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Décisions

CJCE, 1re ch., 27 octobre 2005, n° C-329/03

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Trapeza tis Ellados AE

Défendeur :

Banque Artesia

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Jann

Avocat général :

M. Jacobs

Juges :

Mme Colneric, MM. Schiemann, Juhász, Ilešic

Avocats :

Mes Soufleros, Christodoulou, Kontovazainitis, Herbert, Stefanakis, Papakonstantinou

CJCE n° C-329/03

27 octobre 2005

LA COUR (première chambre),

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l'interprétation de l'annexe I, listes B, poste IV A, et D, poste VI, de la première directive du Conseil, du 11 mai 1960, pour la mise en œuvre de l'article 67 du traité (JO 1960, 43, p. 921, ci-après la "première directive").

2 Cette demande a été présentée par l'Areios Pagos (Cour de cassation) dans le cadre d'un litige opposant Trapeza tis Ellados AE (ci-après la "Banque de Grèce") à la Banque Artesia (ci-après "Artesia"), au sujet de la demande de cette dernière tendant à être indemnisée du préjudice subi par elle du fait des refus de la Banque de Grèce de l'autoriser à créditer un compte en drachmes grecques convertibles du produit de la liquidation d'obligations.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

3 Artesia, dont le siège social est à Bruxelles (Belgique), disposait d'un compte en drachmes grecques convertibles dans sa succursale d'Athènes (Grèce).

4 Au cours de la période du 28 avril 1981 au 30 juillet 1982, Artesia a acheté à Elliniki Trapeza Viomichanikis Anaptixeos (ETVA) Anonimos Etairia (Banque grecque de développement industriel SA, ci-après "ETVA"), dont les actions appartiennent à l'État grec, des obligations, émises par cette banque, libellées en monnaie nationale, d'un terme d'un an à compter de leur émission, qui étaient négociées et cotées en Bourse. Ces obligations avaient été payées à partir du compte en drachmes grecques convertibles d'Artesia. Afin que le montant correspondant auxdites obligations soit toujours convertible, une autorisation spéciale de la Banque de Grèce était nécessaire.

5 Le 24 août 1982, Artesia a demandé à cette banque de l'autoriser à créditer son compte en drachmes grecques convertibles du produit de la liquidation des obligations en cause, en vue de rapatrier ce produit en Belgique. Au cours de la période du 25 août 1982 au 23 novembre 1986, la Banque de Grèce a rejeté cette demande à plusieurs reprises. Elle y a, toutefois, fait droit le 24 novembre 1986. Il apparaît que son refus était motivé, du moins en partie, par le fait que l'utilisation du compte d'Artesia en drachmes grecques convertibles pour l'acquisition initiale des obligations en question n'avait pas fait l'objet d'une autorisation et que, dès lors, ce compte n'était plus convertible.

6 Estimant qu'elle avait subi un préjudice au cours de la période du 30 septembre 1982 au 11 décembre 1986, du fait des refus opposés par la Banque de Grèce, Artesia a, le 28 avril 1987, introduit un recours en indemnisation contre cette banque. Elle a fait valoir que l'acquisition des obligations par elle relevait de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive, de sorte que les États membres étaient tenus de prévoir l'octroi de l'autorisation demandée, en vertu de l'article 2 de cette directive. L'affaire a été jugée par le Polymeles Protodikeio Athinon (tribunal de grande instance d'Athènes), l'Efeteio Athinon (Cour d'appel d'Athènes), puis l'Areios Pagos, qui a renvoyé l'affaire devant cet Efeteio. Ce dernier a, le 27 juillet 2001, condamné la Banque de Grèce à indemniser Artesia. Cette juridiction a considéré que l'opération en cause au principal relevait de l'article 2 et de l'annexe I, liste B, de la première directive.

7 La Banque de Grèce s'étant pourvue en cassation, l'Areios Pagos a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

" 1) Il est demandé, eu égard à la disposition de la liste D, qui se réfère à l'article 4 de la première directive [...], et de la catégorie de la nomenclature VI, relative à des 'Investissements à court terme en bons du Trésor et en autres titres normalement traités sur le marché monétaire', si, selon l'esprit de cette disposition et le but qu'elle poursuit, ou selon son interprétation à la lumière de la pratique générale éventuelle en matière de commerce international, à savoir que des titres, tels que les obligations ETVA en cause, d'une durée d'un an, constituent des investissements à court terme, a) des obligations émises par une banque constituée sous la forme d'une société anonyme dont les actions appartiennent à l'État, d'une durée d'un an à l'émission, négociables en Bourse, où elles ont aussi été introduites, ou b) des obligations émises par une banque constituée sous la forme d'une société anonyme, d'une durée d'un an à l'émission, négociables en Bourse, où elles ont aussi été introduites, sont soumises à la réglementation de cette disposition.

