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Décisions

CJCE, 27 septembre 2001, n° C-257/99

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

The Queen

Défendeur :

Secretary of State for the Home Department, Julius Barkoci et Marcel Malik

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rodríguez Iglesias

Présidents de chambre :

MM. Gulmann, La Pergola, Wathelet, Skouris

Avocat général :

M. Mischo

Juges :

MM. Edward, Puissochet, Jann, Sevón, Schintgen, Macken

Avocats :

Mes Blake, Eicke, Fransman, Sheldrick, Quadri

CJCE n° C-257/99

27 septembre 2001

LA COUR,

1. Par ordonnance du 29 mars 1999, parvenue à la Cour le 9 juillet suivant, la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Divisional Court), a posé, en vertu de l'article 234 CE, sept questions préjudicielles sur l'interprétation des articles 45 et 59 de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République tchèque, d'autre part, conclu et approuvé au nom de la Communauté par la décision 94-910-CECA, CE, Euratom du Conseil et de la Commission, du 19 décembre 1994 (JO L 360, p. 1, ci-après l'"accord d'association").

2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant MM. Barkoci et Malik, ressortissants tchèques, au Secretary of State for the Home Department (ci-après le "Secretary of State") au sujet de deux décisions par lesquelles ce dernier a refusé de leur accorder une autorisation d'admission au Royaume-Uni.

L'accord d'association

3. L'accord d'association a été signé le 4 octobre 1993 à Luxembourg et, conformément à son article 123, deuxième alinéa, il est entré en vigueur le 1er février 1995.

4. Selon son article 1er, paragraphe 2, l'accord d'association a notamment pour objet de fournir un cadre approprié au dialogue politique entre les parties afin de permettre le développement de relations étroites entre elles, de promouvoir l'expansion des échanges et des relations économiques harmonieuses afin de favoriser le développement dynamique et la prospérité de la République tchèque, ainsi que de créer un cadre approprié pour l'intégration progressive de cette dernière dans la Communauté, l'objectif ultime de ce pays étant, selon le dix-huitième considérant dudit accord, l'adhésion à la Communauté.

5. Au regard de l'affaire au principal, les dispositions pertinentes de l'accord d'association se trouvent sous le titre IV de celui-ci, intitulé "Circulation des travailleurs, droit d'établissement et services".

6. L'article 38, paragraphe 1, de l'accord d'association, qui figure sous le titre IV, chapitre I, intitulé "Circulation des travailleurs", dispose:

"Sous réserve des conditions et modalités applicables dans chaque État membre:

- les travailleurs de nationalité tchèque légalement employés sur le territoire d'un État membre ne doivent faire l'objet d'aucune discrimination fondée sur la nationalité, en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement, par rapport aux ressortissants dudit État membre,

- le conjoint et les enfants d'un travailleur légalement employé sur le territoire d'un État membre qui y résident légalement, à l'exception des travailleurs saisonniers ou des travailleurs arrivés sous le couvert d'accords bilatéraux au sens de l'article 42, sauf dispositions contraires desdits accords, ont accès au marché de l'emploi de cet État membre pendant la durée du séjour professionnel autorisé du travailleur."

7. Aux termes de l'article 45, paragraphes 3 et 4, de l'accord d'association, qui fait partie du titre IV, chapitre II, intitulé "Établissement":

"3. Dès l'entrée en vigueur du présent accord, chaque État membre réserve un traitement non moins favorable que celui accordé à ses propres sociétés et ressortissants pour l'établissement de sociétés et de ressortissants de la République tchèque et réserve à l'activité de sociétés et de ressortissants de la République tchèque établis sur son territoire un traitement non moins favorable que celui qu'il réserve à ses propres sociétés et ressortissants.

4. Aux fins du présent accord, on entend par:

a) établissement:

i) en ce qui concerne les ressortissants, le droit d'accéder à des activités économiques et de les exercer en tant qu'indépendants et celui de créer et de diriger des sociétés, en particulier des sociétés qu'ils contrôlent effectivement. La qualité d'indépendant et de chef d'entreprise commerciale ne confère pas le droit de se porter demandeur d'emploi salarié sur le marché de l'emploi d'une autre partie.

Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent pas aux personnes qui ne sont pas exclusivement indépendantes; [...]

[...]

c) 'activités économiques, les activités à caractère industriel, commercial, artisanal ainsi que les professions libérales."

8. L'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, qui figure sous le titre IV, chapitre IV, intitulé "Dispositions générales", prévoit:

"Aux fins de l'application du titre IV du présent accord, aucune disposition de ce dernier ne fait obstacle à l'application, par les parties, de leurs lois et réglementations concernant l'admission et le séjour, l'emploi, les conditions de travail, l'établissement des personnes physiques et la prestation de services, à condition que n'en soient pas réduits à néant ou compromis les avantages que retire l'une des parties d'une disposition spécifique du présent accord. [...]"

La réglementation nationale

9. L'article 11, paragraphe 1, de l'Immigration Act 1971 (loi relative à l'immigration, ci-après l'"Immigration Act") définit l'"entrée au Royaume-Uni" de la manière suivante:

"Une personne qui arrive au Royaume-Uni par bateau ou aéronef est, aux fins de la présente loi, censée ne pas être entrée au Royaume-Uni à moins et jusqu'à ce qu'elle débarque, et après avoir débarqué dans un port elle continuera à être censée ne pas être entrée sur le territoire du Royaume-Uni tant qu'elle restera dans une zone (s'il y en a) au port, éventuellement désignée à cet effet par un agent du service d'immigration; et une personne qui n'est pas entrée d'une autre manière au Royaume-Uni est censée ne pas être entrée tant qu'elle sera détenue, ou temporairement admise ou remise en liberté tout en risquant la détention [...]"

10. Au regard de l'affaire au principal, les autres dispositions pertinentes du droit national sont essentiellement les United Kingdom Immigration Rules (House of Commons Paper 395) (règles relatives à l'immigration adoptées par le Parlement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord en 1994, ci-après les "Immigration Rules"), dans leur version en vigueur à la date des faits au principal, qui régissent l'admission et le séjour au Royaume-Uni.

11. Les Immigration Rules ont pour objet d'adapter le système juridique du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord aux dispositions en matière d'établissement contenues dans l'accord d'association ainsi que dans les autres accords européens d'association conclus entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et les pays d'Europe centrale et orientale, d'autre part.

12. Les points 24 à 26 des Immigration Rules instituent un régime général exigeant, pour certaines catégories de demandeurs d'une autorisation d'admission ("leave to enter"), un permis d'entrer ("entry clearance") préalable et impliquant un refus obligatoire de cette autorisation si un tel permis d'entrer n'a pas été obtenu. Aux termes desdits points:

"24. Le ressortissant nécessitant un visa, et toute autre personne souhaitant entrer dans un but qui exige un permis d'entrer préalable en vertu des présentes dispositions, doit, à son arrivée, présenter à l'agent du service d'immigration un passeport valide ou tout autre document d'identité portant la mention du permis d'entrer au Royaume-Uni, permis qui lui aura été délivré pour le but dans lequel il souhaite entrer. Toute personne de cette catégorie ne pouvant pas présenter un tel permis d'entrer se verra refuser l'entrée [...]

25. Le permis d'entrer se présente sous la forme d'un visa (pour les ressortissants nécessitant un visa) ou d'un certificat d'entrée (pour les ressortissants ne nécessitant pas de visa). Ces documents doivent être considérés comme preuve concernant la possibilité, pour leur détenteur, d'entrer au Royaume-Uni et ils sont, en conséquence, admis comme 'permis d'entrer' au sens de l'Immigration Act 1971.

26. Toute demande en vue d'un permis d'entrer sera examinée conformément aux dispositions de la présente réglementation, applicables à la décision d'accorder ou de refuser l'autorisation d'admission. [...]"

13. Le point 28 des Immigration Rules dispose que le demandeur d'un permis d'entrer doit se trouver à l'extérieur du Royaume-Uni au moment de sa demande et que cette dernière doit être présentée à l'endroit désigné, situé dans son pays de résidence.

14. Conformément à l'annexe des Immigration Rules, les ressortissants tchèques n'ont pas besoin de visa pour le Royaume-Uni, le permis d'entrer exigé par le point 24 des Immigration Rules se présentant sous la forme d'un certificat d'entrée.

15. La partie 6 des Immigration Rules, intitulée "Personnes souhaitant être admises et séjourner au Royaume-Uni en qualité d'homme d'affaires, de travailleur indépendant, d'investisseur, d'auteur, de compositeur ou d'artiste", comporte certaines dispositions concernant le traitement des demandes d'autorisation d'admission émanant de "personnes ayant l'intention d'exercer une activité en application des dispositions d'un accord d'association conclu par la Communauté". Les points 211, 212 et 214 à 216, qui figurent dans cette partie, sont ainsi libellés:

"211. Au sens des points 212 à 223, le terme activité désigne une entreprise sous la forme

- unipersonnelle; ou

- d'une association professionnelle; ou

- d'une société immatriculée au Royaume-Uni.

212. Une personne souhaitant être admise au Royaume-Uni pour y exercer une activité doit remplir les conditions suivantes:

i) répondre aux exigences [...] du point 214;

ii) disposer de ressources pécuniaires suffisantes pour l'exercice de son activité au Royaume-Uni et être maître de ces ressources; et

iii) dans l'attente de recevoir les premiers fruits de son entreprise, disposer de réserves pécuniaires suffisantes pour subvenir à ses propres besoins et à ceux des personnes qui dépendent d'elle, et cela sans travailler (si ce n'est dans son activité propre) ni avoir recours aux fonds publics; et

iv) tirer de son activité des bénéfices suffisants pour subvenir à ses propres besoins et à ceux des personnes qui dépendent d'elle, et cela sans travailler (si ce n'est dans son activité propre) ni avoir recours aux fonds publics; et

v) ne pas chercher à compléter ses revenus en prenant un autre travail au Royaume-Uni; et

vi) être en possession d'un permis d'entrer au Royaume-Uni valide à ce titre.

214. Si une personne entend s'établir comme travailleur indépendant ou en association professionnelle au Royaume-Uni, elle devra, outre les conditions du point 212, démontrer

i) qu'elle est ressortissante de [...] la République tchèque; et

ii) qu'elle participera activement à une activité commerciale ou de services pour son propre compte ou dans le cadre d'une association professionnelle au Royaume-Uni; et

iii) qu'elle détiendra, seule ou avec ses associés, les actifs de l'entreprise; [...]

[...]

[...]

215. Une personne souhaitant obtenir une autorisation d'admission au Royaume-Uni pour y exercer une activité peut être admise pour une période n'excédant pas douze mois, assortie d'une condition restreignant sa liberté de se porter demandeur d'emploi, pourvu qu'elle soit en mesure de présenter à l'agent du service d'immigration, à son arrivée, un permis d'entrer valide à ce titre.

[...]

216. L'autorisation d'admission au Royaume-Uni pour une personne souhaitant y exercer une activité doit être refusée si cette personne n'est pas en mesure de présenter à l'agent du service d'immigration, à son arrivée, un permis d'entrer valide à ce titre."

16. Le point 321 des Immigration Rules prévoit que, si le demandeur détient un permis d'entrer qui lui a été dûment délivré et est en cours de validité, l'autorisation d'admission au Royaume-Uni ne peut lui être refusée que si l'agent du service d'immigration est convaincu que le demandeur a fait de fausses déclarations ou a omis de divulguer des faits essentiels, par écrit ou oralement, en vue de l'obtention du permis d'entrer, ou si sa prétention à l'admission est devenue sans fondement à la suite d'une modification de circonstances intervenue depuis la délivrance dudit permis.

Le litige au principal

17. Il ressort de l'ordonnance de renvoi que M. Barkoci est arrivé au Royaume-Uni le 14 octobre 1997 et a demandé une autorisation d'admission pour une période indéfinie en vue de travailler, tout en demandant le statut de réfugié politique. Il a déclaré qu'il souhaitait s'établir au Royaume-Uni parce que, étant gitan, il ne trouvait pas de travail dans la République tchèque d'où il venait. Il a été placé en détention en attendant que son cas soit examiné, conformément aux dispositions applicables de l'Immigration Act.

18. Le Secretary of State ayant rejeté, le 11 novembre 1997, la demande déposée par M. Barkoci en vue d'obtenir le statut de réfugié politique, ce dernier a introduit un recours contre cette décision, tout en déclarant qu'il ne souhaitait pas demander une autorisation d'admission au Royaume-Uni au titre d'une autre disposition des Immigration Rules. Le 3 décembre 1997, M. Barkoci a été remis en liberté sous caution jusqu'à l'issue de son recours.

19. À la suite du rejet de ce recours, M. Barkoci a été informé que des instructions avaient été données en vue de le reconduire à la frontière. Toutefois, étant donné que, le 9 mars 1998, il avait introduit une demande d'autorisation de séjour au titre de l'accord d'association, en vue de son établissement au Royaume-Uni en tant que jardinier indépendant, les dispositions prises par le Secretary of State en vue de son renvoi ont été annulées.

20. Il ressort également de l'ordonnance de renvoi que M. Malik, qui est lui aussi gitan, est arrivé au Royaume-Uni en provenance de la République tchèque le 18 octobre 1997 et qu'il a demandé à bénéficier du statut de réfugié politique. Il a également été placé en détention en attendant que son cas soit examiné. Sa demande a été rejetée par le Secretary of State par décision du 17 novembre 1997. Le recours introduit par M. Malik contre cette décision a été rejeté le 23 janvier 1998 par le Special Adjudicator.

21. Le 22 janvier 1998, M. Malik a introduit, au titre de l'accord d'association, une demande d'établissement au Royaume-Uni en vue de fournir des services de nettoyage domestique et commercial. Une admission temporaire lui a alors été accordée par les autorités compétentes en matière d'immigration.

