cette entreprise prétend qu'elle n'est pas un des instigateurs des pratiques collusoires engagées dès 1992 par les trois grands producteurs afin de mettre un terme à la guerre des prix et stabiliser les marchés, et que " ce n'est qu'à partir de 1996 que Gyproc a progressivement et très partiellement été intégrée dans les pratiques des autres producteurs ".

(571) La Commission rappelle tout d'abord qu'elle ne prend en compte, dans son appréciation de la durée de la participation de Gyproc à l'infraction, que la période postérieure à juin 1996.

(572) La Commission constate ensuite que, pour la période allant de juin 1996 à novembre 1998, Gyproc était un membre actif de l'accord complexe et continu décrit dans la présente décision, car ses dirigeants ont régulièrement participé aux réunions visant à stabiliser le marché allemand, savaient ou auraient dû savoir dès cette date que l'échange d'informations auquel elle était associée avait une finalité collusoire, et entre mars et novembre 1998, ont activement participé à tous les aspects de cet échange d'informations. Dans ces conditions, la Commission tient Gyproc pour responsable de l'ensemble de l'infraction pour la période à laquelle elle y a participé, c'est-à-dire de juin 1996 à novembre 1998.

(573) En outre, il est exact que cette entreprise n'a pas participé à l'entente sur le marché britannique, mais cette circonstance s'explique par le fait qu'elle n'y était pas présente. Il est exact, au vu des preuves disponibles, que Gyproc Benelux n'a pas pris l'initiative des tentatives de hausses de prix concertées sur le marché allemand et a compromis le succès de celles-ci en ne les appliquant pas ou pas complètement. Toutefois, ceci n'établit nullement l'absence de participation à l'entente, dans la mesure où le fait que cette entreprise ait reçu les annonces préalables de hausses de prix des concurrents, même si elle ne les a pas appliquées, a affecté sa propre politique de prix, ainsi mise en œuvre en toute connaissance de cause. En réalité, il s'agit là d'une situation fréquente dans les ententes secrètes où une entreprise utilise l'entente pour son propre bénéfice sans en respecter la discipline.

(574) Reste que pendant une période substantielle de sa participation à l'entente, Gyproc paraît avoir eu des difficultés pour éviter que M. [D, BPB] n'obtienne et ne transmette des informations la concernant, en raison de sa qualité de membre de son conseil d'administration ; elle a été un élément déstabilisateur constant qui a contribué à la limitation des effets de l'entente sur le marché allemand; et elle était absente du marché britannique, où les manifestations de l'entente ont été plus fréquentes. Cet ensemble de circonstances met Gyproc dans une situation objectivement différente, de telle sorte que la Commission reconnaît que Gyproc n'a pas joué un rôle identique dans l'entente à celui des autres entreprises.

(575) La Commission considère que l'ensemble de ces éléments doit être pris en considération comme une circonstance atténuante dans l'appréciation de la gravité de l'infraction constatée dans le chef de Gyproc.

(576) Gyproc souligne également (474) avoir mis en œuvre un programme de conformité avec le droit de la concurrence et avoir organisé, avec l'aide de conseils spécialisés, des séminaires de formation destinés à ses employés.

(577) La Commission, tout en considérant un tel programme comme une initiative positive, estime que celui-ci ne constitue pas une circonstance atténuante, dans la mesure où il intervient trop tard et ne saurait dispenser la Commission d'exercer sa mission en sanctionnant l'infraction aux règles de concurrence commises par Gyproc. Dans ces conditions, la Commission considère qu'il n'est pas fondé d'accorder pour ce motif une circonstance atténuante à Gyproc.

(578) BPB prétend (475) que " il faut donner tout son poids au fait que BPB, à la réception de la lettre anonyme, a pris des mesures pour convoquer une réunion du conseil d'administration et s'adjoindre des conseillers juridiques externes indépendants, [...]. Ce cabinet s'est vu donner carte blanche pour examiner minutieusement les accusations contenues dans la lettre anonyme (sauf celles de nature personnelle dirigées contre M. [D, BPB]), et il a été exigé de tous les employés qu'ils coopèrent et qu'ils rendent tous les documents disponibles. Le rapport (connu en interne sous le nom de rapport Alpha) a présenté les déclarations de M. [D] concernant les échanges de données sur le marché ainsi que celles de M. [N, BPB]. Un poids important doit être accordé au fait que, lors de la réception de ce rapport, BPB a immédiatement renforcé ses mesures de conformité et a spécifiquement attiré l'attention de toute la direction sur l'absolue nécessité de respecter toutes les règles de concurrence pertinentes. M. [D] et [N] ont reçu l'instruction de mettre un terme à tous les contacts avec les concurrents sur le champ".

(579) De plus (476), " avant cela, BPB a donné instruction à Rigips de se retirer de ses accords de partage d'informations avec [M. U, consultant indépendant], bien que, sur base de toute appréciation juridique raisonnable, de tels contacts étaient conduits par [M. U] dans le respect de règles strictes. En fait, tant Knauf que l'association allemande du plâtre ont fourni à BPB des avis juridiques concernant la légalité du système en espérant que BPB répondrait, et BPB a d'ailleurs obtenu son propre avis ; toutefois BPB décida, compte tenu de la sensibilité, de rester en dehors des échanges ".

(580) En outre (477), " l'importance que BPB réservait à la conformité est soulignée par la décision immédiate de se séparer de M. [D, BPB] dès qu'il est devenu clair que ce dernier avait négligé les instructions expresses de ne plus avoir de contacts en relation avec le partage d'information avec des concurrents. M. [D] était un employé de longue date de BPB et au moment de son départ, il avait été dans les principaux conseils depuis [plusieurs années] et [représentant de haut niveau] depuis [plusieurs années]. Nous ajoutons que le départ inopiné de M. [D] a confronté BPB à des difficultés importantes étant donné qu'il n'avait pas de successeur évident".

(581) Enfin (478), " Après l'inspection de la Commission, BPB a demandé à ses conseils, [...], de commencer une enquête complémentaire pour examiner les points contenus dans la déclaration sous serment de M. [..., fonctionnaire de la Commission] ainsi que plus généralement. Une fois de plus, les avocats se sont vus donner carte blanche à l'encontre de toute personne et de tous documents. L'empressement à se soumettre à deux enquêtes externes et à coopérer totalement avec la Commission sont incohérents dans le chef d'une société qui aurait quelque chose à cacher ; au contraire, ces actions participent d'une culture générale d'entreprise visant à assurer la conformité avec toutes les législations pertinentes quel que soit l'endroit où BPB est active ".

(582) Force est pour la Commission de constater que le premier programme mis en place par BPB n'a, à l'évidence, pas eu le résultat escompté.

(583) Quant au retrait du " système [M. U, consultant indépendant] " d'échange d'informations, s'il témoigne d'une volonté d'éviter des comportements dont la nature pouvait effectivement prêter à suspicion, il ne s'est pas accompagné d'autres mesures visant à mettre fin aux arrangements collusoires, comme en témoignent la poursuite des échanges d'informations ou encore les discussions entre concurrents à La Haye. La Commission considère donc qu'elle ne peut accueillir la demande de BPB comme une circonstance atténuante.

(584) S'agissant enfin des décisions se rapportant au changement à la direction de l'entreprise et du programme mis en place après la vérification, la Commission, estime que ces initiatives ne constituent pas une circonstance atténuante, dans la mesure où elles sont intervenues trop tard et ne sauraient dispenser la Commission d'exercer sa mission en sanctionnant l'infraction aux règles de concurrence commises par BPB. Dans ces conditions, la Commission considère qu'il n'est pas fondé d'accorder pour ce motif une circonstance atténuante à BPB.

