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Décisions

Ministre de l’Économie, 28 octobre 2005, n° ECOC0600005Y

MINISTRE DE L’ÉCONOMIE

Lettre

PARTIES

Demandeur :

MINISTRE DE L'ECONOMIE

Défendeur :

Conseils des sociétés Finance et Management, Entremont et Unicopa

Ministre de l’Économie n° ECOC0600005Y

28 octobre 2005

MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE

Maîtres,

Le 9 août 2005, vous avez présenté à la Commission une demande de renvoi de l'intégralité d'une opération de concentration aux autorités françaises, au titre de l'article 4, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 139-2004. Les États membres ont reçu copie du mémoire motivé le 10 août 2005. L'opération envisagée consiste en la création d'une entreprise commune dénommée Entremont Alliance, qui regroupera l'ensemble des activités d'Entremont et la branche lait d'Unicopa et sera contrôlée conjointement par Finance et Management SAS (" FEM "), filiale de la Compagnie Nationale à Portefeuille (" CNP "), et le groupe Unicopa. L'opération constitue une concentration de dimension communautaire au sens des articles 1er et 3 du Règlement précité.

Par décision en date du 14 septembre 2005 (1), la Commission européenne a considéré que les critères de l'article 4.4 du Règlement n° 139-2004 étaient remplis et a renvoyé l'opération dans sa totalité aux autorités françaises, ces dernières ayant préalablement accepté de recevoir votre demande.

I. - LES PARTIES CONCERNÉES ET L'OPÉRATION.

FEM est une holding financière sans activité propre qui possède directement et indirectement la totalité du capital et des droits de vote de la société Groupe Entremont. Elle est contrôlée par la CNP, société holding détenant des participations dans divers secteurs (2). La CNP a réalisé en 2004 un chiffre d'affaires mondial consolidé de 9 229 millions d'euro HT, dont 3 149 millions d'euro dans l'Union européenne et 1 284 millions d'euro en France.

Groupe Entremont (" Entremont "), essentiellement présent en France, est spécialisé dans la transformation et la commercialisation de fromages à pâte pressée cuite, de poudres et de matières grasses laitières, et de lactosérum.

Unicopa est une société coopérative agricole, présente essentiellement en France, spécialisée dans les activités agroalimentaires, dont le capital est détenu par des coopératives ou des unions de coopératives agricoles. La branche lait d'Unicopa transforme et commercialise des produits issus du lait (fromages à pâte pressée cuite, poudres et matières grasses laitières, lactosérum). Unicopa a réalisé en 2004 un chiffre d'affaires mondial consolidé de 1 218 millions d'euro HT, dont 1 038 millions d'euro dans l'Union européenne et 928 millions d'euro en France.

L'opération envisagée consiste en la création d'une entreprise commune Entremont Alliance, qui regroupera l'ensemble des activités d'Entremont et la branche des produits issus du lait d'Unicopa. Entremont Alliance sera détenue à 100 % par Unifem, nouvelle dénomination de FEM. En rémunération de ses apports dans l'opération, Unicopa recevra 36,5 % du capital d'Unifem, la CNP conservant les 63,5 % restants. CNP et Unicopa exerceront un contrôle conjoint sur Entremont Alliance par l'intermédiaire d'Unifem, aux termes d'un protocole d'intention signé entre les parties (3). L'entreprise commune accomplira de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome, avec son propre personnel d'encadrement et les ressources nécessaires.

L'opération est ainsi contrôlable en France en application du second alinéa de l'article L. 430-2 du Code de commerce, qui prévoit qu'une opération qui a fait l'objet d'un renvoi total ou partiel à l'autorité nationale est soumise, dans la limite de ce renvoi, aux dispositions du titre III du Code de commerce.

II. - LES MARCHES CONCERNÉS

Les parties sont simultanément présentes sur les marchés amont de la collecte de lait et de meules blanches, en tant qu'acheteurs, et sur les marchés aval de la production et de la commercialisation de fromages et de dérivés du lait, en tant que vendeurs.

A. - Les marchés de produits.

1. Les marchés amont concernés par l'opération

a) La collecte de lait

La pratique décisionnelle a reconnu l'existence de marchés distincts de collecte de lait selon le type de lait : lait de vache, lait de brebis etc. (4) Au cas d'espèce, les parties achètent exclusivement du lait de vache. On pourrait s'interroger sur une délimitation plus étroite du marché s'agissant du lait collecté destiné à fabriquer des AOC. En effet, " les fromages bénéficiant d'une telle appellation ne peuvent par définition et par contrainte réglementaire être fabriqués qu'à partir de lait produit dans une zone délimitée par décret et uniquement à partir de certaines races de vaches locales " (5). L'existence de tels marchés de produits peut toutefois rester ouverte dans la mesure où, quelle que soit la définition retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées.

b) Les meules blanches à comté

Pour assurer leur production de comté, les industriels fromagers se fournissent essentiellement auprès d'environ 185 fruitières (coopératives agricoles détenues par des producteurs de lait) qui fabriquent les " meules blanches " à comté. Les industriels procèdent à un affinage des meules à des fins de revente. Le volume de comté fabriqué par les industriels à partir du lait de vache qu'ils collectent directement dans la zone AOC du comté est peu important. (6)

2. Les marchés aval concernés par l'opération

a) Les marchés de fromages

Les fromages fondus

Ces fromages sont obtenus à partir de pâtes pressées cuites et non cuites non affinées, auxquelles sont ajoutés de la poudre de lait, des sels de fonte, de la crème et du beurre. Ces fromages sont principalement la crème de gruyère et les fromages pour tartine, dont les plus consommés sont les marques du groupe Bel : Vache Qui Rit, Kiri, Apéricube, Picon, Sylphide. Les autorités françaises de la concurrence ont, à plusieurs reprises, retenu l'existence de marchés de fromages correspondant à certaines familles de fromages (marché de fromages à pâte molle (7) ; marché de fromages frais (8)). Sans avoir besoin d'affiner l'analyse, il pourrait être retenu au cas d'espèce un marché global des fromages fondus.

