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Décisions

CUE, 17 décembre 1999, n° 2722-1999

CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE

Règlement

Instituant un droit antidumping définitif sur les importations de furfural originaire de la République populaire de Chine

CUE n° 2722-1999

17 décembre 1999

LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement (CE) n° 384-96 du Conseil du 22 décembre 1995 relatif à la défense contre les importations qui font l'objet d'un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (1), et notamment son article 9, vu la proposition présentée par la Commission après consultation du comité consultatif, considérant ce qui suit:

A. PROCÉDURE

1. Enquête précédente

(1) En janvier 1995, le Conseil a, par le règlement (CE) n° 95-95 (2), institué un droit antidumping définitif sur les importations de furfural originaire de la République populaire de Chine (ci-après dénommée "RPC"). Le taux du droit applicable était de 352 écus par tonne.

2. Demande de réexamen

(2) Le 5 juillet 1996, un exportateur chinois, China National Chemical Import and Export Corp. (ci-après dénommé "Sinochem"), a déposé une demande de réexamen intermédiaire des mesures, conformément à l'article 11, paragraphe 3, du règlement (CE) n° 384-96 (ci-après dénommé "règlement de base"). La demande de réexamen faisait valoir que le maintien d'un droit antidumping n'était plus nécessaire pour contrebalancer le dumping, car les prix des importations en provenance de la RPC avaient augmenté; que le volume des exportations de Sinochem vers la Communauté était faible et que la structure de l'industrie communautaire avait considérablement changé, puisqu'elle comptait un nouveau producteur depuis l'adhésion de l'Autriche, ce qui avait amélioré sa situation générale.

Compte tenu de ce qui précède, la Commission a jugé qu'il existait suffisamment d'éléments de preuve pour l'ouverture d'un réexamen intermédiaire portant sur le dumping, le préjudice et l'intérêt de la Communauté.

(3) En mai 1997, la Commission a donc annoncé par un avis publié au Journal officiel des Communautés européennes (3) (ci-après dénommé "avis d'ouverture") l'ouverture d'un réexamen intermédiaire concernant les mesures applicables aux importations de furfural originaire de la RPC et a entamé une enquête.

3. Présente enquête

(4) La Commission en a officiellement informé les producteurs dans la Communauté, les producteurs-exportateurs, les importateurs, les industries utilisatrices notoirement concernées, leurs associations représentatives et les représentants du pays exportateur. Toutes les parties directement concernées ont eu la possibilité de faire connaître leur point de vue par écrit et de demander à être entendues dans le délai fixé dans l'avis d'ouverture.

(5) La Commission a recherché et vérifié toutes les informations qu'elle jugeait nécessaires aux fins d'une détermination du dumping et de l'analyse de la situation de l'industrie communautaire et a procédé à des visites de vérification auprès des sociétés suivantes:

a) Producteurs communautaires

- Furfural Español, Espagne

- Lenzing AG, Autriche

b) Industrie utilisatrice

- Repsol Petroleo, Espagne

(6) L'enquête relative au dumping a couvert la période comprise entre le 1er mai 1996 et le 30 avril 1997 (ci-après dénommée "période d'enquête"). L'analyse de la situation de l'industrie communautaire a porté sur la période allant du 1er janvier 1994 au 30 avril 1997.

(7) Compte tenu des nombreuses difficultés rencontrées pour établir des déterminations dans le cadre de la présente enquête, notamment le fait que, simultanément une procédure était pendante devant le Tribunal de première instance pour clarifier, entre autres, la définition du produit concerné, l'enquête a sensiblement dépassé la période de douze mois recommandée pour les enquêtes à l'article 11, paragraphe 5, du règlement de base.

B. PRODUIT CONSIDÉRÉ ET PRODUIT SIMILAIRE

1. Produit considéré

(8) Le produit considéré est le furfural (également connu sous le nom de "2-furaldéhyde" ou "furfurol"), un liquide jaune clair présentant une odeur piquante caractéristique, qui est obtenu par traitement de divers types de déchets agricoles. Le furfural a deux applications principales: il est utilisé comme solvant sélectif dans le raffinage du pétrole en vue de la production d'huiles lubrifiantes et comme matière première de l'alcool furfurylique, utilisé pour fabriquer de la résine synthétique pour les moules de fonderie.

