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Décisions

CJCE, 6e ch., 9 octobre 1997, n° C-163/95

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Freifrau von Horn

Défendeur :

Cinnamond

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ragnemalm

Avocat général :

M. Jacobs

Juges :

MM. Mancini, Kapteyn, Murray, Hirsch

Avocats :

Mes Forsyte, Saunders, Kerman, Brunner, Henshall, Lloyd Jones

CJCE n° C-163/95

9 octobre 1997

LA COUR (sixième chambre),

1 Par ordonnance du 25 mai 1995, parvenue à la Cour le 29 mai suivant, la House of Lords a posé, en vertu du protocole du 3 juin 1971 relatif à l'interprétation par la Cour de justice de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 21 de la convention du 27 septembre 1968, précitée (JO 1972, L 299, p. 32, ci-après la "convention de Bruxelles"), telle que modifiée par la convention du 9 octobre 1978 relative à l'adhésion du Royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (JO L 304, p. 1, et - texte modifié - p. 77), par la convention du 25 octobre 1982 relative à l'adhésion de la République hellénique (JO L 388, p. 1) et par la convention du 26 mai 1989 relative à l'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise (JO L 285, p. 1, ci-après la "convention de San Sebastián"), ainsi que de l'article 29 de la convention de San Sebastián.

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Mme von Horn, domiciliée au Portugal, à M. Cinnamond, domicilié au Royaume-Uni, au sujet du paiement d'une somme qu'elle réclame à l'encontre de ce dernier, représentant le montant de la vente à une société de Gibraltar de parts sociales dans une société immobilière.

3 Le 27 août 1991, M. Cinnamond a assigné Mme von Horn devant le Tribunal de Círculo de Portimão (Portugal) pour faire établir qu'il ne lui était pas redevable de la somme de 600 000 UKL ou de l'équivalent en escudos. Dans le cadre de cette procédure, Mme von Horn a fait une demande reconventionnelle visant à voir déclarer que M. Cinnamond lui devait la somme de 600 000 UKL et à obtenir une injonction de paiement.

4 Le 9 novembre 1992, Mme von Horn a saisi la High Court of Justice d'un recours, notifié le 18 novembre suivant à M. Cinnamond, en vue d'obtenir le paiement de la somme de 600 000 UKL à titre de solde de la vente de parts sociales ou, à titre subsidiaire, des dommages et intérêts. Le 27 novembre 1992, M. Cinnamond a soulevé l'incompétence de cette dernière juridiction. Le 5 mars 1993, un sursis à statuer a été ordonné. Le 21 avril 1993, un juge de la High Court a fait droit à l'appel interjeté par Mme von Horn à l'encontre de ce sursis. M. Cinnamond a interjeté appel de cette décision devant la Court of Appeal, qui l'a débouté par arrêt du 25 février 1994. Le 19 juillet suivant, la House of Lords a autorisé M. Cinnamond à former un pourvoi devant elle.

5 Considérant que le litige posait des questions d'interprétation des conventions de Bruxelles et de San Sebastián, la House of Lords a sursis à statuer et a posé à la Cour les questions suivantes:

"Lorsque:

a) des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties dans deux États contractants différents;

b) la première de ces demandes dans le temps a été introduite dans l'État contractant A avant l'entrée en vigueur dans cet État de la convention de Bruxelles et/ou de toute convention d'adhésion applicable;

c) la seconde de ces actions est formée dans l'État contractant B conformément à l'article 2 de la convention de Bruxelles après l'entrée en vigueur à la fois dans l'État A et dans l'État B de la convention de Bruxelles et/ou de toute convention d'adhésion applicable;

et compte tenu de l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián et des articles correspondants de toute autre convention d'adhésion applicable ainsi que de l'article 21 de la convention de Bruxelles (telle que modifiée):

1) La convention de Bruxelles (telle que modifiée) et/ou toute autre convention d'adhésion applicable prévoit-elle des règles permettant ou imposant à la juridiction de surseoir à statuer dans la procédure dans l'État B, ou de se dessaisir, en raison de l'action pendante dans l'État A, et dans l'affirmative lesquelles?

