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Décisions

CA Bordeaux, 5e ch., 21 avril 2005, n° 04-01131

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Cabinet Etudes Conseils Diagnostics (SARL), Dewitte

Défendeur :

Amrane Immobilier Expertise (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gaboriau

Conseiller :

Mme Coll

Avoués :

SCP Fournier, SCP Gautier & Fonrouge

Avocats :

Mes Tiquant, Soucerdauch, Sirgue

Vice-président :

Mme Gillet

T. com. Bordeaux, pré., du 20 nov. 2003

20 novembre 2003

Vu l'ordonnance de référé rendue par le juge des référés du Tribunal de commerce de Bordeaux en date du 20 novembre 2003.

Vu l'acte d'appel de la société Cabinet Etudes Conseils Diagnostics (CECD) SARL et de Monsieur Jean-Marc Dewitte.

Vu les conclusions de la SARL CECD et de Monsieur Jean-Marc Dewitte en date du 24 mars 2004.

Vu les conclusions de la société Amrane Immobilier Expertise en date du 31 janvier 2005.

La procédure a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 8 février 2005.

SUR QUOI

Monsieur Jean-Marc Dewitte et la SARL CECD ont fait appel de l'ordonnance de référé du Président du tribunal de commerce qui a rejeté leur demande tendant à voir la société Amrane Immobilier Expertise condamnée à faire cesser sous astreinte le trouble manifestement illicite dont ils estiment être victimes et à ordonner la publication dans un journal d'annonces immobilières d'un "message" indiquant que la société Amrane Immobilier Expertise diffuse des informations dénigrant l'un de ses concurrents.

En l'espèce, la SARL CECD, dont le dirigeant est Monsieur Jean-Marc Dewitte, est une société faisant essentiellement des métrages et des diagnostics sur la présence de plomb, d'amiante ou d'autres substances nocives dans les immeubles d'habitation. Cette société travaille essentiellement avec des agences immobilières.

La SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte soutiennent que la société Amrane Immobilier Expertise tient des propos dénigrants sur eux aux agences immobilières, en indiquant notamment que Monsieur Jean-Marc Dewitte fait de faux certificats. Mais soutenir qu'une personne fait de faux certificats est une atteinte à l'honneur et à la considération et non une critique malveillante sur la manière de travailler. Il s'agit donc de diffamation et en l'espèce, c'est bien au demeurant ainsi que la SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte avaient initialement motivé leur demande devant le juge des référés. Si devant la cour, il est soutenu que ces propos sont dénigrants, il y a lieu de constater qu'il est demandé la publication d'un message rectificatif, exactement comme en cas de diffamation. De plus, Monsieur Jean-Marc Dewitte avant entrepris une action devant la juridiction correctionnelle pour diffamation, action jugée irrecevable, ce dernier n'ayant pas consigné la somme mise à sa charge par la juridiction.

Il apparaît donc que l'action de la SARL CECD et de Monsieur Jean-Marc Dewitte ne saurait prospérer devant le juge des référés, qui est compétent pour statuer en matière de diffamation.

Sur le fondement de l'article 9-1 du Code civil

Monsieur Jean-Marc Dewitte soutient que sur le respect de la présomption d'innocence, il est en droit de demander en référé la cessation de la diffusion des propos tenus par la société Amrane Immobilier Expertise, mais si l'article 9-1 du Code civil permet en effet au juge des référés d'intervenir si une personne est avant toute condamnation présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire, encore faut-il que ces allégations revêtent un caractère certain de publicité. En l'espèce, Monsieur Jean-Marc Dewitte se plaint que la société Amrane Immobilier Expertise ou plus exactement son dirigeant fasse état oralement du fait qu'il serait en procès pour des "faux rapports", propos qui auraient été tenus devant des employés de deux cabinets immobiliers. A l'évidence, il ne s'agit pas de propos tenus à la radio ou à la télévision, voire dans des rencontres publiques, mais des conversations d'ordre privé pour lesquelles, les dispositions de l'article 9-1 du Code civil ne sauraient recevoir application.

La décision sera donc de confirmer de ce chef par substitution des motifs.

La procédure engagée par la SARL CECD n'est pas fondée, mais pour autant la preuve de son caractère abusif n'est pas rapportée.

L'équité permet de faire droit à la demande de la société Amrane Immobilier Expertise au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile à concurrence de la somme de 1 000 euro.

Par ces motifs, LA COUR, Réforme la décision du juge des référés du tribunal de commerce en date du 20 novembre 2003 en ce sens qu'il se déclarait compétent pour statuer sur la demande initiale présentée par la SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte. Confirme la décision du juge des référés en date du 20 novembre 2003 déboutant la SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte de sa demande. Condamne in solidum la SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte à payer à la société Amrane Immobilier Expertise la somme de 1 000 euro au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Condamne in solidum la SARL CECD et Monsieur Jean-Marc Dewitte aux entiers dépens avec application des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.