2) Il est aussi demandé, eu égard à la disposition de la liste D, qui se réfère à l'article 4 de la [première] directive [...], et de la catégorie de la nomenclature IX, qui prévoit 'Constitution et approvisionnement de comptes courants et de dépôts, rapatriement ou utilisation des avoirs en compte courant ou en dépôt auprès des établissements de crédit', si, selon l'esprit de cette disposition et le but qu'elle poursuit, l'utilisation dans une banque, en tant qu'établissement de crédit, d'avoirs sur un compte de dépôt, alimenté conformément à la décision 1097-1959 du comité monétaire, citée dans le présent arrêt (au moyen du produit de devises étrangères importées, etc.), et consistant dans des dépôts libellés en monnaie nationale, convertible en monnaie étrangère, est soumise à la réglementation de cette disposition."

Sur la demande de réouverture de la procédure orale

8 Par demande déposée au greffe de la Cour le 8 juillet 2005, la Banque de Grèce a demandé la réouverture de la procédure orale.

9 À cet égard, il convient de rappeler que la Cour peut ordonner la réouverture de la procédure orale, conformément à l'article 61 de son règlement de procédure, si elle considère qu'elle est insuffisamment éclairée ou que l'affaire doit être tranchée sur la base d'un argument qui n'a pas été débattu entre les parties (arrêts du 10 février 2000, Deutsche Post, C-270-97 et C-271-97, Rec. p. I-929, point 30, et du 18 juin 2002, Philips, C-299-99, Rec. p. I-5475, point 20).

10 La Cour, l'avocat général entendu, considère qu'il n'y a pas lieu d'ordonner, en l'espèce, la réouverture de la procédure orale. Par conséquent, il convient de rejeter la demande tendant à ce qu'une telle réouverture soit ordonnée.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

11 L'article 67 du traité CEE (devenu article 67 du traité CE, abrogé par le traité d'Amsterdam) prévoit:

"1. Les États membres suppriment progressivement entre eux, pendant la période de transition et dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché commun, les restrictions aux mouvements des capitaux appartenant à des personnes résidant dans les États membres, ainsi que les discriminations de traitement fondées sur la nationalité ou la résidence des parties, ou sur la localisation du placement.

2. Les paiements courants afférents aux mouvements de capitaux entre les États membres sont libérés de toutes restrictions au plus tard à la fin de la première étape."

12 Selon le considérant de la première directive, la réalisation des objectifs du traité CEE nécessite une liberté aussi grande que possible des mouvements de capitaux entre les États membres, et, en conséquence, la libéralisation la plus étendue et la plus rapide des mouvements de capitaux entre ces États.

13 Aux termes des articles 1er, paragraphe 1, et 3, paragraphe 1, de ladite directive, les États membres accordent toute autorisation de change requise pour la conclusion ou l'exécution des transactions et pour les transferts entre résidents des États membres, afférents aux mouvements de capitaux énumérés aux listes A et, sous certaines conditions, C de l'annexe I de la même directive.

14 L'article 2, paragraphe 1, de la première directive prévoit que "[l]es États membres accordent des autorisations générales pour la conclusion ou l'exécution des transactions et pour les transferts entre résidents des États membres, afférents aux mouvements de capitaux énumérés à la liste B de l'annexe I de [cette] directive".

15 Une telle obligation d'octroi d'autorisation n'est, en revanche, pas instituée pour les mouvements de capitaux énumérés à la liste D de la même annexe. Les États membres demeurent libres de maintenir leurs restrictions afférentes à ces transactions.

16 L'article 4 de la première directive dispose:

"Le Comité monétaire procède au moins une fois l'an à un examen des restrictions qui s'appliquent aux mouvements de capitaux énumérés dans les listes de l'annexe I de la présente directive; il fait rapport à la Commission sur les restrictions qui pourraient être supprimées."

