Cass. com., 27 janvier 2009, n° 07-15.971
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Pop'Tel Publicité (SARL)
Défendeur :
Cocktail (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
Mme Beaudonnet
Avocat général :
Mme Batut
Avocats :
SCP Boré, Salve de Bruneton, SCP Boullez
LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2007, rectifié le 6 juin 2007) que la société Cocktail, reprochant à la société Cocktail Publicité Mahmoudi, devenue Pop'tel publicité (ci-après CPM) d'avoir en imitant sa dénomination sociale commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire, l'a assignée afin d'obtenir des mesures d'interdiction et de réparation ;
Sur les premier et deuxième moyens, réunis : - Attendu que la société Pop'tel publicité fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé par substitution de motifs le jugement en ce qu'il lui avait ordonné de modifier sa dénomination sociale afin d'en retirer le terme Cocktail, lui avait interdit d'employer le terme Cocktail dans ses documents commerciaux et en signature de ses créations, avait autorisé une mesure de publication et de l'avoir condamnée à payer à la société Cocktail la somme de 15 000 euro à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait d'actes de concurrence déloyale, alors, selon le moyen : 1°) qu'un acte de concurrence déloyale suppose une situation de concurrence effective, les parties en présence exerçant leurs activités sur le même marché économique, à destination d'une même clientèle ; qu'en affirmant qu'il importait peu que la clientèle de la société Cocktail publicité Mahmoudi ne soit constituée que de petits commerçants désireux de présenter sur des prospectus la présentation de plats cuisinés tels, comme le faisait valoir cette société, des pizzerias et des établissements de restauration rapide situés en banlieue parisienne, à l'exclusion des annonceurs de la grande consommation, d'envergure nationale et internationale, constituant la clientèle de la société Cocktail, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; 2°) qu'il résulte des termes clairs et précis de l'attestation du responsable d'un département de la société Colgate palmolive, cliente de la société Cocktail, que ce dernier se bornait à affirmer que, résidant personnellement à Malakoff, il avait reçu dans sa boîte aux lettres un tract de la société Cocktail publicité Mahmoudi, de qualité " inférieure " aux travaux de la société Cocktail ; qu'en retenant qu'il résultait de cette attestation que la société Cocktail publicité Mahmoudi s'adressait également à des annonceurs de la grande consommation, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette attestation et violé l'article 1134 du Code civil ; 3°) que l'interdiction d'utiliser un terme du langage commun dans le cadre de relations commerciales ne peut être prononcée que dans la stricte mesure où l'illicéité de cet usage a été constatée ; qu'en condamnant la société Cocktail publicité Mahmoudi à modifier sa dénomination sociale afin d'en retirer le terme Cocktail et en lui interdisant, de façon générale, d'employer ce terme dans ses documents commerciaux et en signature de ses créations, après avoir relevé que le risque de confusion avec la société Cocktail résultait uniquement de l'emploi, pour sa communication, d'une abréviation de sa dénomination sociale, ne faisant pas état du nom Mahmoudi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382 du Code civil et le principe de la liberté du commerce et de l'industrie ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la société Cocktail publicité Mahmoudi est immatriculée au registre du commerce de Créteil depuis 1996 sous cette dénomination, mais se fait référencer dans l'annuaire sous le nom de Cocktail publicité et utilise sur ses documents commerciaux et publicitaires les dénominations Cocktail ou Cocktail publicité ou Cocktail pub tandis que la société Cocktail, immatriculée au registre du commerce de Nanterre depuis 1984 est plus ancienne et déjà connue dans l'univers professionnel de la publicité, l'arrêt retient que ces deux sociétés exercent, dans la même zone géographique, la même activité d'édition de supports publicitaires destinés aux consommateurs ; qu'en l'état de ces constatations faisant ressortir l'existence d'un risque de confusion entre les deux entreprises, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si les deux sociétés en cause avaient pour clients les mêmes annonceurs et qui n'a pas interdit à la société Cocktail publicité Mahmoudi d'utiliser le mot cocktail dans son sens commun, a, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la deuxième branche, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le troisième moyen : - Attendu que la société Pop'tel publicité fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Cocktail la somme de 15 000 euro à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que la partie qui se voit imputer un acte de concurrence déloyale peut rapporter la preuve de ce qu'aucun préjudice n'est résulté de cet acte ; qu'en affirmant qu'il s'inférait nécessairement des actes déloyaux constatés l'existence d'un préjudice commercial pour la société Cocktail, fût-il seulement moral, pour infirmer le jugement qui avait constaté l'absence de tout préjudice subi en conséquence de ces actes, et sans rechercher concrètement, comme il le lui était demandé, si l'absence de préjudice ne résultait pas suffisamment de la progression constante du chiffre d'affaires de cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que, le moyen qui, sous couvert d'un défaut de base légale, tend à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du préjudice résultant pour la société Cocktail des agissements de la société Cocktail publicité Mahmoudi, n'est pas fondé ;
Par ces motifs : Rejette le pourvoi.