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Décisions

CA Angers, 1re ch. B, 14 septembre 2005, n° 04-02240

ANGERS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Mauget

Défendeur :

Duchesne

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Delétang

Conseillers :

MM. Mocaer, Travers

Avoués :

SCP Gontier-Langlois, SCP Chatteleyn, George

Avocats :

Mes Guillou, Massei

TGI Angers, du 26 août 2004

26 août 2004

Décision déférée à la cour

Par jugement du Tribunal de grande instance d'Angers, en date du 26 août 2004, il a été statué en ces termes:

Condamne la société Duchesne représentant son enseigne commerciale TV Directe Distribution à payer à Monsieur Michel Mauget la somme de deux mille euro (2 000 euro) à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil;

Condamne la société Duchesne représentant son enseigne commerciale TV Directe Distribution à payer à Monsieur Mauget la somme de mille euro (1 000 euro) sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

- Déboute les parties de leurs autres demandes;

- Condamne la société Duchesne représentant son enseigne commerciale TV Directe Distribution aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de Michel Mauget du 11 mai 2005:

Vu les dernières conclusions de la société Duchesne du 13 mai 2005

Exposé du litige

La société Duchesne, qui exerce, à l'enseigne TV Directe Distribution, une activité de vente par correspondance, a organisé un jeu publicitaire sous forme de loterie et adressé à un de ses clients, Michel Mauget, des lettres lui annonçant un gain de 10 000 euro.

Cette somme ne lui ayant pas été versée, Michel Mauget a assigné TV Directe Distribution en paiement le 18 août 2003.

La société Duchesne est intervenue volontairement à la cause et par jugement du 26 août 2004 le Tribunal de grande instance d'Angers a condamné cette société à payer à Michel Mauget la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ainsi que celle de 1 000 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et aux dépens.

Michel Mauget en est appelant. Il demande à la cour de condamner la société Duchesne à lui payer la somme de 10 000 euro par application de l'article 1371 du Code civil, subsidiairement sur celui de l'article 1382 du même Code, ainsi que celle de 3 000 euro par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société Duchesne, se portant appelante incidente, demande à la cour de réformer le jugement déféré, de constater qu'aucune faute ne peut être mise à sa charge, de débouter en conséquence Michel Mauget de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 1 500 euro sur le fondement de dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Motifs de la décision

Le 5 octobre 2002, Michel Mauget a reçu de la société Duchesne un document à en-tête de la société Duchesne intitulé" Déclaration officielle et définitive aux gagnants confirmés " et portant la mention " Identification d'un gagnant "; suivie de son nom et de la formule suivante : " Toutes mes félicitations Michel Mauget, vous êtes réellement gagnant d'un unique chèque en euro. C'est officiel - définitif et confirmé par notre huissier de justice assermenté. OUI le règlement de 10 000 euro par chèque bancaire vous est bien destiné Oui Votre chèque est prêt à vous être expédié IMMEDIATEMENT sous pli scellé par porteur spécial OUI vous et vous seul pouvez réclamer l'unique chèque bancaire de 10 000 euro grâce au titre de réclamation de paiement nominatif personnalisé ci-joint. En vertu des articles 6 et 7 de la réglementation en vigueur Michel Mauget, une réponse de votre part est obligatoire. Sans réponse de votre part, l'envoi de votre chèque quelqu'il soit sera définitivement suspendu. Votre chèque sera annulé et détruit."

Michel Mauget ayant répondu et commandé par la même occasion divers produits, a reçu de la société Duchesne le 25 novembre 2002 un dépliant intitulé : "Notification d'envoi confirmé de règlement ".

Ce document est ainsi rédigé :" Michel Mauget, c'est en engagement ferme et définitif ! Dés réception de votre avis d'acceptation nous procéderons à l'envoi immédiat de votre règlement sous pli scellé. "Il s'agissait du règlement du jeu et non de celui d'une somme d'argent.

Ce règlement figurait déjà au verso du document reçu par Michel Mauget le 5 octobre 2002, même s'il était en petits caractères ; il indique l'existence d'un pré-tirage sous le contrôle d'un huissier de justice, de destinataires de ces documents parmi lesquels serait tiré un gagnant unique.

Ceci était rappelé, plus clairement, sur le bon de commande utilisé par Michel Mauget.

Si le texte de ces envois était exagérément attractif, ce qui est habituel pour ces sociétés de vente, l'attention de Michel Mauget devait être attirée par le règlement au verso du premier envoi (articles 1, 4 et 5) et par le titre même de cet envoi qui indiquait qu'il avait été fait en nombre et ne pouvait donc s'adresser à lui seul alors qu'il n'existait qu'un seul et unique lot. Elle devait l'être aussi par les mentions du bon de commande.

Les formules ambiguës de ces envois ne pouvaient qu'être démasquées par la lecture attentive de l'intégralité des documents, ce qui est indispensable pour asseoir une certitude, particulièrement lorsqu'il s'agit de ce type de loterie publicitaire dont les méthodes sont bien connues de tous.

Le gain de 10 000 euro s'avérait donc hypothétique et la société Duchesne produit le constat de l'huissier de justice selon lequel ce n'est pas le nom de Michel Mauget qui a été tiré au sort lors du tirage définitif.

La société Duchesne n'ayant fait aucune promesse ferme à Michel Mauget, l'article 1371 du Code civil ne peut s'appliquer.

Il n'est pas davantage démontré que la société Duchesne a commis une faute, même si elle a tout fait pour laisser croire au lecteur inattentif qu'il avait gagné, et surtout Michel Mauget ne démontre pas avoir subi le moindre préjudice, l'illusion naïve et vite démentie d'un gain inespéré ne constituant pas, à elle seule, un préjudice.

Michel Mauget ne démontre par aucune pièce le choc émotionnel qu'il invoque et il sera donc débouté de toutes ses demandes, le jugement déféré étant infirmé.

Aucune considération d'équité ne commande de faire droit aux demandes d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Michel Mauget supportera les dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement : Infirme le jugement déféré; Statuant à nouveau; Déboute les parties de toutes leurs demandes; Condamne Michel Mauget aux dépens de première instance et d'appel recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

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