L'enquête a montré que le produit exporté par la RPC est obtenu essentiellement à partir de balles de riz ou de rafles de maïs.

2. Produits similaires

(9) Sinochem a réitéré l'argument déjà présenté au tribunal de première instance(4) selon lequel le furfural importé de la RPC et celui fabriqué par l'industrie communautaire ne sont pas des produits similaires, puisque leurs applications sont différentes et correspondent donc à deux marchés distincts.

Il a été allégué qu'un producteur communautaire est le principal fournisseur de furfural destiné au raffinage de pétrole, tandis que le produit chinois est vendu comme matière première en vue de la production d'alcool furfurylique, si bien que l'industrie communautaire n'a pas pu subir de préjudice, puisque producteurs chinois et communautaires ne sont pas en concurrence sur le même marché.

(10) Le furfural produit dans la Communauté et celui produit en RPC présentent les mêmes caractéristiques physiques et les mêmes spécifications et ne sont pas destinés exclusivement à une application donnée. Cela signifie que, conformément à l'arrêt rendu par le Tribunal de première instance le 29 janvier 1998, ils sont interchangeables en ce qui concerne leurs applications. L'argument a donc été rejeté et il a été conclu que le furfural produit en RPC et celui produit et vendu par les producteurs communautaires sont des produits similaires au sens de l'article 1er, paragraphe 4, du règlement de base.

C. DUMPING

(11) Sinochem, le seul producteur-exportateur chinois à avoir coopéré a demandé l'ouverture d'une enquête de réexamen, faisant valoir que les circonstances qui ont donné lieu à l'adoption des mesures antidumping ont sensiblement changé depuis l'enquête initiale.

(12) Il convient de noter que la RPC était considérée comme un pays n'ayant pas une économie de marché au moment de l'enquête initiale, si bien que pour établir le changement de circonstances, il faudrait prouver que le prix de la totalité, ou du moins d'un volume représentatif, du produit concerné exporté par la RPC correspond à un niveau de dumping différent. Par conséquent, pour permettre l'évaluation des changements présumés de circonstances, il faudrait pouvoir procéder à une analyse du volume total, ou du moins d'un volume représentatif, des exportations en provenance de la RPC.

(13) Sur la base des données Eurostat disponibles, il a toutefois été constaté dans ce cas que les exportations du produit concerné déclarées par Sinochem ne représentent qu'une proportion mineure du total des exportations chinoises effectuées pendant la période d'enquête. Il y a également lieu de noter qu'il n'a pas été possible d'établir le volume total réel des exportations chinoises, car certains éléments laissent à penser que les statistiques d'Eurostat susmentionnées concernant les importations en provenance de la RPC pendant la période d'enquête seraient incomplètes.

(14) Premièrement, les importations en provenance de Thaïlande, pays tiers non concerné par la présente enquête, ont augmenté de manière spectaculaire après l'institution des mesures antidumping à l'encontre des importations en provenance de la RPC. Pour la même période, les statistiques d'exportations chinoises montrent que les exportations de la RPC à destination de la Thaïlande ont suivi une tendance similaire. Ces éléments sont particulièrement significatifs en l'espèce, car il ressort des informations disponibles que la Thaïlande ne possède pas de nouvelles capacités de production susceptibles d'expliquer une telle hausse des exportations et que, de toute manière, les capacités existantes dans ce pays ne permettent pas de produire le volume déclaré exporté vers la Communauté pendant la période d'enquête.

(15) Deuxièmement, il ressort de certains éléments communiqués à la Commission que l'origine thaïlandaise déclarée à l'importation du produit concerné dans la Communauté pendant la période d'enquête est susceptible d'être inexacte. Il y a des raisons de croire qu'une proportion considérable des produits déclarés d'origine thaïlandaise sont en réalité d'origine chinoise. Dans ces circonstances, les services de la Commission considèrent que le niveau des importations dans la Communauté du produit considéré originaire de Chine rapporté par Eurostat est nettement inférieur à la réalité, avec pour conséquence que, la part du produit de Sinochem dans les importations en provenance de la RPC étant moindre, le véritable niveau de non-coopération a été sous-estimé.