Les fromages à pâte pressée cuite et assimilés (" PPC ")

Ces fromages sont fabriqués à partir de lait de vache. Il s'agit principalement de l'emmental, du gruyère, du comté, et du beaufort. Le maasdam, commercialisé en France sous la marque Leerdammer, peut être rattaché à cette famille de fromages dans la mesure où il fait l'objet d'une légère phase de cuisson avant moulage et pressage, contrairement aux autres fromages de Hollande. Le ministre a eu l'occasion d'analyser une opération de concentration sur le marché des fromages PPC, Leerdammer compris. Il a observé que " concernant les PPC, le Leerdammer est un produit concurrent du gruyère, de l'emmental et du comté " (9).

Les parties ont indiqué qu'il fallait néanmoins tenir compte d'une certaine substituabilité des fromages PPC lorsqu'ils sont destinés à être utilisés par l'industrie agroalimentaire. En effet, cette dernière utilise le fromage comme produit intermédiaire dans la fabrication de plats préparés. Le fromage est alors plus utilisé pour ses propriétés technologiques et son niveau de prix que pour ses qualités gustatives.

La question du format des fromages PPC, selon qu'ils sont râpés (10) ou vendus en portion, peut, au cas d'espèce, être laissée ouverte, compte tenu d'une très forte substituabilité du côté de l'offre. La plupart des fournisseurs de fromages PPC sont en effet en mesure de proposer et de vendre ces deux formats de produits immédiatement et sans augmenter leurs coûts de manière substantielle. A cet égard, 80 % des appels d'offres de la grande distribution pour la fabrication de leur fromage PPC sous marque de distributeur portent concomitamment sur les deux formats.

Au cas d'espèce, les questions relatives à la délimitation précise des différents fromages PPC concernés par l'opération peuvent être laissées ouvertes, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant identiques quelle que soit la segmentation envisagée.

Une segmentation plus fine peut également être envisagée au sein des fromages PPC, en distinguant les fromages bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée (AOC). Ceux-ci correspondent à des fromages dits " de plateau ", haut de gamme, revendus aux consommateurs à des prix nettement supérieurs à ceux des fromages dits " standards ". Pour les besoins de la présente analyse, la question se pose pour le comté et le beaufort, produits par chacune des parties.

Le beaufort est un fromage PPC à appellation d'origine contrôlée depuis 1968 dont les règles de production sont fixées par un décret du 19 janvier 2001. Son goût se distingue nettement de celui des autres fromages à pâte pressée cuite. Il possède, tout comme le comté, des caractéristiques propres, telles que celles exigées pour bénéficier d'une appellation d'origine contrôlée, qui le différencient des fromages d'aspect voisin. Compte tenu de la valeur accordée par les consommateurs aux AOC et des contraintes réglementaires spécifiques auxquelles sont soumis ses producteurs, il pourrait également former un marché pertinent. La question de la délimitation exacte de ce marché peut rester ouverte dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent inchangées.

Le comté est un fromage PPC à appellation d'origine contrôlée depuis 1958 dont les règles de production sont fixées par un décret du 30 décembre 1998. Le Conseil de la concurrence, saisi dans le cadre de pratiques anticoncurrentielles, a estimé que le comté formait un marché pertinent (11). Dans la mesure où l'analyse menée en 1998 par le Conseil de la Concurrence lors de sa définition du marché de produit est toujours valable, l'analyse concurrentielle portera donc sur le marché du comté.

b) Les marchés des dérivés du lait

Le lactosérum

Le lactosérum est un produit industriel obtenu par séchage du liquide résiduel de la fabrication du fromage, du fromage blanc, de la caséine ou de procédés similaires. Le lactosérum est utilisé dans les secteurs de la nutrition et de la santé.

Les poudres laitières

Les poudres laitières sont des produits industriels obtenus par séchage du lait. Ce marché, très fluctuant, est directement tributaire de mesures européennes de soutien (restitutions à l'exportation et aides à l'écoulement sur le marché intérieur) ainsi que de l'évolution des cours mondiaux.

Au cas d'espèce, les questions relatives à la délimitation précise des différents marchés des dérivés du lait peuvent être laissées ouvertes, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant identiques quelle que soit la segmentation envisagée.

B. - Les réseaux de distribution

1. La grande distribution et les commerces à dominante alimentaire

Les marchés de produits qui viennent d'être distingués pour les fromages peuvent faire l'objet de segmentations plus fines eu égard à la diversité des formes de leur commercialisation. Le fromage est usuellement revendu à la coupe ou en libre-service, et, au sein du libre-service, selon son positionnement commercial (marque de fabricant / marques de distributeur, premier prix, hard discount).

En France, l'essentiel de la distribution de fromage est assuré par les grandes et moyennes surfaces (GMS). Au sein de ce circuit, les fromages sont revendus au consommateur final soit en libre-service (12), soit à la coupe. Cette distinction implique notamment, en amont, des conditionnements différents : l'approvisionnement de fromages en libre-service nécessite en effet une activité de découpe et de préemballage des produits. De plus, le mode de vente à la coupe présente des spécificités : il est en régression, alors que le libre-service est dynamique et innovateur et les fromages AOC sont beaucoup plus présents à la coupe qu'en libre-service. Les opérateurs interrogés confirment la pertinence de cette distinction. Il n'est pas nécessaire toutefois de conclure quant à l'existence de marchés distincts libre-service et coupe dans la mesure où l'analyse concurrentielle ne s'en trouverait pas modifiée.

