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Décisions

CJCE, 6e ch., 20 novembre 2003, n° C-340/01

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Abler e.a.

Défendeur :

Sodexho MM Catering Gesellschaft mbH , Sanrest Großküchen Betriebsgesellschaft mbH

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gulmann

Avocat général :

M. Geelhoed

Juges :

Mmes Macken, Colneric

Avocats :

Mes Schneider, Loibner, Walchshofer

CJCE n° C-340/01

20 novembre 2003

LA COUR (sixième chambre),

1 Par ordonnance du 25 juin 2001, parvenue au greffe de la Cour le 10 septembre suivant, l'Oberster Gerichtshof a posé, en vertu de l'article 234 CE, une question préjudicielle sur l'interprétation de l'article 1er de la directive 77-187-CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements (JO L 61, p. 26).

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'un litige opposant Sodexho MM Catering Gesellschaft mbH (ci-après "Sodexho"), société de restauration collective, chargée par contrat de la gestion de la restauration collective au sein d'un hôpital, à M. Abler, aide-cuisinier, et à 21 autres salariés du secteur de la restauration (ci-après "M. Abler e.a."), soutenus par leur ancien employeur Sanrest Großküchen Betriebsgesellschaft mbH (ci-après "Sanrest"), société de restauration collective chargée, immédiatement avant, des mêmes prestations en vertu d'un contrat antérieur qui a été résilié. Ces salariés ont saisi l'Arbeits- und Sozialgericht Wien (Tribunal du droit du travail et du droit social de Vienne) (Autriche) d'un recours dirigé contre Sodexho, afin de voir constater que la relation de travail s'est poursuivie avec Sodexho sur le fondement de l'Arbeitsvertragsrechts-Anpassungsgesetz (loi portant adaptation de la législation en matière de contrats de travail, BGBl. 459-1993), modifié (ci-après l'"AVRAG"), qui a transposé la directive 77-187 en droit autrichien.

Le cadre juridique

Le droit communautaire

3 Aux termes de son article 1er, paragraphe 1, la directive 77-187 "est applicable aux transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements à un autre chef d'entreprise, résultant d'une cession conventionnelle ou d'une fusion".

4 L'article 3, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 77-187 dispose:

"Les droits et obligations qui résultent pour le cédant d'un contrat de travail ou d'une relation de travail existant à la date du transfert au sens de l'article 1er paragraphe 1 sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire."

5 La directive 98-50-CE du Conseil, du 29 juin 1998, modifiant la directive 77-187 (JO L 201, p. 88), dont le délai de mise en œuvre expirait le 17 juillet 2001, a été transposée en droit autrichien en 2001, postérieurement au litige au principal, et n'est donc pas applicable.

Le droit national

6 L'article 3 de l'AVRAG, intitulé "Transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements à un autre chef d'entreprise", dispose, à son paragraphe 1:

"Lorsqu'une entreprise, un établissement ou une partie d'établissement est transférée à un autre chef d'entreprise (transfert d'établissement), celui-ci acquiert la qualité d'employeur et est subrogé dans tous les droits et obligations découlant des relations de travail existant à la date du transfert."

Le litige au principal

7 Le 2 novembre 1990, l'institution gestionnaire de l'hôpital orthopédique Wien-Speising (ci-après l'"institution gestionnaire") a conclu un accord avec Sanrest, en vertu duquel cette dernière prenait en charge la gestion complète de la restauration au sein de l'hôpital, en fournissant aux patients et au personnel les repas et les boissons. Les prestations exceptionnelles devaient être rémunérées séparément.

8 Les repas devaient être préparés dans les locaux de l'hôpital. Les obligations de Sanrest comprenaient notamment l'établissement des menus, l'achat, le stockage, la production, la préparation des portions et leur transport dans les différents services de l'hôpital (à l'exclusion toutefois de leur distribution aux patients), le service des repas dans le réfectoire du personnel, ainsi que la vaisselle et le nettoyage des locaux utilisés.