(16) En l'absence d'autres données fiables et conformément à l'article 18 du règlement de base, les conclusions relatives au dumping ont été fondées sur les meilleures informations disponibles. Compte tenu de la situation, il a été considéré que les données d'Eurostat concernant les importations chinoises ne pouvaient pas être utilisées, puisque, selon toute vraisemblance, elles étaient incomplètes. Ces données n'ont donc pas été prises en considération aux fins de l'établissement d'une marge de dumping pour la RPC. Il a également été impossible d'utiliser les informations communiquées par Sinochem afin d'établir une marge de dumping nationale pour la RPC, la représentativité des importations en question n'ayant pas pu être déterminée. Par conséquent, il a été considéré que la meilleure information disponible aux fins de la présente enquête était la marge de dumping établie dans le cadre de l'enquête précédente.

(17) En ce qui concerne la marge de dumping, il a donc été conclu que les conclusions de l'enquête n'étayent pas les allégations selon lesquelles les circonstances auraient sensiblement changé depuis l'enquête initiale.

(18) Toutes les parties intéressées ont été pleinement informées des conclusions définitives et ont eu la possibilité de présenter leur point de vue par écrit et d'être entendues. Aucune n'a communiqué de nouvelles informations ni avancé de nouveaux arguments fondés susceptibles de modifier les conclusions exposées plus haut.

(19) La marge de dumping établie pour la RPC dans le cadre de la présente enquête s'élève donc à 62,6 %.

D. PRÉJUDICE

1. Industrie communautaire

(20) Lors de l'enquête précédente, l'industrie communautaire était constituée d'un seul producteur. Elle en compte un de plus depuis l'adhésion des trois nouveaux États membres en 1995. Pour assurer la cohérence de la comparaison et dégager des tendances significatives, les données ci-dessous intègrent les informations relatives au deuxième producteur communautaire depuis 1994.

Dans le cadre de la présente enquête de réexamen, la Commission a demandé des informations aux deux producteurs de la Communauté et les a obtenues. Ces deux producteurs représentent la totalité de la production communautaire et constituent l'industrie communautaire au sens de l'article 4, paragraphe 1 et de l'article 5, paragraphe 4, du règlement de base.

2. Remarque préliminaire

(21) Comme dans le cas du dumping, l'enquête a cherché à établir si les circonstances concernant la situation de l'industrie communautaire ont changé au point de justifier une conclusion autre que celle de l'enquête provisoire.

3. Analyse de la situation du marché communautaire

3.1. Consommation communautaire

(22) L'évolution de la consommation communautaire apparente, à savoir les ventes de l'industrie communautaire sur le marché de la Communauté augmentées des importations en provenance de tous les pays tiers enregistrées par Eurostat, démontre que la consommation communautaire de furfural a augmenté, passant de 35442 tonnes en 1994 à 46474 tonnes en 1995 pour culminer à 49694 tonnes en 1996, avant de retomber à 40127 tonnes pendant la période d'enquête, ce qui représente, dans l'ensemble, une hausse de 13,2 % entre 1994 et la période d'enquête.

3.2. Volume et prix des importations dans la Communauté

(23) En ce qui concerne le volume et les prix des importations, l'enquête s'est, dans un premier temps, fondée sur les données d'Eurostat. Toutefois, comme il est fortement soupçonné, pour les raisons exposées plus haut, que ces statistiques sont incomplètes, il a été conclu que les données d'Eurostat pouvaient uniquement donner une indication générale de la tendance suivie par les importations en question.

(24) Le volume des importations du produit concerné en provenance de la RPC a d'abord diminué, passant de 1933 tonnes en 1994 à 413 tonnes en 1995, pour ensuite augmenter sensiblement atteignant 5 650 tonnes en 1996 et se maintenir à 5 285 tonnes, pendant la période d'enquête. L'enquête a révélé que le volume exceptionnellement bas des importations en 1995 s'explique par une pénurie de déchets agricoles appropriés en RPC causée par une récolte particulièrement mauvaise cette année-là.

Selon Eurostat, les importations en provenance de la RPC représentaient au moins 15 % du total des importations pendant la période d'enquête et ont augmenté de 173 % sur la période considérée.

(25) La demande de réexamen faisait valoir que les importations en provenance de la RPC avaient diminué régulièrement entre 1994 et 1995 et que l'industrie communautaire ne subissait donc plus de préjudice. L'enquête a toutefois révélé que, si elles ont diminué, passant de 1933 tonnes en 1994 à 413 tonnes en 1995, elles ont ensuite augmenté de manière significative entre 1993 et la période d'enquête pour atteindre 5 285 tonnes. Cette tendance à la hausse s'est maintenue après la période d'enquête. Compte tenu des allégations de la demande de réexamen concernant le niveau des importations, la Commission a examiné les données relatives au volume importé après la période d'enquête. À cet égard, il est observé qu'en 1998, le volume des importations considérées atteignait 10502 tonnes, soit pratiquement le double du volume enregistré importé pendant la période d'enquête.

(26) La part de marché des importations en provenance de la RPC a suivi la même tendance à la hausse sur la période considérée: de 5,5 % en 1994, elle est passée à 0,9 % en 1995, à 11,4 % en 1996 et à 13,2 % pendant la période d'enquête, un niveau similaire à celui de 1992 établi par l'enquête précédente. Compte tenu de ce qui précède, il est conclu que, contrairement à ce que Sinochem affirme dans sa demande de réexamen, le produit considéré originaire de la RPC n'est pas importé en faibles quantités.

(27) Quant à leurs prix caf frontière communautaire, en écu/tonne, ils ont augmenté, passant, selon Eurostat, de 500 en 1994 à 1300 en 1995 avant de retomber à 946 en 1996 et de diminuer encore pour atteindre 919 pendant la période d'enquête. Si les prix des exportations chinoises ont progressé de 83 % sur la période considérée, cette hausse a été moins marquée que celle des prix des producteurs communautaires qui, dans l'ensemble, ont augmenté de 90 %.

Les prix des exportations chinoises ont commencé à baisser en 1996 et cette tendance s'est maintenue pendant et après la période d'enquête. L'évolution des prix observée à partir de la fin de 1995 contraste fortement avec les allégations de la demande de réexamen selon lesquelles, en raison de leurs prix élevés, les importations en provenance de la RPC ne pouvaient pas causer de préjudice à l'industrie communautaire.

3.3. Sous-cotation des prix

(28) L'enquête a révélé la persistance de marges importantes de sous-cotation des prix, que les prix de l'industrie communautaire soient comparés à ceux du seul exportateur chinois ayant coopéré ou aux prix à l'importation obtenus à partir des données d'Eurostat (qui n'ont qu'une valeur indicative générale).

4. Situation économique de l'industrie communautaire

4.1. Généralités

(29) Lors de l'analyse de la situation économique de l'industrie communautaire, il a été tenu compte du fait que, comme il n'y a que deux producteurs communautaires du produit considéré, il importe de protéger l'intégrité des données fournies à titre confidentiel. Lorsque nécessaire, les informations confidentielles fournies sont présentées sous forme d'indice, l'année 1994 étant l'année de référence pour l'établissement des tendances.

4.2. Production

(30) La production du produit concerné par l'industrie communautaire n'a cessé de diminuer, passant d'un indice 100 en 1994 à 91 en 1995 avant de tomber à 86 en 1996 et à 81 pendant la période d'enquête, ce qui représente une diminution de 19 % sur la période considérée.

4.3. Capacités et utilisation des capacités

(31) Les capacités de production de l'industrie communautaire sont restées stables tout au long de la période considérée.

La période considérée a été marquée par une baisse significative du taux d'utilisation des capacités par l'industrie communautaire, qui est passé de 81 % en 1994 à 74 % en 1995 et à 70 % en 1996 avant de diminuer encore pour atteindre 66 % pendant la période d'enquête, ce qui représente un recul de 15 points de pourcentage pour la période.

4.4 Volume des ventes de l'industrie communautaire

(32) Le volume des ventes des producteurs communautaires sur le marché de la Communauté a légèrement augmenté entre 1994 et 1995 avant de diminuer. Les ventes ont augmenté, passant d'un indice 100 en 1994 à 106 en 1995 avant de retomber à 86 en 1996 et à 80 pendant la période d'enquête, ce qui représente une diminution de 20 % des ventes sur la période considérée.

4.5. Stocks

(33) Le niveau des stocks de furfural détenus par les producteurs communautaires a diminué passant d'un indice 100 en 1994 à 16 en 1995, ce qui est exceptionnellement bas.