Une segmentation supplémentaire pourrait être envisagée, notamment pour la vente en libre service où le consommateur repère aisément une marque et le prix de vente selon le positionnement commercial du produit. Il existe ainsi des produits de marque de fabricant (MDF) d'une part, et des produits de marque de distributeur (MDD), premiers prix (MPP) et hard discount (MHD), d'autre part. Il apparaît que certains opérateurs sont plus ou moins spécialisés selon ces positionnements commerciaux.

Au cas d'espèce, il apparaît que les produits destinés à être revendus sous MDD/MPP/MHD sont sur le même marché d'approvisionnement. Les acheteurs sont en effet identiques et les marchés sont des marchés d'appels d'offres, auxquels répondent les mêmes offreurs. De plus, concernant les MDD ou les MPP, la grande distribution peut lancer des appels d'offres et décider au dernier moment de changer le positionnement commercial du produit (MDD/MPP). Il y a donc, tant du côté de l'offre que de la demande, une substituabilité tendant à confirmer l'existence d'un marché unique de l'approvisionnement des fromages sous MDD/MPP/MHD.

En revanche, on peut s'interroger sur une éventuelle segmentation avec les produits destinés à être revendus sous MDF. En effet, contrairement au circuit d'approvisionnement des produits MDD/MPP/MHD. Ces marchés ne font pas l'objet d'appels d'offres. De plus, les achats de ces produits ne sont pas conditionnés au respect de cahiers des charges prédéfinis stricts et ils donnent lieu à une rémunération du distributeur dans le cadre de contrats de coopération commerciale. Enfin, la grande distribution, d'une manière générale, se doit de disposer d'au moins une marque de fabricant dans ses assortiments en matière de fromages PPC.

En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de conclure quant à l'existence de marchés distincts suivant le positionnement commercial des produits dans la mesure où les conclusions de l'analyse concurrentielle ne s'en trouveraient pas modifiées.

2. La restauration hors foyer (" RHF ")

La RHF regroupe notamment les opérateurs du circuit de la restauration commerciale et de la restauration collective (grossistes, cash and carry, chaîne de restauration etc.). Le circuit d'approvisionnement de la RHF se distingue de la vente aux GMS. La RHF revend les fromages intégrés à un repas, nécessitant un conditionnement particulier et des contenants plus volumineux que ceux destinés à la revente aux consommateurs. Enfin, les besoins de la RHF en termes de diversité de gamme sont moindres que ceux des GMS (13).

En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de conclure quant à l'existence d'un marché distinct de l'approvisionnement de fromages de la RHF dans la mesure où l'analyse concurrentielle ne s'en trouverait pas modifiée.

3. L'industrie agroalimentaire (" IAA ")

L'industrie agroalimentaire achète essentiellement des fromages PPC, des fromages à pâte pressée non cuite, des pâtes filées, et des fromages fondus. Elle achète plus marginalement (pour des produits " haut de gamme ") du comté et du beaufort. Dans un contexte de forte croissance du marché des plats cuisinés, les industries agroalimentaires utilisent davantage de fromages. En fonction de leur goût ou de la consistance souhaités, les fromages seront utilisés seuls ou sous forme de mélange.

En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de conclure quant à l'existence d'un marché distinct de l'approvisionnement de l'IAA en fromages dans la mesure où l'analyse concurrentielle ne s'en trouverait pas modifiée.

C. - Les marchés géographiques

1. Les marchés de la collecte du lait

Il y a lieu d'opérer ici une distinction entre la collecte de lait destinée à la fabrication de PPC hors AOC et la collecte dans les zones AOC.

En ce qui concerne la collecte de lait destiné à la fabrication de PPC hors AOC, les parties se sont référées à la pratique de la Commission européenne qui, dans la décision Arla Foods/Express Dairies du 10 juin 2003, avait identifié le marché amont de l'approvisionnement de lait comme un marché de dimension nationale. En l'espèce, la décision portait sur le marché britannique, fortement distinct compte tenu de son insularité. Or, dans sa pratique décisionnelle nationale, le ministre a retenu l'existence de marchés géographiques locaux, tout au plus régionaux, pour la collecte de lait. Ont ainsi été étudiés les marchés de la collecte de lait de vache en Rhône-Alpes (14), mais aussi les " marchés départementaux concernés du lait de vache " et du marché de la collecte de lait de brebis en Aveyron (15). Les parties ont indiqué qu'au cas d'espèce, la dimension géographique de ce marché ne pouvait être réduite à une région administrative. Elles considèrent en effet qu'il existe une zone homogène en termes d'offre et de demande, constituée par la Bretagne et les Pays de la Loire en raison d'une valorisation du lait de vache identique pour ces deux régions, de l'absence de frontière logistique entre elles, et de l'existence d'un Centre Interprofessionnel Laitier (CIL) unique pour les régions Bretagne et Pays de la Loire. Cependant, une analyse des tournées de collecte de lait révèle que celles-ci ne peuvent s'effectuer que dans un rayon de 50 kilomètres en moyenne autour de chaque laiterie, ce qui tend à réduire davantage la dimension géographique pertinente du marché de la collecte du lait.

En ce qui concerne les AOC, on pourrait s'interroger sur une délimitation plus étroite du marché de la collecte de lait, suivant les contours des zones de production du comté et du beaufort. En effet, les fromages bénéficiant d'une AOC ne peuvent être fabriqués qu'à partir de lait produit dans une zone délimitée par décret (16) et uniquement à partir de certaines races de vaches. Pour le comté, la production de lait doit être effectuée dans l'aire géographique comprenant un nombre limité de communes et s'étendant sur les départements du l'Ain, du Doubs, du Jura, de Saône-et-Loire et de la Haute-Savoie. (17) Pour le beaufort, la production de lait doit être effectuée dans l'aire géographique qui s'étend au territoire d'un nombre limité de communes implantées dans les arrondissements d'Albertville, Saint-Jean-de-Maurienne et Bonneville.

