Cass. 1re civ., 4 mars 1997, n° 94-22.026
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Caisse Mutuelle d'Assurance et de Prévoyance
Défendeur :
Cauzette-Rey (ès qual.), Equip Press (Sté), Pressema (SARL), Charon frères et Cie (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Bouscharain
Avocat général :
M. Gaunet
Avocats :
SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, SCP Ryziger, Bouzidi, Mes Blondel, Roger
LA COUR : - Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses trois branches : - Attendu que la Caisse Mutuelle d'Assurance et de Prévoyance fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 octobre 1994), qui a prononcé, pour vices cachés, la résolution de la vente, par la société Equip Press à la société Pressema, d'un matériel professionnel fabriqué par la société Charon frères et Cie, de l'avoir condamnée, in solidum avec ce fabricant, à payer une indemnité réparatrice du préjudice matériel et commercial subi par l'acquéreur, alors que, d'une part, en décidant que l'absence d'indication par l'assureur de la date de prise d'effet du contrat d'assurance initial et de production de cette convention montrait que le vendeur était assuré lors de la vente litigieuse, mettant ainsi à la charge de l'assureur l'obligation d'établir, contre son assuré et contre la victime, l'existence d'un contrat valide lors du sinistre, la cour d'appel aurait inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du Code civil; alors, d'autre part, qu'en déclarant que la police versée aux débats, qui concernait une période postérieure au sinistre, ne couvrait pas la bonne exécution des contrats, mais garantissait les dommages provenant d'un vice propre du produit, comme l'énonçait l'article 22 de ses conditions générales contre stipulation expresse aux conditions particulières, ce qui était le cas en l'espèce, retenant ainsi d'office deux clauses non invoquées par les parties, sans, au préalable, les mettre à même d'en discuter contradictoirement, la cour d'appel aurait violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, enfin, que la décision judiciaire qui constate la responsabilité de l'assuré constitue, pour l'assureur, dans ses rapports avec la victime, la réalisation du risque couvert, tant dans son principe que dans son étendue ; que sa condamnation à l'égard de la victime ne peut donc excéder la somme due par l'assuré; qu'ayant fixé à 100 000 francs la créance de l'acquéreur sur la liquidation judiciaire du vendeur, tout en condamnant l'assureur à payer à la victime la somme de 150 000 francs, la cour d'appel aurait violé les articles L. 124-1 et L. 124-3 du Code des assurances ;
Mais attendu, d'abord, qu'ayant analysé les pièces produites aux débats et tiré les conséquences de l'attitude de la compagnie d'assurance qui ne produisait pas le contrat initial que la police communiquée remplaçait, la cour d'appel, par une appréciation souveraine et sans inverser la charge de la preuve, a estimé établi que la société Equip Press était assurée lors de la vente litigieuse; qu'ensuite, elle a, sans enfreindre le principe de la contradiction, tiré les conséquences des stipulations du contrat d'assurance produit aux débats pour écarter l'exception de non-garantie invoquée par l'assureur; qu'enfin, contrairement à ce que soutient le moyen, la fixation du montant de la créance de l'acquéreur en restitution de l'acompte par lui versé ne faisait pas obstacle à ce que l'acquéreur, qui avait fait fixer judiciairement le principe et l'étendue de la responsabilité du vendeur, puisse obtenir directement la condamnation de l'assureur à l'indemniser; d'où il suit que le moyen, qui est mal fondé en ses deux premières branches et manque en fait en sa troisième branche, ne sera pas accueilli ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident : - Attendu que la société Pressema fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que la société Charon ne saurait être tenue à lui rembourser l'acompte qu'elle avait elle-même versé à la société Equip Press, alors qu'ayant constaté qu'elle bénéficiait d'une action directe, tenant au vice caché de la chose, contre le fabricant, la cour d'appel, qui énonce que la société Charon, qui n'a pas été payée de la livraison de la marchandise, ne saurait être tenue à rembourser l'acompte versé à la société venderesse, ajoutant que la société Charon, fabricant, devait garantir, à concurrence de 100 000 francs, la fixation de sa créance dans le cadre de la liquidation judiciaire, contre restitution du matériel vendu, n'aurait pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et aurait violé les articles 1641 et suivants du Code civil ;
Mais attendu que l'action rédhibitoire exercée par l'acquéreur contre le vendeur originel étant celle de son auteur, ce dernier ne peut être tenu de restituer davantage qu'il n'a reçu; qu'ayant retenu que la société Charon, vendeur originel, n'avait pas été payée de la livraison du matériel par la société Equip Press, l'arrêt en a exactement déduit que cette société ne saurait être tenue de rembourser l'acompte versé par la société Pressema à son vendeur; qu'il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le pourvoi revêt un caractère abusif ;
Par ces motifs : Rejette les pourvois.