Ce bas niveau de stock s'explique par le fait que les producteurs communautaires ont pu tirer parti de la "disparition temporaire" des importations chinoises du marché communautaire en 1995. Le niveau des stocks a ensuite augmenté, passant de 72 en 1996 à 90 pendant la période d'enquête.

4.6. Évolution des prix

(34) Les prix de vente de l'industrie communautaire ont fortement augmenté, passant d'un indice 100 en 1994 à 129 en 1995 et à 216 en 1996, avant de retomber à 194 pendant la période d'enquête.

Ces augmentations de prix ont coïncidé avec de fortes hausses du coût des matières premières. Ces dernières représentaient 46 % des coûts variables en 1994 contre 56 % pendant la période d'enquête.

4.7. Rentabilité

(35) Au cours de la période considérée, la rentabilité de l'industrie communautaire a suivi la tendance suivante (sous forme d'indice): 100 en 1994, 105 en 1995, 109 en 1996 et 103 pendant la période d'enquête.

4.8. Emploi

(36) L'emploi est resté stable dans l'industrie communautaire pendant toute la période considérée, diminuant légèrement d'un indice 100 en 1995 à 97 pendant la période d'enquête.

4.9. Conclusion concernant la situation de l'industrie communautaire

(37) Sur la base de l'évaluation générale des principaux indicateurs économiques de l'industrie communautaire, il est conclu que les résultats de l'enquête ne confirment pas les allégations concernant la situation de l'industrie communautaire avancées dans la demande de réexamen. Au contraire, l'enquête a montré que l'industrie communautaire reste affaiblie.

5. Facteurs influant sur la situation de l'industrie communautaire

5.1. Effet des importations concernées

(38) Il y a une coïncidence manifeste entre la hausse des importations à bas prix en provenance de la RPC établie pour la période considérée, d'une part, et la situation précaire de l'industrie communautaire, d'autre part, ce qu'attestent la diminution du volume des ventes de l'industrie communautaire et la détérioration importante de la rentabilité pendant la période d'enquête.

(39) La situation financière de l'industrie communautaire, mauvaise au début de la période considérée, s'est considérablement améliorée par la suite. Cette amélioration a coïncidé avec l'institution des mesures antidumping et la disparition temporaire des importations chinoises du marché de la Communauté en 1995. Toutefois, la réapparition de ces importations chinoises, effectuées en grandes quantités et à bas prix, surtout à partir de 1996, a contraint l'industrie communautaire à baisser ses prix, alors que le volume de ses ventes diminuait lui aussi sous la pression des importations faisant l'objet d'un dumping, ce qui a eu une incidence négative sur sa situation financière.

(40) Il ressort clairement de l'analyse ci-dessus que les allégations de la demande de réexamen ne sont pas fondées, que le préjudice établi au cours de l'enquête précédente n'a pas été éliminé et que les circonstances n'ont pas sensiblement changé.

5.2. Effets d'autres facteurs

(41) D'autres facteurs susceptibles d'influencer la situation du marché communautaire ont également été évalués. Les services de la Commission ont notamment examiné l'évolution et l'incidence des importations en provenance d'autres pays tiers ainsi que l'effet des augmentations du prix des matières premières.

(42) En ce qui concerne les importations en provenance de pays tiers non concernés par la présente enquête de réexamen, il convient de noter que, même si elles représentent une part importante du marché de la Communauté, comme c'était déjà le cas lors de l'enquête précédente, leur volume montre une tendance à la baisse sur la période considérée.

(43) Pour ce qui est des importations en provenance de la République dominicaine, il est fait référence aux affirmations d'un exportateur chinois, à savoir que ces importations auraient toujours occupé une position dominante sur le marché (avec une part de marché de plus de 60 %) et que leurs prix seraient toujours restés très bas. À cet égard, la Commission a examiné si les circonstances relatives aux importations du produit concerné originaire de la République dominicaine ont changé.