Toutefois, il n'apparaît pas nécessaire de définir précisément les marchés géographiques de la collecte de lait, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

2. Les marchés de l'achat de meules blanches de comté et de beaufort

Les dimensions géographiques de ces marchés sont identiques à celles précédemment définies pour la collecte du lait destiné à la fabrication des deux fromages sous AOC.

3. Les marchés de fromages

Dans le domaine alimentaire, les autorités de concurrence considèrent traditionnellement les marchés comme de dimension nationale. Les préférences, les goûts et les habitudes des consommateurs, les différences de prix, des variations de parts de marché des opérateurs dans les différents États membres, et la forte présence de marques nationales justifient cette approche. Elle s'applique en l'espèce à l'approvisionnement de la grande distribution, notamment en raison de ses préférences pour les produits d'origine nationale (ce qui est particulièrement le cas de l'emmental français). Si les importations de fromages PPC existent, notamment en provenance d'Allemagne et des Pays-Bas, ces dernières restent faibles.

En ce qui concerne l'approvisionnement en fromages PPC de l'industrie agroalimentaire et de la restauration hors domicile, les fromages PPC sont utilisés comme ingrédients, destinés à être transformés avant la revente d'un produit au consommateur final. Ce dernier est moins sensible à la provenance géographique du produit utilisé, ce qui permet à l'IAA ou à la RHF d'acheter plus facilement que la GMS des fromages d'origine étrangère. La question d'un marché de dimension supranationale pour les circuits de l'IAA et de la RHF peut cependant être laissée ouverte dans la mesure où l'analyse concurrentielle menée sur le marché national aboutit aux mêmes conclusions.

4. Les marchés des dérivés du lait

Ces marchés se caractérisent par la présence, tant à l'achat qu'à la vente, de grands groupes de dimension européenne, voire mondiale. Sur ce segment de leur activité, les parties exportent plus de 70 % de leur production. La question de savoir si ces marchés sont de dimension mondiale peut toutefois être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la dimension retenue, les conclusions de l'analyse concurrentielle demeurent identiques.

III. - ANALYSE CONCURRENTIELLE

A. - Marchés amont

1. La collecte de lait

A l'issue de l'opération, Entremont Alliance collectera ([30-40] % ([10-20] % + [10-20] %) du lait produit en Bretagne, devant Lactalis ([20-30] %), CoopAgri ([10-20] %), Bongrain ([0-10] %) et Even ([0-10] %). Cette part de marché est de [10-20] % dans la région Grand Ouest (Bretagne et Pays de la Loire).

Le risque de création ou de renforcement de la puissance d'achat de la nouvelle entité plaçant les fournisseurs en situation de dépendance économique peut être écarté. Une analyse des différentes zones de collecte montre en effet que les producteurs de lait conservent la possibilité d'écouler leur production chez d'autres industriels. Les sites de production des parties se situent d'ailleurs dans des départements différents : Entremont est implanté en Ille-et-Vilaine et dans le Morbihan*, tandis qu'Unicopa est présent dans le Finistère et les Côtes d'Armor.

Le risque de création ou de renforcement d'une position dominante simple peut également être écarté compte tenu de l'existence d'un concurrent puissant, la société Lactalis, ainsi que de trois autres concurrents qui, ensemble, détiennent une part de marché équivalente à la nouvelle entité (environ [20-30] %).

Compte tenu de la structure de la demande, cinq entreprises collectant 85 % du lait produit en Bretagne, deux d'entre elles totalisant près de [50-60] % des achats à elles seules, on peut s'interroger sur le risque de création ou de renforcement d'une position dominante collective sur le marché de la collecte de lait, même si, comme l'a souligné la Commission européenne dans sa décision Arla Foods/Express Dairies du 10 juin 2003, une telle position du côté de la demande constituerait une situation inhabituelle. Sans entrer dans une analyse approfondie, il peut être considéré que le risque de création ou de renforcement d'une position dominante collective sur le marché en cause doit être à ce stade écarté. En effet, il paraît improbable que les entreprises actives sur ce marché aient une incitation quelconque à coordonner leurs comportements d'achat compte tenu de la divergence de leurs intérêts économiques propres. Les groupes industriels qui sont de simples acheteurs se trouvent en effet confrontés à la présence des coopératives agricoles qui entretiennent des liens très étroits avec les producteurs de lait. Cette hétérogénéité des acheteurs et de leurs intérêts respectifs conduit à penser qu'un oligopole collusoire maintenu par un mécanisme de rétorsion efficace ne pourrait être créé sur le marché en cause.

En ce qui concerne la zone de collecte du lait situé à l'est de la France, le risque d'atteinte à la concurrence peut être écarté dans la mesure où Unicopa n'y collecte pas de lait de vache.

Enfin, dans les zones de collecte AOC du comté et du beaufort, les parties ont des positions négligeables (18) et restent confrontées à la concurrence de nombreux autres opérateurs.

2. L'achat de meules blanches à comté

En 2004, sur les 40 162 tonnes de meubles blanches à comté fabriquées par les fruitières, FEM/Entremont en a acheté [5 000-15 000] tonnes et Unicopa [0-10 000] tonnes. Entremont Alliance détiendra donc [20-30] % de ce marché, devant les autres principaux opérateurs : Petite ([10-20] %), Arnaud ([10-20] %), Rivoire ([0-10] %), Vagne ([0-10] %) et Fromageries l'Ermitage ([0-10] %). Le volume restant ([20-30] %) est acheté par des affineurs locaux.

