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Décisions

CA Limoges, ch. soc., 8 mars 2005, n° 04-1482

LIMOGES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Bonnie

Défendeur :

Delzongle Aquitaine (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Leflaive

Conseillers :

M. Nerve, Mme Dubillot-Bailly

Avocats :

Mes Maury, Deleage, Raineix

Cons. prud'h. Brive-la-Gaillarde, du 22 …

22 septembre 2004

LA COUR,

Monsieur Jean-Paul Bonnie a été embauché par la SARL Gounet-Leal à compter du 1er avril 1981, en qualité de VRP exclusif, pour assurer la vente des produits de peinture et de papiers peints, sur les secteurs de la Corrèze, du Lot et de la Dordogne.

Différents avenants intervenaient entre les parties, avenants aux termes desquels le secteur géographique de Monsieur Jean-Paul Bonnie était modifié.

Par lettre en date du 10 septembre 2001, il était proposé à Monsieur Jean-Paul Bonnie la signature d'un nouvel avenant dans le cadre d'une restructuration destinée à préserver la compétitivité de l'entreprise, avenant consistant dans l'abandon d'une partie de la clientèle moyennant l'instauration d'une garantie mensuelle de ressources en contrepartie du chiffre d'affaires perdu.

Par lettre en date du 8 octobre 2001, Monsieur Jean-Paul Bonnie refusait la modification du contrat de travail soumise à son approbation.

Après entretien préalable du 19 octobre 2001, Monsieur Jean-Paul Bonnie a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 octobre 2001 dans les termes suivants:

"Monsieur,

Suite à notre entretien du 19 octobre 2001, nous vous confirmons notre décision de procéder à votre licenciement pour motif économique.

En effet, l'évolution de l'activité de l'entreprise est malheureusement négative cette année, ce qui se traduit inévitablement à terme par une baisse, voire une absence de rentabilité et, étant dans l'impossibilité d'investir suffisamment pour l'avenir, une perte de compétitivité.

Pour une meilleure efficacité destinée à rétablir notre niveau d'activité et à sauvegarder notre compétitivité, une réorganisation de la répartition des zones d'intervention des deux VRP est donc nécessaire, un déséquilibre important existant entre les deux zones.

Ainsi, si l'on se réfère au passé, on s'aperçoit que votre chiffre d'affaires a stagné (1er janvier 1997 : 4 808 KF ; 5 240 KF en 2000) sur 70 à 75 % de la zone géographique d'activité commerciale de la société alors qu'il est passé dans le même temps du simple au double (2 172 KF au 1 er janvier 1997 ; 4 196 KF en 2000) sur les 25 à 30 % de la zone géographique restante.

Afin de vous permettre de prospecter de manière suffisamment intensive la clientèle potentielle de votre secteur, nous vous avons proposé de redistribuer une partie de celle-ci sur le secteur de l'autre VRP et d'abandonner les clients de la tournée Objat-Pompadour ainsi que le client Etablissements Talamona, basé sur Brive et Tulle.

Un aménagement de votre rémunération a été également prévu avec notamment une garantie mensuelle brute de 2 695,25 F versée en contrepartie du chiffre d'affaires abandonné et correspondant au montant des commissions perçues antérieurement chez les clients que vous ne visiteriez plus.

Vous avez refusé cette proposition de restructuration formulée par courrier en date du 10 septembre 2001.

En conséquence à la première présentation de cette lettre vous serez en préavis de trois mois que nous vous dispensons d'effectuer et à l'issue duquel nous solderons votre compte.

La législation du travail prévoit de vous proposer une convention de conversion. Cependant nous sommes dans l'impossibilité de le faire, celle-ci ayant fait l'objet d'une suppression depuis le 1er juillet.

Durant l'année qui suivra la rupture de votre contrat de travail vous bénéficierez d'une priorité de réembauchage dans notre entreprise, à condition de nous avoir informés dans les quatre mois suivant cette rupture de votre désir de faire valoir cette priorité.

Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et, également ceux qui correspondraient à une nouvelle qualification acquise après la rupture, sous réserve cependant que vous nous la fassiez connaître.

Nous vous confirmons que vous êtes délié de l'obligation de non-concurrence prévue à votre contrat de travail...".

Par demande en date du 24 mai 2002 Monsieur Jean-Paul Bonnie a saisi le Conseil de prud'hommes de Brive d'une action en contestation du licenciement ainsi prononcé.

Par jugement en date du 22 septembre 2004 auquel il est expressément renvoyé, le Conseil de prud'hommes de Brive, présidé par Madame le juge départiteur, a:

> déclaré le licenciement de Monsieur Jean-Paul Bonnie fondé sur une cause réelle et sérieuse,

> débouté Monsieur Jean-Paul Bonnie de l'ensemble de ses demandes,

> condamné Monsieur Jean-Paul Bonnie au paiement de la somme de 304,90 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Suivant déclaration en date du 20 octobre 2004, Monsieur Jean-Paul Bonnie a interjeté appel du jugement ainsi rendu.

Aux termes de conclusions déposées le 18 janvier 2005 et oralement soutenues à l'audience, Monsieur Jean-Paul Bonnie conclut à l'infirmation du jugement entrepris en demandant à la cour de condamner la société Delzongle Aquitaine, venant aux droits de la société Gounet-Leal à lui payer:

> la somme de 152 964 euro à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> la somme de 32 000 euro à titre d'indemnité de clientèle,

> la somme de 2 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Aux termes de conclusions déposées le 8 février 2005, la SAS Gounet-Leal conclut au contraire à la confirmation du jugement entrepris, ainsi qu'à l'allocation de la somme de 1 500 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Motifs de l'arrêt

Sur le licenciement :

Attendu qu'aux termes de la lettre de licenciement de Monsieur Jean-Paul Bonnie, dont les termes ont été rappelés dans les développements qui précèdent, Monsieur Jean-Paul Bonnie a été licencié pour un motif économique tenant à la nécessité de restructurer son secteur afin de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ;

Attendu que les premiers juges ont pertinemment relevé :

> que la modification refusée par Monsieur Jean-Paul Bonnie faisait suite à plusieurs avenants aux termes desquels Monsieur Jean-Paul Bonnie avait accepté une modification de son secteur géographique,

> que l'examen de l'évolution du chiffre d'affaires de Monsieur Jean-Paul Bonnie en la période 1997-2000 fait apparaître une stagnation,

> que la réduction du secteur géographique de Monsieur Jean-Paul Bonnie était de nature à permettre à celui-ci une prospection plus efficace ;

Attendu que la réduction du centre géographique de Monsieur Jean-Paul Bonnie était accompagnée d'une compensation financière moyennant une garantie mensuelle brute de 2 695,25 F (cf lettre du 10 septembre 2001)

Attendu que les termes de la lettre du 8 mars 2001 ne sont pas suffisants pour caractériser l'existence d'un licenciement personnel déguisé en licenciement économique;

Attendu qu'en définitive c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que la modification du contrat de travail proposée à Monsieur Jean-Paul Bonnie était fondée en la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et que par suite le licenciement prononcé repose sur un motif économique réel et sérieux avec toutes conséquences de droit;

- Sur la demande au titre de l'indemnité de clientèle:

Attendu que c'est par des motifs complets et pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont débouté Monsieur Jean-Paul Bonnie de ce chef de demande;

- Sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile:

Attendu qu'eu égard aux éléments de l'espèce et à la situation économique respective des parties, il n'y a pas lieu de faire application des dites dispositions en cause d'appel,

Par ces motifs, LA COUR, Statuant en audience publique, contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ; Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions; Déboute les parties de tous autres chefs de demande ; Condamne Monsieur Jean-Paul Bonnie aux entiers dépens;