Il importe avant tout de souligner que l'exportateur chinois ayant coopéré a reconnu, à l'occasion de la présente enquête, que les importations en provenance de la République dominicaine ont toujours occupé une place significative. Il est tout aussi essentiel de souligner que tout changement relatif à ces importations devrait être particulièrement important pour justifier la clôture de la présente enquête de réexamen sans maintien des mesures. L'examen de la tendance suivie par le volume des importations en provenance de la République dominicaine révèle qu'il a augmenté, passant de 24429 tonnes en 1994 à 33209 tonnes en 1995 avant de retomber à 29765 tonnes en 1996 et à 24331 tonnes pendant la période d'enquête. Les importations en provenance de la République dominicaine (données d'Eurostat) représentaient 82,6 % du total des importations en 1994 contre 82,4 % en 1995, 66,6 % en 1996 et 68,6 % pendant la période d'enquête.

(44) En ce qui concerne les prix à l'importation du furfural originaire de la République dominicaine obtenus à partir des données d'Eurostat, la moyenne pondérée des prix caf frontière communautaire exprimée en écu/tonne a évolué de la manière suivante: 973 en 1993, 1040 en 1994, 905 en 1995, 708 en 1996 et 599 pendant la période d'enquête.

(45) L'enquête précédente a établi que la situation préjudiciable de l'industrie communautaire n'était pas imputable aux importations du produit concerné originaire de la République dominicaine.

(46) Il convient de noter que les conclusions auxquelles le Conseil avait abouti à l'issue de l'enquête précédente concernant la contribution de ces importations au préjudice étaient l'un des moyens invoqués dans le recours contre le règlement (CE) 95-95 qui, comme précisé plus haut, a été rejeté par le Tribunal de première instance(5).

Dans ses conclusions, le Tribunal a déclaré que les institutions de la Communauté n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en considérant que les importations de furfural en provenance de la République dominicaine, auxquelles aucune pratique de dumping n'était imputée, n'étaient pas de nature à rompre le lien de causalité entre le dumping pratiqué sur les importations de furfural en provenance de Chine et le préjudice subi par l'industrie communautaire.

(47) Dans le cadre de la présente enquête de réexamen, il a été considéré que la situation n'a pas suffisamment changé depuis l'enquête précédente en ce qui concerne les importations de furfural en provenance de la République dominicaine pour affecter les conclusions relatives aux importations en provenance de la RPC. En fait, le volume des importations en provenance de la République dominicaine a plutôt accusé une tendance à la baisse sur la fin de la période considérée.

(48) En ce qui concerne les importations en provenance de pays tiers autres que la RPC et la République dominicaine, seules les importations en provenance de Thaïlande représentent un volume significatif. Il y a toutefois lieu de préciser que, comme expliqué plus haut, il existe des doutes sérieux quant à l'origine réelle des produits importés de Thaïlande.

(49) Il a été constaté que le volume des importations en provenance des autres pays tiers, tous pays confondus, est passé de 2705 tonnes en 1994 à 2941 en 1995 avant de tomber à 1759 tonnes pendant la période d'enquête et que leurs prix étaient nettement plus élevés que ceux des importations chinoises. Il a donc été considéré que le résultat de l'analyse des prix et du volume de ces importations ne permet pas de justifier la clôture de la présente enquête de réexamen sans maintien des mesures.

5.3. Conclusion

(50) L'enquête a montré que l'industrie communautaire a souffert d'une diminution de ses volumes de production et de ventes au cours de la période d'enquête, à un moment où les importations en provenance de la RPC s'effectuaient en grandes quantités et à des prix nettement inférieurs à ceux des producteurs communautaires.

E. EFFET PROBABLE DE L'ABROGATION DES DROITS ANTIDUMPING

(51) Conformément à l'article 11, paragraphe 7, du règlement de base, le présent réexamen étant en cours à la fin de la période d'application des mesures instituées par le règlement (CE) n° 95-95, il a également couvert les circonstances spécifiées à l'article 11, paragraphe 2, du règlement de base.

(52) Dans le cadre de l'enquête couvrant les circonstances visées à l'article 11, paragraphe 2, du règlement de base, il importe de souligner qu'aucun producteur du produit considéré n'a coopéré au cours de la présente enquête. En effet, la seule partie à avoir coopéré à l'enquête ne fait qu'exporter le produit concerné. En conséquence, il n'a pas été possible d'obtenir des données relatives à la production, notamment aux capacités et au taux d'utilisation des capacités, éléments considérés comme des indicateurs clés dans les enquêtes couvrant les circonstances précisées à l'article 11, paragraphe 2, du règlement de base.