22. Comme MM. Barkoci et Malik n'avaient obtenu aucune autorisation d'entrée au Royaume-Uni, ni sous la forme d'un permis d'entrer préalable ni sous celle d'une autorisation d'admission, ils étaient censés, conformément à l'article 11, paragraphe 1, de l'Immigration Act, ne pas être entrés sur le territoire national. Dès lors, leurs demandes d'autorisation de séjour ont été traitées comme des demandes d'admission initiale au Royaume-Uni au titre de l'accord d'association.

23. Dans ces conditions, l'agent du service d'immigration qui a examiné les demandes présentées par MM. Barkoci et Malik s'est borné à vérifier qu'elles satisfaisaient de manière claire et manifeste aux autres conditions énumérées au point 212 des Immigration Rules, de telle sorte que l'exigence du permis d'entrer, prévue par ledit point 212, sous vi), pouvait être écartée par un acte administratif relevant de son pouvoir d'appréciation et qu'une autorisation d'admission devait être accordée en dehors des Immigration Rules.

24. Toutefois, au vu des projets d'établissement soumis par MM. Barkoci et Malik au service d'immigration ainsi que des réponses qu'ils ont respectivement données au cours des entretiens y afférents, les agents compétents ont déclaré qu'ils n'étaient pas convaincus de la viabilité financière ni du caractère indépendant des activités qu'ils envisageaient d'exercer. En particulier, M. Malik a expressément indiqué qu'il continuerait à vivre des prestations sociales jusqu'à ce que son activité lui rapporte un revenu suffisant.

25. En conséquence, par décisions des 9 et 6 mars 1998, les agents compétents du service d'immigration ont refusé d'accorder respectivement à MM. Barkoci et Malik l'autorisation d'admission au Royaume-Uni, conformément au point 216 des Immigration Rules, au motif qu'ils n'avaient pas le permis d'entrer exigé par le point 212, sous vi), de celles-ci.

26. Des autorisations d'admission temporaire ont cependant été accordées à MM. Barkoci et Malik en attendant la mise en œuvre de leur reconduite à la frontière. Celle accordée à M. Barkoci, le 9 mars 1998, a, pour la première fois, fait interdiction à ce dernier d'accepter un quelconque emploi et/ou de s'établir en tant que travailleur indépendant au Royaume-Uni.

27. En revanche, l'autorisation d'admission temporaire accordée à M. Malik le 22 janvier 1998, c'est-à-dire à une date antérieure à celle de la décision de refus d'admission, ne comportait pas une telle interdiction.

28. Le 24 juillet 1998, MM. Barkoci et Malik ont été autorisés à introduire un recours en contrôle de la légalité ("judicial review") des deux décisions du Secretary of State refusant leur admission. En raison de cette nouvelle procédure, la reconduite à la frontière de ces derniers a en conséquence été différée.

Les questions préjudicielles

29. Considérant que, dans ces conditions, la solution du litige nécessitait une interprétation de l'accord d'association, la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Divisional Court), a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les sept questions préjudicielles suivantes:

"Effet direct et interprétation de l'accord d'association

1) L'article 45 de l'accord d'association est-il directement applicable dans les ordres juridiques des États membres, nonobstant l'article 59 du même accord?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, comment convient-il d'interpréter la réserve énoncée à la fin de la première phrase de l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association (et notamment les termes 'avantages que retire l'une des parties d'une disposition spécifique du présent accord); et, de manière plus générale, dans quelle mesure un État membre est-il libre d'appliquer ses lois et réglementations concernant l'admission, le séjour et l'établissement des personnes physiques à des personnes qui se prévalent de l'article 45 de l'accord d'association, sans contrevenir à cette réserve?

3) En cas de réponse négative à la première question, une personne physique qui est un ressortissant de la République tchèque peut-elle, dans le cadre d'une procédure nationale engagée en vue de contester une décision des autorités nationales compétentes lui refusant l'entrée pour s'établir au titre de l'accord d'association, invoquer l'article 45 de l'accord d'association en vue de contester la légalité des lois et réglementations d'un État membre concernant l'admission,le séjour et l'établissement des personnes physiques, et, le cas échéant, sur quel fondement juridique?

La nécessité d'obtenir une permission préalable avant le voyage

4) En cas de réponse affirmative à la première ou à la troisième question, l'article 45 et/ou l'article 59 de l'accord d'association autorisent-ils l'État membre à exiger d'une personne qui souhaite se rendre dans un État membre dans le but exclusif de s'établir en tant que travailleur indépendant au titre de l'accord d'association qu'elle demande et obtienne un permis d'entrer (entry clearance) préalable (c'est-à-dire une permission préalable de se rendre dans cet État pour cet objectif précis)?

5) En cas de réponse affirmative à la quatrième question:

a) un État membre est-il en droit d'exiger, pour accorder un tel permis d'entrer préalable, qu'il soit satisfait aux conditions de fond relatives à l'établissement, telles que prévues au point 212 du HC 395; et

b) un État membre peut-il refuser d'admettre sur son territoire une personne souhaitant s'établir en tant que travailleur indépendant au titre de l'accord d'association, au seul motif que celle-ci n'a pas obtenu un tel permis d'entrer préalable?

6) Lorsqu'une telle personne ne s'est pas vu accorder l'autorisation d'entrée sur le territoire de l'État membre sur un autre fondement, la réponse à la cinquième question est-elle affectée (et, le cas échéant, comment) par l'un des éléments suivants:

a) le fait que, lors de son arrivée à la frontière de l'État membre, la personne n'a pas demandé à être admise au titre de l'accord d'association, mais sur un autre fondement qui, par la suite, a été rejeté;

b) la durée de la période écoulée entre la date d'arrivée du demandeur à la frontière de l'État membre et la date de sa demande présentée postérieurement en vue de s'établir en tant que travailleur indépendant au titre de l'accord d'association;

c) l'étendue des éventuelles restrictions imposées au demandeur par les autorités nationales au cours de cette période, conformément aux pouvoirs dont celles-ci disposent en vertu de la législation nationale en matière d'immigration, notamment quant à sa liberté ou à l'emploi/l'exercice d'une profession;

d) le fait que le demandeur avait accès au système d'assistance sociale de l'État membre et qu'il en était dépendant alors qu'il était en train de s'établir en tant que travailleur indépendant?

7) Si l'État membre n'est pas autorisé à refuser d'admettre une personne souhaitant s'établir au titre de l'accord d'association au seul motif que le permis d'entrer préalable n'a pas été obtenu, est-il légitime que l'autorité compétente accorde à cette personne une autorisation d'admission uniquement si sa demande satisfait clairement et manifestement aux mêmes critères de fond que ceux qui auraient été appliqués si elle avait demandé un permis d'entrer préalable?"

Sur la première question

30. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association peut être invoqué par un particulier devant une juridiction nationale de l'État membre d'accueil, nonobstant le fait que les autorités de ce dernier demeurent compétentes pour appliquer au ressortissant tchèque qui se prévaut de cette disposition la législation en matière d'admission, de séjour et d'établissement, conformément à l'article 59, paragraphe 1, dudit accord.