Et, en particulier,

2) la juridiction saisie doit-elle ou peut-elle, pour décider si elle doit ou non se dessaisir ou surseoir à statuer dans la procédure pendante devant elle, vérifier la base sur laquelle la juridiction saisie en premier lieu s'est déclarée compétente, et dans l'affirmative comment?"

6 Pour répondre à ces questions, qu'il convient d'examiner ensemble, il importe de rappeler à titre liminaire que, aux termes de l'article 21 de la convention de Bruxelles, tel que modifié par l'article 8 de la convention de San Sebastián,

"Lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d'États contractants différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d'office à statuer jusqu'à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie.

Lorsque la compétence du tribunal premier saisi est établie, le tribunal saisi en second lieu se dessaisit en faveur de celui-ci."

7 L'article 29 de la convention de San Sebastián est rédigé comme suit:

"1. La convention de 1968 et le protocole de 1971, modifiés par la convention de 1978, la convention de 1982 et par la présente convention, ne sont applicables qu'aux actions judiciaires intentées et aux actes authentiques reçus postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente convention dans l'État d'origine et, lorsque la reconnaissance ou l'exécution d'une décision ou d'un acte authentique est demandée, dans l'État requis.

2. Toutefois, les décisions rendues après la date d'entrée en vigueur de la présente convention dans les rapports entre l'État d'origine et l'État requis à la suite d'actions intentées avant cette date sont reconnues et exécutées conformément aux dispositions du titre III de la convention de 1968, modifiée par la convention de 1978, la convention de 1982 et par la présente convention, si la compétence était fondée sur des règles conformes aux dispositions du titre II modifié de la convention de 1968 ou aux dispositions prévues par une convention qui était en vigueur entre l'État d'origine et l'État requis lorsque l'action a été intentée."

8 Conformément à son article 32, paragraphe 2, la convention de San Sebastián est entrée en vigueur entre le Portugal et le Royaume-Uni le premier jour du troisième mois qui a suivi le dépôt du dernier instrument de ratification, à savoir le 1er juillet 1992.

9 Dès lors, la règle qui régit l'application dans le temps de l'article 21 de la convention de Bruxelles est celle qui figure à l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián. Toutefois, force est de constater que cette disposition ne permet pas de déterminer avec certitude si les règles énoncées à l'article 21 de la convention de Bruxelles pour les cas de litispendance sont applicables dans l'hypothèse où la première procédure a été introduite dans un État contractant avant la date d'entrée en vigueur de la convention de San Sebastián, alors que la seconde procédure a été engagée dans un autre État contractant après cette date, ou s'il est nécessaire que les deux procédures aient été introduites postérieurement à l'entrée en vigueur de la convention de San Sebastián.

10 D'une part, si l'article 21 figure dans le titre II de la convention de Bruxelles parmi les règles qui déterminent la compétence de la juridiction saisie, il prescrit à cette dernière de surseoir à statuer et, le cas échéant, de se dessaisir en raison de l'existence d'une procédure devant la juridiction d'un autre État contractant. Contrairement à d'autres règles de procédure, il implique donc nécessairement la prise en compte d'une autre action qui a pu être introduite avant ou après l'entrée en vigueur de la convention.

11 Or, lorsque l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián indique que la convention de Bruxelles s'applique aux actions judiciaires intentées postérieurement à son entrée en vigueur, il ne précise nullement si, dans le cas visé à l'article 21 de cette dernière convention où plusieurs demandes sont formées devant des juridictions d'États contractants différents, il est nécessaire que toutes les procédures aient été introduites après la date d'entrée en vigueur ou s'il suffit que tel soit le cas de la procédure pendante devant la juridiction saisie en dernier lieu.

