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Décisions

CA Lyon, ch. com., 28 septembre 2001, n° 2001-02975

LYON

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Nuova Con-Pel (Sté)

Défendeur :

Le Tanneur et Cie (Sté)

TGI Belley, du 5 mars 2001

5 mars 2001

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Suite à l'apparition de défauts dans le cuir acheté auprès de la société de droit italien Nuova Con-Pel, la société Le Tanneur et Cie a sollicité et obtenu en référé du président du Tribunal de grande instance de Belley (France), statuant en matière commerciale, la désignation d'un expert et a ensuite fait assigner la société Nuova Con-Pel, au fond, le 5 avril 2000, devant le même tribunal, demandant sa condamnation à lui payer la somme de 3 115 273 F en principal, et ce, sur le fondement de la garantie des vices cachés, de l'obligation de délivrance et de la responsabilité du fait des produits défectueux. Se prévalant d'une clause attributive de juridiction au profit du Tribunal civil italien de Pise puis de Florence, la société Nuova Con-Pel a soulevé l'incompétence territoriale du Tribunal de grande instance de Belley en application de l'article 17 de la Convention de Bruxelles. A titre subsidiaire, elle a fondé son exception d'incompétence sur les articles 2 et 5, point 1, de la même Convention, au motif que la livraison a eu lieu en Italie, ce lieu de livraison étant déterminé en application de la Convention de Vienne du 18 avril 1980.

Par jugement du 5 mars 2001, le Tribunal de grande instance de Belley a rejeté l'exception d'incompétence, sursis à statuer au fond dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise et réservé les dépens, tout en condamnant la société Nuova Con-Pel à payer 10 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Pour écarter l'exception d'incompétence et l'application de la Convention de Bruxelles, le tribunal a retenu que la Convention de Vienne ne régit que les conditions touchant le fond du litige et qu'elle est sans effet sur l'appréciation de la juridiction compétente pour trancher un litige entre deux sociétés de pays différents, que les parties n'ont conclu aucun contrat afin de déterminer la juridiction compétente en cas de litige, que la clause attributive de compétence invoquée était reproduite en petits caractères et en langue italienne sur le recto des factures, qu'elle n'était pas reproduite sur les autres documents servant aux relations contractuelles entre les parties, tels que courriers, bons de commande et de livraison, et que compte tenu de ses caractéristiques topographiques et de la langue utilisée dans sa rédaction, elle " ne peut s'analyser comme des dispositions connues et acceptées de la société Le Tanneur et Cie ".

Le tribunal a ajouté que le silence de la société Le Tanneur et Cie à réception des factures ne peut davantage être analysé comme une acceptation des termes de la clause attributive de compétence, que la période pendant laquelle la société Nuova Con-Pel a adressé ses factures est insuffisante pour caractériser des relations d'affaires depuis de nombreuses années et que de l'analyse de l'ensemble de ces éléments, il ne peut être conclu à l'existence d'un usage dont les parties avaient connaissance ou qui est largement observé dans ce type de commerce.

Le 7 mai 2001, la société Nuova Con-Pel a formé contredit au jugement en question. Elle demande à la cour de l'infirmer, de faire droit à son exception d'incompétence, de renvoyer la société Le Tanneur et Cie à mieux se pourvoir devant le Tribunal civil de Florence et de la condamner aux dépens et à lui payer la somme de 15 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle expose et soutient à cet effet : que la clause attributive de juridiction figurant sur ses factures est validée à double titre par l'article 17 de la Convention de Bruxelles : en raison d'une part, des relations courantes d'affaires qui existaient entre les deux parties et, d'autre part, de l'usage existant dans le domaine du commerce international dans lequel opèrent les parties, que ce n'est pas moins de 35 contrats de vente qui ont été conclus entre les parties entre les mois de novembre 1997 et de septembre 1999, soit plus d'un contrat de vente par mois, que la clause attributive de juridiction figurait en caractères très lisibles au recto des factures, en bas de la page, immédiatement sous le montant à payer, de telle sorte que toute personne examinant la facture pour en connaître le montant voit également la clause, qu'en payant régulièrement les factures sans aucune contestation sur l'opposabilité de la clause attributive de juridiction, la société Le Tanneur et Cie l'a acceptée et que cette clause lui est donc opposable sur le fondement de l'article 17, b, de la Convention de Bruxelles, que la société Le Tanneur et Cie achetait le cuir en Italie, l'expédiait ou le faisait expédier à ses façonniers en Tunisie ou au Maroc, avant expédition du produit fini au Japon, que cela montre sa maîtrise du commerce international, qu'elle a dès lors nécessairement connaissance du fait qu'il est d'usage dans les contrats de vente internationaux que la juridiction compétente en cas de litige soit désignée par le vendeur et qu'en conséquence, la clause litigieuse est aussi opposable en application de l'article 17, c, de la Convention, qu'à titre subsidiaire, la juridiction du défendeur est compétente en l'absence de clause de juridiction, en application de l'article 2 de la Convention de Bruxelles, que la juridiction italienne est également compétente en vertu de l'article 5, point 1, de la Convention, le lieu d'exécution de l'obligation litigieuse étant en l'occurrence situé en Italie, lieu de remise des marchandises au premier transporteur pour transmission à l'acheteur, ce lieu étant déterminé conformément à l'article 31 de la Convention de Vienne du 18 avril 1980 qui ne distingue pas entre l'obligation de livraison conforme et l'obligation de garantie.