17 Parmi les mouvements de capitaux énumérés à l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive, relative aux "[m]ouvements de capitaux visés à l'article 2 de la directive", figurent, notamment, l'"[a]cquisition par des non-résidents de titres nationaux négociés en Bourse (à l'exclusion des parts de fonds communs de placement) et [le] rapatriement du produit de leur liquidation", à laquelle correspond le poste IV A de la nomenclature. Celui-ci comprend, notamment, au point 3, sous i), l'acquisition d'obligations "libellées en monnaie nationale" et au point 4 le "Rapatriement du produit de la liquidation d'obligations".

18 S'agissant des mouvements de capitaux énumérés à l'annexe I, liste D, de la première directive, relative aux "[m]ouvements de capitaux visés à l'article 4 de la directive", figurent parmi ceux-ci:

- les "[i]nvestissements à court terme en bons du Trésor et en autres titres normalement traités sur le marché monétaire", auxquels correspond le poste VI de la nomenclature. Celui-ci comprend notamment les investissements à court terme par des non-résidents sur le marché monétaire national et le rapatriement du produit de leur liquidation;

- la "[c]onstitution et [l']approvisionnement de comptes courants et de dépôts, [le] rapatriement ou [l']utilisation des avoirs en compte courant ou en dépôt auprès des établissements de crédit", auxquels correspond le poste IX de la nomenclature. Celui-ci comprend notamment les transactions de non-résidents auprès d'établissements de crédit nationaux et s'applique aux comptes et avoirs libellés en monnaie tant nationale qu'étrangère.

La réglementation nationale

19 La décision 1097 du comité monétaire, du 23 mai 1959, concernant l'application en Grèce du système de convertibilité limitée (FEK A' 109/16.6.1959) prévoyait, à la date des faits au principal, deux catégories de comptes de dépôt à la Banque de Grèce et dans les autres banques agréées qui pouvaient être ouverts au nom de personnes ayant leur résidence permanente à l'étranger, à savoir les comptes en drachmes grecques convertibles et les comptes en devises étrangères.

20 En vertu de cette décision, les comptes en drachmes grecques convertibles ne pouvaient être utilisés qu'à certaines fins et être alimentés que sous certaines formes limitativement énumérées. Ladite décision disposait que si des drachmes grecques étaient utilisées, sans une autorisation spéciale de la Banque de Grèce, dans un but autre que ceux visés, elles cesseraient d'être convertibles.

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

21 Par sa première question, l'Areios Pagos demande, en substance, si l'acquisition d'obligations libellées en monnaie nationale, d'un terme d'un an à compter de leur émission, négociées et cotées en Bourse, émises par une banque, établie dans un État membre et appartenant à cet État, est une "acquisition [...] de titres nationaux négociés en Bourse" au sens de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive ou un "investissement à court terme en bons du Trésor et en autres titres normalement traités sur le marché monétaire" au sens de la liste D, poste VI, de cette même annexe.

22 Il est constant entre les parties au principal que, aux fins de la première directive, Artesia est une banque "non-résidente", qui a acquis en Grèce les obligations en cause et qui a voulu rapatrier en Belgique le produit de leur liquidation. Il est tout aussi constant que ces obligations sont des "titres nationaux", libellés en monnaie nationale, d'un terme d'un an à compter de leur émission, qui ont été négociés ainsi que cotés en Bourse.

23 Artesia et la Commission des Communautés européennes font valoir que lesdites obligations relèvent de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive. En revanche, la Banque de Grèce et le gouvernement hellénique soutiennent qu'elles relèvent de la liste D, poste VI, de cette même annexe.

24 Le litige au principal a donc pour origine une différence d'interprétation des critères qui s'attachent aux obligations en cause. Ce litige porte sur l'interprétation des notions de "titres négociés en Bourse" et de "titres normalement traités sur le marché monétaire". Il vise également à déterminer si le terme des obligations en cause est un critère déterminant pour définir celles-ci. Selon la Banque de Grèce et le gouvernement hellénique, les obligations en question sont des "titres normalement traités sur le marché monétaire" au sens de l'annexe I, liste D, poste VI, de la première directive, indépendamment du fait qu'elles ont été négociées en Bourse.

25 Aux termes de l'article 67 du traité, la libre circulation des capitaux comporte la suppression des restrictions aux mouvements des capitaux appartenant à des personnes résidant dans les États membres, ainsi que des discriminations de traitement fondées sur la nationalité ou la résidence des parties ou sur la localisation du placement. La première directive prévoit, pour la mise en œuvre dudit article 67, la libéralisation complète de certains mouvements de capitaux et vise à entraîner l'élimination des obstacles administratifs qui, tout en n'imposant pas des autorisations de change et en n'affectant pas l'acquisition de titres étrangers, ne représentent pas moins une gène pour la libéralisation la plus étendue et la plus rapide des mouvements de capitaux entre les États membres que nécessite, selon le considérant de la première directive, la réalisation des objectifs de la Communauté européenne (voir arrêt du 24 juin 1986, Brugnoni et Ruffinengo, 157-85, Rec. p. 2013, points 21 et 22).