12 Il est vrai que la plupart des versions linguistiques de l'article 21 de la convention de Bruxelles font référence à l'introduction des demandes et semblent donc suggérer que l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián doit être interprété en ce sens qu'il ne prévoit l'application dudit article 21 que si les dates d'introduction de toutes les demandes sont postérieures à l'entrée en vigueur de la convention. Toutefois, les versions allemande ("werden ... anhängig gemacht") et néerlandaise ("aanhangig zijn") visent la situation dans laquelle la procédure est pendante, en sorte qu'elles autorisent à penser que, en vertu de l'article 29, paragraphe 1, la règle de l'article 21 est applicable dès lors que cette situation se vérifie devant la juridiction saisie en second lieu après l'entrée en vigueur de la convention de San Sebastián.

13 D'autre part, les deux interprétations mentionnées au point 9 du présent arrêt sont également susceptibles de conduire à des résultats peu satisfaisants et contraires aux objectifs de la convention de Bruxelles, tels qu'ils résultent de son préambule, qui consistent, en particulier, à faciliter la reconnaissance et l'exécution réciproques des décisions judiciaires, ainsi qu'à renforcer la protection juridique des personnes établies dans la Communauté. S'agissant, en particulier, de l'article 21, la Cour a itérativement observé que cette disposition figure, ensemble avec l'article 22, relatif à la connexité, à la section 8 du titre II de la convention de Bruxelles, section qui tend, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice au sein de la Communauté, à éviter des procédures parallèles devant les juridictions de différents États contractants et les contrariétés de décisions qui pourraient en résulter. Ainsi, cette réglementation vise à exclure, dans toute la mesure du possible, dès le départ, une situation telle que celle envisagée par l'article 27, point 3, à savoir la non-reconnaissance d'une décision en raison de son incompatibilité avec une décision rendue entre les mêmes parties dans l'État requis (voir arrêts du 8 décembre 1987, Gubisch Maschinenfabrik, 144-86, Rec. p. 4861, point 8, et du 27 juin 1991, Overseas Union Insurance e.a., C-351-89, Rec. p. I-3317, point 16).

14 Or, la thèse selon laquelle l'article 21 serait applicable dès lors que la seconde procédure a été intentée après la date d'entrée en vigueur de la convention de San Sebastián, même si la première demande avait été introduite avant cette date, pourrait conduire à l'impossibilité pour les parties au litige d'obtenir un jugement susceptible d'être exécuté dans l'État contractant dans lequel se déroule la seconde procédure. En effet, le juge saisi en second lieu devrait surseoir à statuer et, le cas échéant, se dessaisir en raison de l'existence d'une procédure devant une juridiction d'un autre État contractant, alors même que la reconnaissance et l'exécution de la décision rendue dans le cadre de cette dernière procédure pourraient s'avérer impossibles dans l'État requis. Tel serait notamment le cas, en vertu de l'article 29, paragraphe 2, de la convention de San Sebastián, si la compétence de la juridiction de l'État contractant d'origine était fondée sur des règles non conformes au titre II de la convention de Bruxelles ou aux dispositions d'une convention qui était en vigueur entre l'État d'origine et l'État requis lorsque l'action avait été intentée.

15 La thèse opposée, selon laquelle l'article 21 ne serait applicable que si les deux procédures ont été introduites après l'entrée en vigueur de la convention de San Sebastián, aboutirait en revanche à ce que les deux procédures se poursuivent dans les deux États contractants, le cas échéant jusqu'au prononcé de deux décisions différentes. Au cas où celles-ci seraient inconciliables entre elles, aucune de ces décisions ne pourrait être reconnue dans l'autre État, conformément à la règle de l'article 27, point 3, de la convention de Bruxelles.

16 Dans ces conditions, il s'avère indispensable d'interpréter l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián à la lumière du système et des objectifs de la convention, ainsi que de la convention de Bruxelles.

