CCE, 17 décembre 2002, n° M.2822
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
EnBW/ENI/GVS
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, paragraphe 2, point a), vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 (2), et notamment son article 8, paragraphe 2, et son article 22, paragraphe 3, vu la décision prise par la Commission le 16 septembre 2002 d'engager la procédure dans la présente affaire, après avoir entendu le comité consultatif en matière de concentrations (3), vu le rapport final sur l'audition des intéressés et des tiers (4) considérant ce qui suit:
1. Le 14 août 2002, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89 ("le règlement 4064-89"), d'un projet de concentration par lequel l'entreprise allemande Energie Baden-Württemberg AG ("EnBW") et l'entreprise italienne ENI SpA ("ENI") prennent le contrôle en commun de l'entreprise allemande Gasversorgung Süddeutschland GmbH ("GVS") par un achat d'actions.
2. Après avoir examiné la notification, la Commission a conclu que l'opération notifiée entrait dans le champ d'application du règlement 4064-89 et soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun. C'est pourquoi, le 16 septembre 2002, elle a décidé d'engager la procédure prévue à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement 4064-89 et à l'article 57 de l'accord EEE.
3. Le comité consultatif a examiné le projet de la présente décision le 6 décembre 2002.
I. LES PARTIES ET L'OPÉRATION
4. EnBW poursuit des activités dans le domaine de l'électricité ainsi que dans celui de la production, du transport, de la distribution, de la fourniture et du négoce de gaz et de la fourniture de chauffage urbain. Parmi ses autres activités figurent les télécommunications et le recyclage de déchets. Avant la libéralisation du marché allemand de l'électricité, les activités d'EnBW étaient concentrées dans le Sud-Est de l'Allemagne (principalement le Land de Bade-Wurtemberg), mais après la libéralisation, EnBW a étendu à l'échelle nationale certaines de ses activités dans le domaine de l'électricité (par exemple, la formule "Yello" principalement destinée à la clientèle des particuliers). En ce qui concerne le gaz, EnBW le distribue au niveau local, par l'intermédiaire de ses filiales, aux clients finals et aux distributeurs secondaires.
5. EnBW est contrôlée conjointement par Electricité de France ("EDF") et Zweckverband Oberschwäbische Elektrizitätswerke ("OEW") (5). EDF est une entreprise publique qui est présente dans tous les domaines de la fourniture et du transport d'électricité en France. EDF est l'opérateur du réseau national, mais n'est pas présente dans les secteurs de la production et de la fourniture de gaz. Elle détient indirectement 34,5 % du capital d'EnBW. Le groupement OEW, qui se compose de neuf collectivités régionales du sudest de l'Allemagne, a pour objet principal la détention de participations dans des entreprises présentes dans les secteurs de l'énergie. OEW détient 34,5 % du capital d'EnBW par l'intermédiaire de sa filiale à 100 % OEW Beteiligungsgesellschaft mbH.
6. ENI a pour activité l'exploration et la production de pétrole et de gaz naturel dans le monde entier. Producteur de gaz en Italie, en mer du Nord, en Égypte, au Nigeria, au Kazakhstan et en Libye, ENI achète également du gaz à Sonatrach, à Gasunie, à Gazprom/Gazexport, à Nigeria LNG et à quelques producteurs norvégiens. Elle assure aussi la fourniture, le transport, le stockage, la distribution et le négoce de gaz naturel. ENI détient des participations dans des entreprises ayant des capacités de transport et assurant l'exploitation des gazoducs transnationaux en Allemagne, en Autriche, en Suisse et en Tunisie ainsi que des gazoducs immergés en Méditerranée entre la Tunisie et l'Italie, en mer Noire entre la Russie et la Turquie et en mer du Nord entre le Royaume-Uni et la Belgique.
7. ENI est actuellement contrôlée par le ministère italien des finances qui détient 30,33 % de son capital; le reste du volume d'actions est flottant.
8. GVS a pour activités la distribution et le transport de gaz. À cet effet, elle utilise et exploite un réseau de gazoducs dans le Land de Bade-Wurtemberg. GVS fournit principalement du gaz à des entreprises locales de distribution. De plus, GVS approvisionne deux usines, Rodia Rhone-Poulenc AG à Fribourg et Badische Stahlwerke AG à Kehl. Cette dernière activité représente environ 1 % de son chiffre d'affaires.
9. Actuellement, le capital de GVS est détenu à 26,25 % par MVV RHE AG ("MVV"), à 25 % par le Land de Bade-Wurtemberg, à 15,35 % par des collectivités locales individuelles et à 33,4 % par la société Neckarwerke Stuttgart AG ("NWS"), laquelle est contrôlée par EnBW. La société MVV, le Land de Bade-Wurtemberg, NWS et certaines collectivités locales, qui représentent ensemble 95,62 % du capital de GVS, ont décidé de vendre leur participation, tandis que deux collectivités locales resteront actionnaires de GVS avec 4,38 % du capital à elles deux. EnBW et ENI (cette dernière par sa filiale à 100 % Società Nazionale Metanodotti ("SNAM")) ont l'intention d'acquérir ces 95,62 % du capital de GVS. Une fois l'opération achevée, les parties notifiantes entendent faire de GVS leur principal circuit de distribution de gaz à l'intérieur et à l'extérieur des frontières du Land de Bade-Wurtemberg.
II. CONCENTRATION
10. Par suite de l'opération notifiée, EnBW et ENI auront le contrôle en commun de GVS. En effet, EnBW et ENI (par sa filiale à 100 % SNAM) envisagent d'acquérir par l'intermédiaire de NewCo, une entreprise commune dont elles détiennent 50 % chacune, la totalité du capital de GVS et, ce faisant, de prendre le contrôle de GVS. Comme NewCo sera simplement une société de portefeuille pour les participations respectives des parties dans GVS, l'opération aboutira indirectement au contrôle en commun de GVS par les parties. Toutes les grandes décisions stratégiques de NewCo et de GVS devront recevoir l'accord préalable d'EnBW et de SNAM. Les deux sociétés mères seront à parité de droits pour la nomination des organes de décision de l'entreprise commune. EnBW et SNAM détiendront donc le contrôle en commun de GVS par l'intermédiaire de NewCo.
11. Par conséquent, l'opération envisagée constitue une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement 4064-89.
