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Décisions

Cass. 2e civ., 11 octobre 2001, n° 99-16.735

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Flow control technologies (SA)

Défendeur :

Tichane, CPAM Bearn et Soule

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Buffet

Rapporteur :

M. Guerder

Avocat général :

M. Kessous

Avocats :

SCP Nicolay, de Lanouvelle, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

Pau, 1re ch., 1re sect., du 29 mars 1999

29 mars 1999

LA COUR : - Sur les moyens, réunis : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau 29 mars 1999), que M. Tichane a été victime d'un accident du travail, alors qu'il effectuait avec un collègue, pour le compte de son employeur, la Société nationale des gaz du Sud-Ouest (SNGSO), des travaux d'entretien sur une canalisation de gaz sous pression, dont la porte orifice s'est rompue ; que cette rupture étant imputée à un vice de la porte orifice, M. Tichane a fait assigner devant le tribunal de grande instance, en réparation de son préjudice, le fabricant du produit, la société Lallstorm, aux droits de laquelle est venue la société Flow Control Technologies (la société) ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen, 1°) qu'en énonçant à la fois des motifs relatifs à la faute et des motifs relatifs à la garde, et en laissant incertain Ie fondement de la responsabilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1384 du Code civil ; 2°) que la société Lallstorm montrait (conclusions du 25 mars 1998, p. 2) qu'il était contraire à tous les usages d'entreprendre, comme l'avaient fait la victime et son collègue présent sur les lieux de l'accident, de manipuler un assemblage dont toute pression n'avait pas été évacuée ; qu'en affirmant l'absence de faute de la victime sans s'expliquer sur cet élément, la cour a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1384 du Code civil ; 3°) qu'en déclarant des expertises non judiciaires opposables à une partie qui n'y avait pas participé, et en asseyant sa conviction sur ces seules expertises, sans en corroborer les données par d'autres éléments, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; 4°) que la victime invoquait une responsabilité délictuelle au fondement non précisé, et le fabricant se défendait sur le terrain de la responsabilité pour faute, de sorte qu'en visant d'office la qualité supposée de gardien de la structure qu'aurait eue le fabricant, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, et violé les articles 4 et 7 du nouveau Code de procédure civile ; 5°) que la notion de garde de la structure ne peut s'appliquer qu'aux choses dotées d'un dynamisme propre ou intrinsèquement dangereuses ; qu'en n'expliquant pas en quoi la porte concernée était dotée d'un dynamisme propre ou intrinsèquement dangereuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 du Code civil ; 6°) que la notion de garde de Ia structure est sans application à une chose que son utilisateur est amené à démonter lui-même pour les besoins de son entretien ; que la société Lallstorm faisait valoir (notamment conclusions du 28 janvier 1998, p. 53), reprenant les propres déclarations de l'employeur de la victime, que la société SNGSO faisait démonter et remonter les portes de ce type tous les trois mois ; qu'en ne s'expliquant pas sur cette circonstance de nature à rompre tout lien de garde entre le fabricant et la chose, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 du Code civil ; 7°) qu'en déduisant la faute du fabricant de la non conformité du produit à une norme qu'elle n'a pas pris soin de préciser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve régulièrement communiqués et contradictoirement débattus devant elle que la cour d'appel a pris en considération une expertise officieuse de l'Institut de soudure de Paris, réalisée à la requête de la SNGSO, employeur de M. Tichane, un rapport d'enquête de la Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) d'Aquitaine, et une étude du Centre technique des industries mécaniques, réalisée à la requête de la société ;

Et attendu que l'arrêt retient que selon l'ingénieur de la DRIRE, deux agents procédant à l'étalonnage de la calculatrice destinée à mesurer le volume de gaz transitant dans la canalisation avaient enlevé puis replacé dans la canalisation le diaphragme et le couvercle le maintenant serré, lorsqu'une fuite avait été décelée, et que le collègue de M. Tichane avait resserré les boulons du couvercle qui avait cédé ; que la DRIRE et l'Institut de soudure avaient conclu que la rupture résultait de la fragilité de l'acier à la température de service, et que l'acier employé ne correspondait pas à la norme requise ; que l'arrêté du 11 mai 1970 portant règlement de sécurité des ouvrages de transport de gaz laissait la qualité du matériau des appareils accessoires et celle des soudures à la responsabilité du constructeur ; que l'accident était dû à la rupture brutale de la porte orifice, conséquence directe de la fragilité importante de l'acier utilisé pour sa fabrication ; que la société n'établissait pas que l'accident serait dû à une faute de la victime qui n'a pas eu de rôle actif dans l'opération, ni à un défaut d'entretien ;

Qu'en déduisant de ces constatations et énonciations que la société, fabricant de la porte orifice et gardienne de la structure, devait être déclarée responsable de l'accident, la cour d'appel qui, répondant aux conclusions, n'a pas méconnu les termes du litige, ni violé le principe de la contradiction, en restituant aux faits leur exacte qualification, a légalement justifié sa décision, au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Par ces motifs : Rejette le pourvoi.