(53) Compte tenu de cet élément et de ce qui a été établi plus haut, l'enquête a montré que le dumping continue en dépit des mesures en vigueur. Il a, en outre, été constaté que la situation de l'industrie communautaire reste précaire. En effet, elle a vu sa production, son taux d'utilisation des capacités, son volume de ventes et sa part de marché diminuer sur la période considérée. La présente enquête permet donc de conclure que les circonstances concernant le dumping et le préjudice n'ont pas sensiblement changé.

(54) Quant à la probabilité d'une continuation du dumping préjudiciable en cas d'expiration des mesures, il ressort en premier lieu de l'enquête que la capacité de production de la RPC a fortement augmenté sur la période considérée. En effet, alors que la demande de réexamen intermédiaire estimait la capacité de production de la RPC à quelque 20 000 tonnes/an, les informations collectées au cours de la présente enquête ont révélé que la production d'un seul producteur chinois s'était élevée à 50 000 tonnes par an en 1998. D'après ces informations, la capacité totale de la RPC tourne aux alentours de 90 000 tonnes/an.

(55) En deuxième lieu, en ce qui concerne le prix du furfural chinois, les informations rassemblées lors de l'enquête montrent que, pendant la période d'enquête, les prix du furfural chinois sur les marchés de plusieurs pays tiers où ce produit ne fait pas l'objet de mesures antidumping étaient, durant la période d'enquête, nettement plus bas que celui des importations chinoises dans la Communauté.

(56) En troisième lieu, la Commission a des raisons de penser qu'une part considérable du furfural déclaré comme étant d'origine thaïlandaise pendant la période d'enquête était en réalité d'origine chinoise, ce qui souligne le potentiel d'exportation de la RPC qui continue à exister.

Compte tenu de tous les éléments exposés ci-dessus, il est considéré qu'en cas d'expiration des mesures, le furfural chinois continuerait à être exporté vers la Communauté en grandes quantités et à des prix faisant l'objet d'un dumping, nettement inférieurs à ceux de l'industrie communautaire. Non seulement l'effet préjudiciable des importations en question sur l'industrie communautaire continuerait à se faire sentir, mais surtout il ne ferait très probablement que s'accentuer, aggravant ainsi le préjudice important subi par cette industrie.

F. INTÉRÊT DE LA COMMUNAUTÉ

1. Considérations générales

(57) Se fondant sur les informations qui lui ont été communiquées, la Commission a examiné si, malgré les conclusions de la présente enquête, il existe des raisons impérieuses de conclure qu'il n'est pas dans l'intérêt de la Communauté de maintenir les mesures dans ce cas particulier.

Des questionnaires ont été envoyés au début de l'enquête à toutes les parties connues de la Commission, en vue d'obtenir des informations concernant l'intérêt de la Communauté aux fins de l'évaluation de l'effet des mesures en vigueur.

(58) Il convient de rappeler qu'il avait été considéré, lors de l'enquête précédente, que l'adoption de mesures n'était pas contraire aux intérêts de la Communauté. En outre, il faut souligner que la présente enquête est une enquête de réexamen, c'est-à-dire qu'elle analyse une situation dans laquelle des mesures antidumping ont déjà été mises en place. En conséquence, le moment et la nature de la présente enquête devraient permettre d'évaluer toute incidence négative anormale de ces mesures antidumping sur les parties concernées.

2. Industrie communautaire du furfural

(59) Il a été constaté qu'au moment de l'institution des droits antidumping provisoires en juillet 1994 et de la disparition temporaire du produit chinois du marché de la Communauté en 1995, l'industrie communautaire a pu augmenter ses prix et améliorer ainsi sa rentabilité, passant d'une situation médiocre en 1994 à une situation nettement plus saine en 1996. Toutefois, les prix élevés pratiqués par les producteurs communautaires en 1996 doivent être considérés comme exceptionnels, car ils résultaient d'une demande inhabituellement élevée associée à ce qui s'est avéré n'être qu'une diminution temporaire des importations du produit considéré originaire de la RPC. Ces éléments ont été confirmés au cours de la période suivante durant laquelle les prix n'ont pas pu être maintenus en raison de la présence, sur le marché communautaire, de quantités considérables de produit chinois importé à bas prix. La pression de ces importations a contraint l'industrie communautaire à baisser ses prix, ce qui a eu un effet négatif sur sa situation financière.