17 Il convient donc de retenir une interprétation de cette disposition susceptible de renforcer la protection juridique des personnes établies dans la Communauté et de faciliter la reconnaissance et l'exécution des décisions judiciaires, notamment en limitant les risques d'inconciliabilité des décisions, motif de refus de reconnaissance et d'exécution selon les articles 27, point 3, et 34, deuxième alinéa, de la convention de Bruxelles (voir arrêts du 11 janvier 1990, Dumez France et Tracoba, C-220-88, Rec. p. I-49, point 18, et Overseas Union Insurance e.a., précité, point 15).

18 Or, conformément à l'article 29, paragraphe 2, de la convention de San Sebastián, les décisions rendues dans un État contractant après la date d'entrée en vigueur de cette convention à la suite d'actions intentées avant cette date doivent être reconnues et exécutées conformément au titre III de la convention de Bruxelles si la compétence était fondée sur des règles conformes au titre II de cette même convention ou aux dispositions d'une convention qui était en vigueur entre l'État d'origine et l'État requis lorsque l'action avait été intentée.

19 Il convient donc que, en pareille hypothèse, la juridiction saisie en second lieu, conformément à l'article 21, sursoie d'office à statuer jusqu'à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie et que, lorsque la compétence du tribunal premier saisi est établie, elle se dessaisisse en faveur de celui-ci. De la sorte, la formation de décisions parallèles et potentiellement contradictoires, susceptibles de faire obstacle à la reconnaissance et à l'exécution réciproques, est évitée.

20 En revanche, dans le cas où la compétence du juge premier saisi serait fondée sur des règles non conformes aux dispositions du titre II de la convention de Bruxelles ou d'une convention qui était en vigueur entre l'État d'origine et l'État requis lorsque l'action avait été intentée, sa décision ne pourrait être reconnue dans l'État contractant de la juridiction saisie en second lieu.

21 Dans une telle hypothèse, la juridiction saisie en second lieu se doit d'écarter l'application de l'article 21 et de poursuivre la procédure devant elle. De cette manière, une décision pourra être rendue dans l'État contractant de la juridiction saisie en second lieu, dans lequel la décision de la juridiction saisie en premier lieu ne pourra être ni reconnue ni exécutée. Par ailleurs, la décision de la juridiction saisie en second lieu pourra être reconnue et exécutée dans l'État contractant de la juridiction saisie en premier, à condition certes de ne pas être incompatible avec une décision rendue dans cet État entre les mêmes parties.

22 Il convient encore de préciser que, si le juge premier saisi ne s'est pas encore prononcé sur sa propre compétence, il appartient au juge saisi en second lieu d'appliquer à titre provisoire l'article 21 de la convention de Bruxelles et de surseoir à statuer, étant entendu que la procédure devant lui peut ensuite reprendre si le juge saisi en premier se déclare incompétent ou si la règle sur laquelle il a fondé sa compétence n'est pas conforme aux dispositions du titre II de la convention de Bruxelles ou d'une convention qui était en vigueur entre l'État d'origine et l'État requis lorsque l'action avait été intentée.

23 Il est vrai que cette interprétation conduit le juge d'un État contractant à procéder à un contrôle de la compétence du juge d'un autre État contractant en dehors des hypothèses expressément énoncées aux articles 28 et 34, deuxième alinéa, de la convention de Bruxelles, alors que, comme la Cour l'a indiqué au point 24 de l'arrêt Overseas Union Insurance e.a., précité, en dehors de ces exceptions limitées, cette convention n'autorise pas un tel contrôle. Cependant, une dérogation à ce principe apparaît justifiée dans le cas visé par la juridiction de renvoi.

24 D'abord, en vertu de la disposition transitoire de l'article 29, paragraphe 2, de la convention de San Sebastián, l'application des règles de la convention relatives à la reconnaissance et à l'exécution des décisions judiciaires dépend précisément du titre de compétence du juge saisi en premier lieu.