9 Les locaux eux-mêmes ainsi que l'eau, l'énergie et les petits et gros équipements indispensables étaient mis à la disposition de Sanrest par l'institution gestionnaire. Sanrest était responsable d'éventuelles détériorations de ces équipements.

10 En outre, Sanrest assurait l'exploitation de la cafétéria, également située dans l'hôpital.

11 Par ailleurs, jusqu'à l'été 1998, Sanrest approvisionnait des clients externes en plats préparés dans la cuisine de l'hôpital, notamment le Kindergarten St. Josef, un jardin d'enfants situé tout près de l'hôpital.

12 Au milieu de l'année 1998, des désaccords sont apparus entre l'institution gestionnaire et Sanrest et ont conduit à un refus de cette dernière de fournir les prestations prévues au contrat pendant deux mois. Au cours de cette période, Sodexho a assuré le service de restauration au sein de l'hôpital à partir de ses autres lieux d'activité.

13 Par lettre du 26 avril 1999, l'institution gestionnaire a résilié le contrat qui la liait à Sanrest en respectant le préavis de six mois prévu par ledit contrat.

14 Par lettre du 25 octobre 1999, l'institution gestionnaire a informé Sanrest, qui avait répondu au nouvel appel d'offres, que le marché ne lui serait pas attribué, ce dernier étant confié à Sodexho à partir du 16 novembre 1999.

15 Sanrest a alors soutenu qu'il s'agissait d'un transfert d'établissement. Toutefois, Sodexho ayant refusé de reprendre le petit matériel mobile, le stock ainsi que les salariés de Sanrest, celle-ci a réduit les stocks de façon à ce qu'il ne reste rien après le 15 novembre 1999. Il ressort également de l'ordonnance de renvoi que Sodexho n'a reçu de Sanrest ni calcul des coûts, ni menus, ni régimes, ni recettes, ni rapports sur l'expérience acquise.

16 Outre le service de restauration pour l'hôpital, Sodexho a repris, en ce qui concerne les autres activités de la société Sanrest, six à dix menus pour le Kindergarten St. Josef.

17 Par lettre du 5 novembre 1999, Sanrest a résilié les contrats de travail de ses salariés, avec effet au 19 novembre 1999.

18 M. Abler e.a. ont alors saisi l'Arbeits- und Sozialgericht Wien d'un recours dirigé contre Sodexho afin de voir constater que leur relation de travail s'était poursuivie avec cette dernière sur le fondement des dispositions de l'AVRAG relatives aux transferts d'établissements.

19 Sodexho a soutenu qu'il n'y avait pas eu transfert d'établissement dès lors qu'elle avait refusé de reprendre ne fût-ce qu'un salarié de Sanrest. Elle a ajouté qu'il n'y avait pas de lien contractuel entre les deux sociétés.

20 En première instance, l'Arbeits- und Sozialgericht a rejeté la demande de M. Abler e.a. Il a jugé que, si l'absence de lien conventionnel entre Sanrest et Sodexho ne revêtait pas une importance déterminante et que seul était décisif le changement, dans le cadre de relations contractuelles, de la personne responsable de l'exploitation, il n'y avait pas en l'espèce, transfert d'une entité économique organisée de manière stable, entendue comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments permettant l'exercice d'une activité économique poursuivant un objectif propre caractérisant la notion de transfert au sens de l'AVRAG. Selon lui, le fait que les prestations fournies par Sanrest et Sodexho fussent similaires n'était pas suffisant.

21 L'Arbeits- und Sozialgericht a constaté que Sodexho n'avait repris que l'activité de Sanrest consistant à faire la cuisine pour l'hôpital dans des locaux mis à sa disposition. Il a considéré que les éléments d'un transfert d'entreprise n'étaient pas réunis car il n'y avait pas eu transfert de cadres, de l'organisation du travail, des recettes ou des prescriptions diététiques, ni même transfert de clients.

22 En appel, l'Oberlandesgericht Wien (Autriche) a pris une position contraire. Il a estimé que ce n'est pas la nature de la cession de l'exploitation qui est décisive, mais plutôt le changement de la personne responsable du devenir de l'exploitation.