(585) Gyproc Benelux souligne qu'elle n'a, par le passé, jamais été condamnée, ni même poursuivie, pour violation des dispositions du droit communautaire ou d'un droit national de la concurrence.

(586) La Commission considère qu'une telle condamnation aurait été éventuellement susceptible de constituer une circonstance aggravante, mais que son absence ne saurait, a contrario, constituer une circonstance atténuante. Dans ces conditions, la Commission considère qu'il n'est pas fondé d'accorder pour ce motif une circonstance atténuante à Gyproc.

(587) BPB souligne (479) qu'elle " n'a retiré aucun bénéfice financier découlant des points faisant l'objet de l'enquête ". BPB indique ainsi que " après la fin de la guerre des prix, entre janvier et décembre 1992, les prix net net de BPB en Allemagne et au Royaume-Uni ont augmenté respectivement de [3-5] % et [7-10] %" mais que " comme le niveau des prix pendant la guerre des prix, était, de l'aveu de tous, très bas et insupportable, la Commission ne peut pas soutenir que les prix ne seraient pas remontés à un moment en 1992. Au pire, les discussions [MM. B et C, Knauf]/[M. A, BPB], si elles avaient eu un quelconque impact, ont accéléré une augmentation inévitable des prix. Mais ni BPB ni la Commission ne peuvent s'aventurer à quantifier cette augmentation ". De même, selon BPB, " la Commission ne peut isoler aucun bénéfice matériel revenant à BPB comme résultat des échanges du marché [...] il est peu probable que la position sur le marché eût été différente si l'échange d'informations n'avait pas eu lieu". BPB reconnaît toutefois que " la connaissance de la taille totale et des positions des participants avait une valeur commerciale pour son [représentant de haut niveau] - et comme telle, il est au moins possible que la situation concurrentielle puisse avoir été, à certains égards, légèrement différente. Suite à la connaissance des parts des concurrents, la concurrence a même pu devenir plus virulente. Toutefois, il est très difficile d'attribuer, de manière assurée, un quelconque bénéfice financier. C'est un facteur qui doit être pris en compte par la Commission dans la détermination de l'amende ".

(588) La Commission ne considère pas que le fait, à supposer qu'il soit avéré, ce dont la description faite par BPB elle-même permet de douter, de ne pas tirer profit d'une entente constitue une circonstance atténuante pour la détermination de l'amende ou que les entreprises puissent faire valoir un droit à la réduction de l'amende pour une infraction dont non seulement l'effet, mais aussi l'objet sont anticoncurrentiels.

(589) Au vu de ce qui précède, la Commission considère approprié d'accorder à Gyproc une réduction de 25 % du montant de base de l'amende.

3.2.2.4. Conclusion sur les montants des amendes avant application de la communication sur la clémence

(590) Après prise en considération des circonstances aggravantes et atténuantes, la Commission fixe comme suit le montant des amendes avant application éventuelle de la communication sur la clémence :

- BPB : 198 millions d'euro

- Knauf Westdeutsche Gipswerke : 85,8 millions d'euro

- Lafarge : 249,6 millions d'euro

- Gyproc : 7,2 millions d'euro

3.2.2.5. Application de la communication sur la clémence

(591) Certains destinataires de la présente décision ont coopéré avec la Commission, à différentes étapes de l'enquête et en liaison avec les différentes périodes de l'infraction examinées, afin de bénéficier du traitement favorable prévu dans la communication sur la clémence. Pour répondre aux attentes légitimes des entreprises concernées quant à la non imposition ou à la réduction du montant des amendes au titre de la coopération dont elles ont fait preuve, il est nécessaire d'examiner si lesdites parties remplissent les conditions énoncées dans la communication sur la clémence.

Réduction importante du montant de l'amende

(592) BPB a été le premier membre de l'entente à communiquer des éléments complémentaires à ceux découverts lors des vérifications et confirmant l'existence de l'entente. Après que la Commission eut adressé une demande de renseignements à BPB, celle-ci lui a communiqué des déclarations et des documents relatifs à l'affaire.

(593) Toutefois, contrairement à ce que prétend cette entreprise (480), BPB n'a pas apporté d'informations décisives à la Commission, qui en toute hypothèse aurait été en mesure d'engager une procédure en vue de l'adoption d'une décision dans la présente affaire. En effet, la Commission disposait, à la suite des vérifications, d'informations suffisantes pour prouver l'existence de l'entente dénoncée.

(594) La Commission estime par conséquent que la coopération dont a fait preuve BPB ne remplit pas les conditions prévues au titre B, point b), de la communication sur la clémence et qu'elle n'est donc pas admise à bénéficier d'une réduction importante de l'amende conformément au titre C de ladite communication.

Réduction significative du montant de l'amende

(595) Avant que la Commission adopte sa communication des griefs, BPB et Gyproc lui ont communiqué des informations et/ou des documents. L'étendue et la qualité de la coopération de ces entreprises avec la Commission ont cependant été différentes.

(596) La Commission constate que BPB a été le premier membre de l'entente à communiquer, postérieurement à une demande de renseignements de la Commission mais allant au-delà de celle-ci, des éléments complémentaires à ceux découverts lors des vérifications et confirmant l'existence de l'entente (voir le considérant (593)) . Comme le souligne (481) cette entreprise, ces éléments comprennent des informations détaillées sur les réunions concernées, notamment la réunion de Londres et les échanges d'informations sur les principaux marchés européens et en particulier le marché britannique.

(597) BPB a, en outre reconnu (482) une partie des faits qui ont été décrits dans la communication des griefs. Toutefois, elle conteste le caractère d'infraction de certains faits décrits dans la communication des griefs et retenus dans la présente décision.

(598) La Commission constate que Gyproc a également fourni des éléments de preuve qui ont contribué à l'établissement de la preuve de l'infraction. Comme le souligne Gyproc (483), cette entreprise a fourni, postérieurement à une demande de renseignements de la Commission mais allant au-delà de celle-ci, des informations sur les réunions du cartel précisant les périodes pendant lesquelles les réunions ont eu lieu dans divers États membres de la Communauté et les noms des entreprises participantes. Lors d'une entrevue demandée par Gyproc avec les services de la Commission, M. [E, Gyproc] a spontanément fourni des explications orales au sujet de ses notes manuscrites. Gyproc a ensuite confirmé par écrit les explications orales fournies par M. [E], qui contribuent à démontrer que les producteurs de plaques en plâtre ont cherché à se répartir le marché allemand ou tout au moins à stabiliser celui-ci. Gyproc a en outre spontanément fourni à la Commission des notes manuscrites de M. [E] dont la Commission n'avait pas pris connaissance lors de la vérification, contenant notamment les informations relatives à l'échange des volumes de ventes au cours de la réunion de Versailles.

(599) Gyproc ne conteste pas l'existence des faits et leur qualification comme infractions au droit communautaire de la concurrence.

(600) Dans ces conditions, la Commission considère qu'il est justifié d'accorder une réduction du montant des amendes de 30 % pour BPB et de 40 % pour Gyproc.

3.2.2.6. Montant final des amendes infligées dans la présente procédure

(601) En conclusion, les montants des amendes à infliger conformément à l'article 15, paragraphe 2, point a), du règlement n° 17 doivent être établis comme suit:

- BPB : 138,6 millions d'euro

- Knauf Westdeutsche Gipswerke : 85,8 millions d'euro

- Lafarge : 249,6 millions d'euro

- Gyproc : 4,32 millions d'euro

A arrêté la présente décision:

Article premier

BPB PLC, le groupe Knauf, Société Lafarge S.A. et Gyproc Benelux N.V. ont enfreint l'article 81, paragraphe 1, du traité en participant à un ensemble d'accords et de pratiques concertées dans le secteur des plaques en plâtre.

