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Décisions

CA Rennes, 1re ch. B, 25 mars 2005, n° 04-05227

RENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Distri Import (SARL)

Défendeur :

Bonnami (Epoux)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Piperaud

Conseillers :

Mme Sillard, M. Bohuon

Avoués :

SCP Guillou & Renaudin, SCP Gautier-Lhermitte

Avocats :

Mes Merand, SCP Salaun Doré, Associés

TI Saint-Nazaire, du 2 juin 2004

2 juin 2004

Faits et procédure:

Le 1er avril 2002, Monsieur et Madame Bonnami ont passé commande à la SARL Distri Import d'une cuisine aménagée modèle Siria ainsi qu'un évier et de la robinetterie pour un coût total de 6 250 euro et versé la somme de 1 000 euro.

Par acte d'huissier du 29 août 2003, Monsieur et Madame Bonnami ont assigné la SARL Distri Import devant le Tribunal d'instance de Saint-Nazaire pour la voir condamnée notamment à leur rembourser la somme de 1 000 euro en application de l'article L. 114-1 du Code de la consommation pour défaut de livraison de la cuisine et défaut de date de livraison.

Par jugement du 2 juin 2004, le tribunal a:

• constaté que le contrat de vente est rompu en application de l'article L. 114-1 du Code de la consommation,

• condamné la SARL Distri Import à restituer à Monsieur et Madame Bonnami la somme de 1 000 euro avec intérêts au taux légal à compter du jugement.

• rejeté la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur et Madame Bonnami,

• condamné la SARL Distri Import à payer à Monsieur et Madame Bonnami la somme de 800 euro en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

• débouté la SARL Distri Import de toutes ses demandes,

• dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

• mis les dépens à la charge de la SARL Distri Import.

Appelante, la SARL Distri Import demande à la cour :

• de réformer le jugement en ce qu'il a constaté que le contrat de vente est rompu en application de l'article L. 114-1 du Code de la consommation et l'a condamnée à régler à Monsieur et Madame Bonnami l'acompte de 1 000 euro ainsi que la somme de 800 euro au titre des frais irrépétibles et les dépens,

• de condamner les époux Bonnami à exécuter les obligations résultant du contrat du 1er avril 2002, à savoir proposer une date de livraison et régler le solde du prix de vente,

• de les condamner à lui régler la somme de 2 500 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, outre les entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du même Code.

Les époux Bonnami demandent à la cour :

• de condamner la SARL Distri Import à leur payer la somme de 2 000 euro à titre de restitution des sommes versées,

• de condamner la SARL Distri Import à leur payer la somme de 2 000 euro à titre de dommages et intérêts,

• de confirmer la décision pour le surplus, y ajoutant:

• de condamner la SARL Distri Import à leur payer la somme de 1 500 euro au titre des frais irrépétibles d'appel;

• de condamner la SARL Distri Import aux entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

La cour renvoie aux dernières conclusions des parties en date du 9 décembre 2004 pour Monsieur et Madame Bonnami et du 11 janvier 2005 pour la SARL Distri Import s'agissant des moyens et arguments développés à l'appui de leurs prétentions.

Sur ce,

Considérant que l'article L. 114-1 du Code de la consommation dispose que "dans tout contrat ayant pour objet la vente d'un bien meuble ou la fourniture d'une prestation de services à un consommateur, le professionnel doit lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation n'est pas immédiate et si le prix convenu excède les seuils fixés par voie réglementaire, indiquer la date limite à laquelle il s'engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation. Le consommateur peut dénoncer le contrat de vente d'un bien meuble ou de fourniture de prestations de services par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien ou d'exécution de la prestation excédant 7 jours et non dû à un cas de force majeure. Ce contrat est le cas échéant considéré comme rompu à la réception par le vendeur ou par le prestataire de services de la lettre par laquelle le consommateur l'informe de sa décision, si la livraison n'est pas intervenue ou si la prestation n'a pas été exécutée entre l'envoi et la réception de cette lettre. Le consommateur exerce ce droit dans un délai de 60 jours ouvrés à compter de la date indiquée pour la livraison du bien ou l'exécution de la prestation ";

Considérant que le bon de commande ne comporte que la mention "délai de prévenance de deux mois";

Que cette mention, portée à la demande expresse des époux Bonnami, ce dont ils ne disconviennent pas, ne placent pas ces derniers dans une situation de dépendance vis-à-vis du fournisseur quant à la date de livraison de leur commande mais au contraire les laisse maîtres de décider de celle-ci, le fournisseur disposant alors d'un délai maximal de deux mois, constituant la date limite, pour y procéder;

Qu'une telle mention ne peut cependant valoir date de livraison;

Qu'en l'absence de celle-ci, le consommateur ne peut cependant obtenir la résolution de la vente que s'il a mis en demeure le vendeur d'exécuter et que celui-ci n'y a pas satisfait dans un délai raisonnable;

Que selon l'article 1139 du Code civil, le débiteur est constitué en demeure, soit par l'effet de la convention, lorsqu'elle porte que sans qu'il soit besoin d'acte et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure, ce qui ne peut donc être le cas en l'espèce, soit par une sommation ou par un autre acte équivalent;

Que force est de relever que les époux Bonnami n'ont jamais mis en demeure leur cocontractant de s'exécuter, mais lui ont adressé le 25 avril 2003 un courrier afin de dénoncer la commande passée et à la proposition de livraison sous un mois environ de la cuisine faite par lettre du 13 juin 2003 du conseil de la société Distri Import adressée à l'UFC Que Choisir, se sont empressés d'assigner le cuisiniste;

Que partant, le jugement sera infirmé et que les époux Bonnami seront condamnés solidairement à exécuter leurs obligations contractuelles, et en particulier à proposer, sauf à user de la faculté de rétractation ouverte par le dernier alinéa de l'article L. 114-1 du Code de la consommation, une date de livraison, sous astreinte, passé le délai d'un mois courant à compter de la signification du présent arrêt, de 75 euro par jour de retard ;

Qu'ils seront en outre condamnés solidairement aux entiers dépens de cette instance et à verser à l'intimée la somme de 1 200 euro au titre de ses frais irrépétibles;

Par ces motifs, LA COUR, Accueillant la société Distri Import en son appel ; Reforme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Condamne solidairement Monsieur et Madame Bonnami à exécuter les obligations résultant du contrat du 1er avril 2002 et notamment à proposer une date de livraison, sous astreinte de 75 euro par jour de retard, passé le délai d'un mois suivant la signification du présent arrêt; Les condamne solidairement à régler à la société Distri Import la somme de 1 200 euro sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; Les condamne aux entiers dépens recouvrés selon l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.