III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE
12. Le chiffre d'affaires total réalisé sur le plan mondial par l'ensemble des entreprises concernées, c'est-à-dire EDF (EnBW incluse), ENI et GVS, représente un montant supérieur à 5 000 millions d'euro (en 2001 : 40 700 millions d'euro pour EDF, 48 900 millions d'euro pour ENI et 1 734 millions d'euro pour GVS). Le chiffre d'affaires total réalisé individuellement dans la Communauté par EDF, ENI et GVS représente un montant supérieur à 250 millions d'euro (en 2001 : 36 600 millions d'euro pour EDF, 36 200 millions d'euro pour ENI et 1 704 millions d'euro pour GVS). EDF (EnBW incluse) a réalisé plus des deux tiers de son chiffre d'affaires total dans la Communauté en France, GVS en Allemagne et ENI en Italie. L'opération notifiée revêt donc une dimension communautaire au sens de l'article 1er, paragraphe 2, du règlement 4064-89.
IV. LES MARCHÉS EN CAUSE
A. Marché de produits en cause
13. En Allemagne, pour des raisons d'évolution historique, il existe deux niveaux de grossistes en gaz : d'une part, les grossistes qui achètent du gaz auprès de producteurs de la Communauté et de pays tiers et transportent ce gaz sur de grandes distances par des gazoducs à haute pression et, d'autre part, les entreprises régionales de fourniture qui utilisent des gazoducs à moyenne et basse pression sur de petites distances. Dans ses décisions Exxon/Mobil (6) et Veba/Viag (7), la Commission conclut pour l'Allemagne que les grossistes grande distance opèrent sur un marché différent de celui des grossistes petite distance.
La vente régionale de gaz en gros est le marché de produits en cause
14. GVS a pour activités la distribution et le transport de gaz au niveau régional. À cet effet, elle utilise et exploite un réseau de gazoducs dans le Land de Bade-Wurtemberg. GVS fournit principalement du gaz à des entreprises locales de distribution. C'est pourquoi, la vente régionale de gaz en gros est le marché de produits en cause sur lequel GVS opère.
15. Comme on le verra plus loin au considérant 20, l'enquête effectuée par la Commission a révélé qu'en général, les grands clients commerciaux et les régies municipales ("Stadtwerke") concluent des contrats de fourniture avec des grossistes en gaz opérant dans leur région respective. Autrement dit, la vente régionale de gaz en gros (appelée, dans des décisions antérieures (8), transport courte distance en gros) (9) doit toujours être considérée comme un marché de produits distinct. L'appréciation qui suit s'attache au marché ainsi défini.
B. Marché géographique en cause
16. Dans la décision Exxon/Mobil (10) comme dans la décision Veba/Viag (11), la Commission ne s'est pas prononcée sur la question de savoir si, en Allemagne, les marchés du gaz en gros étaient encore régionaux, c'est-à-dire encore limités aux anciennes régions à démarcation, ou s'il s'agissait déjà d'un marché national.
1. Les parties notifiantes déclarent que le marché du gaz en gros est un marché national
17. Les parties notifiantes considèrent que les marchés de transport en gros sont nationaux, car la distribution est organisée, depuis toujours et dans une large mesure, sur une base nationale par le truchement d'opérateurs nationaux ou régionaux. Cette thèse est étayée par la possibilité d'accès pour les tiers fixée sur une base nationale, ce qui permet à d'autres fournisseurs régionaux de gaz d'approvisionner des clients même dans des régions où le fournisseur concerné ne dispose pas d'un réseau physique.
18. En ce qui concerne l'appréciation de la Commission dans les décisions Exxon/Mobil et Veba/Viag, les parties notifiantes considèrent que la délimitation régionale établie dans ces décisions s'explique par le cadre réglementaire existant à l'époque, qui était fondé sur la convention " Verbändevereinbarung Erdgas I " ("la convention VVI") (12) et ne permettait pas assez aux nouveaux arrivants dans le secteur de la fourniture de gaz en gros de se mesurer efficacement avec les opérateurs historiques respectifs des différentes régions. Mais depuis lors, les organisations professionnelles concernées ont signé, le 3 mai 2002, la convention " Verbändevereinbarung Erdgas II " ("la convention VVII") qui est entrée en vigueur le 1er octobre 2002 et expirera le 30 septembre 2003. 19. Les parties soulignent que la convention VVII applique un système de tarification harmonisé pour le transport régional et transrégional. Le prix est calculé en fonction du nombre et des caractéristiques des trajets empruntés. C'est pourquoi les parties estiment que les marchés du gaz doivent être considérés comme des marchés d'envergure nationale par suite des effets de la convention VVII favorables à la concurrence.
2. L'enquête a montré que le marché de la vente régionale en gros de gaz est encore un marché régional et le restera probablement à l'avenir.
2.1 Actuellement, la plupart des clients continuent à être approvisionnés par des grossistes en gaz opérant à l'intérieur des anciennes démarcations, à savoir les " Länder ".
20. L'examen effectué par la Commission n'a pas corroboré la déclaration des parties, selon laquelle le marché du gaz doit être considérés comme un marché national, mais il a révélé que de nombreux grands clients industriels et régies municipales ("Stadtwerke") avaient conclu des contrats de fourniture avec des grossistes en gaz opérant dans leurs régions respectives, c'est-à-dire au niveau du " Land " (Bade-Wurtemberg, Bavière, Hesse, Rhénanie-Palatinat, Rhénanie du Nord-Westphalie, etc"). Cela correspond aux anciennes démarcations des marchés du gaz qui ont été interdites avec le lancement du processus de libéralisation du secteur du gaz.
21. Par ailleurs, très rares sont les clients qui considèrent le recours aux marchés à terme comme une source d'approvisionnement de rechange viable. En effet, les clients estiment généralement que les marchés à terme ne conviennent pas pour l'achat de volumes substantiels en raison des contrats de livraison généralement à court terme et des faibles volumes disponibles. De surcroît, il appert que de nombreuses régies municipales manquent d'expérience dans la gestion du renouvellement des achats à terme et de la continuité des livraisons permettant d'assurer un approvisionnement permanent en gaz. C'est pourquoi les marchés à terme ne constituent pas, à l'heure actuelle, un moyen usité de se procurer du gaz auprès d'une source extérieure à la région.
2.2 En application de la directive 98-30-CE du Parlement européen et du Conseil du 22 juin 1998 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel (13), l'Allemagne a commencé à libéraliser le secteur du gaz au moyen de conventions : la " Verbändevereinbarung Erdgas I (VVI) ", ultérieurement modifiée par la Verbändevereinbarung Erdgas II (VVII).