31. À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une disposition d'un accord conclu par la Communauté avec des pays tiers doit être considérée comme étant d'application directe lorsque, eu égard à ses termes ainsi qu'à l'objet et à la nature de l'accord, elle comporte une obligation claire et précise qui n'est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l'intervention d'aucun acte ultérieur (voir, notamment, arrêt du 4 mai 1999, Sürül, C-262-96, Rec. p. I-2685, point 60).

32. Pour vérifier si l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association répond à ces critères, il convient d'abord de procéder à l'examen de ses termes.

33. À cet égard, il y a lieu de constater que cette disposition consacre, dans des termes clairs, précis et inconditionnels, l'interdiction pour les États membres de traiter de manière discriminatoire, en raison de leur nationalité, notamment les ressortissants tchèques qui souhaiteraient exercer sur le territoire de ces États des activités économiques en tant que travailleurs indépendants ou y créer et y diriger des sociétés qu'ils contrôleraient effectivement.

34. Cette règle d'égalité de traitement prescrit une obligation de résultat précise et elle est, par essence, susceptible d'être invoquée par un justiciable devant une juridiction nationale pour demander à cette dernière d'écarter les dispositions discriminatoires d'une réglementation d'un État membre soumettant l'établissement d'un ressortissant tchèque à une condition qui n'est pas imposée aux ressortissants nationaux, sans que l'adoption de mesures d'application complémentaires soit requise à cet effet (voir, en ce sens, arrêt Sürül, précité, point 63).

35. Par ailleurs, la constatation que le principe de non-discrimination inscrit à l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association est susceptible de régir directement la situation des particuliers n'est pas contredite par l'examen de l'objet et de la nature dudit accord dont cette disposition fait partie.

36. En effet, aux termes de son dix-huitième considérant, ainsi que de son article 1er, paragraphe 2, l'accord d'association a pour objet d'instituer une association destinée à promouvoir le développement d'échanges et de relations économiques harmonieuses entre les parties contractantes afin de favoriser le développement dynamique et la prospérité de la République tchèque, en vue de faciliter son adhésion à la Communauté.

37. En outre, la circonstance que l'accord d'association vise essentiellement à favoriser le développement économique de la République tchèque et comporte dès lors un déséquilibre dans les obligations assumées par la Communauté envers le pays tiers concerné n'est pas de nature à empêcher la reconnaissance par cette dernière de l'effet direct de certaines dispositions dudit accord (voir, en ce sens, arrêt Sürül, précité, point 72).

38. La constatation que l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association est d'application directe n'est pas non plus contredite par l'examen des termes de l'article 59, paragraphe 1, dudit accord. En effet, il découle seulement de cette disposition que les autorités des États membres demeurent compétentes pour appliquer, dans le respect des limites fixées par l'accord d'association, les législations nationales en matière d'admission, de séjour et d'établissement. Dès lors, ledit article 59, paragraphe 1, ne concerne pas la mise en œuvre par les États membres des dispositions de l'accord d'association en matière d'établissement et ne vise pas à subordonner l'exécution ou les effets de l'obligation d'égalité de traitement prescrite par l'article 45, paragraphe 3, à l'adoption de mesures nationales complémentaires.

39. Il résulte des considérations qui précèdent qu'il convient de répondre à la première question que l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association doit être interprété en ce sens qu'il établit, dans le domaine d'application de cet accord, un principe précis et inconditionnel suffisamment opérationnel pour être appliqué par un juge national et qui, dès lors, est susceptible de régir la situation juridique des particuliers. L'effet direct qu'il convient donc de reconnaître à ladite disposition implique que les ressortissants tchèques qui s'en prévalent ont le droit de l'invoquer devant les juridictions de l'État membre d'accueil, nonobstant le fait que les autorités de ce dernier demeurent compétentes pour appliquer auxdits ressortissants la législation nationale en matière d'admission, de séjour et d'établissement, conformément à l'article 59, paragraphe 1, dudit accord.

Sur les deuxième, quatrième, cinquième et septième questions

40. Par ses deuxième, quatrième, cinquième et septième questions, qu'il convient d'examiner conjointement, la juridiction de renvoi demande en substance si, eu égard à l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, l'article 45, paragraphe 3, de celui-ci est de nature à conférer à un ressortissant tchèque un droit d'admission dans l'État membre où il souhaite s'établir en tant que travailleur indépendant au titre dudit accord.

41. Ladite juridiction demande, notamment, si les dispositions de l'accord d'association mentionnées au point précédent ne s'opposent pas à des règles nationales qui:

- exigent qu'un ressortissant tchèque obtienne, préalablement à son départ vers l'État membre d'accueil, un permis d'entrer dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, et

- prévoient que les autorités compétentes dudit État, qui exercent leur pouvoir d'appréciation à l'égard des demandes d'admission aux fins d'établissement, présentées au titre dudit accord par des ressortissants tchèques dépourvus de permis d'entrer, au point d'arrivée dans cet État, ne peuvent délivrer une autorisation d'admission, sur un fondement autre que celui des Immigration Rules, que si la demande satisfait clairement et manifestement aux mêmes conditions de fond que celles qui auraient été appliquées à la demande de permis d'entrer.

42. En vue de répondre utilement à ces questions ainsi reformulées, il y a lieu d'examiner dans quelle mesure l'État membre d'accueil peut, sans contrevenir à la condition énoncée à la fin de la première phrase de l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, appliquer sa législation en matière d'admission, de séjour et d'établissement à des ressortissants tchèques qui se prévalent de l'article 45, paragraphe 3, dudit accord.

43. À cet égard, il convient de constater que, aux termes de l'article 45, paragraphe 4, sous a) et c), de l'accord d'association, le principe de non-discrimination énoncé au paragraphe 3 de ladite disposition concerne le droit d'accéder à des activités à caractère industriel, commercial ou artisanal et aux professions libérales, et de les exercer en tant que travailleur indépendant, ainsi que le droit de créer et de diriger des sociétés.

44. Le droit d'accès d'un ressortissant tchèque à l'exercice d'activités économiques qui ne relèvent pas du marché de l'emploi présuppose l'existence dans son chef d'un droit d'admission et de séjour dans l'État membre d'accueil. Dans ces conditions, il importe de déterminer la portée de l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association.

Sur la portée de l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association et sur l'extension éventuelle à cette disposition de l'interprétation de l'article 52 du traité CE (devenu, après modification, article 43 CE)

45. MM. Barkoci et Malik prétendent que le droit qu'ils invoquent sur le fondement de l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association équivaut au droit d'établissement régi par l'article 52 du traité. Ils font valoir, à cet égard, que l'absence de toute mention d'un droit d'admission dans le libellé dudit article 52 n'a pas empêché la Cour de juger que cette disposition confère directement aux ressortissants d'un État membre le droit d'entrer sur le territoire d'un autre État membre et d'y séjourner, indépendamment de la délivrance d'une autorisation d'entrée par l'État membre d'accueil (arrêt du 8 avril 1976, Royer, 48-75, Rec. p. 497, points 31 et 32) .