26 À cet égard, même si dans la liste D, poste VI, de ladite annexe figure la notion de "titres normalement traités sur le marché monétaire", la première directive ne prévoit aucune définition de cette notion. En revanche, cette directive se réfère à la notion de "titres négociés en Bourse", dans la liste B, poste IV A, de la même annexe, ainsi que dans ses notes explicatives, lesquelles en prévoient une définition. Selon ces notes, qui doivent être considérées comme des parties intégrantes de ladite directive (voir arrêt du 4 février 1988, East e.a., 143-86, Rec. p. 625, point 11), les "titres négociés en Bourse" sont "des titres qui font l'objet de transactions réglementées et dont les cours sont systématiquement publiés, soit par des organes boursiers officiels (titres cotés officiellement), soit par d'autres organes rattachées à la Bourse comme, par exemple, les commissions bancaires (titres non cotés officiellement)". Ainsi que le relève la Commission, cette définition signifie que le législateur communautaire a accordé une importance aux règles de fonctionnement de la Bourse, notamment sur la base des dispositions garantissant la transparence du fonctionnement boursier et la publication des prix des titres faisant l'objet de la négociation.

27 En ce qui concerne les "titres négociés en Bourse" visés à l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive, le législateur communautaire a estimé que les titres négociés dans un environnement réglementé, tel que la Bourse, peuvent, au sens de l'article 2 de la première directive, bénéficier d'une autorisation générale, accordée par l'État membre concerné, pour la conclusion ou l'exécution des transactions ainsi que pour les transferts entre résidents des États membres.

28 En revanche, le marché monétaire, mentionné à l'annexe I, liste D, poste VI, de la première directive, est moins réglementé que la Bourse. En effet, les transactions sur le marché monétaire sont habituellement conclues à la suite de négociations privées, dans un environnement qui est, par rapport à la Bourse, moins transparent. Cette affirmation est également corroborée par le fait que le caractère fondamental des "titres normalement traités sur le marché monétaire" est que leurs prix ne font pas l'objet d'une cotation publique, de sorte qu'il peut être nécessaire pour les autorités nationales d'évaluer leur valeur afin d'éviter toute fraude due à des prix fictifs. Tel n'est pas le cas, en revanche, des "titres négociés en Bourse" ainsi que l'avocat général l'a relevé au point 43 de ses conclusions.

29 Il ressort du dossier que les titres, mêmes s'ils ont été négociés en Bourse, ont été, en réalité, acquis auprès d'ETVA. Toutefois, cette circonstance, contrairement à ce qu'a fait valoir la Banque de Grèce à l'audience, ne modifie pas la nature des obligations en cause. En effet, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 40 de ses conclusions, la première directive ne prévoit pas que le lieu de la négociation des titres et celui de leur acquisition soient les mêmes. L'annexe I, liste B, de la première directive comprend l'"acquisition [...] de titres [...] négociés en Bourse" et il n'est pas nécessaire que l'acquisition des titres ait eu lieu en Bourse. Le critère décisif est qu'ils soient négociés dans ce cadre. Ainsi que l'a relevé également M. l'Avocat général audit point, cette interprétation est corroborée par l'analyse de toutes les versions linguistiques de la première directive.

30 Si le terme des titres peut être déterminant pour ceux qui relèvent de l'annexe I, liste D, de la première directive et qui sont, au sens de l'article 4 de cette directive, soumis à restriction, à savoir les "[i]nvestissements à court terme en bons du Trésor et en autres titres normalement traités sur le marché monétaire", tel n'est toutefois pas le cas des "titres négociés en Bourse". Ceux-ci ne sont visés que dans la liste B, poste IV A, de la même annexe, ainsi que dans les notes explicatives de la première directive. Ces dernières se réfèrent expressément audit poste IV et prévoient uniquement la nature de l'organisme qui émet les obligations, à savoir tant des "organismes privés que publics". Ce sont les directives 86-566-CEE du Conseil, du 17 novembre 1986, modifiant la première directive (JO L 332, p. 22), et 88-361-CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l'article 67 du traité (JO L 178, p. 5), qui prévoient une définition des obligations à court terme, lesquelles directives ne sont pas d'application rétroactive. Aussi ressort-il du libellé de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive que le législateur communautaire a voulu définir les "titres négociés en Bourse" selon des critères autres que leur terme.

