CA Bordeaux, 1re ch. B, 21 mai 2002, n° 00-02581
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Tremouille
Défendeur :
Legry
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Montamat
Conseillers :
M. Crabol, Mme Ellies-Thoumieux
Avoués :
SCP Touton-Pineau & Figerou, Me Fournier
Avocats :
Mes Joly-Vialard, Bureau, Perret
A la suite d'une annonce parue dans la presse locale, Léon Tremouille a vendu à Claude Legry une camionnette Citroën mise en circulation le 19 mars 1986 pour le prix de 18 000 F, suivant le certificat de cession du véhicule en date du 13 juin 1998 et la facture du 15 juin 1998 ; la révélation d'anomalies conduisait l'acquéreur à consulter son assureur qui mandatait l'expert André Schmitt dont le rapport concluait à une tromperie à l'égard de l'acheteur.
Saisi le 10 mai 1999 par l'acquéreur contre le vendeur d'une action en résolution de la vente pour vices cachés, avec restitution du prix et dommages et intérêts (20 000 F), le Tribunal d'instance de Sarlat, par jugement en date du 16 mars 2000 rendu sur le rapport de l'expert Charles Menant commis en référé, après avoir constaté l'existence de vices cachés rendant le véhicule impropre à la destination, a rejeté la demande en résolution mais a condamné le vendeur à restituer une partie du prix d'acquisition (5 131 F), avec dommages et intérêts (3 000 F) ; l'exécution provisoire a été ordonnée,
Dans ses dernières écritures signifiées le 28 septembre 2001 au soutien de son appel, Léon Tremouille, agriculteur et non pas garagiste, soutient l'absence de vices cachés au moment de la vente, au vu du procès-verbal de contrôle technique du Centre de Trelissac ne mentionnant que deux défauts (soufflets de cardan percés et dissymétrie de la suspension), pour conclure au débouté du demandeur avec indemnité de procédure (5 000 F).
L'intimé Claude Legry, retraité, arguant des 22 défauts révélés après la vente par le centre de contrôle technique de Champcevinel, conteste le caractère apparent de certains vices relevés par l'expert et insiste sur le caractère dangereux du vice indécelable du système de freinage admis par l'expert ; il demande donc la résolution de la vente, avec restitution du prix, des dommages et intérêts (20 000 F), la confirmation de l'indemnité de procédure allouée par le tribunal et une indemnité de procédure devant la cour (8 000 F).
Sur ce,
Attendu que l'option entre l'action estimatoire et l'action résolutoire fondée sur la garantie des vices cachés est ouverte par l'article 1644 du Code civil à l'acquéreur qui exerce son choix de façon discrétionnaire, sans que le juge ait à prendre en considération les interventions propres à remédier aux vices cachés;
Attendu en fait qu'il résulte du rapport de l'expert Menant que l'état actuel du système de freinage (fixation défectueuse de l'étrier avant gauche sur le pivot de la roue, flexibles craquelés, disques atteints d'une importante usure) constitue un vice caché qui rend le véhicule impropre à l'usage auquel il est destiné; que l'expert précise que le desserrage de l'étrier de frein sur le pivot de la roue présente un caractère incontestablement dangereux;
Attendu que le vice caché de la chose vendue la rend impropre à l'usage auquel on la destine, c'est à tort que le tribunal a rejeté l'action résolutoire dont il était saisi pour faire droit à une action estimatoire pour laquelle le demandeur n'avait pas opté;
Que le jugement doit être réformé en ce sens;
Attendu que la connaissance par le vendeur du vice caché n'est pas établie avec certitude, l'action en dommages et intérêts fondée sur l'article 1645 du Code civil ne peut qu'être rejetée contre Léon Tremouille qui n'est pas un professionnel de l'automobile;
Attendu que si l'appelant ne remplit pas les conditions définies à l'article 700 du nouveau Code de procédure civile pour bénéficier d'une indemnité de procédure, il serait en revanche inéquitable de laisser supporter à Claude Legry ses irrépétibles frais appréciés à la somme de 900 euro;
Attendu que la partie succombante doit supporter les dépens;
Par ces motifs, LA COUR, Réformant partiellement, Prononce la résolution de la vente du véhicule Citroën type C 15 immatriculé 7296 RN 24, Condamne Léon Tremouille à restituer à Claude Legry le prix de vente de deux mille sept cent quarante quatre euro (2 744 euro), Dit que Léon Tremouille devra reprendre le véhicule à ses frais, Confirme le jugement déféré du chef de l'indemnité de procédure et des dépens; Y ajoutant : Rejette la demande en dommages et intérêts contre Léon Tremouille, Condamne Léon Tremouille à payer à Claude Legry une indemnité de procédure devant la cour de neuf cent euro (900 euro), Condamne Léon Tremouille aux dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Fournier, avoué à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.