22. Les conventions VVI et VVII ont été conclues par quatre organisations professionnelles Allemandes (14) afin de mettre en pratique les principes de la directive 98-30-CE du Parlement européen et du Conseil de 22 juin 1998 (15). S'il est vrai que la situation actuelle de la fourniture est toujours fondée sur le cadre défini par la convention VVI parce que la convention VVII n'est entrée en vigueur que le 1er octobre 2002, force est de constater que le cadre prévu par VVII n'est guère différent de celui défini par VVI. En particulier, la convention VVII ne modifie pas le concept de tarification en fonction de la distance, précédemment établi par la convention VVI. Les différences essentielles entre VVI et VVII résident principalement dans les deux points suivants : un nouveau modèle d'accès au réseau ("Punkt-Zahlen-Modell") et son application au niveau de la vente régionale en gros.
23. En ce qui concerne l'accès au réseau, la convention VVI avait établi un modèle tarifaire utilisant le principe des timbres-poste (16) pour l'accès aux réseaux régionaux. Chaque exploitant de réseau concerné définissait le prix des timbres-poste sur des zones données.
24. La convention VVII a introduit un nouveau modèle pour l'accès aux réseaux régionaux et l'accès aux réseaux de transport. Avec ce modèle, appelé " Punktzahlen-Modell ", le prix du transport est calculé en fonction de la distance de transport et du diamètre ou de la pression des gazoducs. Ce modèle sert aussi pour le transport sur grande distance. Sur la base de la convention VVII, un modèle de calcul harmonisé est prévu pour le transport grande distance et la vente régionale en gros. Pour les réseaux de fourniture locaux (Stadtwerke), le modèle tarifaire reste le même que celui de la convention VVI, à savoir le timbre-poste pour distribution locale ("Endverteilerbriefmarke").
25. Les opérateurs devaient faire connaître publiquement au plus tard le 1er octobre 2002 s'ils appliqueraient pour leurs réseaux le " Punktzahlen-Modell " ou le timbre-poste pour distribution locale. S'ils optaient pour le " Punktzahlen-Modell ", ils étaient tenus de publier au plus tard le 30 juin 2002 leurs prix spécifiques en fonction de la distance de transport et du diamètre ou de la pression des gazoducs. Ils devaient aussi publier le 1er octobre 2002 au plus tard les " Punktzahlen " proprement dits, lesquels doivent être calculés à partir du prix spécifique, permettant ainsi de calculer le prix total à acquitter en fonction de la distance, du diamètre, etc.
2.3 Les éléments clés jugés nécessaires pour l'ouverture totale du marché du gaz aux nouveaux arrivants n'ont pas encore été abordés par les conventions VVI et VVII.
26. Il apparaît que la convention VVII ne permet toujours pas aux concurrents potentiels de calculer le prix total de manière transparente, car l'opérateur du réseau physique à utiliser est seul à connaître ou à choisir le trajet que le gaz va suivre dans son réseau et, par conséquent, les paramètres de calcul du prix (distance, diamètres de différents tronçons). Les fournisseurs qui veulent un transport direct n'ont aucun moyen de vérifier si la distance de transport concernant le trajet qu'ils ont payé est celle qui a été effectivement parcourue.
27. Ce modèle de coût reste lié à la distance et nécessite des accords spécifiques pour l'accès des tiers avec chacun des exploitants de réseau concernés par une opération donnée. Cela signifie généralement que plus la distance que le gaz acheté doit parcourir est grande, plus il y aura de réseaux à traverser, plus il y aura d'accords d'accès à négocier avec les exploitants des réseaux concernés et plus les frais et contraintes supplémentaires seront élevés. Par conséquent, l'accès des tiers continue à être coûteux et compliqué et empêche d'autres fournisseurs de transporter du gaz sur une grande distance si ce n'est sur leur propre réseau.
28. Il convient de noter que le ministère fédéral de l'économie et du développement technique a commandé une étude indépendante (17) qui présente une évaluation concurrentielle du cadre établi par la convention VVI pour l'accès au réseau et parvient aux conclusions suivantes:
" Les règles actuelles définies par les organisations professionnelles pour l'accès au réseau et le tarif ne sont pas encore de nature à permettre le développement d'un marché liquide du gaz et d'opérations de masse, les questions essentielles n'ont pas encore été abordées (")
- négociations au cas par cas par rapport conditions types obligatoires
- accès au réseau et tarifs
(")
L'accès au réseau et les tarifs sont liés aux opérations. Autrement dit, chaque tarif est défini directement ou indirectement en fonction de l'opération commerciale concernée. Ce système entrave la concurrence en raison du coût élevé des opérations et du risque de discrimination envers les tiers pour l'accès au réseau. En fait, les tarifs devraient être indépendants de l'opération concernée (tarif timbres-poste) ".
29. Ces arguments conservent leur validité, car la convention VVII n'a pas abordé ces questions. En fait, cette dernière n'est qu'une étape intermédiaire dans le processus de libéralisation des marchés du gaz et nombre des questions essentielles, comme les conditions types obligatoires, sont restées sans réponse et doivent être abordées dans une nouvelle convention qui sera publiée le 30 septembre 2003. À cet égard, la convention VVII contient une liste d'améliorations que les organisations professionnelles signataires auront à traiter dans la nouvelle convention VVIII. Ainsi, elles devront élaborer un concept amélioré qui atteigne les buts suivants:
Plus de concurrence et de transparence que ce ne fut le cas jusqu'ici, service et utilisation plus simples, possibilités de négociation en bourse, absence de discrimination, adaptation au marché de masse et tarif indépendant des caractéristiques de l'opération concernée (tarif timbre-poste non rapporté à la distance), pertinence pour la formation d'un groupe de bilan énergétique, imputation des coûts selon le principe de causalité.
Le concept amélioré devra entrer en vigueur à temps pour le début de la campagne de gaz 2003/2004.
Les organisations professionnelles signataires conviennent qu'un échange continu d'expérience et de vues dans ce domaine doit permettre d'accompagner et de favoriser un accès aux réseaux qui soit plus simple, plus transparent et plus compétitif. (18)
2.4 Comme elle ne peut présumer avec le degré de certitude voulu que les caractéristiques des marchés du gaz vont évoluer à brève échéance, la Commission doit se fonder sur les caractéristiques actuelles des marchés concernés, lesquels sont de nature régionale.
