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Décisions

Cass. soc., 25 mars 2009, n° 07-41.242

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Warczyglowa

Défendeur :

Yves Rocher (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Rapporteur :

M. Texier

Avocat général :

M. Allix

Avocats :

SCP Bachellier, Potier de La Varde, SCP Célice, Blancpain, Soltner

Nîmes, ch. soc., du 10 janv. 2007

10 janvier 2007

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 10 janvier 2007), que la société Laboratoires de biologie végétale Yves Rocher et Mme Warczyglowa ont conclu le 17 mai 1988 un contrat de franchise par lequel celle-ci vendait des produits de beauté Yves Rocher et des services par l'entremise d'un magasin exploité sous l'enseigne Yves Rocher ; que ce contrat a été remplacé, à compter d'octobre 1995, par un contrat de gérance libre ; que la société a résilié ce contrat par lettre du 5 mai 2000 ; qu'estimant pouvoir prétendre à l'existence d'un contrat de travail, la gérante a saisi le conseil de prud'hommes qui, par décision du 5 juillet 2000, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce ; que, sur contredit, la cour d'appel a, par arrêt du 20 décembre 2002, infirmé le jugement, déclaré applicables les dispositions du Code du travail et renvoyé l'affaire devant la juridiction prud'homale ; que, par arrêt du 8 février 2005 la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société Yves Rocher contre cet arrêt ; que Mme Warczyglowa a saisi la juridiction prud'homale en paiement de diverses sommes ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société Yves Rocher : - Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit que, pour les indemnités de licenciement et de préavis, l'ancienneté de Mme Warczyglowa devait être appréciée à compter du 17 mai 1988, date du premier contrat entre les parties, alors, selon le moyen, que les dispositions de l'article L. 781-1-2° du Code du travail s'appliquent aux personnes dont la profession consiste essentiellement, soit à vendre des marchandises ou denrées de toute nature, des titres, des volumes, publications, billets de toute sorte qui leur sont fournis exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise industrielle ou commerciale, soit à recueillir les commandes ou recevoir des objets à traiter, manutentionner ou transporter, pour le compte d'une seule entreprise industrielle ou commerciale, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise, et aux conditions et prix imposés par ladite entreprise ; que pour dire que Mme Warczyglowa devait voir son ancienneté être décomptée dès le 17 mai 1988, soit dès la conclusion du contrat de franchise qui l'a liée à la société, la cour d'appel s'est bornée à relever que dans un arrêt du 20 décembre 2002, elle avait énoncé qu'"en l'espèce, il n'est pas discuté que tant le contrat de franchise que le contrat de gérance libre avaient pour objet de vendre des produits de beauté et des soins esthétiques dans un magasin dénommé "centre de beauté Yves Rocher", exploité dans des conditions uniformes tenant en particulier à la décoration, aux aménagements et à "tout autre domaine que la SA LBV Yves Rocher considérait comme approprié" ; qu'à cette fin, celle-ci a établi les plans et projets de l'installation du centre et fourni la "liste des équipements reconnus comme nécessaires à son exploitation" ; que les motifs auxquels la cour d'appel renvoie ne suffisent pas à caractériser la satisfaction des conditions posées par l'article L. 781-1-2° du Code du travail dès le 17 mai 1988, date de conclusion du contrat de franchise, la cour d'appel ayant, dans son arrêt, essentiellement visé le contrat de gérance libre ayant succédé à ce contrat, et la Cour de cassation ayant d'ailleurs, dans son arrêt en date du 8 février 2005 rendu un pourvoi formé contre la décision précitée, seulement énoncé que la cour d'appel avait retenu que Mme Warczyglowa avait exercé en dernier lieu son activité dans les locaux fournis par la société Yves Rocher et assuré dans ce magasin la vente au public des marchandises confiées en dépôt par la même société, son unique fournisseur ; que l'application de l'article L. 781-1-2° n'était donc acquise, au regard de ces décisions, que pour le contrat de gérance libre conclu entre la société et Mme Warczyglowa ; qu'il en résulte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 781-1-2° du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que tant le contrat de franchise que le contrat de gérance libre avaient pour même objet de vendre des produits de beauté et des soins esthétiques dans un magasin dénommé "centre de beauté Yves Rocher" exploité dans des conditions uniformes, en a exactement déduit que la relation contractuelle entre les parties avait commencé le 17 mai 1988, et que le calcul de l'indemnité de licenciement devait tenir compte d'une ancienneté depuis cette date ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal formé par Mme Warczyglowa : - Vu l'article L. 781-1 du Code du travail, devenu L. 7321-1 et L. 7321-3 dudit Code ; - Attendu que, pour rejeter la demande de Mme Warczyglowa de se voir appliquer la convention collective de la parfumerie esthétique, l'arrêt retient que, dans le cadre de l'article L. 781-1 du Code du travail, l'appelante, assimilée à une salariée en l'absence de lien de subordination, reste un travailleur indépendant bénéficiant de l'application de certaines dispositions du Code du travail et ne peut prétendre qu'aux avantages accordés par ce Code ; qu'elle ne peut revendiquer à son profit ni un contrat de travail ni, faute d'application volontaire, les dispositions d'une convention qui découlent de dispositions régissant les relations collectives entre employeurs et salariés au sens des articles L. 131-1 et suivants du Code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les travailleurs visés à l'article L. 781-1 du Code du travail devenu les articles L. 7321-1 et L. 7321-3 bénéficient des dispositions de ce Code et notamment de celles du titre V Livre II relatif aux conventions collectives et que par suite ils bénéficient de la convention collective à laquelle est soumis le chef d'entreprise qui les emploie, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes fondées sur un texte conventionnel, l'arrêt rendu le 10 janvier 2007, entre les parties, par la Cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence ;