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Décisions

CJCE, 6e ch., 23 octobre 2003, n° C-408/01

COUR DE JUSTICE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Adidas-Salomon AG, Adidas Benelux BV

Défendeur :

Fitnessworld Trading Ltd

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. Puissochet

Avocat général :

M. Jacobs

Juges :

Mmes Macken, Colneric, MM. Gulmann, Cunha Rodrigues

Avocats :

Mes Gielen, Brinkhof, Visser, Tappin, Tuytschaever

CJCE n° C-408/01

23 octobre 2003

LA COUR (sixième chambre),

1. Par arrêt du 12 octobre 2001, parvenu à la Cour le 15 octobre suivant, le Hoge Raad der Nederlanden a posé, en application de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles sur l'interprétation de l'article 5, paragraphe 2, de la première directive 89-104-CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1, ci-après la " directive ").

2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Adidas-Salomon AG et Adidas Benelux BV à Fitnessworld Trading Ltd (ci-après " Fitnessworld "), à propos de la commercialisation par Fitnessworld de vêtements de sport.

Le cadre juridique

3. L'article 5, paragraphes 1 et 2, de la directive dispose:

" 1. La marque enregistrée confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage, dans la vie des affaires:

a) d'un signe identique à la marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée;

b) d'un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d'association entre le signe et la marque.

2. Tout État membre peut également prescrire que le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe identique ou similaire à la marque pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'État membre et que l'usage du signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porte préjudice. "

4. L'article 13, A, point 1, sous b) et c), de la loi uniforme Benelux sur les marques, qui vise à transposer dans la législation Benelux l'article 5, paragraphes 1 et 2, de la directive, prévoit:

" Sans préjudice de l'application éventuelle du droit commun en matière de responsabilité civile, le droit exclusif à la marque permet au titulaire de s'opposer à:

[...]

b) tout usage qui, dans la vie des affaires, serait fait de la marque ou d'un signe ressemblant pour les produits pour lesquels la marque est enregistrée ou pour des produits similaires, lorsqu'il existe, dans l'esprit du public, un risque d'association entre le signe et la marque;

c) tout usage qui, dans la vie des affaires et sans juste motif, serait fait d'une marque qui jouit d'une renommée à l'intérieur du territoire Benelux ou d'un signe ressemblant pour des produits non similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, lorsque l'usage de ce signe tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porterait préjudice."

Le litige au principal

5. Adidas-Salomon AG, société établie en Allemagne, est titulaire d'une marque figurative enregistrée auprès du bureau Benelux des marques pour certains types de vêtements. Cette marque est constituée par un motif à trois bandes verticales parallèles, très voyantes et de même largeur, qui s'étendent sur toute la longueur latérale du vêtement. Le motif peut se décliner en diverses tailles et combinaisons de couleurs, pour autant qu'il contraste toujours avec la couleur de base du vêtement.

6. La marque fait l'objet d'une licence exclusive concédée pour le Benelux à Adidas Benelux BV, société établie aux Pays-Bas.

7. Fitnessworld, société établie au Royaume-Uni, commercialise des vêtements de sport portant le nom Perfetto. Certains de ces vêtements sont munis d'un motif à deux bandes parallèles et de même largeur, qui contrastent avec la couleur principale et sont apposées sur les coutures latérales du vêtement.

8. Un litige oppose Adidas-Salomon AG et Adidas Benelux BV (ci-après, ensemble, " Adidas ") à Fitnessworld devant le Hoge Raad der Nederlanden, à propos de la commercialisation, par Fitnessworld, aux Pays-Bas, des vêtements Perfetto.

9. Adidas fait valoir que cette commercialisation de vêtements portant deux bandes crée un risque de confusion dans le chef du public, celui-ci pouvant associer lesdits vêtements aux vêtements de sport et de loisirs de marque Adidas, qui portent trois bandes. Fitnessworld tirerait ainsi profit de la renommée de la marque Adidas. L'exclusivité de cette marque pourrait en être atteinte.

10. Le Hoge Raad estime qu'il y a lieu de déterminer si la référence à des produits ou à des services qui ne sont pas similaires, figurant à l'article 5, paragraphe 2, de la directive, ainsi qu'à l'article 13, A, point 1, sous c), de la loi uniforme Benelux sur les marques, doit être interprétée comme une restriction, c'est-à-dire en ce sens que les règles concernées ne s'appliquent pas en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services similaires, ou bien si elle n'a d'autre but que de souligner que ces règles s'appliquent également si les produits ou les services ne sont pas similaires, de sorte que lesdites règles ne sont pas limitées aux cas d'usage du signe pour des produits similaires.