30. En ce qui concerne la future convention VVIII, la convention VVII précise qu'elle devrait être prête pour la campagne de gaz 2003/2004. Mais, pour l'heure, la Commission ne voit pas comment les organisations professionnelles concernées vont aborder les questions exposées au considérant 24. C'est pourquoi, aux fins de la présente appréciation, elle ne peut tenir compte de l'incidence de la future convention VVIII sur l'évolution des marchés du gaz en Allemagne.
31. À la lumière de ce qui précède, la Commission conclut que l'étendue du marché du gaz en cause est actuellement régionale et que les conditions d'entrée dans le Bade-Wurtemberg de concurrents extérieurs ne s'amélioreront que progressivement dans les années à venir. GVS a pour activités la distribution et le transport de gaz. À cet effet, elle utilise et exploite un réseau de gazoducs dans le Land de Bade-Wurtemberg. C'est pourquoi le marché géographique à considérer en l'espèce est le Land de Bade-Wurtemberg.
2.5 Le Bade-Wurtemberg constitue une partie substantielle du Marché commun.
32. Les quantités de gaz fournies dans le Land de Bade-Wurtemberg correspondent grosso modo à celles qui sont fournies, par exemple, en Autriche ou au Danemark. C'est pourquoi le Bade-Wurtemberg constitue un partie substantielle du Marché commun.
V. COMPATIBILITÉ AVEC LE MARCHÉ COMMUN
A. POSITION DOMINANTE DE GVS
1. GVS détient des parts élevées du marché régional de vente de gaz en gros et est le principal fournisseur de gaz dans le Land de Bade-Wurtemberg.
33. GVS possède et exploite dans le Bade-Wurtemberg un réseau de transport d'environ 1 881 km comprenant deux stations de compression et deux petites installations de stockage. Le gaz circule principalement dans le sens nord-sud, les points d'entrée les plus importants dans le réseau de gazoducs de GVS étant Lampertheim, Amerdingen, Zoltingen, Michelbach et Willstätt. Ces points d'entrée sont desservis par les réseaux de transport internationaux MEGAL (appartenant à Ruhrgas et à Gaz de France), TENP (appartenant à Ruhrgas et à ENI/SNAM) et MIDAL (appartenant à Wingas). GVS est approvisionnée en gaz par Wingas, qui représente [moins de 20 %]* de ses approvisionnements. Le reste lui est fourni par Ruhrgas.
34. Dans le Bade-Wurtemberg, le marché régional de vente de gaz en gros a représenté en 2001 une consommation de [70 à 90]* milliards de kWh. Seules GVS, Ruhrgas et Wingas sont présentes à ce niveau de marché. GVS détient une part de [plus de 75 %]* du marché de la vente régionale en gros, le reste [moins de 25 %]* étant détenu par Ruhrgas et Wingas.
35. GVS un conclu avec ses clients des contrats de fourniture de longue durée, comme le montre le tableau 1 qui suit. La durée de [40 % à 50 %]* de ces contrats prend fin d'ici à 2008 et celle des autres en 2015.
Tableau 1 : Contrats de fourniture de GVS dans le Bade-Wurtemberg
Nom de la Stadtwerk
Date d'expiration du contrat
Volume de fourniture annuel (2001, GWh)
[Fourniture totale de 60 000 à 80 000 GWh]*
36. Les contrats de fourniture actuels entre GVS et ses clients sont calqués sur un modèle de contrat type appelé LV III. Ce modèle (version du 1er mars 2000) prévoit la durée du contrat jusqu'au 30 septembre 2015. Les contrats de fourniture calqués sur le modèle LV III ne prévoient aucune possibilité de résiliation anticipée et n'ont qu'une souplesse limitée quant à l'adaptation des volumes et des prix.
2. Conclusion
37. Au vu de sa part de marché de [plus de 75 %]*, on peut présumer que GVS occupe une position dominante.
B. Potentiel d'évolution du marché de fourniture de gaz
1. Même si GVS va conserver sa position dominante dans l'immédiat, tout porte à croire qu'elle devra faire face à un certain degré de concurrence dans les années à venir.
38. Tout porte à croire que certains des facteurs qui entravent actuellement une concurrence digne de ce nom sur le marché régional de gros vont peut-être évoluer dans un avenir prévisible, à telle enseigne qu'un certain degré de concurrence, même limité, serait concevable. Il s'agit notamment de l'achèvement du gazoduc grande distance Südal de Wingas et de l'arrêt attendu de la Cour suprême allemande sur les contrats de longue durée pour la fourniture exclusive de gaz.
2. Achèvement du gazoduc grande distance Südal de Wingas.
39. Importateur de gaz en gros, Wingas possède et exploite un réseau de gazoducs qui lui permet de transporter du gaz sur de grandes distances, mais aussi d'approvisionner directement des Stadtwerke et des clients industriels implantés dans des zones qui jouxtent le trajet de ses gazoducs. Dans ce cas, Wingas n'a pas besoin d'emprunter le réseau d'un concurrent comme GVS, mais établit des embranchements spécialisés reliant son principal gazoduc aux sites de ses clients.
40. Pour l'heure, un tronçon du réseau de gazoducs de Wingas couvre une petite zone du nord-ouest du Bade-Wurtemberg. Wingas approvisionne actuellement trois régies municipales situées dans cette zone " Stadtwerke Weinheim, Stadtwerke Heidelberg et Stadtwerke Schwäbisch Hall " qui étaient encore clientes de GVS il y a peu.
41. Mais Wingas construit actuellement un nouveau gazoduc, appelé Südal, qui devrait être achevé vers la fin de 2004. Ce gazoduc lui permettra de transporter du gaz en provenance de Russie et d'approvisionner des municipalités et des clients industriels dans des agglomérations comme Munich et Augsbourg en Bavière et Stuttgart dans le Bade-Wurtemberg. Compte tenu de la densité de la clientèle industrielle et municipale dans les zones que traversera le gazoduc, Wingas se présente comme un concurrent viable de GVS dans une partie substantielle du Land de Bade-Wurtemberg à partir de 2005.
3. Jugements relatifs aux contrats de longue durée de fourniture exclusive de gaz.
42. Les clauses de fourniture exclusive de longue durée figurant dans les contrats de fourniture de gaz ont fait l'objet de procédures devant le tribunal de grande instance de Düsseldorf (19) et devant le tribunal de grande instance de Stuttgart (20). Les deux juridictions ont conclu que les clauses d'exclusivité de longue durée incriminées constituaient des infractions au droit allemand et au droit communautaire de la concurrence (articles 1er, 19 et 20 de la loi allemande portant interdiction des restrictions de concurrence21 et articles 81 et 82 du traité CE) et étaient donc réputées invalides.