L'addition de parts de marché engendrée par l'opération est faible, Unicopa n'achetant que [0- 10] % des meules blanches à comté. La question de la capacité de la nouvelle entité à restreindre l'accès de ses concurrents au marché se pose néanmoins, compte tenu du renforcement de sa position de numéro un.

Cependant certains de ses concurrents sur le marché aval de la vente de comté, au premier rang desquels Lactalis, disposent d'une structure intégrée, les soustrayant à tout risque d'éviction de la part d'Entremont Alliance sur ce marché de l'achat de meules blanches. Cette pression concurrentielle permet d'écarter le risque d'éviction des concurrents directs de la nouvelle entité. De plus, plusieurs opérateurs régionaux ont créé une structure commune en vue de la commercialisation de leurs produits, les Affineurs Franc-Comtois Réunis, qui devrait à terme intensifier la concurrence sur ce marché amont. Soumise à une concurrence actuelle et potentielle plutôt vive, la nouvelle entité ne paraît pas en mesure d'exercer un quelconque pouvoir de marché.

B. - Marchés aval

En préalable, en ce qui concerne le marché des fromages fondus, il convient d'indiquer que les ventes cumulées des parties ne représentent que [0-10] % des ventes françaises en volume et en valeur. Compte tenu du poids que représente le groupe Bel (60-70 % des ventes en volume, 70-80 % des ventes en valeur), il doit être conclu que l'opération n'a pas pour effet de porter atteinte à la concurrence sur le marché des fromages fondus, quelle que soit sa segmentation.

1. Les marchés des fromages

a) Les marchés des fromages PPC

Les fromages PPC sont vendus par trois canaux de distribution que sont les GMS, la restauration hors foyer et les IAA, analysés séparément ci-après.

Sur le marché de l'approvisionnement des GMS.

En 2004, l'essentiel des ventes de fromages PPC en France a été réalisé auprès du réseau des GMS, lequel a représenté 67,5 % du volume total des ventes et 73,5 % de leur chiffre d'affaires. Les ventes en GMS ont en effet représenté en 2004 un volume de 188 081 tonnes pour un chiffre d'affaires d'un milliard d'euro HT. Sur ce circuit, FEM/Entremont a vendu [50 000-60 000] tonnes et Unicopa [10 000-20 000] tonnes aux GMS. A l'issue de l'opération, Entremont Alliance détiendra donc [30-40] % du marché en volume et [30-40] % en valeur. Il peut d'ores et déjà être relevé que les parties ne sont pas actives sur les marchés des fromages frais, fromages à pâte persillée, fromages de chèvre ou de brebis, et fromages à pâte molle. Sur le marché des fromages fondus, leur présence est marginale, et s'agissant du marché des fromages à pâte pressée non cuite, seul Unicopa intervient sur la vente de raclettes**. Dès lors, l'opération ne saurait conférer à la nouvelle entité un avantage concurrentiel issu d'un effet de gamme.

Les fromages PPC sont usuellement revendus à la coupe ou en libre-service, et, au sein du libre service, selon leur positionnement commercial (marque de fabricant / marques de distributeur, premier prix, hard discount).

En ce qui concerne l'approvisionnement des GMS en fromages PPC destinés à être vendus à la coupe, 14 670 tonnes ont été vendues en 2004, ce qui représente 7,8 % des ventes totales de PPC en GMS. Sur ce circuit, FEM/Entremont a vendu [0-10 000] tonnes et Unicopa [< 1 000] tonnes aux GMS. A l'issue de l'opération, Entremont Alliance détiendra donc [10-20] % du marché en volume. Compte tenu du faible chevauchement d'activité des parties sur ce segment et de l'existence de nombreux concurrents alternatifs, l'opération ne modifie sensiblement ni la structure ni le fonctionnement de ce marché.

Sur le segment de l'approvisionnement de fromages PPC destinés à être vendus en libre-service sous MDF, quatre opérateurs sont présents : Lactalis (" Président ", [30-40] % de parts de marché), Bel (" Leerdammer ", [20-30] %), Entremont ([20-30] %) et Unicopa (" Rippoz ", [0-10] %). La concentration renforcera donc la position d'Entremont Alliance. L'opération a pour effet de réduire le nombre d'acteurs de quatre à trois.

Cependant l'augmentation de la part de marché par rapport à celle détenue par FEM/Entremont demeure limitée. De plus, la combinaison des deux marques Entremont et Rippoz ne paraît pas de nature à renforcer significativement la nouvelle entité du fait de la faible notoriété de la seconde. Compte tenu de la structure de ce marché, l'analyse conduit à s'interroger pour savoir si, préalablement à l'opération, les trois grands opérateurs ne détenaient pas déjà une position dominante collective. Toutefois l'un des critères essentiels pour établir l'existence d'une position dominante collective, la transparence des prix, fait ici défaut. Le marché se caractérise en effet par une forte opacité des prix, notamment en ce qui concerne les négociations commerciales entre les fournisseurs et la grande distribution. Il apparaît qu'aucun opérateur n'est en mesure de connaître le niveau des marges arrière consenties à chaque distributeur. Le risque de collusion tacite peut par conséquent être écarté. De plus, la grande distribution dispose d'une puissance d'achat compensatrice (conditions d'achat et de référencement, coopération commerciale) qui peut lui permettre de contester les fortes positions des fabricants de fromages PPC de marque fabricant. L'évolution à la baisse des prix de vente industriels des produits des parties et de leurs taux de marge est révélateur, dans une large mesure, de ce pouvoir de négociation. Il existe également une forte concurrence entre les producteurs pour être référencés dans les linéaires de la grande distribution. D'une manière générale, sur ces marchés des PPC, la dépendance des distributeurs n'est pas très importante en ce qui concerne les marques de fabricants, dont les ventes sont en recul et correspondent aujourd'hui à 20 % du volume total des fromages PPC vendus par les GMS.