11. En cas d'application de l'article 5, paragraphe 2, de la directive à l'usage d'un signe pour des produits similaires, il se demande, d'une part, si le critère à appliquer est un critère autre qu'une confusion quant à l'origine et, d'autre part, si la circonstance que le signe est exclusivement perçu par le public concerné comme une décoration a une incidence sur l'appréciation de la situation.

12. Dans ce contexte, le Hoge Raad der Nederlanden a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

" 1) a) Y-a-t-il lieu d'interpréter l'article 5, paragraphe 2, de la première directive 89/104/CEE [...] en ce sens que, en application d'une loi nationale qui a transposé cette disposition, le titulaire d'une marque renommée dans l'État concerné peut également s'opposer à l'usage de cette marque ou d'un signe similaire, de la manière et dans les circonstances qui sont visées dans cette disposition, pour des produits ou des services identiques ou analogues à ceux pour lesquels la marque a été déposée?

b) En cas de réponse négative à la question 1), a): s'agissant d'une loi nationale qui a transposé la disposition de l'article 5, paragraphe 2, de la directive 89-104, y-a-t-il lieu d'interpréter la notion de risque de confusion' visée à l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive en ce sens qu'un tel risque existe lorsqu'une personne autre que son titulaire utilise une marque renommée ou un signe similaire, de la manière et dans les circonstances visées à l'article 5, paragraphe 2, de la directive, pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque a été déposée?

2) En cas de réponse affirmative à la question 1), a):

a) Dans un tel cas, y-a-t-il lieu d'apprécier la similitude entre la marque et le signe sur la base d'un autre critère que celui de la confusion quant à la provenance (directe ou indirecte); si c'est le cas, selon quel critère?

b) Si, dans un tel cas, le signe attaqué en raison d'une prétendue atteinte à la marque est exclusivement perçu par le public concerné comme une décoration, quelle en est l'incidence sur la question de la similitude entre la marque et le signe? "

Sur la première question

Sur la première question, sous a)

13. La première question, sous a), contient la question de savoir si, nonobstant la circonstance que l'article 5, paragraphe 2, de la directive ne vise expressément que l'usage d'un signe par un tiers pour des produits ou des services non similaires, cette disposition doit être interprétée en ce sens qu'elle laisse aux États membres le pouvoir de prévoir une protection spécifique au profit d'une marque enregistrée qui jouit d'une renommée lorsque la marque ou le signe postérieur, identique ou similaire à cette marque enregistrée, est destiné à être utilisé ou est utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux couverts par celle-ci.

14. Postérieurement à l'enregistrement de la décision de renvoi, la Cour, dans son arrêt du 9 janvier 2003, Davidoff (C-292-00, Rec. p. I-389), a répondu par l'affirmative à cette question.

15. Compte tenu de cette interprétation et aux fins d'une réponse utile à la solution du litige au principal, la première question, sous a), doit être comprise comme visant également à faire préciser si un État membre, lorsqu'il exerce l'option offerte par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, est tenu d'accorder la protection spécifique en cause en cas d'usage par un tiers d'une marque ou d'un signe postérieur, identique ou similaire à la marque renommée enregistrée, aussi bien pour des produits ou des services non similaires que pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux couverts par celle-ci.

16. Adidas et la Commission font valoir que, sur ce point, il doit être répondu par l'affirmative. La Commission estime qu'une réponse en ce sens se déduit nécessairement du point 25 de l'arrêt Davidoff, précité.

17. Le gouvernement du Royaume-Uni, en revanche, propose une réponse négative. Un État membre serait libre d'adopter des dispositions limitées au libellé exprès de l'article 5, paragraphe 2, de la directive, c'est-à-dire aux produits ou aux services non similaires. Il ne serait pas tenu d'accorder la même protection également pour des produits ou des services identiques ou similaires. Le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir, en toute hypothèse, que l'interprétation d'une disposition de transposition de l'article 5, paragraphe 2, de la directive sur la question de savoir quelle protection un État membre a entendu conférer aux titulaires de marques renommées relève des juridictions nationales.

18. À cet égard, il convient de souligner que, lorsqu'un État membre exerce l'option qui lui est offerte par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, il doit accorder aux titulaires de marques renommées une protection conforme à cette disposition.

19. Dans l'arrêt Davidoff, précité (points 24 et 25), la Cour a relevé au soutien de son interprétation que, en considération de l'économie générale et des objectifs du système dans lequel l'article 5, paragraphe 2, de la directive s'insère, il ne saurait être donné dudit article une interprétation qui aurait pour conséquence une protection des marques renommées moindre en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services identiques ou similaires qu'en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services non similaires. Elle a ensuite constaté, en d'autres termes, que la marque renommée doit bénéficier, en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services identiques ou similaires, d'une protection au moins aussi étendue qu'en cas d'usage d'un signe pour des produits ou des services non similaires (même arrêt, point 26).