L'infraction a eu la durée suivante :

a) BPB PLC : du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

b) Knauf : du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

c) Société Lafarge SA : du 31 août 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998

d) Gyproc Benelux NV : du 6 juin 1996, au plus tard, au 25 novembre 1998

Article 2

Les entreprises visées à l'article 1er mettent fin à l'infraction visée audit article, si elles ne l'ont pas déjà fait. Elles s'abstiennent, dans le cadre de leurs activités liées aux plaques en plâtre, de tout accord ou de toute pratique concertée qui pourraient avoir un objet ou un effet identique ou similaire à celui de l'infraction.

Article 3

Pour l'infraction visée à l'article 1er, les amendes suivantes sont infligées aux entreprises suivantes:

a) BPB PLC : 138,6 millions d'euro

b) Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG : 85,8 millions d'euro

c) Société Lafarge SA : 249,6 millions d'euro

d) Gyproc Benelux NV : 4,32 millions d'euro

Les amendes infligées sont payables dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, sur le compte bancaire n° 642-0029000-95 (Code SWIFT: BBVABEBB - code IBAN BE76 6420 0290 0095) de la Commission européenne auprès de Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (BBVA) SA, Avenue des Arts, 43 B-1040 Bruxelles. À l'issue de ce délai, des intérêts seront automatiquement dus au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement au premier jour du mois au cours duquel la présente décision a été arrêtée, majoré de 3,5 points de pourcentage, soit 6,79 %.

Article 4

Sont destinataires de la présente décision :

BPB PLC Park House 15 Bath Road UK - Slough SL1 3UF

Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG Am Bahnhof 7 D-97346 Iphofen

Société Lafarge SA 61, rue des Belles Feuilles F-75782 Paris cedex 16

Gyproc Benelux NV Merksemsebaan 270 B-2110 Wijnegem

La présente décision forme titre exécutoire conformément à l'article 256 du traité.

Annexe : volume de ventes de plaques en plâtre des destinataires de la décision de 1992 à 1998

Le premier chiffre exprime les volumes de ventes en mètres carrés communiqués par les entreprises et arrondis au million. Le second chiffre, entre parenthèses, exprime le pourcentage de l'entreprise concernée rapporté au total des ventes des quatre entreprises.

<emplacement tableau>

Notes :

(*) Les données remplacées par [...], avec ou sans valeur approximative de remplacement, ont un caractère confidentiel ou de secret d'affaires.

(**) Le nom des personnes impliquées a été remplacé par une lettre en suivant leur ordre d'apparition dans la description de l'infraction (section 1.4. " Détails de l'infraction "). Le détail de leur fonction a été remplacé par la mention " représentant " ou " représentant de haut niveau " de leur entreprise.

1 JO 13 du 21.2.1962, p. 204/62.

2 JO L 148 du 15.6.1999, p. 5.

3 JO L 354 du 30.12.1998, p. 18.

4 " Knauf " désigne l'ensemble des sociétés du groupe Knauf, voir la section 1.3.3.2.

5 p. 49.10665-10718 du dossier de la Commission. Sauf indication contraire, les références de page ci-après sont toujours celles du dossier de la Commission, le premier chiffre se référant au numéro de volume dans ce dossier et le second au numéro de page.

6 ci-après : " première réponse de BPB "

7 ci-après : " note de BPB "

8 ci-après : " déclaration de BPB "

9 ci-après : " deuxième réponse de BPB "

10 ci-après : " troisième réponse de BPB "

11 ci-après : " déclaration de Gyproc "

12 Réponses de Lafarge du 26 août, de Gyproc du 6 septembre, de BPB du 6 septembre, d'Etex du 9 septembre, de Knauf des 19 septembre et 9 octobre 2002.

13 Affaire IV/C/33.833 - Carton, JO L 243 du 19.9.1994, p. 1.

14 Recueil 1998, p. II-1129.

15 Affaires IV/33.126 et 33.322 - Ciment, JO L 343, p. 1.

16 Recueil 2000, p. II-491.

17 Les chiffres concernant chaque entreprise sont ceux communiqués par celle-ci, arrondis à l'unité ; le chiffre " autres ", pour l'Allemagne en 1998 est basé sur l'estimation de BPB (réponse à la communication des griefs, p. 29), et correspond aux ventes de Norgips en 1998 ; cette entreprise a repris ses ventes sur le marché allemand aux environs de septembre 1998 seulement (voir le considérant (47)).

18 Dans les tableaux 1, 2 et 3, DE = Allemagne ; UK = Royaume-Uni, FR= France ; BNL= Pays-Bas, Belgique et Luxembourg.

19 Les chiffres fournis se fondent sur les réponses des sociétés aux demandes de renseignements et sur des estimations de la Commission. Les ventes en 1997 et 1998 sont fournies comme exemples. L'importance relative des ventes annuelles de chaque entreprise peut avoir varié d'une année à l'autre au cours de la période couverte par l'infraction.

20 Tous les chiffres d'affaires indiqués dans la présente décision sont donnés en écus ou en euro, selon le cas. Les taux de conversion utilisés pour le calcul des montants en euro sont les taux officiels moyens annuels (ou, selon le cas, mensuels) publiés par la Commission pour le calcul de chiffres d'affaires ; pour BPB, 2001 correspond à la période du 01/04/01 - 31/03/02 (taux de change obtenu à partir des taux de change mensuels moyens d'avril 2001 à mars 2002), 1997 correspond à la période du 01/04/97 - 31/03/98 (taux de change obtenu à partir des taux de change mensuels moyens d'avril 1997 à mars 1998), 1998 correspond à la période du 01/04/987 - 31/03/99 (taux de change obtenu à partir des taux de change mensuels moyens d'avril 1998 à mars 1999).

21 Monopolies and Mergers Commission, Report on the supply of plasterboard in the United Kingdom, Cm1224, October 1990, p.35.

22 Réponse du 19 septembre 2002 de Knauf à la demande d'information de la Commission, Zusammenstellung 7.

23 Site internet de Knauf : http://www.knauf.de/home.htm.

24 Source : Verband der Vereine Creditreform e.V. Creditreform-Datenbank-Dienste ; EcoRegister: German Company Registrations (ECCO) - Bundesanzeiger Verlagsgesellschaft mbH.

25 Source : Verband der Vereine Creditreform e.V. Creditreform-Datenbank-Dienste ; EcoRegister: German Company Registrations (ECCO) - Bundesanzeiger Verlagsgesellschaft mbH ; Dun & Bradstreet European Standard Report.

26 Réponse du 19 septembre 2002 de Knauf à la demande d'information de la Commission, p.1, 3.

27 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p.6.

28 Réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.7987; réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 42-43.

29 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 37.

30 Ibid., p.40.

31 Réponse de BPB à la communication des griefs, p.28.

32 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p.23.

33 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p.28, concernant l'objectif premier, selon cette entreprise, de la discussion tenue à Londres en 1992 avec BPB.

34 Deuxième réponse à la demande de renseignements, p. 36.8128-8130.

35 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 29.

36 Deuxième réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.8129.

37 Réponse à la communication des griefs p. 45.

38 Ibid., p. 45-46.

39 Ibid., p. 46.

40 Ibid., p. 4, 108.

41 Ibid., p. 108.

42 Réponse de BPB du 28 octobre 1999, p. 36.8129.

43 Réponse à la communication des griefs, p. 46.

44 Réponse à la communication des griefs, p. 29-33.

45 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 29-30.