En ce qui concerne les fromages PPC destinés à être vendus sous MDD/MPP/MHD, Entremont Alliance détiendrait à l'issue de l'opération une part de marché estimée à [40-50] % (19). Son principal concurrent est Lactalis avec une part de marché en croissance, estimée aujourd'hui à [20-30] %. Lactalis, première entreprise laitière européenne, présente sur les marchés des fromages PPC depuis le début des années 1990, a concurrencé de manière particulièrement efficace les parties puisque son volume de vente est passé de 5 000 tonnes à environ 70 000 tonnes actuellement. Les autres opérateurs sur ce segment de l'approvisionnement de fromages PPC destinés à être vendus sous MDD/MPP/MHD sont les sociétés Ermitage, Even, le Centurion qui ont des parts de marché de l'ordre de [0-10] % chacune. La grande distribution dispose ici d'un fort pouvoir de négociation par le biais de ses appels d'offres, comme l'indique la tendance à la baisse des prix de vente des parties pour la fourniture de fromages PPC sous MDD/MPP/MHD. En outre, les distributeurs ont des sources d'approvisionnement diversifiées, en ayant recours à la plupart des producteurs présents en France, avec la possibilité de s'adresser à des fabricants étrangers, notamment pour le hard discount. Par conséquent, la puissance d'achat de la grande distribution et la concurrence effective de Lactalis est suffisante au cas présent pour prévenir la création ou le renforcement d'une position dominante de la nouvelle entité consécutive à la concentration.

Sur le marché de l'approvisionnement de l'industrie agroalimentaire.

S'agissant de l'approvisionnement de l'industrie agroalimentaire, 26 030 tonnes de fromages " PPC et assimilés hors AOC ", soit 9 % du volume global, ont été vendues en 2004. FEM/Entremont a vendu [0-10 000] tonnes et Unicopa [0-10 000] tonnes aux industriels de l'agroalimentaire. A l'issue de l'opération, Entremont Alliance détiendra une part de marché estimée à [20-30] % en volume et en valeur. Il apparaît que sur ce circuit les produits vendus par les parties sont directement concurrencés par d'autres types de fromages d'origine non française (édam pour l'essentiel) qui sont moins chers et qui ont un usage identique (20) pour la fabrication des plats préparés. Sur ce segment l'offre est excédentaire et les grands groupes de l'industrie agroalimentaire disposent d'un fort pouvoir de négociation.

Sur le marché de l'approvisionnement de la restauration hors foyer.

En 2004 pour l'approvisionnement de la restauration hors foyer (21), 65 029 tonnes de fromages PPC, soit 23,5 % du volume global, ont été vendues. FEM/Entremont a vendu [0-10 000] tonnes et Unicopa [10 000-20 000] tonnes dans ce circuit. A l'issue de l'opération, Entremont Alliance détiendra donc une part de marché estimée à [30-40] % en volume et [30-40] % en valeur. Les parties ont indiqué que leurs produits étaient cependant concurrencés par des fromages PPC en provenance d'autres pays européens (concurrence de l'emmental allemand (22) notamment), étant donné l'absence du critère de la nationalité du produit dans les choix des demandeurs, contrairement à la grande distribution. Ainsi, les acheteurs, comme Eurofrais, CashMetro, Prodirest, bénéficient de nombreuses alternatives sur ce marché.

b) Les marchés du comté.

En 2004, 44 179 tonnes de comté ont été vendues en France (23). FEM/Entremont a vendu [0-10 000] tonnes et Unicopa [0-10 000] tonnes de comté. A l'issue de l'opération, Entremont Alliance détiendra [20-30] % de part de marché global en volume (24). Sur ce marché global, les autres opérateurs détiennent des positions moins importantes : Petite ([10-20] %), Arnaud ([10-20] %), Rivoire ([0-10] %), Ermitage ([0-10] %), et Lactalis ([0-10] %).

Sur le marché de l'approvisionnement des GMS.

Le comté est usuellement revendu à la coupe ou en libre-service, et, au sein du libre-service, selon son positionnement commercial (marque de fabricant / marques de distributeur, premier prix, hard discount).

Concernant l'approvisionnement en comté destiné à être vendu à la coupe, les parties disposeront d'une part de marché cumulée de [10-20] % (25). Compte tenu de la très faible addition de parts de marché ([0-10] %) et de l'existence d'une forte concurrence sur ce marché peu dynamique, l'opération n'est pas de nature à conférer un pouvoir de marché à Entremont Alliance.

Concernant l'approvisionnement de comté destiné à être vendu en libre-service sous MDD/MPP/MHD, Entremont Alliance détiendra une part de marché de [30-40] % (26). Sans rappeler ici le fonctionnement des marchés d'appels d'offres, structurellement favorables à la demande qui dispose, en outre, de la même puissance d'achat que décrite ci-dessus pour les marchés des PPC (27), il doit être tenu compte de la concurrence potentielle constituée par la SAS " Société des Affineurs Franc-Comtois Réunis ". Cette société regroupe les fromageries Petite, Rivoire, Vagne, Seignemartin et Griollot, ainsi que la société de préemballage Terres d'Or. Ce concurrent dispose depuis 2004 d'une ligne de production permettant de pré-découper le comté en poids fixe, qui constitue le mode de conditionnement demandé par les GMS pour les produits MDD/MPP/MHD vendus en libre-service. Cette société a des capacités de production estimées à 10 000 tonnes de comté préemballé et est donc capable de répondre efficacement aux appels d'offres de la grande distribution en comté MDD/MPP/MHD, dont le volume total est de 14 600 tonnes environ. Compte tenu de ces effets compensateurs, la forte position de la nouvelle entité n'est pas de nature à lui conférer ou à renforcer une position dominante sur ce marché.