La société Le Tanneur et Cie sollicite le rejet du contredit, comme non fondé, et la condamnation de la société Nuova Con-Pel aux dépens et à lui payer 20 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Elle fait valoir à cet effet : qu'aucun contrat n'a été conclu entre les parties afin de déterminer la juridiction compétente, que la clause attributive de juridiction n'a pas été conclue par écrit au sens de l'article 17 de la Convention de Bruxelles, qu'il n'existe aucun contrat signé entre les parties renvoyant aux conditions générales de vente de la société Nuova Con-Pel qui contiennent la clause litigieuse, que celle-ci n'existe sur aucun document de confirmation de commande, qu'elle n'est mentionnée que sur les seules factures, en caractères minuscules, à la limite inférieure du seuil de lisibilité, en bas du recto, sans être détachée des autres conditions de vente, qu'aucun élément distinctif ne permet d'attirer l'attention de l'acheteur sur l'existence même de cette clause et que son invalidité tient à son graphisme, à la langue étrangère dans laquelle elle a été rédigée et à son illisibilité, que les parties n'ont pas été en relations d'affaires courantes depuis de nombreuses années, mais seulement depuis fin 1997, que le paiement des factures sans protestation ne suffit donc pas à valider la clause attributive de juridiction, qu'il est de jurisprudence constante que les clauses de compétence insérées dans une lettre ou dans une facture, expédiée après la conclusion du contrat, sont inopposables, que l'argument tiré du paiement des factures sans objection est d'autant moins pertinent qu'il n'existait pas entre les parties une relation antérieure à la facture du 21 novembre 1997 et que la preuve de la connaissance, de l'acceptation et donc du consentement donné par elle n'est pas rapportée, que les conditions d'application de l'article 17, c, de la Convention de Bruxelles ne sont pas réunies, que c'est à juste titre que le jugement déféré a estimé que les dispositions de la Convention de Vienne étaient sans effet sur l'appréciation de la juridiction compétente dès lors qu'elles ne régissent que les conditions relatives au contrat de vente, c'est-à-dire le fond du litige, que l'obligation qui sert de base à la demande est l'obligation de garantie des vices cachés et non l'obligation de livraison, que s'agissant de l'obligation de garantie, le lieu d'exécution est celui de la livraison effective de la chose, qu'en l'espèce, la livraison devait être effectuée dans son propre entrepôt à Belley, que le Tribunal de Belley est certainement mieux placé que les juridictions italiennes pour examiner la chose vendue et déceler les vices cachés, que la localisation par la lex causae de l'obligation de garantie au lieu de la livraison en Italie méconnaît totalement l'objectif de bonne administration de la justice que poursuit l'article 5, point 1, de la Convention de Bruxelles et qu'en l'absence de clause attributive qui puisse être totalement opposable, le Tribunal de grande instance de Belley est compétent par application de ce dernier texte.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que la société Nuova Con-Pel et la société Le Tanneur et Cie ont leur siège social respectivement en Italie et en France, deux Etats signataires de la Convention de Bruxelles, modifiée, du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ; que leur litige a son origine dans un contrat commercial non exclu de l'application de cette Convention ; que la juridiction compétente pour le trancher doit donc être déterminée en application des règles prévues par la Convention en question qui prévalent sur les dispositions du droit interne;