43. En ce qui concerne les conséquences de l'invalidité des clauses d'exclusivité de longue durée incriminées, le tribunal de grande instance de Düsseldorf a rejeté la possibilité de recourir à la clause de sauvegarde figurant dans le contrat pour adapter le volume contractuel de gaz ou la durée du contrat. Le tribunal de grande instance de Stuttgart ne l'a pas suivi sur ce point, car il n'a pas écarté la possibilité que la clause de sauvegarde constitue la base d'une adaptation appropriée et nécessaire. C'est pourquoi il a rejeté la demande d'invalidation de l'intégralité du contrat. Ainsi, les clients seraient libres de se procurer au moins un certain pourcentage de leurs approvisionnements actuels auprès d'un autre fournisseur.
44. Le jugement du Tribunal de grande instance de Stuttgart fait l'objet d'une procédure d'appel devant la Cour suprême fédérale, laquelle a jugé l'appel recevable. Une audience est prévue pour avril 2003.
45. Selon l'approche qu'adoptera la Cour suprême fédérale, il se peut que les clients seront en mesure de se procurer au moins un certain pourcentage de leurs approvisionnements auprès d'un autre fournisseur. À son tour, cette possibilité rendrait une présence dans le Bade-Wurtemberg plus intéressante aux yeux de nouveaux concurrents comme Wingas, mais aussi de revendeurs et de grossistes de gaz des régions voisines. Il est vrai que dans leur état actuel, les éléments incitant de nouveaux concurrents à opérer dans le Land de Bade-Wurtemberg sont très peu développés. Cette situation résulte principalement de la conjonction de deux facteurs. D'abord, même si le transport est juridiquement et techniquement faisable, il reste difficile en raison des conditions de transport actuelles telles qu'elles sont décrites aux considérants 22 à 29. Ensuite et surtout, les clients sont liés à leur fournisseur actuel par des contrats de longue durée.
46. Toutefois, dans une situation où au moins un certain pourcentage de la demande sera ouvert à la concurrence, les concurrents auront une chance de pénétrer sur le marché et de trouver des clients. Cela est évident pour une entreprise comme Wingas qui construit des embranchements spécialisés entre son principal gazoduc et les sites de ses clients et n'a donc pas besoin d'emprunter le réseau de GVS. Mais même des concurrents comme les revendeurs de gaz et les grossistes des régions voisines qui doivent emprunter le réseau de GVS pourraient profiter de ce développement, au moins dans une certaine mesure, surtout si les conditions de transport s'améliorent à terme.
3. Conclusion
47. À la lumière de ce qui précède, la Commission conclut que tout porte à croire qu'à moyen terme, GVS fera face à un certain degré de concurrence. Cela sera notamment le cas en raison de l'achèvement du gazoduc Südal vers la fin de 2004 et de l'ouverture des contrats de fourniture de longue durée à la suite de l'arrêt attendu de la Cour suprême fédérale qui, à son tour, permettra aux clients de se procurer au moins un certain pourcentage de leurs approvisionnements auprès d'un autre fournisseur (22).
C. RENFORCEMENT DE LA POSITION DOMINANTE DE GVS
48. La concentration envisagée renforcera la position dominante de GVS dans le Bade- Wurtemberg par une intégration verticale en aval évinçant une partie substantielle des clients actuels de GVS.
1. EnBW contrôle une partie substantielle du marché aval de la distribution de gaz
49. Dans le Land de Bade-Wurtemberg, EnBW est présente sur le marché de la distribution locale de gaz - qui constitue le marché aval par rapport à la vente régionale de gaz en gros -, par le truchement d'une participation dans des Stadtwerke. Les volumes vendus par GVS à des entreprises contrôlées par EnBW, c'est-à-dire les volumes vendus aux Stadtwerke dans lesquelles EnBW détient une participation majoritaire, représentent [plus de 20 %]* du marché régional de gros, comme le montre le tableau 2 ci-dessous. Si l'on considère toutes les participations d'EnBW, les volumes vendus par GVS à ces Stadtwerke représentent [plus de 30 %]* du marché régional de gros.
Tableau 2 : Participation d'EnBW dans des Stadtwerke du Bade-Wurtemberg <emplacement tableau>
50. Toutefois, la position d'EnBW sur le marché aval est encore plus forte, car ses filiales fournissent elles aussi du gaz sur la base de contrats de longue durée à des Stadtwerke indépendantes, c'est-à-dire des Stadtwerke dans lesquelles EnBW ne détient aucune participation. Le tableau 3 donne la liste des Stadtwerke qui sont approvisionnées en gaz par les filiales d'EnBW Neckarwerke Stuttgart AG (NWS), EnBW Gas GmbH (EnBW Gas), EVS-Gasversorgung Nord Energie GmbH (EGVN), EVS-Gasversorgung Süd GmbH (EGVS) et EnBW Ostwürttemberg DonauRies AG (ODR) en leur qualité de distributeurs régionaux.
Tableau 3: Clients approvisionnés par des filiales d'EnBW
Nom de la Stadtwerk
Fournisseur
Date d'expiration du contrat
Volume annuel fourni (2001, GWh)
[Fourniture totale inférieure à 7.000 GWh]*
*Clients dont EnBW est un actionnaire
2. Sans la présente opération, EnBW aurait une forte incitation à profiter de développements ultérieurs, comme l'achèvement du gazoduc grande distance Südal de Wingas.
51. Comme on l'a vu aux considérants 39 à 41, Wingas procède actuellement à la construction du gazoduc Südal dont l'achèvement est prévu pour la fin de 2004. Ce nouveau gazoduc traversera une zone du Bade-Wurtemberg à très forte densité de clientèle industrielle et municipale, à savoir la région de Stuttgart. L'examen effectué par la Commission révèle que les embranchements spécialisés à partir des gazoducs principaux constituent une solution viable pour la fourniture jusqu'à une distance maximale de 20 à 25 kilomètres de part et d'autre du gazoduc. En conséquence, un couloir de 40 à 50 kilomètres autour du nouveau gazoduc Südal serait la zone de fourniture potentielle de gaz au moyen d'embranchements spécialisés.