46. Selon MM. Barkoci et Malik, en vue de bénéficier des droits d'établissement et de séjour, conférés directement par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, il suffit que les activités du ressortissant tchèque concerné soient effectives et véritables, sans que des exigences spécifiques en matière de revenus minimaux puissent lui être imposées. Or, les décisions du Secretary of State respectivement attaquées par MM. Barkoci et Malik indiqueraient que les activités professionnelles qu'ils ont exercées, à l'époque où aucune restriction à leur droit d'entreprendre ne leur avait été imposée, étaient loin d'être purement marginales ou accessoires.

47. MM. Barkoci et Malik concèdent que les droits en cause font l'objet de la limitation énoncée à l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association. Toutefois, des dispositions concernant l'admission, le séjour et l'établissement des personnes physiques ne pourraient être adoptées par les États membres qu'à la condition de ne pas restreindre ces droits d'une manière déraisonnable et excessive. En effet, l'interprétation selon laquelle l'exercice du droit de s'établir dans un État membre sans y subir de discrimination est soumis à un pouvoir d'appréciation absolu des autorités compétentes de celui-ci conduirait à vider de sa portée le chapitre dudit accord consacré à l'établissement.

48. Dès lors, selon MM. Barkoci et Malik, l'application par les autorités compétentes de l'État membre d'accueil de règles nationales relatives à l'immigration qui exigent l'obtention par les ressortissants tchèques d'une autorisation d'entrée et de séjour est en elle-même de nature à priver d'effet les droits reconnus par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association.

49. Le gouvernement du Royaume-Uni, les autres gouvernements qui ont présenté des observations devant la Cour et la Commission rétorquent que la finalité ainsi que l'économie générale de l'accord d'association imposent d'interpréter ensemble ses articles 45, paragraphe 3, et 59, paragraphe 1. À cet égard, ils soutiennent notamment que, l'article 38 de l'accord d'association ayant exclu tout droit d'accès au marché de l'emploi de l'État membre d'accueil, un système national de contrôle fondé sur l'obligation de demander une autorisation préalable d'entrée et de séjour est nécessaire pour garantir que les dispositions en matière d'établissement dudit accord ne soient pas invoquées par des ressortissants tchèques qui ont, en réalité, l'intention d'accéder par cette voie à ce marché, en tant que travailleurs salariés.

50. Il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence établie dans le cadre de l'interprétation tant des dispositions du traité que de celles de l'accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie (JO 1964, 217, p. 3687), le droit au traitement national en ce qui concerne l'établissement, tel que défini par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, en des termes comparables ou analogues à ceux de l'article 52 du traité, implique bien qu'un droit d'admission et un droit de séjour sont conférés, en tant que corollaires du droit d'établissement, aux ressortissants tchèques qui souhaitent exercer des activités à caractère industriel, commercial, artisanal ou des professions libérales dans un État membre (voir arrêts Royer, précité, points 31 et 32, et du 11 mai 2000, Savas, C-37-98, Rec. p. I-2927, points 60 et 63).

51. Toutefois, il convient également de rappeler que, selon une jurisprudence constante, une simple similitude dans le libellé d'une disposition de l'un des traités instituant les Communautés et d'un accord international entre la Communauté et un pays tiers ne suffit pas pour donner aux termes de cet accord la même signification que celle qu'ils ont dans les traités (voir arrêts du 9 février 1982, Polydor et RSO, 270-80, Rec. p. 329, points 14 à 21; du 26 octobre 1982, Kupferberg, 104-81, Rec. p. 3641, points 29 à 31, et du 1er juillet 1993, Metalsa, C-312-91, Rec. p. I-3751, points 11 à 20).

52. Selon cette jurisprudence, l'extension de l'interprétation d'une disposition du traité à une disposition, rédigée en termes comparables, similaires ou même identiques, figurant dans un accord conclu par la Communauté avec un pays tiers, dépend notamment de la finalité poursuivie par chacune de ces dispositions dans le cadre qui lui est propre. À cet égard, la comparaison des objectifs et du contexte de l'accord, d'une part, et de ceux du traité, d'autre part, revêt une importance considérable (voir arrêt Metalsa, précité, point 11).

53. Or, l'accord d'association vise simplement à créer un cadre approprié pour l'intégration progressive de la République tchèque dans la Communauté, aux fins de son éventuelle adhésion à cette dernière, alors que l'objectif du traité est la création d'un marché intérieur, dont l'établissement implique l'élimination des obstacles à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux entre les États membres [voir article 3, sous c), du traité CE (devenu, après modification, article 3, paragraphe 1, sous c), CE)].

54. En outre, il découle des termes mêmes de l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association que les droits d'admission et de séjour conférés aux ressortissants tchèques, en tant que corollaires du droit d'établissement, ne constituent pas des prérogatives absolues, leur exercice pouvant être limité, le cas échéant, par les règles de l'État membre d'accueil concernant l'admission, le séjour et l'établissement des ressortissants tchèques.

55. Il résulte de ce qui précède que l'interprétation de l'article 52 du traité, telle qu'elle ressort de la jurisprudence de la Cour, ne peut pas être étendue à l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association.

56. Dès lors, l'argumentation de MM. Barkoci et Malik, selon laquelle l'application par les autorités compétentes d'un État membre des règles nationales relatives à l'immigration, exigeant une autorisation d'entrée des ressortissants tchèques, serait en elle-même de nature à priver d'effet les droits reconnus à ces derniers par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, ne saurait être accueillie.

57. Il est vrai cependant que, ainsi que cela découle de l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, le pouvoir de l'État membre d'accueil d'appliquer ses règles internes concernant l'admission, le séjour et l'établissement des personnes physiques aux demandes émanant de ressortissants tchèques est expressément soumis à la condition de ne pas réduire à néant ni compromettre les avantages que la République tchèque retire dudit accord.

58. La question se pose, dès lors, de savoir si les restrictions apportées au droit d'établissement par la législation de l'État membre d'accueil en matière d'immigration, droit qui est conféré directement aux ressortissants tchèques par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, ainsi qu'aux droits d'admission et de séjour qui en constituent les corollaires, sont compatibles avec la condition expresse énoncée à l'article 59, paragraphe 1, de cet accord.

Sur la compatibilité des restrictions apportées au droit d'établissement par la législation de l'État membre d'accueil en matière d'immigration avec la condition énoncée à l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association

59. À cet égard, il importe de vérifier si les règles relatives à l'immigration appliquées par les autorités nationales compétentes, qui exigent d'un ressortissant tchèque, préalablement à son départ vers l'État membre d'accueil, qu'il obtienne un permis d'entrer dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, sont aptes à réaliser l'objectif visé et si elles ne constituent pas, au regard de celui-ci, une intervention qui porterait atteinte à la substance même des droits octroyés par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association aux ressortissants tchèques, en rendant l'exercice de ces droits impossible ou excessivement difficile.