Concernant l'approvisionnement de comté destiné à être vendu en libre-service sous MDF, Entremont Alliance détiendra une part de marché de [50-60] % (28). Préalablement à l'opération, Entremont qui disposait d'une part de marché de [50-60] % n'était vraisemblablement pas en position dominante simple sur ce marché dans la mesure où on observe que ses prix moyens de vente de comté aux GMS sont globalement orientés à la baisse, la tendance s'étant accentuée en 2004. De plus, Lactalis est entré sur ce marché en 1992 : avec sa marque à très forte notoriété, Président, il a gagné des parts de marché au détriment d'Entremont, le leader historique du marché.

Il convient toutefois de s'interroger sur l'éventuelle création de position dominante à l'issue de l'opération. Tout d'abord, il faut souligner que la concentration n'entraîne qu'un faible chevauchement d'activité (la marque Rippoz, peu connue, représente moins de 200 tonnes sur un marché dont le volume est évalué à 6 856 tonnes). En outre, la nouvelle entité ne paraît pas en mesure d'exercer un pouvoir de marché compte tenu de la puissance d'achat compensatrice de la grande distribution. Au cas d'espèce, cette puissance d'achat s'appuie en particulier sur la présence très forte des GMS sur le marché du comté vendu sous MDD/MPP/MHD qui représente près de 70 % des ventes totales de comté en libre-service. Même si le comté MDF et le comté MDD/MPP/MHD ne constituent pas des produits directement substituables, ils sont toutefois suffisamment proches pour que les opérateurs de la grande distribution puissent décider en cas de manifestation d'un quelconque pouvoir de marché de la nouvelle entité de déréférencer le comté MDF d'Entremont Alliance sans que cela leur nuise pour autant. En effet, ils pourront reporter leurs achats sur le produit substitut le plus proche, le comté de marque Président et/ou orienter leurs approvisionnements vers les comtés MDD/MPP/MHD. Enfin, on ne peut exclure la concurrence potentielle qui viendrait de la SAS " Société des Affineurs Franc-Comtois Réunis " qui, attirée par une hausse des prix, pourrait entrer sur le marché de l'approvisionnement en comté MDF. Cette concurrence potentielle pourrait également se manifester, dans le cadre du scénario précédemment exposé, puisque la SAS " Société des Affineurs Franc-Comtois réunis " pénétrera le marché de l'approvisionnement de comté sous MDD/MPP/MHD et serait en mesure de répondre à un surcroît de demande des GMS. L'ensemble de ces considérations conduit à penser que l'opération ne se traduira pas par la création d'une position dominante de la nouvelle entité sur le marché du comté MDF destiné à la vente en libre-service.

De la même manière que l'analyse effectuée sur le marché des PPC sous MDF, notamment du fait de l'absence de transparence des prix (taux de coopération commerciale), le risque d'une position dominante collective d'Entremont et de Lactalis peut être écartée.

Dès lors, la forte position de la nouvelle entité n'est pas de nature à lui conférer ou à renforcer une position dominante sur ce marché.

Sur les marchés de l'approvisionnement de l'IAA et de la RHF.

Pour l'approvisionnement de l'IAA et de la RHF, la part de marché combinée d'Entremont Alliance sera respectivement de [20-30] % (29) et [20-30] % (30). Ces marchés sont de taille très réduite : 1 500 tonnes de comté ont été vendues à l'industrie agroalimentaire (soit 3,3 % du volume global de comté vendu en France en 2004) et 3 166 tonnes ont été vendues à la restauration hors domicile (soit 7 % du volume global de comté vendu). Compte tenu de leur taille et de la concurrence exercée par les opérateurs régionaux précités, l'opération ne modifie pas sensiblement la structure de ces marchés et n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence.

c) Les marchés du beaufort.

En 2004, sur les 3 037 tonnes de beaufort vendues en France (31), FEM/Entremont en a vendues [< 1 000] et Unicopa [< 1 000], soit une part de marché de [10-20] % en volume. (32) La nouvelle entité ne bénéficiera que d'un faible apport d'Unicopa ([0-10] % des ventes françaises en volume) et restera confrontée à la concurrence du numéro un, la société Pochat, filiale de Lactalis ([10-20] %). Si les autres opérateurs sont de taille plus modeste (33), l'opération ne modifie pas l'environnement concurrentiel de manière significative sur un petit marché en volume (34), quel que soit son canal de distribution, et n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence.

2. Les marchés des dérivés du lait

Sur les 302 209 tonnes de poudres de lait vendues en France en 2004, Entremont Alliance détiendra à l'issue de l'opération une part de marché d'environ [0-10] % (35). Sur les 322 445 tonnes de lactosérum vendues en France en 2004, Entremont Alliance détiendra sur le marché français de la vente de lactosérum une part de marché estimée à [10-20] %. (36) Déjà faibles, les parts de marché d'Entremont Alliance doivent de surcroît être considérées dans un contexte concurrentiel marqué par la présence d'acteurs nationaux et européens importants (37), ainsi que par l'existence d'un fort pouvoir de négociation de la demande sur deux marchés très fluctuants.

En conclusion, il ressort de l'instruction du dossier que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement de position dominante. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.

Je vous prie d'agréer, Maîtres, l'expression de ma considération distinguée.