Attendu que l'article 17 de cette Convention, invoqué à titre principal par la société Nuova Con-Pel, prévoit ce qui suit : " Si les parties, dont l'une au moins a son domicile sur le territoire d'un Etat contractant, sont convenues d'un tribunal ou de tribunaux d'un Etat contractant pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet Etat sont seuls compétents. Cette convention attributive de juridiction est conclue : (a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite soit (b) sous forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, soit (c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée " ;

Attendu qu'il est constant, en l'espèce, que les parties n'ont pas conclu formellement par écrit une convention attributive de juridiction ; qu'il n'est pas prétendu qu'une telle convention aurait été conclue verbalement avec confirmation écrite ; qu'il y a lieu dès lors de vérifier si, comme le soutient la société Nuova Con-Pel, la convention a pu néanmoins intervenir sous l'une des formes prévues aux cas de figure (b) et (c) de l'article 17 précité ;

Attendu que la société Nuova Con-Pel, qui en a la charge, ne produit aucun élément susceptible de démontrer que les conditions d'application du cas de figure (c) sont réunies ; qu'en effet, le seul fait que la société Le Tanneur et Cie achète du cuir en Italie, le confie à des façonniers établis en Tunisie ou au Maroc et expédie le produit fini au Japon n'est pas de nature à établir l'existence de l'usage visé au cas de figure en question et ne suffit pas à prouver que la société Le Tanneur et Cie en avait ou était censée en avoir connaissance ; qu'il s'ensuit que la société Nuova Con-Pel n est pas fondée à invoquer utilement l'article 17, cas de figure (c), susvisé ;

Attendu qu'il est établi que la société Nuova Con-Pel et la société Le Tanneur et Cie ont entretenu des relations d'affaires entre les mois de novembre 1997 et septembre 1999, que pendant cette période, la société Nuova Con-Pel a émis en langue italienne 35 factures qui ont été réglées par la société Le Tanneur et Cie et que sur chacune des factures figurait, au recto, une clause stipulant que " tout litige sera de la compétence du tribunal du lieu de l'émission " ;

Attendu qu'il est exact que la clause en question est portée en bas de page et insérée, sans en être détachée, au milieu de " conditions de vente " imprimées en petits caractères ;

Attendu, cependant, que cette clause est parfaitement lisible et apparente malgré son impression en petits caractères ; que le fait qu'elle ne soit pas détachée des autres conditions de vente ne diminue ni sa lisibilité, ni sa compréhension, l'ensemble des conditions en question n'occupant que deux lignes et ces conditions figurant très près du montant de la somme due et étant précédées du titre " Conditions de vente " imprimé en majuscules et en caractères plus grands, attirant ainsi nécessairement l'attention du lecteur ; qu'il en est d'autant ainsi que la société Le Tanneur et Cie pratique le commerce international et est censée, avant de régler une facture, lire attentivement l'ensemble des mentions qui y sont portées et, en particulier, les conditions de vente; que dès lors, la clause litigieuse ne saurait être écartée en raison de son graphisme ou de son emplacement ; que sa rédaction en langue italienne ne nuit pas à son efficacité, toutes les factures ayant été rédigées en italien et réglées sans aucune contestation de la part de la société Le Tanneur et Cie ;

Attendu que les relations entre les parties ont duré 22 mois pendant lesquelles 35 factures ont été établies, correspondant à 35 commandes, apparemment non écrites ; que si ces relations n'ont pas duré des années, l'importance du nombre des commandes et des factures auxquelles ces commandes ont donné lieu pendant la période considérée et le paiement par la société Le Tanneur et Cie de toutes ces factures sans la moindre contestation des conditions de vente suffisent à établir que cette dernière avait nécessairement connu et accepté la clause attributive de juridiction litigieuse portée sur ces factures et que des habitudes se sont instaurées entre les parties au sens de l'article 17, b, de la Convention de Bruxelles ; que l'absence de confirmations de commande ou de bons de livraison comportant la clause litigieuse n'est pas de nature à exclure l'application de ce texte dans la mesure où, d'une part, celui-ci n'exige pas une forme particulière, que d'autre part, une clause attributive de juridiction est opposable en matière de vente internationale, même si elle ne figure que sur des factures, dès lors que, comme en l'espèce, ces factures sont très nombreuses, traduisent un flux soutenu d'affaires et n'ont donné lieu à aucune objection et que, de troisième part, il n'est même pas allégué que le litige trouve son origine dans les seules commandes ayant donné lieu à l'établissement des premières factures ;