60. MM. Barkoci et Malik, ainsi que la Commission, font valoir que le fait de refuser l'admission d'un ressortissant tchèque qui souhaite s'établir dans un État membre pour la raison purement formelle que, avant son départ vers celui-ci, il n'a pas obtenu de permis d'entrer, excède manifestement les limites imposées par l'accord d'association aux autorités compétentes de cet État au regard de l'objectif recherché, dès lors que ledit ressortissant satisfait aux autres conditions de fond exigées par les règles nationales en matière d'immigration relatives à la nature exclusive et viable de l'activité indépendante envisagée.

61. En vue de statuer sur le bien-fondé de cette argumentation, il y a lieu de relever d'emblée que l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association n'étant applicable qu'aux personnes qui exercent exclusivement une activité indépendante, conformément à l'article 45, paragraphe 4, sous a), i), dernière phrase, dudit accord, il est nécessaire de déterminer si l'activité envisagée dans l'État membre d'accueil par les bénéficiaires de cette disposition est une activité salariée ou indépendante.

62. À cet égard, l'application d'un système national de contrôle préalable de la nature exacte de l'activité envisagée par le demandeur poursuit un objectif légitime en ce qu'elle permet de limiter l'exercice des droits d'admission et de séjour par les ressortissants tchèques qui se prévalent de l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association aux seuls bénéficiaires visés par cette disposition.

63. En ce qui concerne en particulier les exigences de fond, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, il y a lieu de considérer, ainsi que le gouvernement du Royaume-Uni et la Commission l'ont fait valoir, qu'elles poursuivent l'objectif de permettre aux autorités compétentes de vérifier qu'un ressortissant tchèque souhaitant s'établir au Royaume-Uni a véritablement l'intention de commencer une activité de travailleur indépendant, sans exercer simultanément aucun emploi salarié ni recourir aux fonds publics, et qu'il dispose dès le départ de ressources financières suffisantes et a des chances raisonnables de réussir. En outre, des exigences de fond telles que celles prévues audit point 212 sont aptes à assurer la réalisation d'un tel objectif.

64. Dans le cadre d'un tel système de contrôle préalable, s'il s'avère qu'un ressortissant tchèque, ayant présenté en bonne et due forme une demande d'autorisation d'entrée en vue de l'établissement, satisfait aux exigences de fond fixées à cette fin par la législation de l'État membre d'accueil en matière d'immigration, le respect de la condition expresse énoncée à l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association impose aux autorités nationales compétentes de lui reconnaître le droit de s'établir comme travailleur indépendant et, à cette fin, de lui accorder une autorisation d'entrée et de séjour.

65. Par ailleurs, un tel système de contrôle implique la réalisation d'enquêtes détaillées qui, notamment pour des raisons linguistiques, seraient difficiles à effectuer par l'agent du service d'immigration au point d'arrivée au Royaume-Uni. Dès lors, l'exigence selon laquelle la vérification des conditions de fond doit être effectuée dans la République tchèque permet un accès plus aisé aux informations concernant la situation des ressortissants tchèques souhaitant s'établir au Royaume-Uni.

66. Il résulte de ce qui précède que des règles nationales qui exigent d'un ressortissant tchèque, préalablement à son départ vers l'État membre d'accueil, qu'il obtienne un permis d'entrer dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, doivent être considérées comme compatibles avec l'accord d'association.

67. En outre, en ce qui concerne le pouvoir des autorités compétentes de l'État membre d'accueil de refuser l'autorisation d'admission demandée par un ressortissant tchèque, lors de son arrivée sur le territoire de cet État, au seul motif qu'il n'a pas obtenu dans son pays de résidence un permis d'entrer en vue de l'établissement, il convient de rappeler que, comme il est indiqué aux points 22 et 23 du présent arrêt, bien que MM. Barkoci et Malik n'aient jamais demandé de permis d'entrer au Royaume-Uni, les autorités nationales compétentes en matière d'immigration ont néanmoins, en vertu de leur pouvoir d'appréciation, effectué un examen individuel de leurs demandes d'admission présentées respectivement cinq mois et trois mois après leur admission physique sur le territoire national, afin de vérifier si une autorisation d'entrée pouvait leur être accordée sur un fondement autre que celui des Immigration Rules, au motif que les autres conditions énumérées au point 212 de celles-ci étaient clairement et manifestement satisfaites.

68. Un tel examen de la situation individuelle des ressortissants tchèques dépourvus de permis d'entrer, qui a été effectué dans l'affaire au principal, semble conforme à la pratique souple des autorités britanniques en la matière. En effet, le gouvernement du Royaume-Uni a indiqué lors de l'audience que le Secretary of State exerce habituellement son pouvoir d'appréciation à l'égard des demandes d'admission aux fins d'établissement, présentées au titre de l'accord d'association, au point d'arrivée au Royaume-Uni.

69. Dans ces conditions, sans même qu'il soit besoin d'aborder la question de savoir si l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association permet aux autorités compétentes de l'État membre d'accueil de refuser d'admettre sur son territoire un ressortissant tchèque dépourvu de permis d'entrer, il suffit d'examiner si l'application par les autorités britanniques de la législation nationale en matière d'immigration dans son ensemble, y compris l'exercice du pouvoir discrétionnaire du Secretary of State visant à déterminer si la condition relative à la possession d'un permis d'entrer peut être écartée dans des cas individuels, apparaît conforme à la condition énoncée à la fin de la première phrase dudit article 59, paragraphe 1.

Sur la compatibilité des modalités d'exercice du pouvoir discrétionnaire du Secretary of State avec la condition énoncée à l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association

70. À cet égard, il importe de rappeler d'emblée que, ainsi qu'il a été relevé aux points 62 à 66 du présent arrêt, un système de contrôle préalable, tel que celui établi par les Immigration Rules, par lequel l'État membre d'accueil subordonne la délivrance d'un permis d'entrer préalable, et, ultérieurement, d'une autorisation d'admission, à la vérification par les autorités compétentes en matière d'immigration que le demandeur entend véritablement exercer dans cet État, à titre exclusif, une activité indépendante et viable, est en principe compatible avec les articles 45, paragraphe 3, et 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, lus ensemble.

71. Par ailleurs, en raison de la mise en œuvre du dispositif de prévention que constitue l'examen de la situation individuelle du ressortissant tchèque dépourvu de permis d'entrer, une autorisation d'admission est susceptible d'être accordée à ce dernier sur un fondement autre que celui des Immigration Rules dans le cas où, les exigences de fond pour l'établissement imposées par la législation de l'État membre d'accueil relative à l'immigration se trouvant clairement et manifestement remplies, le rejet de la demande fondé sur le seul motif que ledit ressortissant n'a pas obtenu de permis d'entrer préalable répondrait à des exigences purement formalistes.