Nota. - A la demande des parties notifiantes, des informations relatives au secret des affaires ont été occultées et la part de marché exacte remplacée par une fourchette plus générale. Ces informations relèvent du " secret des affaires ", en application de l'article 8 du décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du Code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

Notes :

(1) Affaire n°COMP/M.3904 - FEM/Entremont/Unicopa, décision en date du 14 septembre 2005.

(2) CNP est présente dans la communication, l'agroalimentaire, la restauration rapide, le trading d'énergie, la vente au détail de vêtements...

(3) Il ressort des éléments de droit contenus dans ce protocole d'intention qu'Unicopa sera en mesure d'exercer une influence déterminante dans Unifem.

(4) Se référer notamment à la décision du ministre de l'économie en date du 12 novembre 2002 dans l'opération Fromageries Bel SA/Groupe Leerdammer (C.2002-103). Décision publiée au BOCCRF n°2003-09.

(5) Cf. Lettre du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en date du 22 décembre 2004, aux conseils de la société Lactalis, relative à une concentration dans le secteur des produits laitiers (affaire C.2004-166).

(6) Sur une production totale de 49 262 tonnes de comté en 2004, 9 100 tonnes ont été fabriquées par les industriels fromagers eux-mêmes (collecte/fabrication/affinage), soit 18 %.

(7) Décision du 7 janvier 1997 Groupe Besnier/Société fromagère vosgienne Marcillat.

(8) Décision du 20 mai 1998 Groupe Besnier/Société Laiterie Ladhuir.

(9) Décision du ministre de l'Economie en date du 12 novembre 2002 dans l'opération Fromageries Bel SA/Groupe Leerdammer (C.2002-103). Décision publiée au BOCCRF n°2003-09.

(10) Le volume des ventes de fromages râpés a beaucoup augmenté ces dernières années et atteint aujourd'hui 60 % du volume total des ventes de fromages PPC.

(11) Décision n°98-D-54 du 8 juillet 1998, relative à des pratiques relevées dans le secteur de la production du gruyère de comté.

(12) En 2004, les ventes de PPC en libre-service représentaient plus de 92 % de la distribution au détail en volume.

(13) Une analyse identique a été appliquée dans le secteur du riz lors de l'analyse de l'opération Ebro Puleva / Panzani, autorisée par le ministre par une décision en date du 21 avril 2005 (C. 2005-17).

(14) Cf. Décision du ministre de l'Economie Lactalis/Pochat en date du 22 décembre 2004 (affaire C.2004-166).

(15) Cf. Décision du ministre de l'Economie Besnier/Sociétés Laiterie Ladhuie et Ladhuie Distribution en date du 20 mai 1998.

(16) Pour le comté, le décret prévoit que " pour un site de transformation, la zone de collecte des laits ne peut s'étendre au-delà des limites d'un cercle de 25 kilomètres, si ces exploitations approvisionnaient déjà ce site avant cette date [30 décembre 1998]. "

(17) Article 1er du décret du 29 décembre 1986.

(18) Sur le marché de la collecte de lait de vache destiné à la fabrication du comté, les parties détiennent une part de marché cumulée inférieure à [0-10] %.

* Erreur matérielle : Entremont est également implanté dans le Finistère.

(19) Sur les 139 000 tonnes de fromages MDD/MPP/MHD vendus en libre-service par les GMS, Entremont a été fournisseur de [40 000-50 000] tonnes et Unicopa de [10 000-20 000] tonnes.

(20) Du point de vue de la demande de l'IAA, les fromages à pâte jaune (" yellow cheese ") pourraient ainsi former un marché de produit relativement homogène pour caractériser l'ensemble des fromages utilisés pour leur capacité à fondre.

(21) L'approvisionnement concerne également les grossistes et les préemballeurs.

(22) Les sociétés Hochland***, Bayerland et Zott comptent parmi les principaux groupes laitiers allemands fabricants de PPC.

(23) Ces ventes ont généré, selon les parties, un chiffre d'affaires estimé à 304 millions d'euro HT.

(24) La part de marché global en valeur a été estimée par les parties à 30 %.

(25) Entremont : [10-20] % ; Unicopa : [0-10] %.

(26) Entremont : [10-20] % ; Unicopa : [10-20] %.

(27) Par exemple, malgré sa forte part de marché avant l'opération ([50-60] %), les prix de vente moyens industriels du comté en MDD/MPP d'Entremont ont régulièrement baissé : - [0-10] % depuis 2001.

** Erreur matérielle : Entremont est également présent, de manière marginale, sur la vente de raclettes.

*** Erreur dans la notification : lire " Algäuland " au lieu de " Hochland "

(28) Entremont : [50-60] % ; Unicopa : [0-10] %.

(29) Entremont : [10-20] % ; Unicopa : [0-10] %.

(30) Entremont : [0-10] % ; Unicopa : [10-20] %.

(31) Ce volume a généré un chiffre d'affaires estimé à 33,7 millions d'euro.

(32) La part de marché en valeur a été estimée par les parties à [10-20] %.

(33) Chabert et Connus ([0-10] % chacun), les coopératives locales (environ [20-30] %), les grossistes locaux et les négociants ([10-20] %).

(34) Environ 4 000 tonnes de beaufort sont produites annuellement en France.

(35) Sur le marché européen des poudres de lait, les parties détiennent ensemble une part de marché estimée à [0-10] % en volume et en valeur.

(36) Sur un marché européen du lactosérum, les parties détiennent ensemble une part de marché estimée à [0-10] % en volume.

(37) Sur le marché des poudres de lait, citons notamment le groupe Lactalis, le groupe Even, Bongrain-Clé, Nestlé, Ingredia, et Celia, et sur le marché du lactosérum, citons Lactofrance (filiale de Lactalis) et Bonilait en France, mais aussi Borculo (Pays-Bas), Kerry (Irlande), Valio (Finlande) et BMI (Allemagne).