Attendu qu'il s'ensuit que la clause litigieuse est opposable à la société Le Tanneur et Cie en application de l'article 17, cas de figure (b), de la Convention de Bruxelles et que le litige relève de la compétence du Tribunal civil italien de Florence, qui est le tribunal du lieu de l'émission des factures ;

Attendu, au surplus, que ledit tribunal est compétent même dans l'hypothèse où l'article 17 de la Convention de Bruxelles ne serait pas applicable ;

Attendu, en effet, qu'à défaut d'application d'une clause attributive de juridiction, la compétence doit être déterminée selon les règles prévues à l'article 5, point 1, de la même Convention qui dispose que " le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut être attrait, dans un autre Etat contractant : () en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée " ;

Attendu que la Cour de justice des Communautés européennes, dont les décisions s'imposent naturellement au juge français, a toujours dit pour droit, notamment dans son arrêt GIE Groupe Concorde du 28 septembre 1999 (affaire C-440-97), que l'article 5, point 1, en question " doit être interprété en ce sens que le lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée, au sens de cette disposition, doit être déterminé conformément à la loi qui régit l'obligation litigieuse selon les règles de conflit de la juridiction saisie " ;

Attendu qu'en l'espèce, l'obligation litigieuse est, selon la société Le Tanneur et Cie, une obligation de garantie des vices cachés ; que la société Nuova Con-Pel soutient que cette obligation se confond avec l'obligation de livraison conforme ;

Attendu qu'il y a lieu de relever qu'il résulte de l'assignation introductive d'instance que la société Le Tanneur et Cie fonde sa demande, non seulement sur l'obligation de garantie des vices cachés, mais aussi sur l'obligation de livraison conforme ;

Attendu que le contrat litigieux étant un contrat de vente internationale de marchandises, il est régi par la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises, signée aussi bien par la France que par l'Italie ; que cette Convention, qui est donc la loi du contrat, ne distingue pas l'obligation de livraison conforme, qu'elle prévoit, de l'obligation de garantie des vices cachés, la première incluant la seconde; qu'aux termes de l'article 31 de cette Convention, si le vendeur n'est pas tenu de livrer les marchandises en un autre lieu particulier, son obligation de livraison consiste, lorsque le contrat de vente implique un transport des marchandises, à remettre les marchandises au premier transporteur pour transmission à l'acheteur ;

Attendu qu'en l'espèce, il n'est pas établi que le vendeur était tenu de livrer les marchandises à l'entrepôt de la société Le Tanneur et Cie à Belley, comme celle-ci le prétend; que la société Nuova Con-Pel affirme, sans être démentie, que la quasi-totalité des ventes en 1998 et la totalité des ventes en 1999 ont été réalisées sur une base " franco tannerie ", le transport étant effectué soit directement par le destinataire-acheteur, soit par un transporteur indépendant désigné par ce dernier ;

Attendu dès lors, et dans la mesure où la société Le Tanneur et Cie n'allègue même pas que le litige porterait sur les seules ventes non réalisées sur la base " franco tannerie ", il y a lieu de retenir que l'obligation litigieuse a été exécutée au lieu où les marchandises ont été remises au premier transporteur pour transmission à l'acheteur, à savoir à la tannerie de la société Nuova Con-Pel, située en Italie, dans le ressort du Tribunal civil de Florence ; qu'il s'ensuit qu en application de l'article 5, point 1, de la Convention de Bruxelles, c'est ce tribunal italien qui est compétent pour connaître du litige, à supposer même qu'il ne le soit pas en application de l'article 17, b, de la même Convention ; qu'il importe peu que le Tribunal français de Belley soit mieux placé que les juridictions italiennes pour apprécier le litige puisque la désignation de la juridiction italienne est imposée par le droit matériel applicable ;

Attendu que, compte tenu de ce qui précède, le jugement déféré sera réformé et la société Le Tanneur et Cie sera renvoyée à mieux se pourvoir devant le tribunal civil de Florence ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ;

Par ces motifs : LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions ; Statuant à nouveau, Dit recevable et bien fondée l'exception d'incompétence soulevée par la société Nuova Con-Pel ; En conséquence, Dit que le Tribunal de grande instance de Belley n'était pas compétent et renvoie la société Le Tanneur et Cie à mieux se pourvoir ; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ; Condamne la société Le Tanneur et Cie aux dépens de première instance et d'appel.