Livv
Décisions

Cass. crim., 18 mai 2005, n° 04-85.127

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Castagnede

Avocat général :

M. Frechede

Avocat :

SCP Le Bret-Desache

Angers, ch. corr., du 13 mai 2004

13 mai 2004

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : X Philippe, contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Angers, chambre correctionnelle, en date du 13 mai 2004, qui, pour faux et usage de faux et tromperie, l'a condamné à 7 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, 2 000 euro d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3 du Code pénal et L. 213-1 du Code de la consommation, 441-1 du Code pénal, 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Philippe X coupable de tromperie sur la nature, la qualité ou l'origine d'une prestation de service, de faux et usage de faux, et l'a condamné pénalement et civilement ;

"aux motifs que si l'article L. 326-11 du Code de la route n'exige pas un contrôle de l'expert pendant les travaux, le prévenu a indiqué dans son rapport avoir assuré sa mission pendant les travaux ; qu'il a certifié la qualité desdits travaux ; qu'il n'est pas établi avec suffisamment de certitude que Philippe X s'est déplacé à trois reprises comme il l'a attesté puisque ce n'était pas sa pratique et cela résulte de la déclaration de son coprévenu même s'il soutient qu'il est bien venu trois fois pour cette voiture, il a précisé que la dernière fois il n'avait fait que jeter un coup d'oeil et qu'il n'avait jamais demandé de mettre la voiture sur un pont, ce qui relativise la certification de Philippe X sur le suivi pendant les travaux ;

"alors que, d'une part, tout jugement de condamnation doit à peine de nullité comporter les motifs propres à justifier la décision ; que les motifs insuffisants, contradictoires ou dubitatifs équivalent à leur absence totale ; qu'en déclarant le prévenu coupable des faits poursuivis au motif qu'il n'était pas établi avec suffisamment de certitude qu'il ne s'était pas déplacé comme il l'a attesté, la cour d'appel a statué par des motifs dubitatifs et entachant ainsi sa décision d'une absence totale de motifs ;

"alors que, d'autre part, la charge de la preuve incombe à la partie poursuivante et au Ministère public ; que le doute doit profiter au prévenu ; qu'en imposant au prévenu d'établir la réalité des déplacements effectués plusieurs années auparavant, alors qu'il incombait au ministère public d'apporter la preuve des infractions poursuivies, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et méconnu le principe de la présomption d'innocence ;

"alors que, de troisième part, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires en considérant que la loi n'exigeait pas de l'expert qu'il se déplace, et en reprochant cependant à ce dernier, pour retenir sa culpabilité pénale, de ne pas établir qu'il s'était déplacé, privant sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;

"alors que, de quatrième part, en s'abstenant de caractériser dans ces conditions l'élément intentionnel du délit retenu à l'encontre du prévenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que Philippe X, expert automobile qualifié, intervenu dans les conditions fixées par l'article L. 326-11 du Code de la route, devenu l'article L. 327-2 du même Code, a délivré à Lucien Z, propriétaire d'une automobile Renault 25 accidentée, un rapport attestant que ce véhicule avait fait l'objet des réparations touchant à la sécurité prévues par l'expert l'ayant déclaré économiquement irréparable et qu'il était en état de circuler dans des conditions normales de sécurité ; que, grâce à ce rapport, Lucien Z a obtenu la restitution du certificat d'immatriculation et a pu vendre l'automobile aux époux Y ; que ceux-ci, à la suite d'incidents mécaniques, ont soumis le véhicule à l'examen d'un expert, qui a constaté des défauts le rendant dangereux et impropre à la circulation ; que le tribunal correctionnel a déclaré Lucien Z coupable de tromperie et Philippe X de la même infraction ainsi que de celle de faux et usage ;

Attendu que, pour confirmer le jugement à l'égard de Philippe X, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'il a certifié dans son rapport avoir examiné le véhicule à plusieurs reprises durant les travaux et avoir constaté que tous les éléments touchant à la sécurité avaient été remis en état dans les règles de l'art, alors qu'il a admis n'avoir, en réalité, procédé qu'a un contrôle purement formel ne faisant que "jeter un coup d'oeil", sans même faire placer le véhicule sur un pont élévateur ; que les juges en déduisent que le rapport litigieux constitue une altération frauduleuse de la vérité ; qu'ils ajoutent que le prévenu savait, en raison de sa qualité professionnelle, que son intervention tendait à la remise en circulation du véhicule en vue de la revente ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.