CA Lyon, 1re ch. civ., 10 novembre 2005, n° 04-05838
LYON
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Robert
Défendeur :
Sillitti
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Jacquet
Conseillers :
Mme Biot, M. Roux
Avoués :
Mes Barriquand, Ligier de Mauroy
Avocats :
Mes De Lambert, Farre
LA COUR,
Faits, procédure, prétention des parties
Le 1er juillet 1999 Thierry Robert, exerçant son activité commerciale à l'enseigne "Espace camping', a vendu à Arcangelo Sillitti un véhicule camping car neuf de marque Pluma Sky au prix de 285 000 F et lui a remis les certificats de conformité et d'immatriculation le 1er octobre 1999.
Après avoir obtenu la réalisation de diverses réparations, Arcangelo Sillitti a demandé à Jean-Jacques Goy, "expert en automobiles agréé liste nationale", d'examiner le véhicule, ce qu'il a fait en présence de Thierry Robert ensuite de quoi il a rédigé un rapport où, après avoir mentionné les désordres suivants:
équipement pneumatiques non conforme pour le véhicule de base,
- caisson plastic de marche pied cassé,
caisson plastic de douche cassé,
panneau supérieur G décollé,
infiltrations d'eau sous le rafraîchisseur " Trapcool ",
traces jaunâtres d'humidité sous faux plafond, dans capucine,
-plancher, détérioration et fragilisation causée par absence de protection étanche sous la caisse,
il a émis l'avis que "les désordres relevés sont des défauts de constructions qui peuvent être qualifiés de vices cachés" et que "ces désordres se sont révélés après la vente ".
Par acte du 7 novembre 2001, Arcangelo Sillitti a fait assigner Thierry Robert en résolution de la vente et, le 9 juillet 2004 le Tribunal de grande instance de Montbrison a rendu le jugement suivant:
- Constate que les défauts relevés sur le camping Car,... constituent des vices cachés,
- Prononce la résolution de la vente du véhicule camping car...,
- condamne Thierry Robert à rembourser à Arcangelo Sillitti le prix de vente du véhicule, soit la somme de 43 447,97 euro (285 000 F)
- Dit qu'Arcangelo Sillitti procédera à la restitution du camping car à Thierry Robert au jour du remboursement de la somme de 43 447,97 euro,
- Condamne Thierry Robert à payer à Arcangelo Sillitti
* la somme de 5 000 euro à titre de dommages-intérêts,
* la somme de 168,14 euro au titre des honoraires de M. Goix,
* la somme de 800 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Appelant de cette décision, Thierry Robert soutient que L4action d'Arcangelo Sillitti est tardive dès lors qu'elle a été engagée deux ans et demi après la vente, un an et demi après la fuite du rafraîchisseur et un an après le premier examen de Jean-Jacques GOY: il conteste que les défauts constatés constituent des vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil ; il fait valoir qu'Arcangelo Sillitti s'est opposé à toutes interventions et réparations tout en continuant à utiliser le véhicule. Il conclu donc principalement à l'irrecevabilité des demandes adverses, subsidiairement à leur rejet et plus subsidiairement à la réduction du montant des demandes pécuniaires d'Arcangelo Sillitti. Il sollicite en outre la condamnation de ce dernier à lui payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Arcangelo Sillitti conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de l'appelant à lui payer une indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'il n'est pas établi que les causes des défauts affectant le véhicule et la possibilité de les qualifier de vices cachés ont été portées à la connaissance d'Arcangelo Sillitti avant le 27 novembre 2000, date d'une lettre adressée à Thierry Robert par Jean-Jacques Goy où il est fait état de l'examen du véhicule auquel cet expert avait procédé le 23 novembre 2000 et duquel il ressortait, selon lui, que ce véhicule présentait divers désordres susceptibles d'être qualifiées de vices cachés ; que Thierry Robert a aussitôt répondu en proposant d'effectuer un examen contradictoire le 12 décembre 2000; que le 29 mars 2001, après une réunion avec Jean-Jacques Goy, Arcangelo Sillitti et Thierry Robert ont signé un document constituant, selon Thierry Robert lui-même " un commencement de transaction" et "permettant surtout de récapituler les faits"; que Jean-Jacques Goy a rédigé son rapport qu'il a daté du 20 avril 2001; que les conseils des deux parties ont continué d'échanger des courriers en vue du règlement du litige;