52. À cet égard, il convient de noter que NWS, EGVN et EGVS (filiales d'EnBW) ainsi que les Stadtwerke suivantes dans lesquelles ENBW détient des participations se trouvent dans cette zone: Energieversorgung Gaildorf OHG, Stadtwerke Esslingen am Neckar GmbH, Gasversorgung Dornstadt GmbH, Energieversorgung Rottenburg am Neckar GmbH, Gasversorgung Pforzheim Land GmbH, Stadtwerke Sindelfingen GmbH, Stadtwerke Schwäbisch Gmünd GmbH, FairEnergie GmbH, Reutlingen, Stadtwerke Nürtingen GmbH, Stadtwerke Fellbach GmbH.
53. NWS, filiale d'EnBW, est l'un des plus gros clients de GVS avec [20 % à 30 %]* de son approvisionnement actuel. Son contrat de fourniture expire en 2008. Sans l'opération envisagée, EnBW serait fortement incitée à étudier d'autres solutions compétitives pour les futures livraisons de gaz à NWS, à savoir la fourniture par le gazoduc Südal et des embranchements spécialisés qui existeront sur le marché à partir de 2005.
3. En sa qualité d'actionnaire de GVS, EnBW serait plus intéressée par les résultats économiques de GVS et, de ce fait, userait plutôt de son influence pour obtenir les fournitures actuelles de GVS.
54. Il est vrai que, même avant l'opération envisagée, EnBW a un certain intérêt pour les résultats économiques de GVS, puisque sa filiale NWS est l'un des dix actionnaires de GVS, avec une participation de 33,40 %. Or, par suite de l'opération envisagée, EnBW prendrait le contrôle en commun de GVS et ne ferait donc que redoubler d'intérêt pour les résultats économiques de celle-ci. Compte tenu de cet intérêt renforcé, les filiales d'EnBW négocieraient avec GVS en sa qualité de fournisseur privilégié d'EnBW, dès lors qu'un contrat de fourniture prendrait fin. Sur ce point, on peut conclure que GVS serait à même d'obtenir des contrats de fourniture si son offre était au moins aussi acceptable que celle de ses concurrents. Les autres actionnaires de ces filiales n'auraient aucune raison de s'opposer au fournisseur privilégié d'EnBW dès lors que la fourniture par GVS n'entraînerait aucun inconvénient direct ou indirect pour l'entreprise. De plus, en sa qualité d'actionnaire de GVS, EnBW pourrait user de son influence décisive pour adapter les offres de celle-ci d'une manière affectant le moins possible leur rentabilité respective.
55. Par ailleurs, comme le montre le tableau 3 ci-dessus, EnBW détient de nombreuses participations minoritaires dans des Stadtwerke. Même pour ces régies dans lesquelles EnBW détient une participation sans contrôle, la concentration pourrait produire un résultat comparable, du moins dans une certaine mesure, en termes d'obtention de contrats de fourniture pour GVS, comme indiqué au considérant 54.
56. S'il est vrai qu'EnBW ne possède pas dans ces entreprises la même influence que dans ses filiales pour orienter l'approvisionnement futur en gaz, il faut cependant noter que, même dans des Stadtwerke où elle ne détient qu'une participation minoritaire, EnBW siège aux organes de décision de ces entreprises, qu'il s'agisse du directoire ou du conseil de surveillance. C'est ainsi qu'elle a des représentants dans [15 à 25]* organes de décision de Stadtwerke, ce qui donne un total de [50 à 70]* représentants. Cette présence permet au moins à EnBW d'obtenir des informations sur les offres de fourniture concurrentes faites par d'autres fournisseurs de gaz que GVS. Dès lors, GVS serait mieux placée pour s'aligner sur les conditions d'offres concurrentes. C'est pourquoi, même pour les entreprises dans lesquelles EnBW détient une participation minoritaire, sa présence donne à GVS un accès préférentiel à ces clients, ce qui lui permettra d'obtenir des contrats de fourniture si les autres actionnaires du client ne perçoivent aucun désavantage économique par rapport à la fourniture par un concurrent de GVS.
57. Par suite de l'opération envisagée, GVS serait donc en mesure de procurer aux filiales d'EnBW des ventes de [20 % à 30 %]* de sa clientèle actuelle qui représente [20 % à 30 %]* des volumes de gaz qu'elle vend actuellement sur le marché en cause. Si l'on prend toutes les participations d'EnBW, ces pourcentages sont sans doute plus élevés. À l'inverse, la part de consommation correspondante serait retirée du marché (dans le cas des filiales d'EnBW) au détriment d'autres fournisseurs, ou risquerait en tout cas de faire l'objet d'un certain degré d'éviction.
4. Conclusions
58. Comme on l'a vu aux considérants 38 à 47, la concurrence sera certes économiquement et juridiquement possible, mais limitée, dans les années à venir. Cette concurrence limitée sera éliminée de manière significative par l'intégration verticale en aval issue de l'opération envisagée. On ne peut présumer que les filiales d'EnBW et les entreprises dans lesquelles celle-ci détient une participation feront usage des possibilités concurrentielles résultant de l'achèvement du nouveau gazoduc de Wingas et de l'ouverture anticipée de contrats de fourniture, au moins pour un certain pourcentage de fournitures. À son tour, cette situation débouchera sur un renforcement significatif de la position dominante de GVS dans un proche avenir.
59. C'est pourquoi la Commission conclut qu'en l'état actuel du marché régional de la vente de gaz en gros, la concentration envisagée renforcerait la position dominante de GVS dans le Land de Bade-Wurtemberg en raison des activités d'EnBW sur le marché situé en aval.
VI. ENGAGEMENTS
60. La décision de la Commission d'engager la procédure prévue à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement 4064-89 avait déjà fait naître des préoccupations de la concurrence exposées dans la présente décision. En réponse, les parties notifiantes ont proposé des engagements visant à dissiper ces préoccupations à un stade précoce de l'examen approfondi.
1. ENGAGEMENTS PROPOSES PAR LES PARTIES NOTIFIANTES
61. Pour aborder la question de l'effet d'éviction de l'opération envisagée, les parties notifiantes s'engagent à accorder un droit spécial par lequel chaque entreprise de distribution locale cliente de GVS en Bade-Wurtemberg - qu'EnBW détienne ou non une participation dans cette entreprise -, peut procéder à la résiliation anticipée du contrat de fourniture qu'elle a conclu avec GVS. Ce droit spécial de résiliation anticipée peut être exercé à deux moments différents. Les contrats de longue durée expirant en 2008 pourront être résiliés en octobre23 2004 ou en octobre 2006, tandis que ceux qui expirent en 2015 pourront être résiliés en octobre 2005 ou en octobre 2007. Les clients devront notifier leur résiliation anticipée par préavis de six mois.