72. Or, dans la mesure où les autorités compétentes en matière d'immigration de l'État membre d'accueil adoptent une politique consistant à écarter la nécessité impérative de détenir un permis d'entrer, il paraît cohérent avec la logique du système de contrôle préalable, ainsi que justifié au regard de l'accord d'association, que, dans l'exercice de leur pouvoir d'appréciation de la situation individuelle du demandeur, ces autorités effectuent un examen plus sommaire du bien-fondé d'une demande d'établissement, présentée au titre dudit accord, au point d'arrivée dans cet État membre que celui qui est effectué dans le cas d'une demande de permis d'entrer présentée par le ressortissant tchèque dans son pays de résidence.

73. Dès lors, la nécessité pour les ressortissants tchèques de démontrer de manière manifeste le bien-fondé de leur prétention à s'établir dans l'État membre d'accueil sur le fondement de l'accord d'association, sans préjudice du contrôle juridictionnel de la légalité de la décision adoptée à cet égard par les autorités nationales compétentes en matière d'immigration, n'est pas susceptible de rendre impossible ou excessivement difficile l'exercice par lesdits ressortissants des droits qui leur sont octroyés par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association.

74. Il résulte de ce qui précède que les articles 45, paragraphe 3, et 59, paragraphe 1, de l'accord d'association ne s'opposent pas à ce que les autorités de l'État membre d'accueil compétentes en matière d'immigration exigent qu'un ressortissant tchèque obtienne, préalablement à son départ vers cet État, un permis d'entrer dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond pour l'établissement, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, pour autant que ces autorités exercent leur pouvoir d'appréciation à l'égard des demandes d'admission aux fins d'établissement, présentées au titre dudit accord, au point d'arrivée dans cet État, de manière telle qu'une autorisation d'admission puisse être accordée à un ressortissant tchèque, sur un fondement autre que celui des Immigration Rules, si la demande de ce dernier satisfait clairement et manifestement aux mêmes conditions de fond que celles qui auraient été appliquées s'il avait demandé un permis d'entrer dans la République tchèque.

Sur la compatibilité de l'exigence de présentation d'une nouvelle demande d'établissement en bonne et due forme avec la règle d'égalité de traitement énoncée à l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association

75. MM. Barkoci et Malik prétendent en outre que la mesure d'"expulsion" du territoire de l'État membre d'accueil, dont ils sont menacés en l'espèce malgré leur présence effective au Royaume-Uni, est susceptible d'interférer de manière sérieuse avec leur capacité de gérer une entreprise déjà établie, alors que tel ne serait pas le cas de toute mesure qui pourrait être imposée à un ressortissant britannique gérant une entreprise similaire.

76. Il convient, par conséquent, d'examiner si l'exigence de la présentation, par un ressortissant tchèque qui n'a pas obtenu de permis d'entrer préalablement à son départ vers l'État membre d'accueil ni d'autorisation d'admission sur un fondement autre que celui des Immigration Rules au point d'arrivée dans cet État, d'une nouvelle demande d'établissement en bonne et due forme, dans son État d'origine ou, le cas échéant, dans un autre pays, est compatible avec la règle d'égalité de traitement énoncée à l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, dès lors qu'une telle exigence ne saurait être appliquée aux ressortissants de l'État membre d'accueil.

77. Il importe de rappeler que, ainsi qu'il a été relevé au point 22 du présent arrêt, MM. Barkoci et Malik ont été considérés, conformément à l'article 11, paragraphe 1, de l'Immigration Act, comme n'étant pas entrés sur le territoire du Royaume-Uni et que leurs demandes d'autorisation de séjour ont ainsi été traitées comme des demandes d'admission initiale. À cet égard, il convient de constater que, contrairement à ce que MM. Barkoci et Malik prétendent, dans le cadre d'un système national fondé sur des mesures de vérification appropriées, préalables au départ vers l'État membre d'accueil d'un ressortissant tchèque, l'éventuelle admission physique, à titre temporaire, de ce dernier alors qu'il est dépourvu de permis d'entrer sur le territoire de cet État n'équivaut nullement à une véritable autorisation d'entrée dans celui-ci.

78. En effet, l'analyse de la compatibilité avec l'accord d'association d'un système national de contrôle de l'immigration fondé sur l'obligation de demander une autorisation préalable d'entrée ne saurait être affectée par la circonstance que, en attendant l'issue d'un recours contre une décision précédente qui aurait refusé, sur un fondement différent, l'admission sur le territoire de l'État membre concerné du ressortissant tchèque, celui-ci a été admis à titre temporaire dans cet État, antérieurement à la présentation d'une demande d'établissement, et autorisé à travailler ou à bénéficier des fonds publics, dans un souci de respect de la dignité humaine et de solidarité (voir, en ce sens, arrêts du 20 septembre 1990, Sevince, C-192-89, Rec. p. I-3461, point 31, et du 16 décembre 1992, Kus, C-237-91, Rec. p. I-6781, points 12 à 17).

79. Dès lors, MM. Barkoci et Malik ne sauraient utilement se fonder sur la seule circonstance qu'ils ont été admis à titre temporaire au Royaume-Uni pour soutenir qu'ils avaient acquis le droit de s'établir en qualité de travailleurs indépendants sur le territoire de cet État membre, droit auquel l'exigence de présentation d'une nouvelle demande de permis d'entrer en bonne et due forme, dans leur État d'origine ou, le cas échéant, dans un autre pays, serait susceptible de porter atteinte.

80. En tout état de cause, il importe également de rappeler que la Cour a constaté, en ce qui concerne la libre circulation des travailleurs, que la réserve figurant à l'article 48, paragraphe 3, du traité CE (devenu, après modification, article 39, paragraphe 3, CE) permet aux États membres de prendre, à l'égard des ressortissants d'autres États membres, pour les motifs énoncés par cette disposition, et notamment ceux justifiés par l'ordre public, des mesures qu'ils ne sauraient appliquer à leurs propres ressortissants, en ce sens qu'ils n'ont pas le pouvoir d'éloigner ces derniers du territoire national ou de leur en interdire l'accès (voir, à cet égard, arrêts du 4 décembre 1974, Van Duyn, 41-74, Rec. p. 1337, point 22; du 18 mai 1982, Adoui et Cornuaille, 115-81 et 116-81, Rec. p. 1665, point 7; du 7 juillet 1992, Singh, C-370-90, Rec. p. I-4265, point 22; du 17 juin 1997, Shingara et Radiom, C-65-95 et C-111-95, Rec. p. I-3343, point 28, et du 16 juillet 1998, Pereira Roque, C-171-96, Rec. p. I-4607, point 37).

81. Cette différence de traitement entre nationaux et ressortissants des autres États membres découle d'un principe de droit international qui s'oppose à ce qu'un État membre refuse à ses propres ressortissants le droit d'accéder à son territoire et d'y séjourner à n'importe quel titre, principe que le traité ne peut pas être censé méconnaître dans les rapports entre les États membres (arrêts précités Van Duyn, point 22, et Pereira Roque, point 38).

82. Pour les mêmes raisons, une telle différence de traitement en faveur des ressortissants de l'État membre d'accueil ne saurait être considérée incompatible avec l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association.

83. Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent qu'il y a lieu de répondre aux deuxième, quatrième, cinquième et septième questions que:

- Le droit d'établissement, tel que défini par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, implique qu'un droit d'admission et un droit de séjour sont conférés, en tant que corollaires de ce droit, aux ressortissants tchèques qui souhaitent exercer des activités à caractère industriel, commercial, artisanal ou des professions libérales dans un État membre. Toutefois, il découle de l'article 59, paragraphe 1, dudit accord que ces droits d'admission et de séjour ne constituent pas des prérogatives absolues, leur exercice pouvant être limité, le cas échéant, par les règles de l'État membre d'accueil concernant l'admission, le séjour et l'établissement des ressortissants tchèques.

- Les articles 45, paragraphe 3, et 59, paragraphe 1, de l'accord d'association, lus ensemble, ne s'opposent pas en principe à un système de contrôle préalable qui subordonne la délivrance d'une autorisation d'entrée par les autorités compétentes en matière d'immigration à la condition que le demandeur établisse qu'il a véritablement l'intention de commencer une activité de travailleur indépendant, sans exercer simultanément aucun emploi salarié ni recourir aux fonds publics, et qu'il dispose dès le départ de ressources financières suffisantes et a des chances raisonnables de réussir. Des exigences de fond, telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, ont précisément pour objectif de permettre aux autorités compétentes d'effectuer une telle vérification et sont aptes à assurer la réalisation d'un tel objectif.

- La condition énoncée à la fin de la première phrase de l'article 59, paragraphe 1, de l'accord d'association doit être interprétée en ce sens que l'obligation d'obtenir dans le pays de résidence, préalablement au départ vers l'État membre d'accueil, un permis d'entrer, dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond telles que celles prévues au point 212 des Immigration Rules, n'a ni pour objet ni pour effet de rendre impossible ou excessivement difficile l'exercice par les ressortissants tchèques des droits qui leur sont octroyés par l'article 45, paragraphe 3, de l'accord d'association, pour autant que les autorités compétentes de l'État membre d'accueil exercent le pouvoir d'appréciation dont elles disposent à l'égard des demandes d'admission aux fins d'établissement, présentées au titre dudit accord, au point d'arrivée dans cet État, de manière telle qu'une autorisation d'admission puisse être accordée à un ressortissant tchèque dépourvu de permis d'entrer, sur un fondement autre que celui des Immigration Rules, dès lors que la demande de ce dernier satisfait clairement et manifestement aux mêmes exigences de fond que celles qui auraient été appliquées s'il avait demandé un permis d'entrer dans la République tchèque.

Sur les troisième et sixième questions

84. Compte tenu des réponses apportées aux première, deuxième, quatrième, cinquième et septième questions, il n'est pas nécessaire de répondre aux troisième et sixième questions. En effet, la juridiction de renvoi n'a posé la troisième question qu'en cas de réponse négative à la première et la sixième question n'a été soulevée que pour le cas, qui n'est pas celui de l'espèce, où une autorisation d'entrée sur le territoire d'un État membre est refusée à un ressortissant tchèque, souhaitant s'y établir en tant que travailleur indépendant au titre de l'accord d'association, sur un fondement autre que l'absence de permis d'entrer préalable dudit ressortissant.

Sur les dépens

85. Les frais exposés par les gouvernements du Royaume-Uni, belge, allemand, français, irlandais, italien et néerlandais, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR,

Statuant sur les questions à elle soumises par la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Divisional Court), par ordonnance du 29 mars 1999, dit pour droit:

1) L'article 45, paragraphe 3, de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la République tchèque, d'autre part, conclu et approuvé au nom de la Communauté par la décision 94-910-CECA, CE, Euratom du Conseil et de la Commission, du 19 décembre 1994, doit être interprété en ce sens qu'il établit, dans le domaine d'application de cet accord, un principe précis et inconditionnel suffisamment opérationnel pour être appliqué par un juge national et qui, dès lors, est susceptible de régir la situation juridique des particuliers. L'effet direct qu'il convient donc de reconnaître à ladite disposition implique que les ressortissants tchèques qui s'en prévalent ont le droit de l'invoquer devant les juridictions de l'État membre d'accueil, nonobstant le fait que les autorités de ce dernier demeurent compétentes pour appliquer auxdits ressortissants la législation nationale en matière d'admission, de séjour et d'établissement, conformément à l'article 59, paragraphe 1, dudit accord.

2) Le droit d'établissement, tel que défini par l'article 45, paragraphe 3, dudit accord d'association, implique qu'un droit d'admission et un droit de séjour sont conférés, en tant que corollaires de ce droit, aux ressortissants tchèques qui souhaitent exercer des activités à caractère industriel, commercial, artisanal ou des professions libérales dans un État membre. Toutefois, il découle de l'article 59, paragraphe 1, de cet accord que ces droits d'admission et de séjour ne constituent pas des prérogatives absolues, leur exercice pouvant être limité, le cas échéant, par les règles de l'État membre d'accueil concernant l'admission, le séjour et l'établissement des ressortissants tchèques.

3) Les articles 45, paragraphe 3, et 59, paragraphe 1, dudit accord d'association, lus ensemble, ne s'opposent pas en principe à un système de contrôle préalable qui subordonne la délivrance d'une autorisation d'entrée par les autorités compétentes en matière d'immigration à la condition que le demandeur établisse qu'il a véritablement l'intention de commencer une activité de travailleur indépendant, sans exercer simultanément aucun emploi salarié ni recourir aux fonds publics, et qu'il dispose dès le départ de ressources financières suffisantes et a des chances raisonnables de réussir. Des exigences de fond, telles que celles prévues au point 212 des United Kingdom Immigration Rules (House of Commons Paper 395), ont précisément pour objectif de permettre aux autorités compétentes d'effectuer une telle vérification et sont aptes à assurer la réalisation d'un tel objectif.

4) La condition énoncée à la fin de la première phrase de l'article 59, paragraphe 1, dudit accord d'association doit être interprétée en ce sens que l'obligation d'obtenir dans le pays de résidence, préalablement au départ vers l'État membre d'accueil, un permis d'entrer, dont la délivrance est subordonnée à la vérification de conditions de fond telles que celles prévues au point 212 desdites Immigration Rules, n'a ni pour objet ni pour effet de rendre impossible ou excessivement difficile l'exercice par les ressortissants tchèques des droits qui leur sont octroyés par l'article 45, paragraphe 3, de cet accord, pour autant que les autorités compétentes de l'État membre d'accueil exercent le pouvoir d'appréciation dont elles disposent à l'égard des demandes d'admission aux fins d'établissement, présentées au titre dudit accord, au point d'arrivée dans cet État, de manière telle qu'une autorisation d'admission puisse être accordée à un ressortissant tchèque dépourvu de permis d'entrer, sur un fondement autre que celui des Immigration Rules, dès lors que la demande de ce dernier satisfait clairement et manifestement aux mêmes exigences de fond que celles qui auraient été appliquées s'il avait demandé un permis d'entrer dans la République tchèque.