Qu'il résulte de ces éléments qu'Arcangelo Sillitti a respecté le bref délai prévu par la loi en engageant son action le 7 novembre 2001 ; que la fin de non recevoir proposée par Thierry Robert doit être écartée;
Attendu que Thierry Robert a envoyé à la société Pluma, société de droit portugais qui était le constructeur du véhicule, une lettre datée du 12 février 2001 ainsi rédigée " ... J'essaie, en vain, de vous demander une prise en charge en garantie d'un véhicule portant des défauts de fabrication flagrant (sic) et dénoncés par un expert. Ce véhicule présente
- un décollement de la toile (sic) supérieure latérale gauche,
- un bac à douche fissuré,
- un marche pied fissure,
-planché (sic) complètement mou incompatible avec une utilisation normale.
Si aucune décision n 'est prise dans les plus brefs délais pour résoudre ces problèmes de fabrication, je me verrais dans l'obligation de saisir les tribunaux concernés afin de pouvoir proposer à M.Sillitti, propriétaire du véhicule, une remise en état correcte de son véhicule " ;
Que par ce courrier Thierry Robert a reconnu à. la fois l'existence et la nature des vices et sa propre responsabilité à l'égard d'Arcangelo Sillitti; qu'il ne prétend pas avoir fait alors une inexacte appréciation des faits et de ses propres obligations ; qu'il ne peut donc plus contester que le véhicule est affecté de défauts cachés dont il est responsable et qui justifient la résolution de la vente;
Mais attendu qu'il est établi que, malgré ces défauts de nature à réduire notablement l'usage pouvant être fait de ce véhicule, Arcangelo Sillitti a continué à utiliser celui-ci puisque le compteur kilométrique marquait 7310 kilomètres le 23 novembre 2000 (cf. rapport de J-J.GOY) et 16134 kilomètres quatre ans plus tard (cf. lettre du 22 septembre 2004 de maître Farre, avocat d'Arcangelo Sillitti), ce qui apparaît relativement important eu égard à la destination de ce type de véhicule;
Que l'usage qu'Arcangelo Sillitti a ainsi fait du véhicule a nécessairement entraîné une dépréciation de celui-ci dont il doit être tenu compte de sorte que la somme que Thierry Robert doit verser à Arcangelo Sillitti, au titre de la restitution du prix de vente et en contre partie de la restitution du véhicule à raison de la résolution de la vente, doit être réduite à 33 000 euro;
Attendu qu'Arcangelo Sillitti ne peut prétendre à dommages-intérêts à raison de la perte de jouissance d'un bien dont, du fait de la résolution de la vente, il est réputé n'avoir jamais été propriétaire et dont pourtant de fait il a joui, bien qu'imparfaitement;
Par ces motifs, LA COUR, Confirme le jugement, hormis en ce qu'il a condamné Thierry Robert à rembourser à Arcangelo Sillitti le prix de vente du véhicule, soit la somme de 43 447,97 euro (285 000F), et les sommes de 5 000 euro à titre de dommages-intérêts et de 168,14 euro au titre des honoraires de M.Goix; Statuant à nouveau, Déboute Arcangelo Sillitti de sa demande de dommages-intérêts; Condamne Thierry Robert à payer à Arcangelo Sillitti la somme de trente-trois mille euro (33 000euro) au titre de la restitution du pris de vente et en contrepartie de la restitution du véhicule; Laisse à chacune des parties la charge de ses frais et dépens exposés en appel.