46 Ibid, p.32.

47 Ibid., p. 30.

48 Ibid., p. 31.

49 Aux considérants 71 et suivants de la communication des griefs, selon Knauf (p. 31 de la réponse à la communication des griefs).

50 Réponse à la communication des griefs, p.20.

51 Original en allemand : " Veständigung ", p. 32.

52 p. 16.4175.

53 Voir le considérant (61) se référant à la p. 29 de la réponse de Knauf à la communication des griefs, ou encore l'absence de souvenir de [MM. B et C, Knauf] sur l'initiateur de la réunion, voir le considérant (53).

54 Réponse de BPB à la communication des griefs, pp.30-31.

55 Réponse à la communication des griefs, p.14.

56 Annexe 1 à réponse à la communication des griefs de Knauf, conclusion, p.68.

57 Réponse à la communication des griefs de Knauf, p.18.

58 Ibid, p.31.

59 p.36.7946, paragraphe 2 ; voir aussi la déclaration de Gyproc, p.35.7802.

60 p. 36.7946, paragraphe 5.

61 p. 1.42.

62 Première réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.8001.

63 p. 1.64.

64 Première réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.8002.

65 p. 1.65.

66 Première réponse de BPB à la demande de renseignements, p.36.8003.

67 p. 25.5970.

68 p. 25.6010.

69 p. 25.5938.

70 p. 1.76-77.

71 Lettre du 1er septembre 1999 rendant compte de la déclaration orale du 23 juillet 1999, p. 35.7791- 7792.

72 Réponse du 2 novembre 1999 à la demande d'information de la Commission, p. 39.8623.

73 Réponse à la communication des griefs, p. 18.

74 pp. 1.76-79, 1.43-44, et première réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.7999.

75 Communiqués par BPB à la demande de la Commission, suite aux vérifications lors desquelles il était apparu que des documents avaient été retirés des locaux de BPB pour être conservés dans les locaux de son conseil juridique, pp. 35.7846-7851.

76 Réponse de M. [D] aux questions posées par les agents de la Commission, p. 1.2, point 3.

77 Réponse de BPB du 17 mars 1999 à la demande d'information de la Commission, p. 36.7999.

78 Ibid., pp. 36.8000-8001.

79 Réponse de BPB du 28 octobre 1999 à la demande de renseignements, p. 36.8132.

80 Déclaration de M. [D] lors des vérifications, p. 1.2 ; réponse de BPB du 17 mars 1999, p.36.7999, réponse du 1er octobre 1999, p. 36.8131.

81 Deuxième réponse de BPB, p. 36.8132.

82 Réponse de Gyproc à la demande d'information de la Commission, p. 39.8623.

83 Réponse de Knauf à la demande d'information de la Commission, p. 37.8310 ; réponse à la communication des griefs de Knauf, p. 32-34.

84 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 60-70.

85 Réponse du 28 octobre 1999 à la demande d'information de la Commission, p. 36.8130

86 Voir le considérant (79).

87 On relèvera que dans ce tableau, Lafarge inclut Epysa et Norgips, bien que cette dernière entreprise soit comptée dans "autres" en ce qui concerne les pays nordiques.

88 On relèvera que dans ce tableau, Knauf inclut Danogips et Isolava.

89 On relèvera que pour BPB même, les données dites réelles ne correspondent pas aux données estimées pour l'Espagne et le Portugal pour 1995, et pour l'Autriche, l'Espagne et le Portugal pour 1996, pour la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni et la République tchèque pour 1997. On peut en conclure que [ce représentant de haut niveau] de BPB ne croyait pas les chiffres reçus de certains de ses collaborateurs ou de filiales, ce qui est cohérent avec les déclarations de BPB selon lesquelles M. [D] contrôlait les résultats de ses collaborateurs (voir la déclaration de M. [D] en annexe à la réponse à la communication des griefs, p. 2-3).

90 Réponse du 28 octobre 1999, p. 36.8131.

91 Deuxième réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.8131.

92 Réponse à la communication des griefs, p. 110.

93 Réponse à la communication des griefs, annexe 50, p.3.

94 Deuxième réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.8130.

95 Ibid, p. 36-8122.

96 Réponse à la communication des griefs, annexe 50, p. 2.

97 Réponse à la communication des griefs, p. 46.

98 Réponse à la communication des griefs, p.108.

99 p. 4 et 22, 48, 108-110.

100 Réponse à la communication des griefs, p. 65.

101 Réponse à la communication des griefs, p. 48.

102 Réponse à la communication des griefs, annexe 50, p. 2.

103 Voir le considérant (133).

104 Réponse à la communication des griefs, pp. 48, 112.

105 Réponse à la communication des griefs, p.105.

106 Première réponse de BPB, p. 36.8000.

107 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 33.

108 Ibid., p.20.

109 Ibid., p. 33.

110 Ibid., p.22.

111 Ibid., p.21, p. 33.

112 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 33.

113 p. 5.1256-1259.

114 P.36.8130.

115 Deuxième réponse à la demande de renseignements, p. 36.8129.

116 Réponse à la communication des griefs, pp. 51, 61.

117 Ibid., p.61.

118 Réponse à la communication des griefs, p.62-68.

119 p. 2-3 de la déclaration de M. [G].

120 Réponse à la communication des griefs, p. 47.

121 Lettre de la direction générale de la Concurrence de la Commission du 12 juin 2002, réponse de Lafarge du 25 juin 2002.

122 pp. 27.6259-6260.

123 www.lafarge.com

124 Deuxième réponse de BPB aux demandes d'information de la Commission, p. 36.8129.

125 Celui-ci était en 1992 [représentant de haut niveau] de Gyproc.

126 Réponse à la communication des griefs, p. 47.

127 Réponse à la communication des griefs, p.41.

128 Réponse du 28 octobre 1999 de BPB à demande d'information de la Commission, p. 36.8133.

129 p. 35.7791.

130 Réponse à la demande d'information de la Commission, p. 39.8623.

131 Réponse à la communication des griefs, p. 17.

132 Ibid.

133 Citée p. 32.6969.

134 Réponse à la communication des griefs, p. 21-22.

135 Ibid., p. 20.

136 Voir le considérant (220).

137 Réponse à la communication des griefs, pp.16-17.

138 Voir le considérant (221).

139 Voir les déclarations de MM. [D, BPB] et [G, Lafarge] et la réponse de Knauf à la communication des griefs.

140 Note du 17 mars 1999, p. 36.8027.

141 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, pp. 60-61.

142 pp. 5.1258-1259

143 Comme on le verra au considérant (271), au sujet de l'échange d'informations relatives au marché allemand institué en 1996 sous l'égide de [M. U, consultant indépendant].

144 p. 3 de la déclaration de M. [G].

145 Note à la Commission jointe à la première réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.8020.

146 Déclaration de BPB, pp. 36.8061-8062 ; deuxième réponse de BPB à la demande de renseignements, pp. 36.8122-8128

147 Réponse à la communication des griefs, p. 124.

148 Réponse du 28 octobre 1999, p. 36.8125.

149 Voir le considérant (172) et la réponse de BPB à la communication des griefs, p.51.

150 Déclaration du 28 mai 1999, p. 36.8048.

151 Deuxième demande de renseignements, p. 36.8123.

152 Déclaration, p. 36.8048.

153 Voir la réponse du 28 octobre 1999, p. 36.8124.

154 Réponse du 28 octobre 1999, p. 36.8125.

155 Ibid. p. 36.8125-8126.

156 Réponse du 28 octobre 1999 à la demande d'information de la Commission, pp. 36.8153-8154.

157 Réponse de BPB à la communication des griefs p. 52-53.

158 Réponse du 28 octobre 1999 à la demande d'information de la Commission, p. 36.8125.

159 Réponse du 28 mai 1999, p. 36.8048.

160 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 52

161 Déclaration du 28 mai 1999, p. 36.8048.

162 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 51-53.