(60) Compte tenu de ce qui précède, l'industrie communautaire pourra probablement améliorer sa situation financière si les mesures sont maintenues. Toutefois, si elles ne le sont pas, il est à prévoir que sa situation se détériorera, entraînant, à long terme, la fermeture d'installations de production et des pertes d'emplois.

3. Industrie utilisatrice

(61) L'industrie utilisatrice de la Communauté relève de deux grands secteurs qui correspondent aux deux applications principales du furfural c'est-à-dire l'industrie pétrolière (solvant sélectif) et l'industrie chimique (résine synthétique pour les moules de fonderie).

(62) Un seul utilisateur de l'industrie pétrolière a coopéré à la présente enquête. Les informations qu'il a communiquées quant à l'effet du prix du furfural sur les coûts des huiles lubrifiantes confirment les conclusions de l'enquête précédente, à savoir que le furfural utilisé comme catalyseur a une incidence négligeable sur les coûts de production. Le maintien des mesures n'aura donc qu'une incidence limitée voire nulle sur cette industrie utilisatrice.

(63) En ce qui concerne la deuxième application principale du produit, aucune information susceptible d'infirmer les conclusions de l'enquête précédente n'a été communiquée. Compte tenu de ce qui précède, il est conclu que les mesures ne devraient pas avoir d'effet significatif sur la situation de l'industrie chimique.

4. Conclusion concernant l'intérêt de la Communauté

(64) Compte tenu des éléments ci-dessus, il est conclu qu'il n'existe aucune raison impérieuse, du point de vue de l'intérêt communautaire, de ne pas maintenir les mesures antidumping en vigueur.

G. MESURES ANTIDUMPING

(65) Compte tenu de ce qui précède et du fait qu'il n'a pas pu être établi que les circonstances concernant le dumping et le préjudice ont sensiblement changé depuis l'enquête initiale, il est conclu que les mesures doivent être maintenues sous leur forme et à leur niveau actuels.

Le droit antidumping proposé, lié au prix franco frontière communautaire et exprimé sous la forme d'un droit spécifique, s'élève à 352 EUR/tonne.

(66) Il est également considéré que les mesures faisant l'objet du réexamen devraient être limitées à quatre ans. En raison des nombreuses difficultés rencontrées pour établir des déterminations dans le cadre de la présente enquête, notamment le fait qu'une procédure était simultanément pendante devant le Tribunal de première instance pour clarifier, entre autres, la définition du produit concerné, l'enquête a largement dépassé la période de douze mois prévue à l'article 11, paragraphe 5, du règlement de base. Compte tenu de cette situation exceptionnelle, indépendante du taux élevé de non-coopération des exportateurs chinois, il convient de réduire la période d'application des mesures,

A arrêté le présent règlement:

Article premier

1. Il est institué un droit antidumping définitif sur les importations de furfural (également dénommé "2-furaldéhyde" ou "furfurol") relevant actuellement du code NC 2932 12 00, originaire de la République populaire de Chine.

2. Le taux de droit applicable est de 352 EUR/tonne.

3. Dans les cas où la valeur en douane est réduite conformément à l'article 145 du règlement (CEE) n° 2454-93 de la Commission (6), le montant du droit spécifique applicable, visé au paragraphe 2 du présent article, sera également réduit au prorata.

Article 2

Le droit antidumping est institué pour une période de quatre ans à compter de la date d'entrée en vigueur du présent règlement.

Article 3

Sauf indication contraire, les dispositions en vigueur en matière de droits de douane sont applicables.

Article 4

Le présent règlement entre en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Notes :

(1) JO L 56 du 6.3.1996, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 905-98 (JO L 128 du 30.4.1998, p. 18).

(2) JO L 15 du 21.1.1995, p. 11.

(3) JO C 156 du 24.5.1997, p. 3.

(4) Affaire T-97-95, Sinochem/Conseil, concernant un recours en annulation contre le règlement (CE) n° 95-95, Recueil 1995, p. II-85.

(5) Affaire T-97-95, Sinochem/Conseil, voir la note 4 ci-dessus.

(6) JO L 253 du 11.10.1993, p. 1. Règlement modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 502-1999 (JO L 65 du 12.3.1999, p. 1).