62. Ces dispositions particulières de résiliation s'appliquent aussi aux contrats conclus entre des entreprises de distribution locale et Neckarwerke Stuttgart AG ou EnBW Gas GmbH (24), deux sociétés contrôlées par EnBW.
63. Par ailleurs, les engagements proposés contiennent des dispositions relatives à la remise de rapports ainsi que l'obligation pour les parties notifiantes d'informer de ces droits spéciaux de résiliation toutes les entreprises de distribution locale concernées
2. APPRECIATION DES ENGAGEMENTS
64. Les engagements proposés par les parties notifiantes abordent l'effet d'éviction en donnant la possibilité de mettre substantiellement sur le marché la demande de volumes de gaz beaucoup plus tôt que ne le permettent actuellement les contrats de fourniture de longue durée. Même dans l'hypothèse où les entreprises de distribution locale dans lesquelles EnBW détient une participation garderaient toutes GVS comme leur fournisseur de gaz, un volume potentiel d'au moins 60 % des ventes actuelles de GVS pourrait arriver progressivement sur le marché du Bade-Wurtemberg dans les années à venir.
65. De plus, avec l'extension du droit de résiliation anticipée aux clients de NWS et d'EnBW Gas indiqués au tableau 3 et au considérant 50, ces clients auront la possibilité de résilier leur contrat de fourniture conclu avec NWS et EnBW Gas. Si l'on ne tient pas compte des clients qui sont des filiales d'EnBW ou dans lesquels EnBW détient une participation, un volume de gaz supplémentaire de 5 % pourrait arriver progressivement sur le marché du Bade-Wurtemberg dans les années à venir.
66. Les contrats de fourniture en cours peuvent être résiliés pour la première fois en 2004 en ce qui concerne ceux qui expirent normalement en 2008, et en 2005 pour ceux qui expirent en 2015. On peut supposer que les conditions du marché régional de la vente de gaz en gros auront changé à ce moment-là en raison de l'achèvement du gazoduc Südal et de la mise en place de règles efficaces pour l'accès de tiers autorisant un certain degré de concurrence.
67. Dans la situation actuelle, des clients représentant [40 % à 50 %]* des ventes de gaz de GVS sont liés par contrat jusqu'en 2008 et des clients représentant [50 % à 60 %]* des ventes sont même liés jusqu'en 2015. Du fait des droits de résiliation anticipée prévus dans les engagements proposés par les parties, au moins 60 % des volumes de gaz vendus par GVS seront ouverts à la concurrence dans un proche avenir.
68. Dans les années à venir, les engagements proposés par les parties amélioreront les conditions de concurrence sur le marché régional de gros dans une mesure qui l'emporte manifestement sur les désavantages concurrentiels de l'opération envisagée. Par suite de cette opération, des entreprises représentant une part substantielle (voir considérant 57) du marché régional de gros seraient empêchées de tirer parti des possibilités concurrentielles à venir, mais grâce à l'engagement proposé par les parties, au moins 60 % de la fourniture totale de GVS (60 % de clients directs et 5 % de clients indirects approvisionnés par NWS et EnBW Gas) pourra en toute légalité changer de fournisseur pour 100 % des fournitures concernées. Cette large ouverture du marché dans les années à venir signifie que la position de marché de GVS devient soumise à la concurrence et que le marché peut bénéficier de la libéralisation au fur et à mesure de son évolution.
69. En l'absence de ces engagements, les Stadtwerke, qui représentent [50 % à 60 %]* de la fourniture totale de GVS, sont actuellement liées à GVS par contrat jusqu'en 2015. Dans ces conditions, on peut s'attendre à ce que GVS conserve sa position dominante dans le Bade-Wurtemberg pendant les treize prochaines années. Cela serait le cas, même si certains volumes des contrats d'exclusivité de longue durée étaient libérés dans les années à venir du fait de l'application du droit de la concurrence national et/ou communautaire. Or, sur la base des engagements, des concurrents comme Wingas auront largement l'occasion de trouver des clients dans les années à venir. Ils auront la possibilité d'étendre progressivement leur position dans le Bade-Wurtemberg et d'évoluer sur le marché en cause dans de bien meilleurs conditions, une fois que tous les contrats en vigueur actuellement seront arrivés à expiration.
70. Dans ce contexte et pour ces raisons, les engagements vont manifestement l'emporter sur les effets de la concentration envisagée. Ils semblent être au moins aussi efficaces que le désengagement de la nouvelle entité de certains " Stadtwerke ", une solution qui impliquerait aussi dans une mesure substantielle des activités qui n'ont aucun rapport avec les problèmes de concurrence évoqués plus haut (notamment l'électricité, l'eau et le chauffage urbain) et sont probablement inséparables (25).
71. Un exposé des engagements proposés a été présenté à un large éventail de tiers, dont des concurrents, toutes les entreprises de distribution locale du Bade-Wurtemberg et des entreprises situées dans des régions voisines, comme la Bavière et la Hesse, qui peuvent être une source de concurrence. La plupart des tiers commentateurs ont considéré que ces propositions constituaient un moyen approprié pour dégager des volumes de gaz de contrats de fourniture de longue durée et, par conséquent, de résoudre les problèmes de concurrence soulevés par le projet de concentration.
72. Les engagements proposés par les parties et acceptés par la Commission en l'espèce ne préjugent nullement de l'appréciation juridique des clauses de fourniture exclusive de longue durée ou des contrats de fourniture dans leur ensemble au regard du droit allemand ou du droit communautaire.
VII. CONDITIONS ET CHARGES
73. En application de la première phrase du deuxième alinéa de l'article 8, paragraphe 2, du règlement 4064-89, la Commission peut assortir sa décision de conditions et charges destinées à assurer que les entreprises concernées respectent les engagements qu'elles ont pris à l'égard de la Commission en vue de rendre la concentration compatible avec le Marché commun.