20. Au regard de ces constatations, l'État membre, s'il transpose l'article 5, paragraphe 2, de la directive, doit donc accorder une protection au moins aussi étendue pour des produits ou des services identiques ou similaires que pour des produits ou des services non similaires. L'option de l'État membre porte ainsi sur le principe même de l'octroi d'une protection renforcée au profit des marques renommées, mais non sur les situations couvertes par cette protection lorsqu'il l'accorde.

21. Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, en appliquant le droit national, et notamment les dispositions d'une loi nationale spécialement introduite en vue de transposer une directive, la juridiction nationale est tenue d'interpréter son droit national dans toute la mesure du possible à la lumière du texte et de la finalité de la directive (voir, notamment, arrêts du 10 avril 1984, Von Colson et Kamann, 14-83, Rec. p. 1891, point 26, et Harz, 79-83, Rec. p. 1921, point 26, ainsi que du 22 septembre 1998, Coote, C-185-97, Rec. p. I-5199, point 18).

22. Il convient dès lors de répondre à la première question, sous a), qu'un État membre, lorsqu'il exerce l'option offerte par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, est tenu d'accorder la protection spécifique en cause en cas d'usage par un tiers d'une marque ou d'un signe postérieur, identique ou similaire à la marque renommée enregistrée, aussi bien pour des produits ou des services non similaires que pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux couverts par celle-ci.

Sur la première question, sous b)

23. La première question, sous b), n'ayant été posée qu'en cas de réponse négative à la première question, sous a), il n'y a pas lieu d'y répondre.

Sur la seconde question

Sur la seconde question, sous a)

24. Par sa seconde question, sous a), la juridiction de renvoi demande en substance si la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive est subordonnée à la constatation d'un degré de similitude tel entre la marque renommée et le signe qu'il existe, dans l'esprit du public concerné, un risque de confusion entre ceux-ci.

25. Adidas estime que la constatation d'un risque de confusion n'est pas nécessaire. Il suffirait que le juge national constate un risque d'association sur la base d'une similitude visuelle, auditive ou conceptuelle entre la marque renommée et le signe. La Commission estime également qu'un risque d'association suffit.

26. Fitnessworld soutient, au contraire, que la similitude entre la marque et le signe doit être telle qu'elle puisse créer une confusion dans l'esprit du public concerné, eu égard aux ressemblances visuelles, auditives et conceptuelles.

27. À cet égard, il doit être rappelé d'emblée que, contrairement à l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive, qui n'a vocation à s'appliquer que s'il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion, l'article 5, paragraphe 2, de la directive instaure, en faveur des marques renommées, une protection dont la mise en œuvre n'exige pas l'existence d'un tel risque. En effet, cette dernière disposition s'applique à des situations dans lesquelles la condition spécifique de la protection est constituée par un usage sans juste motif du signe contesté qui tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de celle-ci ou leur porte préjudice (voir arrêt du 22 juin 2000, Marca Mode, C-425-98, Rec. p. I-4861, points 34 et 36).

28. La condition d'une similitude entre la marque et le signe, visée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, suppose l'existence, en particulier, d'éléments de ressemblance visuelle, auditive ou conceptuelle [voir, à propos de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive, arrêts du 11 novembre 1997, Sabel C-251-95, Rec. p. I-6191, point 23 in fine, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342-97, Rec. p. I-3819, points 25 et 27 in fine].

29. Les atteintes visées à l'article 5, paragraphe 2, de la directive, lorsqu'elles se produisent, sont la conséquence d'un certain degré de similitude entre la marque et le signe, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre le signe et la marque, c'est-à-dire établit un lien entre ceux-ci, alors même qu'il ne les confond pas (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 1999, General Motors, C-375-97, Rec. p. I-5421, point 23).

30. L'existence d'un tel lien doit, de même qu'un risque de confusion dans le cadre de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive, être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce (voir, pour le risque de confusion, arrêts précités Sabel, point 22, et Marca Mode, point 40).

31. Il convient donc de répondre à la seconde question, sous a), que la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive n'est pas subordonnée à la constatation d'un degré de similitude tel entre la marque renommée et le signe qu'il existe, dans l'esprit du public concerné, un risque de confusion entre ceux-ci. Il suffit que le degré de similitude entre la marque renommée et le signe ait pour effet que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque.