163 Réponse du 28.10.99, p. 36.8124.

164 Ibid.

165 Réponse à la communication des griefs, p. 57.

166 Réponse à la communication des griefs, p. 45.

167 Réponse à la communication des griefs, p. 86.

168 p. 16.4142, Note de M. [...] à M. [...] du 7 septembre 1992, projet de note de référence pour l'OFT émanant de BPB; p. 16.4204, projet de corporate plan de BPB.

169 p. 16.4157 et 16.4163.

170 p. 16.4136-4137, lettre de la " Federation of plastering and drywall contractors " du 27 août 1992 et p. 11.2531, extrait du Financial Times du 26 août 1992, Builders complain to OFT over plasterboard prices.

171 p. 20.5083 et 16.4205.

172 p. 2.175, 20.5060-5061.

173 p. 20.5023.

174 p. 36.8159.

175 p. 33.7375.

176 p. 16.4319, lettre d'augmentation de BG du 22 septembre 1995.

177 p. 33.7339, Note interne de Lafarge du 13 octobre 1995, comprenant le texte à envoyer aux clients.

178 p. 17.4479, Lettre d'augmentation de prix de Knauf du 27 octobre 1995.

179 p. 18.4502.

180 Réponse à la communication des griefs, p. 45-46.

181 p. 33.7317, Price list 15 - effective November 1995.

182 p. 17.4468.

183 p. 18.4501, Price list 16 - effective 4 August.

184 p. 17.4484-4485, Price increase August 1997.

185 p. 16.4296, Price increase merchants and distributors, 27 January 1998.

186 p. 18.4601, Price list 17 - effective 6 April 1998.

187 p. 18.4573-4574.

188 p. 18.4614.

189 Déclaration, pp. 36.8048-8049; deuxième réponse, pp. 36.8125-8127.

190 Réponse à la communication des griefs, p.47.

191 Réponse à la communication des griefs, p.93.

192 Ibid., p.96.

193 Réponse à la communication des griefs, pp. 33-34.

194 Réponse à la communication des griefs, p. 35.

195 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 70.

196 Déclaration de Gyproc, pp. 35.7787-7788 ; réponse de Gyproc à la demande de renseignements, p. 39.8618.

197 Déclaration de M. [G] communiquée à la Commission suite à l'audition, p. 3-4.

198 Voir la note évoquée au considérant (224).

199 Réponse à la demande de renseignements de Gyproc, p. 39.8619

200 Voir demande de renseignements de la Commission du 30 mars 2000, plus particulièrement les annexes 2 et 3 (pp. 36.8210-8211, 36.8206).

201 Réponse du 28 avril 2000 de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.8234.

202 Ainsi de l'usine de 20 millions de m² de Lafarge près de Berlin (réponse de Lafarge à la communication des griefs p.104), de l'usine de 50 millions de m² de BPB dans la même région (réponse de BPB à la communication des griefs p.87).

203 Première réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p.5 : " probably because of opportunities in eastern Germany and Poland, the German market never stabilised" ; réponse de Lafarge, p.104.

204 p. 32.7050.

205 Réponse de Gyproc à la demande de renseignements, pp. 39.8618-8620 ; voir également la déclaration de Gyproc, pp. 35.7789-7790

206 Ibid,. p. 32.7050.

207 Gyproc.

208 Invitée à commenter ce document, Gyproc a indiqué que les chiffres concernant Knauf, BPB et Lafarge marqués "estimations" dans la note, ont été obtenus de M. [D] par M. [E] : réponse de Gyproc à la demande d'information de la Commission, p. 39.8619.

209 Ibid.

210 p. 36.7886.

211 Les données relatives à Rigips (BPB) et au marché total étant dites " basées sur les données [de M. U, consultant indépendant] ", les données relatives à Knauf/Dano, Lafarge et Gyproc étant dites " estimations propres ".

212 Réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, pp. 36.8003-8005.

213 Réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p.36.8003-8004.

214 BPB, réponse à la communication des griefs, notamment p.21; Lafarge, voir déclaration de M. [G], p. 3- 4 ; Knauf, réponse à la communication des griefs, p.34.

215 Déclaration de M. [E], p. 35.7801.

216 Ibid, pp. 35.7801-7802.

217 Réponse de Gyproc à la demande d'information de la Commission, p. 39.8620.

218 Réponse de Gyproc à la communication des griefs, p. 28-31.

219 Réponse de BPB à la communication des griefs p. 21, 70.

220 Déclaration de M. [D] communiquée à la Commission à l'annexe 50 de la réponse de BPB à la communication des griefs, p. 4.

221 Réponse de BPB à la communication des griefs p., p.70.

222 Ibid., p. 3.

223 Ibid., p. 103.

224 Déclaration de M. [E], p.35.7800.

225 Réponse de Knauf à la communication des griefs, pp. 34-42.

226 Déclaration de M. [G] communiquée à la Commission suite à l'audition, p. 3-4.

227 p. 25.5969.

228 M. [K] était [représentant de haut niveau] d'Etex et avait été le prédécesseur de M. [E] chez Gyproc ; M. [L] est [représentant de haut niveau] d'Etex.

229 Réponse à la première demande de renseignements, pp. 36.7987-7990.

230 Déclaration de M. [E], p.35.7801.

231 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 42-44 ; réponse de Gyproc à la communication des griefs, p.35-36 ; réponse de Lafarge à la communication des griefs, p.105-108 ; réponse d'Etex à la communication des griefs, p.24-26.

232 Réponse à la communication des griefs, p.69.

233 Première demande de renseignements, pp. 36.7987.

234 Réponse à la communication des griefs, p.42-44.

235 Ibid., p. 52-53.

236 Réponse à la communication des griefs, p. 105-109.

237 pp. 1.39-41 (note rédigée par M. [D] à propos de la réunion et d'autres entretiens sur le même sujet) ; p. 1.97 (ensemble séparé de notes et de calculs effectués par M. [D]) ; pp. 25.5950-5951 (notes détaillées de M. [E]), p. 32.7053 (note rédigée par M. [L]).

238 pp. 1.39-41 ; première réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.7991.

239 Déclaration de M. [E], p. 35.7791.

240 Réponse de Gyproc à la demande de renseignements, pp. 39.8621-8622.

241 p. 25.5989, et explications données par Gyproc : réponse de Gyproc à la demande de renseignements, p.39.8622, 8624.

242 Réponse à la communication des griefs, p. 35.7790.

243 Première réponse à la demande de renseignements, pp. 36.7989-7996.

244 Note du 17 mars 1999 à la Commission, p. 36.8022.

245 pp. 10.2301-2302, 31.6853.

246 Par exemple p. 2.477.

247 p. 32.7050.

248 Ibid.

249 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 74 ; on notera qu'il y a une certaine confusion quant à la date exacte: une note de M. [S] du 25 juin 1998 déclare que Rigips s'était retiré de l'opération "[M. U, consultant indépendant]" dès la fin de 1997 : p. 5.1211.

250 p. 5.1337.

251 p. 5.1299.

252 p. 31.6864.

253 Réponse à la communication des griefs, p. 74-75.

254 pp. 5.1212-1215, 10.2251.

