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Décisions

Cass. 1re civ., 3 mars 1998, n° 96-12.078

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Laboratoires Léo

Défendeur :

Scovazzo

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lemontey

Rapporteur :

M. Sargos

Avocat général :

M. Sainte-Rose

Avocats :

SCP Nicolay, de Lanouvelle, SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde

Versailles, du 25 janv. 1996

25 janvier 1996

LA COUR : - Sur le moyen unique : - Attendu que la société Les Laboratoires Léo (le laboratoire) a mis sur le marché un produit médicamenteux sous forme de comprimé, dénommé Kaléorid, dont l'enveloppe est constituée d'une éponge non digestible qui permet la libération progressive du chlorure de potassium au cours du trajet digestif et doit être normalement évacuée par les voies naturelles ; qu'en juin 1988 M. Scovazzo s'est vu prescrire l'ingestion d'un comprimé de Kaléorid par jour et qu'en octobre de la même année il a du être hospitalisé d'urgence en raison de fortes douleurs dans la fosse iliaque droite ; que l'intervention chirurgicale pratiquée a révélé un processus inflammatoire très important de la région caecale autour d'un abcès et la présence d'un comprimé de Kaléorid logé à cet endroit ; qu'eu égard à l'importance du magma inflammatoire, le praticien n'a pu faire qu'un drainage, une autre intervention chirurgicale étant pratiquée en août 1989 en raison d'une poussée d'appendicite aiguë ; que M. Scovazzo, imputant son état à la présence du comprimé de Kaléorid non évacué, a assigné le laboratoire et que l'arrêt attaqué (Versailles, 25 janvier 1996) a accueilli sa demande et condamné le laboratoire à réparer son préjudice ;

Attendu que le laboratoire reproche à la cour d'appel d'avoir ainsi retenu sa responsabilité, alors que l'obligation de sécurité dont est tenu le fabricant du médicament " se heurte " à la livraison du produit ayant un effet thérapeutique conforme aux données acquises de la science, sans présenter normalement pour l'utilisateur des inconvénients ou dangers supérieurs à l'effet thérapeutique escompté et ne s'étend pas de plein droit à tous les dommages pouvant résulter de l'usage de ce médicament, que la cour d'appel, qui entérine le rapport de l'expert sans constater la défectuosité du médicament, a violé l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu que le fabricant est tenu de livrer un produit exempt de tout défaut de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, c'est-à-dire un produit qui offre la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre ; qu'il résulte des énonciations de la cour d'appel, que le préjudice subi par M. Scovazzo est imputable aux caractéristiques mêmes de l'enveloppe non digestible du comprimé qui, en stagnant dans l'intestin de la victime, a provoqué l'inflammation et ses suites ; que la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé le défaut de ce produit, a légalement justifié sa décision ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.