31 Il ressort de ce qui précède que les obligations en cause sont des "titres négociés en Bourse" au sens de l'annexe I, liste B, poste IV A, et des notes explicatives de la première directive.

32 Dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire d'examiner si ces obligations remplissent simultanément les critères de la liste D, poste VI, de la même annexe. Même si tel était le cas, cela ne pourrait influer sur le fait que les mouvements de capitaux en cause bénéficient du régime libéralisé établi à l'article 2 de la première directive dans la mesure où ils remplissent les critères de l'annexe I, liste B, de la première directive. Aucune disposition de cette directive ne limite la libéralisation dont jouissent les mouvements de capitaux en vertu de l'article 2 de celle-ci du seul fait que les mêmes mouvements de capitaux remplissent aussi les critères de l'annexe I, liste D de ladite directive. La même conclusion résulte d'une interprétation de la première directive à la lumière de son objectif, énoncé à son unique considérant, comme nécessitant "une liberté aussi grande que possible des mouvements de capitaux entre les États membres, et, en conséquence, la libération la plus étendue et la plus rapide de ces mouvements de capitaux".

33 Il convient d'ajouter que le fait que les obligations dans l'affaire au principal soient des titres émis par une banque, société anonyme détenue par l'État, ne modifie pas leur nature. À cet égard, les notes explicatives annexées à la première directive précisent que ces obligations peuvent être émises tant par les organismes privés que publics, ainsi qu'il a été relevé au point 30 du présent arrêt.

34 Compte tenu de ce qui précède, il convient de répondre à la première question que les obligations libellées en monnaie nationale, d'un terme d'un an à compter de leur émission, négociées et cotées en Bourse, émises par une banque, établie dans un État membre et appartenant à cet État, relèvent de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive. Leur acquisition ainsi que le produit de leur liquidation sont régis par l'article 2 de cette directive, qui se réfère à l'annexe I, liste B, de la même directive, lequel prévoit le rapatriement dudit produit.

Sur la seconde question

35 Par sa seconde question, l'Areios Pagos demande, en substance, si l'utilisation, aux fins d'acquérir des obligations telles que celles visées par sa première question, d'avoirs en compte courant ou en dépôt auprès d'un établissement de crédit relève de l'annexe I, liste D, poste IX, de la première directive.

36 Les mouvements de capitaux doivent aux fins de la première directive nécessairement être considérés dans leur globalité et, dès lors que la destination d'un mouvement relève d'une des catégories libéralisées, l'origine d'un tel mouvement ne saurait en principe, eu égard aux considérations énoncées au point 32 du présent arrêt, influer sur ce classement. En outre, les acquisitions de titres relevant d'une des catégories libéralisées seraient sérieusement entravées si les États membres demeuraient libres de restreindre l'utilisation d'avoirs en compte courant ou en dépôt aux fins de telles acquisitions.

37 Il convient par conséquent de répondre à la seconde question que le fait qu'une acquisition d'obligations relevant de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive ait été financée au moyen d'avoirs en compte courant ou en dépôt auprès d'un établissement de crédit, même si relevant de la liste D, poste IX, de la même annexe, ne saurait influer sur le classement du mouvement de capitaux en cause dans la liste B, poste IV A, de ladite annexe.

Sur les dépens

38 La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.

Par ces motifs, LA COUR (première chambre) dit pour droit:

1) Les obligations libellées en monnaie nationale, d'un terme d'un an à compter de leur émission, négociées et cotées en Bourse, émises par une banque, établie dans un État membre et appartenant à cet État, relèvent de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive du Conseil, du 11 mai 1960, pour la mise en œuvre de l'article 67 du traité. Leur acquisition ainsi que le produit de leur liquidation sont régis par l'article 2 de cette directive, qui se réfère à l'annexe I, liste B, de la même directive, lequel prévoit le rapatriement dudit produit.

2) Le fait qu'une acquisition d'obligations relevant de l'annexe I, liste B, poste IV A, de la première directive ait été financée au moyen d'avoirs en compte courant ou en dépôt auprès d'un établissement de crédit, même si relevant de la liste D, poste IX, de la même annexe, ne saurait influer sur le classement du mouvement de capitaux en cause dans la liste B, poste IV A, de ladite annexe.