255 pp. 31.6792, 31.6883.

256 p. 31.6880.

257 Réponse à la communication des griefs, p.39.

258 Ibid, p.19.

259 p. 23.5605.

260 p. 25.5966, la date du 27/1/97 qui figure sur la note est erronée, il faut comprendre " 27/1/98 "

261 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 101-104 ; réponse de BPB à la communication des griefs, p. 71-73.

262 pp. 23.5603-5604.

263 p. 31.6906; voir aussi p. 31.6786, provenant également de Lafarge Gips.

264 Voir en ce sens : arrêt du Tribunal de première instance du 20 avril 1999, dans les affaires jointes T- 305-94 e.a., Limburgse Vinyl Maatschappij N.V. e.a./Commission ("PVC II), Recueil 1999, p. II-931, points 613, 633.

265 pp. 31.6764-6766.

266 Ibid.

267 Ibid. Il faut noter que la date indiquée du 1er janvier 1996 est erronée, en fait il s'agissait du 1er décembre 1995.

268 Ibid..

269 Réponse à la communication des griefs, p.84.

270 Réponse à la communication des griefs, p.57.

271 Réponse à la communication des griefs, p.31.

272 pp. 1.42, 1.64-65, 25.5970, voir les considérants (76) et suivants.

273 Voir le considérant (255).

274 Note à la Commission jointe à la première réponse de BPB à la demande d'information de la Commission, p. 36.8020.

275 pp. 21.5143-5144.

276 p. 22.5431.

277 Réponse de Knauf à la demande de renseignements de la Commission, pp. 37.8307-8308.

278 Réponse à la communication des griefs, p. 55.

279 Réponse à la communication des griefs, pp.60-61.

280 BPB/Rigips détenait la lettre de Knauf annonçant la hausse de prix de février 1995 ainsi que le barème de Knauf (pp. 12.3319-3320) ; Lafarge Gips détenait la lettre de Knauf annonçant la hausse de prix de février 1995 ainsi que le barème de Knauf (pp. 31.6820-6822), ainsi que des copies des lettres et tarifs de Gyproc et de BPB/Rigips (pp. 31.6816-6817, 31.6827-6828) ; BPB/Rigips détenait la lettre de Knauf du 7 septembre 1995 annonçant la hausse des prix prévue pour le 1er décembre 1995 (pp. 12.3311), ainsi que des copies des lettres de Danogips (filiale de Knauf), de Lafarge et de Gyproc (la mention (marquée " [M. V] - Vertraulich ") sur la lettre de Knauf suggère que la lettre de Knauf est arrivée entre les mains de son destinataire par une voie qui ne relève pas de la pratique commerciale normale ; BPB affirme que la lettre provenait d'un client (réponse à la demande de renseignements, pp. 36.8240-8241) ; Lafarge Gips détenait des lettres de tous ses concurrents annonçant des hausses de prix au 1er décembre 1995 (pp. 31.6830-6831, 31.6833-6836) ; Lafarge Gips détenait une lettre d'octobre 1996 de BPB/Rigips concernant la hausse des prix au 1er février 1997 (p. 31.6839) ainsi qu'une lettre de Gyproc (pp. 31.6837-6838) et de Danogips (pp. 31.6809-6810, 31.6837-6838) ; Lafarge Gips détenait les lettres de BPB/Rigips et Gyproc concernant la hausse des prix en septembre 1997 (pp. 31.6840-6845) ; BPB/Rigips détenait les lettres de Gyproc et de Knauf concernant la hausse des prix en septembre 1997 (pp. 10.2293-2294, 10.2298-2299) ; Knauf détenait la lettre de BPB/Rigips concernant la hausse de septembre 1998 (p.22.5446) ; BPB/Rigips détenait les lettres de Knauf, Lafarge, Danogips et Gyproc concernant la hausse de septembre 1998 (pp.12.3262-3265).

281 Voir le considérant (305).

282 Réponse à la communication des griefs, pp.58-59.

283 pp. 12.3328-3329.

284 p. 21.5152.

285 pp. 21.5160, 3.737, 3.739.

286 pp. 12.3203, 12.3207.

287 Réponse à la communication des griefs, pp. 63-64.

288 Réponse à la communication des griefs, pp. 118-120.

289 p. 31.6825.

290 p. 31.6827.

291 p.31.6826.

292 Réponse à la communication des griefs, p. 118-119.

293 p. 21.5160.

294 p. 50.11182.

295 p. 12.3203.

296 Réponse à la communication des griefs, p. 119.

297 pp. 12.3203, 12.3207.

298 pp. 12.3294, 12.3300-3305, 12.3307-3308, 31.6829.

299 pp. 21.5108, 21.5116.

300 pp. 31.6839.

301 p. 31.6809.

302 p. 31.6810.

303 pp. 31.6837-6838.

304 pp. 29.6481-6482.

305 Réponse à la demande de renseignements du 21 septembre 1999, p. 38.8576.

306 Réponse à la communication des griefs, p. 124.

307 Ibid., pp.124-125.

308 Ibid.

309 Réponse à la communication des griefs, pp.60-63.

310 Réponse à la communication des griefs, p.64.

311 Déclaration du 28 mai 1999, pp.36.8062-8063

312 Réponse à la communication des griefs, pp.62-63.

313 pp. 31.6764-6766.

314 Réponse à la communication des griefs, pp. 122-123.

315 p. 31.6942.

316 pp. 31.6876-6877.

317 p. 5.1270.

318 pp. 31.6840-6845, 10.2293-2294, 10.2298-2299.

319 pp. 10.2277-2278, 10.2282, 10.2286-2287.

320 p. 22.5206.

321 Peut-être à l'occasion de la réunion de l'association allemande des fabricants de plaques en plâtre (IGG) qui s'est tenue le 26 juin 1997 à Francfort, p. 37.8415.

322 Réponse de Knauf à la demande d'information, p.37.8275.

323 Voir sa réponse du 14 septembre 1999 à la demande de renseignements, pp. 37.8297-8299

324 Réponse à la communication des griefs, p. 65.

325 Réponse à la communication des griefs, p. 127.

326 pp. 31.6801-6803.

327 p. 31.6803.

328 Réponse à la communication des griefs, pp.127-128.

329 Réponse à la communication des griefs, p.66.

330 p. 10.2275.

331 pp. 5.1293-1294.

332 p. 5.1298.

333 pp. 31.6781-6782.

334 p. 22.5218.

335 pp. 10.2198, 10.2201.

336 p. 12.3259.

337 p. 22.5446.

338 Voir le considérant (291).

339 p. 22.5432

340 p. 34.7467.

341 pp. 12.3261-3265, 26.6224-6225.

342 p. 22.5431.

343 p. 22.5438.

344 pp. 31.6954-6955.

345 pp. 31.6951-6952.

346 pp. 31.6956-6957.

347 pp. 10.2144, 10.2147.

348 Voir aussi la note interne de Lafarge Gips sur cette hausse, p. 31.6962.

349 p.31.6764.

350 Réponse à la communication des griefs, pp. 129-131.

351 p. 31.6953

352 Réponse à la communication des griefs, p.130.

353 Ibid., p.130.

354 p. 41.9113

355 p. 31.6964

356 Réponse à la communication des griefs, p.131.

357 Réponse à la communication des griefs, p. 66.

358 Réponse à la communication des griefs, p.67-68.

359 pp. 31-35.