23 L'Oberlandesgericht a considéré, au vu de la jurisprudence de la Cour, qu'il y avait en l'espèce transfert d'établissement, puisque avait été transposée une entité économique conservant son identité et caractérisée par l'exercice de l'activité ainsi que par les éléments et les locaux nécessaires à l'exploitation mis à disposition. Le transfert du personnel était, selon lui, une conséquence et non une condition du transfert d'établissement.

24 Sodexho a alors introduit un recours en "Revision" devant l'Oberster Gerichtshof en faisant valoir qu'elle n'avait racheté à la société Sanrest aucun élément d'exploitation corporel ou incorporel tel que les stocks, les menus, les régimes, les recettes, les calculs de coûts ou les comptes rendus relatifs à l'expérience acquise, ni même repris ne fût-ce qu'une partie du personnel de cette dernière.

25 Selon Sodexho, le fait, pour un nouvel adjudicataire, de ne reprendre que les locaux et équipements ne signifie pas reprendre une entité de travail organisée au sens d'un transfert d'établissement.

26 C'est dans ces conditions que l'Oberster Gerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

"Y a-t-il transfert d'une partie d'établissement au sens de l'article 1er de la directive 77-187-CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements, lorsque l'institution gestionnaire d'un hôpital, qui a chargé jusque-là une entreprise de restauration collective de fournir aux patients et au personnel de l'hôpital les repas et boissons à un prix fixé sur la base d'un jour de nourriture par personne, en mettant à sa disposition, à cette fin, l'eau et l'énergie ainsi que ses locaux (cuisine de l'entreprise) et les équipements nécessaires, transfère, après avoir résilié ce contrat, ces tâches et les éléments d'exploitation mis jusqu'alors à la disposition de cette première entreprise à une autre entreprise de restauration collective, sans que cette dernière reprenne les éléments d'exploitation - personnel, stocks, documents afférents aux calculs de coûts, aux menus, aux régimes, aux recettes ou à l'expérience acquise - apportés par la première entreprise elle-même ?"

Sur la question préjudicielle

27 Par sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 1er de la directive 77-187 doit être interprété en ce sens que cette dernière s'applique à une situation dans laquelle un donneur d'ordre, qui avait confié par contrat la gestion complète de la restauration collective d'un hôpital à un premier entrepreneur, met fin à ce contrat et conclut, en vue de l'exécution de la même prestation, un nouveau contrat avec un second entrepreneur, lorsque le second entrepreneur, d'une part, utilise d'importants éléments d'actifs corporels précédemment utilisés par le premier entrepreneur et mis successivement à leur disposition par le donneur d'ordre et, d'autre part, refuse de reprendre les salariés du premier entrepreneur.

28 Aux termes de son article 1er, paragraphe 1, la directive 77-187 est applicable aux transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements à un autre chef d'entreprise, résultant d'une cession conventionnelle ou d'une fusion.

29 La directive 77-187 vise à assurer la continuité des relations de travail existant dans le cadre d'une entité économique, indépendamment d'un changement du propriétaire. Le critère décisif pour établir l'existence d'un transfert au sens de cette directive est donc de savoir si l'entité en question garde son identité, ce qui résulte notamment de la poursuite effective de l'exploitation ou de sa reprise (voir, notamment, arrêts du 18 mars 1986, Spijkers, 24-85, Rec. p. 1119, points 11 et 12, et du 11 mars 1997, Süzen, C-13-95, Rec. p. I-1259, point 10).

30 Pour que la directive 77-187 soit applicable, le transfert doit cependant porter sur une entité économique organisée de manière stable, dont l'activité ne se borne pas à l'exécution d'un ouvrage déterminé (voir, notamment, arrêt du 19 septembre 1995, Rygaard, C-48-94, Rec. p. I-2745, point 20). La notion d'entité renvoie ainsi à un ensemble organisé de personnes et d'éléments permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre (voir, notamment, arrêt Süzen, précité, point 13).

