Cass. 1re civ., 27 septembre 2005, n° 02-13.935
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Fédération française d'athlétisme
Défendeur :
Entenial (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ancel
Rapporteur :
M. Bouscharain
Avocat général :
M. Sainte-Rose
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Célice, Blancpain, Soltner
LA COUR : - Donne acte au Crédit foncier de France de sa reprise d'instance aux droits de la société Entenial ; - Sur le moyen unique, pris en ses huit branches : - Attendu que par acte du 20 mars 1995, la Fédération française d'athlétisme (FFA) a contracté auprès du Comptoir des entrepreneurs, devenu la société Entenial aux droits de laquelle vient le Crédit foncier de France, un emprunt de 14 millions de francs remboursable en 15 ans au taux effectif global de 10,17 % ; que les taux d'intérêt ayant baissé, la FFA a demandé la renégociation de ce crédit; que le prêteur lui ayant proposé un nouveau crédit remboursable au taux fixe de 4,80 %, et demandé le paiement d'une indemnité de remboursement anticipé de 3 902 875,13 francs, la FFA a refusé cette proposition et attrait le prêteur en justice pour que la clause stipulant cette indemnité soit notamment déclarée abusive et contraire aux dispositions de l'article 1250, 2°, du Code civil ;
Attendu que la FFA fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 31 janvier 2002) de l'avoir déboutée de ses prétentions, alors, selon le moyen : 1°) qu'en se bornant à caractériser le fait que la Fédération n'était pas un consommateur, sans rechercher si le contrat de prêt litigieux avait un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par celle-ci et donc en omettant de vérifier la qualité de non-professionnel de celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; 2°) qu'en se fondant sur le fait inopérant que l'instauration d'une clause prévoyant le versement de sommes en contrepartie de l'exercice de la faculté de remboursement anticipé afin de compenser la perte financière subie par le prêteur n'est pas en soi abusive, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; 3°) qu'en se bornant à énoncer que la définition actuarielle du montant de l'indemnité due dans le cadre de la rupture du contrat opposant la Fédération à la banque prêteuse variait en fonction de l'état du marché et que le montant de cette indemnité ne dépendait pas de la seule volonté du prêteur, mais résultait du calcul d'éléments dépendant de l'état du marché financier au moment où l'emprunteur avait sollicité le remboursement, sans rechercher si le montant de l'indemnité n'était pas disproportionnellement élevé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1 du Code de la consommation ; 4°) qu'en énonçant que l'indemnité de remboursement anticipé ne devait pas être incluse dans le taux effectif global, aux motifs inopérants pris, d'une part, de ce que son montant dépendait du moment où elle était calculée et, d'autre part, de ce que l'emprunteuse avait la faculté de faire procéder elle-même à des calculs, la clause prévoyant cette indemnité renfermant tous les éléments de calcul, la cour d'appel a violé l'article L. 313-1 du Code de la consommation ; 5°) qu'en retenant que la Fédération ne contestait pas le droit au paiement d'une indemnité compensatrice d'un éventuel préjudice, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de celle-ci et ainsi violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; 6°) qu'en se fondant sur le fait que l'indemnité de remboursement anticipé avait pour objet de compenser le manque à gagner du prêteur du fait de la résiliation anticipée, sans le caractériser autrement que par l'application de la clause, alors que du fait du remboursement anticipé, le prêteur ne pouvait plus subir les préjudices résultant de l'immobilisation de la somme et les risques de difficultés de remboursement, et donc n'avait pas à être rémunéré, la cour d'appel a violé l'article 1131 du Code civil ; 7°) qu'en énonçant qu'il ne résultait pas de l'article 1250, 2°, du Code civil que le remboursement anticipé était de droit pour le débiteur du prêt, la cour d'appel a violé cette disposition ; 8°) qu'en se bornant à énoncer que l'existence d'une indemnité de remboursement n'était pas un obstacle à l'effet de la subrogation, si les conditions étaient remplies, sans rechercher si l'indemnité de remboursement anticipé prévue par le contrat n'était pas d'un montant tel qu'elle empêchait la subrogation dans les droits du prêteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1250, 2°, du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que l'arrêt retient, par des motifs propres et adoptés qui relèvent de son appréciation souveraine, que l'emprunt litigieux avait été contracté par la FFA en vue de financer l'acquisition et l'aménagement d'un nouveau siège social, lieu de son activité, et que la FFA, dont l'objet est de promouvoir l'athlétisme en France par la signature d'importants contrats de partenariat et de vente de licences, avait souscrit cet emprunt dans le cadre de son activité, afin d'améliorer les conditions d'exercice de celle-ci, faisant ainsi ressortir l'existence d'un rapport direct entre l'activité professionnelle de cette association et le contrat de prêt litigieux, pour en déduire à bon droit que les dispositions des articles L. 132-1 et suivants du Code de la consommation n'étaient pas applicables dans le présent litige ; qu'ensuite, il résulte de l'article L. 313-1 du même Code que pour la détermination du taux effectif global, il y a lieu d'ajouter aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects intervenus dans l'octroi du prêt ; que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a considéré que l'indemnité de remboursement anticipé dont la mise en œuvre était éventuelle et donc étrangère aux frais intervenus dans l'octroi du prêt, ne devait pas être prise en compte dans la détermination du taux effectif global de celui-ci ; qu'ensuite, encore, la cour d'appel a souverainement retenu, hors la dénaturation de conclusions alléguée, que la cause de l'obligation au paiement de cette indemnité consistait dans la réparation du manque à gagner subi par le prêteur du fait de la résiliation anticipée du contrat ; qu'enfin, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'avait pas à opérer d'office une recherche qui ne lui était pas demandée, a retenu que la stipulation d'une indemnité de remboursement anticipé ne constituait pas en principe un obstacle au jeu de la subrogation prévue par l'article 1250, 2 , du Code civil, dès lors que les conditions d'application de ce texte seraient réunies ; que, manquant en fait en sa première branche, et, de ce fait inopérant en ses deuxième et troisième griefs, le moyen est mal fondé en sa quatrième branche ; qu'il manque en fait en sa cinquième branche, est irrecevable, comme nouveau et mélangé de fait, en sa sixième branche et sans fondement en ses deux derniers griefs ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.