360 Réponse à la communication des griefs, p. 35.

361 Réponse à la communication des griefs, p. 39.

362 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 6 et s. et notamment l'étude de NERA ; réponse de Gyproc à la communication des griefs, p.29 et s. ; réponse de Lafarge à la communication des griefs, p.29 et s.; réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 4 et s. et notamment l'analyse du marché " Gutachterliche Stellungnahme " de Univ.-Prof. Dr. [...] et Dipl.-Kfm. [...].

363 Réponse de BPB à la communication des griefs, p. 6, 32 et suivantes ; réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 9, 16 et suivantes ; réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 17et s.; réponse de Gyproc à la communication des griefs, pages 29 et suivantes.

364 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 9 et réponse de Knauf à la communication des griefs, p.4 et l'analyse de marché précitée.

365 Arrêts du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, dans l'affaire T-327-94, SCA Holding/Commission, Recueil 1998, p. II-1373, point 142 et dans l'affaire T-348-94, Enso Española/Commission, Recueil 1998, p. II-1875, point 306.

366 Voir les considérants (478), à (480).

367 Arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 13 juillet 1966, dans les affaires jointes 56-64 et 58-64, Consten et Grundig/Commission, Recueil 1966, p. 429, 496 ; arrêt de la Cour de justice du 8 juillet 1999 dans l'affaire C-49-92, Commission/Anic Partecipazioni, Recueil1999, p. I-4125, point 99 et arrêt de la Cour de justice du 8 juillet 1999, dans l'affaire C-199-92 P, Hüls/Commission, Recueil 1999, p. I-4287, point 178; arrêt du Tribunal de première instance du 23 février 1994, dans les affaires jointes T-39-92 et T-40-92, CB et Europay/Commission, Recueil1994, p. II-49, point 87.

368 Arrêt du Tribunal de première instance du 6 avril 1995, dans l'affaire T-148-89, Tréfilunion/Commission, Recueil 1995, p. II-1063, point 79.

369 Voir le considérant (71).

370 JO C 207 du 18.7.1996 p. 4.

371 Arrêt du Tribunal de première instance du 15 mars 2000, dans les affaires jointes T-25-95 e.a., SA Cimenteries CBR e.a./Commission, Recueil 2000, p. II-491, points 1837 et 1838.

372 Arrêt du Tribunal de première instance du 11 mars 1999, dans l'affaire T-141-94, Thyssen Stahl AG/Commission, Recueil 1999, p. II-347, point 175, et arrêt du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, dans l'affaire T-311-94, BPB de Eendracht NV/Commission, Recueil 1998, p. II-1129, point 201.

373 Arrêt du Tribunal de première instance du 12 juillet 2001, dans l'affaire T-202-98, Tate & Lyle/Commission, Recueil 2001, p. II-2035, points 164 à 166. En outre, la Commission se réfère à cet égard aux différents arrêts relatifs au cartel du Carton, où la décision de la Commission s'appuyait surtout sur des déclarations de la société Stora qui a obtenu la réduction de son amende et où la Cour n'a pas accepté les arguments mettant en question la crédibilité de ces déclarations par les parties qui sollicitaient une réduction plus importante de leur amende, voir arrêt du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, dans l'affaire T-347-94, Mayr- Melnhof/Commission, Recueil 1998, p. II-1751, points 82 et suivants.

374 Arrêt du Tribunal de première instance du 20 mars 2002, dans l'affaire T-9-99, HFB Holding für Fernwärmetechnik Beteilungsgesellscaft mbH & Co. KG e.a./Commission, Recueil 2002, p. II-1487, point 212 ;arrêt de la Cour de justice du 16 décembre 1975, dans les affaires jointes 40-48-73 e.a.., Suiker Unie e.a./Commission, Recueil 1975, p. 1663, points 173 et 174 et arrêt précité dans l'affaire Hüls/Commission, points 159 et 160.

375 Arrêt précité dans l'affaire PVC II, point 715, confirmé par l'arrêt de la Cour de justice du 15 octobre 2002, dans les affaires jointes C-238-99P e.a., LMV/Commission e.a., non encore publié.

376 Arrêt de la Cour de justice du 14 juillet 1972, dans l'affaire 48-69, Imperial Chemical Industries Ltd/Commission, Recueil 1972, p. 619, point 64 et arrêt précité dans l'affaire Hüls/Commission, point 158.

377 Arrêt du Tribunal de première instance du 17 décembre 1991, dans l'affaire T-7-89 Hercules/Commission, Recueil 1991, p. II-1711, points 255, 258-261.

378 Arrêt précité dans l'affaire Hüls/Commission, points 158 à 166, et arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, points 213 et 216.

379 Arrêt pécité dans l'affaire Hüls/Commission, points 163 à 165 et arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, point 217.

380 Arrêt précité dans l'affaire Commission/Anic Partecipazioni SpA, point 81.

381 Arrêt précité dans les affaires SA Cimenteries CBR e.a./Commission, points 4025 et suivants.

382 Arrêt précité dans l'affaire Hercules/Commission, point 264.

383 Arrêt précité dans l'affaire PVC II, point 696, confirmé par l'arrêt précité, dans l'affaire LMV/Commission e.a.

384 Arrêt précité dans l'affaire Commission/Anic Partepazioni, points 131 et 132.

385 Ibid., point 43.

386 Ibid., point 83.

387 Voir le considérant (489).

388 Arrêt du Tribunal de première instance du 24 octobre 1991, dans l'affaire T-1-89, Rhône Poulenc SA/Commission, Recueil 1991, p. II-867, point 126.

389 Deuxième réponse de BPB à la demande de renseignements, p. 36.8129.

390 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 29-30.

391 Réponse de BPB à la communication des griefs, point 6.2.3.

392 Voir les considérants (57) et (61).

393 Réponse de BPB à la communication des griefs, p.108.

394 Arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, point 200.

395 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p.31.

396 Voir les considérants (58) et (59).

397 Voir le considérant (106).

398 Voir les considérants (111) et (113).

399 Réponse de Knauf à la communication des griefs, p. 22.

400 Arrêt précité dans l'affaire Thyssen Stahl AG/Commission, point 404.

401 Ibid., point 675.

402 Voir les considérants (162) et (163).

403 Arrêt précité dans l'affaire Thyssen Stahl AG/Commission, points 403 et suivants.

404 Arrêt de la Cour de justice du 28 mai 1998, dans l'affaire C-7-95, John Deere/Commission, Recueil 1998, p. I-3111, points 88 à 90.

405 Cette caractéristique du marché est confirmée par les entreprises destinataires de la présente décision, voir notamment la réponse de BPB à la communication des griefs, p. 26 ;

406 Voir le considérant (139).

407 Arrêt de la Cour de justice du 31 mars 1993, dans l'affaire C-89-85, Ahlström/Commission, Recueil 1993, I-1307, point 175 et arrêt précité dans l'affaire Trefilunion/Commission, point 79.

408 Arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, points 216 et 217.

409 Voir les considérants (127) et suivants, particulièrement (136) à (140).

410 Voir les considérants (158) à (161); la Commission précise qu'il existe certains éléments de fait selon lesquels Gyproc a participé à des comportements pouvant être qualifiés d'anticoncurrentiels avant la tenue de la réunion de Versailles (voir le considérant (471)). Toutefois, en ce qui concerne ces comportements, la Commission n'est pas en mesure d'apporter la preuve nécessaire que Gyproc savait ou aurait dû savoir qu'il adhérait à l'accord de Londres portant sur l'échange d'informations entre [représentants de haut niveau] sur les quatre marchés principaux.