31 Sodexho soutient, tout d'abord, que l'absence totale de reprise du personnel de Sanrest par elle-même exclut tout transfert d'une entité économique maintenant son identité au sens de la directive 77-187.

32 Elle fonde son raisonnement sur les arrêts dans lesquels la Cour a relevé que, dans certains secteurs dans lesquels l'activité repose essentiellement sur la main d'œuvre, une collectivité de travailleurs que réunit durablement une activité commune peut correspondre à une entité économique. Il ressortirait de cette jurisprudence qu'une telle entité est alors susceptible de maintenir son identité par-delà son transfert quand le nouveau chef d'entreprise ne se contente pas de poursuivre l'activité en cause, mais reprend également une partie essentielle, en termes de nombre et de compétences, des effectifs que son prédécesseur affectait spécialement à cette tâche (voir, notamment, arrêts Süzen, précité, point 21, et du 10 décembre 1998, Hidalgo e.a., C-173-96 et C-247-96, Rec. p. I-8237, point 32).

33 Pour déterminer si les conditions d'un transfert d'une entité économique organisée de manière stable sont remplies, il y a lieu de prendre en considération l'ensemble des circonstances de fait qui caractérisent l'opération en cause, au nombre desquelles figurent notamment le type d'entreprise ou d'établissement dont il s'agit, le transfert ou non d'éléments corporels, tels que les bâtiments et les biens mobiliers, la valeur des éléments incorporels au moment du transfert, la reprise ou non de l'essentiel des effectifs par le nouveau chef d'entreprise, le transfert ou non de la clientèle, ainsi que le degré de similarité des activités exercées avant et après le transfert et la durée d'une éventuelle suspension de ces activités (arrêts précités Spijkers, point 13, et Süzen, point 14).

34 Ces éléments ne constituent toutefois que des aspects partiels de l'évaluation d'ensemble qui s'impose et ne sauraient, de ce fait, être appréciés isolément (voir, notamment, arrêts précités Spijkers, point 13, et Süzen, point 14).

35 Le juge national, dans son appréciation des circonstances de fait qui caractérisent l'opération en cause, doit tenir compte du type d'entreprise ou d'établissement dont il s'agit. Il en résulte que l'importance respective à accorder aux différents critères de l'existence d'un transfert au sens de la directive 77-187 varie nécessairement en fonction de l'activité exercée, voire des méthodes de production ou d'exploitation utilisées dans l'entreprise, dans l'établissement ou dans la partie d'établissement en cause (arrêts précités Süzen, point 18, et Hidalgo e.a., point 31).

36 Or, la restauration collective ne peut être considérée comme une activité reposant essentiellement sur la main-d'œuvre dans la mesure où elle exige des équipements importants. Dans l'affaire au principal, ainsi que le relève la Commission, les éléments corporels indispensables pour l'activité visée - à savoir les locaux, l'eau et l'énergie ainsi que les petits et gros équipements (notamment les matériels fixes nécessaires à la confection des repas et les machines à laver) - ont été repris par Sodexho. De plus, la situation en cause au principal se caractérise par l'obligation, explicite et essentielle, de préparer les repas dans la cuisine de l'hôpital et donc de reprendre ces éléments corporels. Le transfert des locaux et des équipements mis à disposition par l'hôpital, qui apparaît indispensable à la préparation et à la distribution des repas aux patients et au personnel de l'hôpital, suffit à caractériser, dans ces conditions, le transfert de l'entité économique. Il est en outre évident que le nouvel adjudicataire a nécessairement repris l'essentiel de la clientèle de son prédécesseur, du fait du caractère captif de celle-ci.

37 Il en résulte que l'absence de reprise, par le nouvel entrepreneur, d'une partie essentielle, en termes de nombre et de compétences, des effectifs que son prédécesseur affectait à l'exécution de la même activité, ne suffit pas à exclure l'existence d'un transfert d'une entité maintenant son identité au sens de la directive 77-187 dans un secteur tel que la restauration collective, où l'activité repose essentiellement sur les équipements. Ainsi que le relèvent à juste titre le Royaume-Uni et la Commission, un raisonnement contraire irait à l'encontre de l'objet principal de la directive 77-187, qui est de maintenir, même contre la volonté du cessionnaire, les contrats de travail des salariés du cédant.

