Cass. com., 28 mai 2002, n° 96-19.729
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Caisse de Crédit mutuel d'Ajaccio (SCCRL)
Défendeur :
Paquet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Tricot
Avocat général :
M. Feuillard
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Bachellier, Potier de la Varde
LA COUR : - Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches : - Attendu, selon l'arrêt déféré (Bastia, 18 juin 1996), qu'après le décès de son père, le 4 mars 1993, Mme Paquet a été désignée gérante de la société Boulangerie-Pâtisserie Les Salines (la société) le 15 avril 1993 ; que le 6 mai 1993, la Caisse de crédit mutuel d'Ajaccio (la Caisse) a fait souscrire à Mme Paquet un engagement de caution pour un montant de 350 000 francs ; que la société ayant déclaré, le 22 juillet 1993, la cessation de ses paiements, le redressement judiciaire de l'entreprise a été ouvert le 26 juillet 1993 ; que la banque ayant assigné Mme Paquet en exécution de son engagement, cette dernière, a demandé l'annulation du contrat de cautionnement ;
Attendu que la Caisse reproche à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de Mme Paquet alors, selon le moyen : 1°) que la réticence dolosive implique l'ignorance par la caution de l'information litigieuse ; que la cour d'appel, qui prononce la nullité du cautionnement sans constater qu'à l'époque de son engagement, Mme Paquet, en sa qualité de gérante de la société débitrice principale pour le compte courant de laquelle elle se portait caution, ignorait la situation de ce compte dont l'arrêt lui-même constate de surcroît qu'elle était établie par les relevés de mouvement de compte, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du Code civil ; 2°) qu'il résulte des constatations de l'arrêt, que la situation gravement obérée de la société ne sera connue qu'en juin 1993 soit postérieurement à l'engagement de la caution ; qu'en prononçant néanmoins la nullité de cet engagement sans constater que la banque ait elle-même connu ou pu connaître la situation financière de la société débitrice principale, et notamment son caractère gravement obéré, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1116 du Code civil ; 3°) qu'en toute hypothèse, la cour d'appel qui prononce la nullité du cautionnement en raison du défaut d'information de la caution sur la solvabilité du débiteur principal, sans rechercher si la caution s'était elle-même renseignée sur la solvabilité de la société débitrice principale dont elle était de surcroît gérante, a affecté son arrêt d'un manque de base légale au regard de l'article 2011 du Code civil ; 4°) qu'en exigeant que l'acte de caution soit précédé d'une information transparente et totale de la situation du débiteur principal, la cour d'appel, qui a ainsi ajouté une condition non prévue par la loi, a violé les dispositions combinées des articles 2011 et 1326 du Code civil ; 5°) que l'arrêt qui affirme que la cautionnement de Mme Paquet aurait remplacé celui de son père dont l'engagement a disparu à la suite de son décès a violé l'article 2017 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que, dès sa prise de fonction, Mme Paquet s'était rapprochée du comptable afin d'obtenir l'état de santé financière de la société qui ne lui avait été fourni que le 1er juin 1993 et relevé qu'à la date de l'engagement de la caution, le 6 mai 1993, la banque, qui était alors créancière de la société pour un montant de 325 000 francs, avait sciemment omis d'en informer la caution, la cour d'appel, qui a effectué la recherche évoquée aux première et troisième branches, a pu retenir, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par les deux dernières branches, que faute d'avoir transmis les informations dont elle disposait à la personne dont elle recherchait le cautionnement, la banque avait reçu de Mme Paquet un consentement entaché de dol ; que la cour d'appel ayant, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision, le moyen, irrecevable en sa deuxième branche, et mal fondé en ses première et troisième branches, ne peut être accueilli pour le surplus ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.