411 Voir les considérants (171) et suivants.

412 Voir les considérants (447) et (448).

413 Voir notamment les considérants (229), (251) et (260).

414 Voir le considérant (219).

415 Voir le considérant (216).

416 Arrêts du Tribunal de première instance du 20 mars 2002, dans l'affaire T-23-99, LR AF/Commission, Recueil 2002, p. II-1705, point 39.

417 Déclaration de Gyproc à la Commission, p.35.7790.

418 Voir le considérant (265).

419 Arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, point 206.

420 Voir le considérant (272).

421 Arrêt précité dans l'affaire SA Cimenteries CBR ea/Commission, point 1849.

422 Arrêt précité dans l'affaire Tate & Lyle/Commission, point 58.

423 Ibid., points 60 et 61.

424 Voir le considérant (211).

425 Voir notamment les considérants (441), (452), (461), (469), (470), (475) et (477).

426 Arrêt de la Cour de justice du 28 mars 1984, dans l'affaire 29 et 30-83, CRAM & Reihnzink/Commission, Recueil 1984, 1679, point 26 et arrêt de la Cour de justice du 8 novembre 1983, dans l'affaire 96-82, IAZ/Commission, Recueil 1983, page 3369, points 22 et suivants.

427 Arrêt de la Cour de justice du 21 janvier 1999, dans les affaires jointes C-215-96 et C-216-96, Bagnasco e.a., Recueil 1999, p I-161, points 47 et 48.

428 Arrêt de la Cour de justice du 28 avril 1998, dans l'affaire C-306-96, Javico et Javico AG/Yves Saint Laurent Parfums SA, Recueil 1998, p. I-1983, points 16 et 17 et arrêt du Tribunal de première instance du 15 septembre 1998 dans l'affaire T-374-94, European Night Services, Recueil 1998, p. II-3141, point 136.

429 Arrêt du Tribunal de première instance du 10 mars 1992, dans l'affaire T-13-89, Imperial Chemical Industries/Commission, Recueil 1992, p. II-1021, point 304.

430 Arrêt de la Cour de justice du 29 octobre 1980, dans les affaires jointes 209 à 215 et 218-78, Van Landewyck e.a./Commission, Recueil 1980, p. 3125, point 170.

431 Voir les considérants (136), (455) et (456).

432 Concernant le fait que Gyproc a participé à des comportements anticoncurrentiels avant cette date, voir la note 410.

433 Voir les considérants (158), (161) et (457).

434 Arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, point 231 et arrêts du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, dans l'affaire T-295-94, Buchmann/Commission, Recueil 1998, p. II-813, point 121, et dans l'affaire T-310-94, Gruber + Weber/Commission, Recueil 1998, p. II-1043, point 140.

435 Arrêt précité dans l'affaire Commission/Anic Partecipazioni, points 83 et 203.

436 Voir notamment l'arrêt précité dans l'affaire HFB/Commission, points 54 et suivants.

437 Ibid., points 66-67 ; voir aussi l'arrêt du Tribunal de première instance du 11 mars 1999, dans l'affaire T-156-94, Aristrain/Commission, Recueil1999, p.II-645, points 119 et suivants.

438 Voir l'arrêt précité dans l'affaire SA Cimenteries CBR e.a./Commission, point 5040.

439 Réponses des 19 septembre et 9 octobre 2002 à la demande d'information de la Commission.

440 La dénomination sociale de Lafarge Plâtres international SA (anciennement dénommée Compagnie du Plâtre jusqu'au 10 août 1995) est devenue Lafarge Gypsum International le 15 août 2000.

441 Arrêt de la Cour de justice du 16 novembre 2000, dans l'affaire C-286-98, Stora Kopparbergs Bergslags/Commission, Recueil point 29 ; arrêt de la Cour de justice du 25 octobre 1983,dans l'affaire 107-82, AEG/Commission, Recueil 1983, p. 3151, point 50 ; arrêt du Tribunal de première instance du 1er avril 1993, dans l'affaire T-65-89, BPB/Commission, Recueil 1993, p. II-389, point 149 et arrêt précité dans l'affaire LVM/Commission, points 960-961.

442 Voir le considérant (43) et le site internet de Lafarge : www.Lafarge.com.

443 Note de M. [G] du 8 août 2001 adressée à M. [..., responsable juridique de Lafarge] et transmise au conseiller-auditeur en annexe à un courrier de l'avocat de Lafarge.

444 Voir les considérants (80), (290) et (302).

445 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, page 174.

446 Voir le considérant (133).

447 Voir le considérant (134).

448 Réponse de Lafarge à la communication des griefs, p. 174.

449 Réponse du 26 août 2002 à la demande d'information de la Commission, p.10.

450 Ibid.

451 Voir l'arrêt précité dans l'affaire SA Cimenteries CBR e.a./Commission, point 5040.

452 Réponse d'Etex à la communication des griefs, p. 24.

453 Voir l'arrêt précité, dans l'affaire IAZ, point 45, et l'arrêt du Tribunal de première instance du 13 décembre 2001, dans les affaires jointes T-45-98 et T-47-98, Krupp-Thyssen, Recueil 2001, p. II-3757, point 200.

454 Réponse à la communication des griefs, p.40-47.

455 JO C 9, 14.1.1998.

456 Réponse à la communication des griefs, p.41-42.

457 Réponse à la communication des griefs, p. 123-125.

458 Réponse à la communication des griefs, p.8, 49, 58-59.

459 Ibid., 125.

460 Réponse à la communication des griefs, p. 68-69.

461 Réponse à la communication des griefs, p.42-44.

462 Arrêt précité dans l'affaire John Deere Ltd/Commission, points 88-90.

463 Voir, par exemple, l'arrêt du Tribunal de première instance du 14 mai 1998 dans l'affaire T-354-94, Stora Kopparbergs Bergslags AB/Commission ("Carton"), Recueil 1998, p. II-2111, point 170 ; voir aussi l'arrêt précité dans l'affaire PVC II, points 745-748.

464 Voir l'arrêt précité dans l'affaire PVC II, point 748.

465 Réponse de Gyproc à la communication des griefs, p. 44.

466 Réponse à la communication des griefs, pp.46-47.

467 Arrêt du 20 mars 2002, dans l'affaire T-31-99, ABB Asea Brown Boveri Ltd/Commission, Recueil 2002, p. II-1881.

468 Comme indiqué au considérant (509), le chiffre d'affaires retenu pour Lafarge pour l'imposition d'une amende est celui de l'" entreprise ", au sens de l'article 81, paragraphe 1, du traité, dirigée par Lafarge, cette entreprise ayant commis l'infraction, c'est-à-dire le chiffre d'affaires mondial réalisé par l'ensemble des sociétés du groupe dirigé par Lafarge.

469 Voir également la décision 2002-405-CE de la Commission du 20 juin 2001 relative à une procédure d'application de l'article 82 du traité CE, Michelin (J.O. L 143 du 31.5./2002; p. 1, considérants 361-363).

470 Réponse à la communication des griefs, p.127-128.

471 Réponse à la communication des griefs, p.48-49.

472 Ibid., p.49.

473 Réponse à la communication des griefs, pp.14-23, pour l'entente au niveau européen des [représentants de haut niveau], pp.27-35, pour l'infraction relative au marché allemand, pp.25-26, pour le marché britannique, p.48.

474 Ibid., p.50.

475 Réponse à la communication des griefs, p.122-123.

476 Ibid., p.123.

477 Ibid.

478 Ibid.

479 Réponse à la communication des griefs, p.126.

480 Ibid, p.121-122.

481 Réponse à la communication des griefs, pp.121-123, 125-126.

482 Réponse à la communication des griefs, pp.19-23.

483 Réponse à la communication des griefs, pp.51-53.