38 Sodexho soutient, ensuite, qu'il n'existe pas de lien contractuel entre Sanrest et elle-même.

39 Mais, ainsi qu'il a été jugé à de nombreuses reprises, la directive 77-187 est applicable dans toutes les hypothèses de changement, dans le cadre de relations contractuelles, de la personne physique ou morale responsable de l'exploitation de l'entreprise, qui contracte les obligations d'employeur vis-à-vis des employés de l'entreprise. Ainsi, pour que la directive 77-187 s'applique, il n'est pas nécessaire qu'il existe des relations contractuelles directes entre le cédant et le cessionnaire, la cession pouvant s'effectuer par l'intermédiaire d'un tiers, comme le propriétaire ou le bailleur (voir, notamment, arrêts du 7 mars 1996, Merckx et Neuhuys, C-171-94 et C-172-94, Rec. p. I-1253, points 28 à 30; Süzen, précité, point 12, et du 24 janvier 2002, Temco, C-51-00, Rec. p. I-969, point 31).

40 Enfin, Sodexho fait valoir que la circonstance que l'institution gestionnaire reste propriétaire du local de travail et des équipements nécessaires à la poursuite de l'activité s'oppose à ce qu'un simple changement d'adjudicataire puisse être regardé comme un transfert d'entité économique.

41 Il ressort, cependant, des termes mêmes de l'article 1er de la directive 77-187 que le champ d'application de cette dernière couvre toutes les hypothèses de changement, dans le cadre de relations contractuelles, de la personne physique ou morale responsable de l'exploitation de l'entreprise et qui, de ce fait, contracte les obligations d'employeur vis-à-vis des employés de l'entreprise, sans qu'il importe de savoir si la propriété des éléments corporels est transférée (arrêts du 17 décembre 1987, Ny Molle Kro, 287-86, Rec. p. 5465, point 12, et du 12 novembre 1992, Watson Rask et Christensen, C-209-91, Rec. p. I-5755, point 15).

42 La circonstance que les éléments corporels repris par le nouvel entrepreneur n'appartenaient pas à son prédécesseur mais étaient mis à disposition par le donneur d'ordre ne peut donc conduire à exclure l'existence d'un transfert d'entreprise au sens de la directive 77-187.

43 Il y a donc lieu de répondre à la question de la juridiction de renvoi que l'article 1er de la directive 77-187 doit être interprété en ce sens que cette dernière s'applique à une situation dans laquelle un donneur d'ordre, qui avait confié par contrat la gestion complète de la restauration collective au sein d'un hôpital à un premier entrepreneur, met fin à ce contrat et conclut, en vue de l'exécution de la même prestation, un nouveau contrat avec un second entrepreneur, lorsque le second entrepreneur utilise d'importants éléments d'actifs corporels précédemment utilisés par le premier entrepreneur et mis successivement à leur disposition par le donneur d'ordre, quand bien même le second entrepreneur aurait émis l'intention de ne pas reprendre les salariés du premier entrepreneur.

Sur les dépens

44 Les frais exposés par le Gouvernement du Royaume-Uni et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre)

statuant sur la question à elle soumise par l'Oberster Gerichtshof, par ordonnance du 25 juin 2001, dit pour droit:

L'article 1er de la directive 77-187-CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements, doit être interprété en ce sens que cette dernière s'applique à une situation dans laquelle un donneur d'ordre, qui avait confié par contrat la gestion complète de la restauration collective au sein d'un hôpital à un premier entrepreneur, met fin à ce contrat et conclut, en vue de l'exécution de la même prestation, un nouveau contrat avec un second entrepreneur, lorsque le second entrepreneur utilise d'importants éléments d'actifs corporels précédemment utilisés par le premier entrepreneur et mis successivement à leur disposition par le donneur d'ordre, quand bien même le second entrepreneur aurait émis l'intention de ne pas reprendre les salariés du premier entrepreneur.