Cass. crim., 25 octobre 1972, n° 71-90.622
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rolland
Rapporteur :
M. Hauss
Avocat général :
M. Boucheron
Avocat :
Me Ryziger
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par X, contre un arrêt de la Cour d'appel de Douai, en date du 5 février 1971 qui l'a condamné pour tromperie dans la vente des marchandises, à treize mois d'emprisonnement dont douze mois avec sursis, à 10 000 F d'amende ainsi qu'à des dommages-intérêts ; - Vu le mémoire présenté à l'appui du pourvoi ; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 2 de la loi du 1er août 1905, des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la décision attaquée, qui déclare le demandeur coupable du délit de tromperie sur la qualité de la marchandise vendue, au même titre qu'il se serait installé dans son garage un système de fraude comportant parfois un certain scénario, le demandeur ne se bornant pas à cacher les vices existants des véhicules qu'il mettait en vente, mais ayant recours à des manœuvres frauduleuses, telles que le fait de montrer ostensiblement des pièces neuves, tendant à persuader de la réalité d'une remise à neuf du moteur, a retenu que le demandeur faisait croire à certains clients à l'existence d'un contrôle officiel desdites voitures, mais sans préciser les indications d'où résulterait que le demandeur ait tenté de faire croire à un contrôle officiel qui n'aurait pas existé ;
"alors, d'une part, que pour que la circonstance aggravante tendant à faire croire à l'existence d'une opération antérieure et exacte d'analyses, dosages, pesages ou mesurages, ou un contrôle officiel qui n'a pas existé, soit constituée, il faut que le prévenu ait utilisé des indications, c'est-à-dire des manœuvres extérieures, un simple mensonge verbal ne suffisant pas ;
"alors d'autre part et en tout cas, que les juges du fond doivent s'expliquer suffisamment sur les moyens matériels employés, consistant en indications, afin de permettre le contrôle de la cour suprême" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qui confirme, pour partie, la décision des premiers juges, que, lors de la réparation d'une voiture automobile d'occasion qu'il avait achetée un mois auparavant chez le garagiste X, Y Francis avait accepté, sur la proposition de cet artisan, de faire remplacer, moyennant participation aux frais, pistons et chemises de culasses par des pièces neuves que X, pour capter sa confiance, avait fait déposer à côté du moteur démonté, alors qu'il devait apparaître, ultérieurement, qu'en réalité la réparation avait été effectuée avec d'autres pièces, prélevées sur un vieux moteur, et qui, néanmoins, ont été facturées au prix du neuf ;
Qu'il appert, en outre, des énonciations des juges du fond que M, P, D et F ont, pour leur part, acquis de X des voitures usagées dont il leur a été affirmé fallacieusement, soit que le véhicule avait été mis en circulation à une date déterminée, soit qu'il représentait une occasion exceptionnelle, soit qu'il était pratiquement neuf, soit encore qu'il était de première main, tandis que, d'autre part, ils ont été laissés dans l'ignorance de ce qu'il s'agissait de voitures ayant toutes subi des accidents et qui avaient été reconstituées par les soins de X;
Attendu que pour retenir à la charge du prévenu, poursuivi et condamné par les premiers juges du chef de tromperies sur les qualités substantielles dans les ventes de marchandises, par application des dispositions de l'article 1er de la loi du 1er août 1905, la circonstance aggravante de l'article 2 du même texte, la cour d'appel a énoncé, comme résultant de ses constatations, que X avait eu recours à des manœuvres frauduleuses pour persuader la remise à neuf des moteurs des véhicules qu'il mettait en vente et qu'il faisait croire, en outre, "à certains clients, à l'existence d'un contrôle officiel des types de voitures" ;
Attendu qu'abstraction faite de motifs surabondants voire erronés, la condamnation de X est justifiée ;
Attendu, sans doute, qu'il ne ressort pas des énonciations des juges du fond que X ait commis les délits qui lui sont reprochés à l'aide de manœuvres ou procédés qui tendraient à fausser des opérations de vérification ou à modifier la composition, le poids ou le volume de la marchandise, au sens de l'alinéa 3 de l'article 2 de la loi du 1er août 1905, qu'il n'appert pas, d'autre part, de l'arrêt attaqué que X se soit prévalu d'un prétendu contrôle officiel, dont l'objet resterait d'ailleurs à préciser, dans les cas déterminés, inclus dans les poursuites actuelles, et ce à l'aide, non pas seulement d'allégations verbales, mais d'indications matérielles, comme l'exige l'alinéa 4 dudit article ;
Attendu, par contre, que les juges du fond ont déclaré établi que le prévenu a facturé, au prix des pièces neuves, les pièces de rechange usagées qu'il a livrées à Y ;
Attendu qu'en procédant ainsi, X a eu recours, aux termes de l'alinéa 4 de l'article 2 précité, à des indications frauduleuses, tendant à faire croire à une opération de vérification antérieure et exacte, dans des conditions de nature à caractériser le délit de tromperie qualifié ;
Qu'en effet, dès lors qu'il ne comporte aucune disposition restrictive, ledit texte doit être considéré comme applicable, quelle que soit la nature de l'opération de vérification à laquelle font croire les indications frauduleuses incriminées et même, par conséquent, lorsque comme en l'espèce, elles concernent le contrôle du seul caractère neuf ou usagé des marchandises livrées ;
Attendu, en cet état, que la peine d'emprisonnement infligée à X se trouve justifiée par les faits délictueux, relevés dans le cas de Y Francis ;
Que, d'autre part, le préjudice dont réparation a été accordé aux parties civiles est indépendant de l'existence de circonstances aggravantes ;
Qu'il n'y a donc pas lieu, aux termes de l'article 598 du Code de procédure pénale, de statuer sur les autres tromperies, retenues par la prévention ; d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.