74. La réalisation de chaque mesure qui provoque une mutation structurelle sur le marché est une condition, alors que la mise en œuvre des mesures qui sont nécessaires pour atteindre ce résultat est généralement une charge incombant aux parties. Lorsqu'une condition n'est pas remplie, la décision de la Commission déclarant la concentration compatible avec le Marché commun devient caduque. Si les entreprises concernées contreviennent à une charge, la Commission peut révoquer sa décision en application de l'article 8, paragraphe 5, point b), du règlement 4064-89 et les parties peuvent aussi se voir infliger des amendes et des astreintes en application de l'article 14, paragraphe 2, point a) et de l'article 15, paragraphe 2, point a), du règlement 4064-89 (26).
75. Compte tenu de ce qui précède, la présente décision doit être subordonnée à l'octroi du droit spécial de résiliation anticipée des contrats de fourniture qui est énoncé aux sections I et II des engagements. Ce droit entraînera un changement de structure du marché. Les sections III, IV et V des engagements, qui portent sur des procédures, sont des charges imposées aux parties et visant à la mise en œuvre du changement de structure du marché.
VIII. CONCLUSIONS
76. La Commission conclut de ce qui précède que les engagements proposés par les parties notifiantes dissiperont les doutes en matière de concurrence et, s'ils sont appliqués, rendront donc l'opération envisagée compatible avec le Marché commun. En conséquence, l'opération doit être déclarée compatible avec le Marché commun en application de l'article 8, paragraphe 2, du règlement 4064-89 et avec l'accord EEE en application de son article 57,
A arrêté la présente décision:
Article premier
L'opération notifiée, par laquelle Energie Bade-Wurtemberg AG et ENI SpA prendraient le contrôle en commun de la société Gasversorgung Süddeutschland GmbH au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement (CEE) n° 4064-89, est déclarée compatible avec le Marché commun et avec l'accord EEE.
Article 2
L'article 1er est subordonné au respect total des obligations énoncées aux sections I et II de l'annexe.
Article 3
L'article 1er est subordonné au respect total des obligations énoncées aux sections III à V de l'annexe.
Article 4
Les parties notifiantes sont destinataires de la présente décision :
Notes :
1 JO L 395 du 30.12.1989, p. 1; rectificatif publié au JO L 257 du 21.9.1990, p. 13.
2 JO L 180 du 9.7.1997, p. 1.
3 JO C ... du ...200. , p....
4 ...
5 Décision 2002-164-CE de la Commission dans l'affaire COMP/M.1853 - EDF/EnBW (JO L 59 du 28.2.2002, p. 1).
6 Décision de la Commission du 29.9.1999 dans l'affaire IV/M.1383 - Exxon/Mobil, considérants 48 seq., 111.
7 Décision 2001-519-CE de la Commission dans l'affaire COMP/M.1673 - Veba/Viag, considérant 186, JO L 188 du 10.7.2001, p.1.
8 Décision de la Commission de 29.9.1999 dans l'affaire IV/M.1383 - Exxon/Mobil, considérants 48 seq., 111; décision 2001-519-CE de la Commission dans l'affaire COMP/M.1673 - Veba/Viag, considérant 186, JO L 188 du 10.7.2001, p.1.
9 Pour des raisons de clarté terminologique, cette expression n'est pas employée dans la présente décision, car l'activité en cause est la vente et non le transport.
10 Considérant 152.
11 Considérant 186.
12 La convention VVI a été signée le 4 juillet 2000.
13 JO L 204 du 21.7.1998, p.1
14 Bundesverband der Deutschen Industrie e.V; Verband der Industriellen Energie- und Kraftwirtschaft e.V; Bundesverband der deutschen Gas- und Wasserwirtschaft e.V.; Verband kommunaler Unternehmen e.V.
15 Parmi ces principes figurent notamment le libre choix du fournisseur, l'accès au réseau et la dissociation comptable.
16 Les tarifs à timbres-poste sont sans rapport avec la distance ou les caractéristiques d'une opération donnée.
17 EWI, BET : " Analyse und Wettberwerbliche Beurteilung der Verbändevereinbarung Gas zum Netzzugang., Gutachten im Auftrag des Bundesministeriums für Wirtschaft und Technologie. Rapport final du 9.11.2000, paragraphe : .8. Zusammenfassung. "
18 Convention VVII, paragraphe 6.2.4 : - Bis zum 30.9.2003 werden die Unterzeichnerverbände ein verbessertes Konzept entwickeln, welches die folgenden Ziele erreicht: mehr Wettbewerb und Transparenz als bisher, einfachere Bedienung und Nutzung, Börsenfähigkeit, Diskriminierungsfreiheit, Eignung für Massengeschäft/Transaktionsunabhängigkeit, Bilanzkreisfähigkeit, Kostenzuordnung nach Verursacherprinzip. Das verbesserte Konzept wird rechtzeitig vor Beginn des Gaswirtschaftsjahres 2003/2004 in Kraft gesetzt. Die Unterzeichnerverbände sind sich darin einig, dass ein stetiger Erfahrungsund Meinungsaustausch zu diesem Thema den einfachen, transparenten und wettbewerbsfähigen Netzzugang begleiten und fördern soll.
* Certaines parties de ce texte ont été coupées pour assurer le secret des renseignements confidentiels; ces parties sont indiquées entre crochets et marquées d'un astérisque.
19 OLG Düsseldorf, jugement du 7.11.2001 dans l'affaire U(Kart) 31/00, " Thyssengas/Stadtwerke Aachen AG ";
20 OLG Stuttgart, jugement du 21.3.2002 dans l'affaire 2 u 136/01, .Gasversorgung Süddeutschland GmbH/Stadtwerke Schwäbisch Hall GmbH.
21 Gesetz gegen Wettbewerbsbechränkungen ("GWB")
22 Sans préjuger des conséquences de modifications éventuelles du cadre de mise en œuvre de la législation communautaire.
23 Octobre est généralement le mois de l'année marquant le début de la durée annuelle des contrats de fourniture de gaz.
24 Ces contrats de fourniture prennent tous fin en 2008, ce qui signifie que les clients concernés pourront exercer leur droit de résiliation anticipée en octobre 2004 ou en octobre 2006.
25 Par exemple, NWS représente au moins 20 % des ventes totales de gaz de GVS. En revanche, elle ne réalise que 23,7 % de son chiffre d'affaires avec le gaz, les 76,3 % restants étant réalisés avec ses autres activités, dont l'électricité est la plus importante avec 59 %.
26 Voir communication de la Commission concernant les mesures correctives recevables conformément au règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil et au règlement (CE) n°447-98 de la Commission (JO C 68 du 2.3.2001, p. 3).