25 Ensuite, le juge saisi en second lieu doit se contenter de déterminer si la compétence du juge saisi en premier lieu est conforme aux règles de la convention de Bruxelles ou d'une convention conclue entre les deux États concernés, qui sont communes aux deux juges et qui peuvent être interprétées avec la même autorité par les juges des deux États contractants (voir arrêt Overseas Union Insurance e.a., précité, point 23). Dans le cas particulier où la compétence du juge saisi en premier lieu découlerait, conformément à l'article 4 de la convention de Bruxelles, de la loi de l'État de ce juge, qui serait alors incontestablement mieux placé pour statuer sur sa propre compétence, le juge saisi en second lieu devrait se borner à vérifier que les conditions d'application de cette disposition sont réunies, à savoir que le demandeur est domicilié sur le territoire d'un État contractant et que le défendeur n'est pas domicilié sur le territoire d'un tel État. En aucun cas le juge saisi en second lieu ne devra donc apprécier la compétence du juge saisi en premier lieu à la lumière de la loi de l'État de ce dernier juge.

26 Enfin, il importe de souligner que le régime précédemment décrit ne trouve à s'appliquer qu'à titre transitoire, pour résoudre les difficultés découlant de l'entrée en vigueur de la convention de Bruxelles et aussi longtemps que des procédures engagées avant cette entrée en vigueur restent pendantes dans un État contractant. Partant, le principe rappelé au point 23 du présent arrêt ne souffre pas d'entorses durables.

27 Dès lors, il y a lieu de répondre aux questions posées que l'article 29, paragraphe 1, de la convention de San Sebastián doit être interprété en ce sens que, lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties dans deux États contractants différents, dont la première a été introduite avant la date d'entrée en vigueur de la convention de Bruxelles entre ces États et la seconde après cette date, la juridiction saisie en second lieu doit appliquer l'article 21 de la convention de Bruxelles si la juridiction saisie en premier lieu s'est déclarée compétente sur la base d'une règle conforme aux dispositions du titre II de la même convention ou aux dispositions prévues par une convention qui était en vigueur entre les deux États concernés lorsque l'action a été intentée et, à titre provisoire, si la juridiction saisie en premier lieu ne s'est pas encore prononcée sur sa propre compétence. En revanche, la juridiction saisie en second lieu ne doit pas appliquer l'article 21 de la convention de Bruxelles si la juridiction saisie en premier lieu s'est déclarée compétente sur la base d'une règle non conforme aux dispositions du titre II de la même convention ou aux dispositions prévues par une convention qui était en vigueur entre ces deux États lorsque l'action a été intentée.

Sur les dépens

28 Les frais exposés par le Gouvernement du Royaume-Uni et par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

Statuant sur les questions à elle soumises par la House of Lords, par ordonnance du 25 mai 1995, dit pour droit:

L'article 29, paragraphe 1, de la convention du 26 mai 1989 relative à l'adhésion du Royaume d'Espagne et de la République portugaise à la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale doit être interprété en ce sens que, lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties dans deux États contractants différents, dont la première a été introduite avant la date d'entrée en vigueur de ladite convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale entre ces États et la seconde après cette date, la juridiction saisie en second lieu doit appliquer l'article 21 de cette dernière convention si la juridiction saisie en premier lieu s'est déclarée compétente sur la base d'une règle conforme aux dispositions du titre II de la même convention ou aux dispositions prévues par une convention qui était en vigueur entre les deux États concernés lorsque l'action a été intentée et, à titre provisoire, si la juridiction saisie en premier lieu ne s'est pas encore prononcée sur sa propre compétence. En revanche, la juridiction saisie en second lieu ne doit pas appliquer l'article 21 de la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale si la juridiction saisie en premier lieu s'est déclarée compétente sur la base d'une règle non conforme aux dispositions du titre II de la même convention ou aux dispositions prévues par une convention qui était en vigueur entre ces deux États lorsque l'action a été intentée.