Sur la seconde question, sous b)

32. Par sa seconde question, sous b), la juridiction de renvoi demande en substance quelle est l'incidence, sur la question de la similitude entre la marque renommée et le signe, d'une appréciation de fait du juge national selon laquelle le signe contesté est exclusivement perçu par le public concerné comme une décoration.

Observations soumises à la Cour

33. Adidas estime que le fait qu'un signe est utilisé ou perçu comme une décoration est sans incidence sur l'applicabilité de l'article 5, paragraphe 2, de la directive dans des situations comme celles décrites par la juridiction de renvoi. Dans la mesure où cette dernière disposition habiliterait le titulaire d'une marque renommée à s'opposer à l'usage de tout signe analogue à sa marque, il ne serait pas exigé qu'il s'agisse d'un signe distinctif. Il pourrait s'agir de tout autre signe, telle une décoration.

34. Fitnessworld propose de répondre à la question que, si un signe est exclusivement perçu par le public concerné comme une décoration, il ne peut en aucun cas en résulter une atteinte à la marque.

35. Le gouvernement néerlandais considère que même un usage décoratif d'un signe pourrait diluer une marque renommée, en particulier lorsqu'il s'agit d'une marque figurative.

36. Le gouvernement du Royaume-Uni se limite à faire valoir que le fait qu'un signe est perçu comme une simple décoration n'est pas pertinent en ce qui concerne la question de savoir si ce signe est ou non similaire à la marque renommée.

37. Selon la Commission, l'article 5, paragraphe 2, de la directive traite de la protection contre l'usage d'un signe semblable à un point tel à la marque renommée que l'usage en question entraînerait un risque de dilution ou d'atteinte à la réputation de celle-ci. En réalité, il serait difficile de concevoir qu'un signe faisant apparaître une telle similitude avec une marque renommée puisse être considéré comme une simple décoration. Inversement, par définition, une simple décoration ne pourrait être similaire, au sens de l'article 5, paragraphe 2, de la directive, à une marque renommée.

Réponse de la Cour

38. Il ressort de la réponse donnée à la seconde question, sous a), que l'une des conditions de la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive est que le degré de similitude entre la marque renommée et le signe ait pour effet que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque.

39. La circonstance qu'un signe est perçu par le public concerné comme une décoration ne fait pas, en soi, obstacle à la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, lorsque le degré de similitude est néanmoins tel que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque.

40. En revanche, lorsque, selon une appréciation de fait du juge national, le public concerné perçoit le signe exclusivement comme une décoration, il n'établit, par hypothèse, aucun lien avec une marque enregistrée. Cela implique alors que le degré de similarité entre le signe et la marque n'est pas suffisant pour que s'établisse un tel lien.

41. Il convient dès lors de répondre à la seconde question, sous b), que la circonstance qu'un signe est perçu par le public concerné comme une décoration ne fait pas, en soi, obstacle à la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive, lorsque le degré de similitude est néanmoins tel que ce public établit un lien entre le signe et la marque. En revanche, lorsque, selon une appréciation de fait du juge national, ledit public perçoit le signe exclusivement comme une décoration, il n'établit, par hypothèse, aucun lien avec une marque enregistrée, de sorte que n'est alors pas remplie l'une des conditions de la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive.

Sur les dépens

42. Les frais exposés par les gouvernements néerlandais et du Royaume-Uni ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, LA COUR, (sixième chambre), statuant sur les questions à elle soumises par le Hoge Raad der Nederlanden, par arrêt du 12 octobre 2001, dit pour droit:

1) Un État membre, lorsqu'il exerce l'option offerte par l'article 5, paragraphe 2, de la première directive 89-104-CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques , est tenu d'accorder la protection spécifique en cause en cas d'usage par un tiers d'une marque ou d'un signe postérieur, identique ou similaire à la marque renommée enregistrée, aussi bien pour des produits ou des services non similaires que pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux couverts par celle-ci.

2) La protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive 89-104 n'est pas subordonnée à la constatation d'un degré de similitude tel entre la marque renommée et le signe qu'il existe, dans l'esprit du public concerné, un risque de confusion entre ceux-ci. Il suffit que le degré de similitude entre la marque renommée et le signe ait pour effet que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque.

La circonstance qu'un signe est perçu par le public concerné comme une décoration ne fait pas, en soi, obstacle à la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive 89-104, lorsque le degré de similitude est néanmoins tel que ce public établit un lien entre le signe et la marque. En revanche, lorsque, selon une appréciation de fait du juge national, ledit public perçoit le signe exclusivement comme une décoration, il n'établit, par hypothèse, aucun lien avec une marque enregistrée, de sorte que n'est alors pas remplie l'une des conditions de la protection conférée par l'article 5, paragraphe 2, de la directive 89-104.